Résumé législatif du Projet de loi C-32

Résumé Législatif
PROJET DE LOI C-32 : LOI PORTANT MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE ENTRE LE GOUVERNEMENT DU CANADA ET LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE DU COSTA RICA
Michael Holden, Division de l'économie
Publication no 37-1-LS-409-F
PDF 191, (16 Pages) PDF
2001-10-10

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  Préambule, introduction et dispositions générales (articles 1-8)
      1.  Préambule
      2.  Titre abrégé, définitions et objet (articles 1-5)
      3.  Dispositions générales (articles 6-8)

   B.  Partie 1 : Mise en œuvre de l’ALECCR (articles 9-18)
      1.  Dispositions institutionnelles et administratives (articles 11-16)
      2.  Groupes spéciaux, comités, sous-comités, et groupes de travail  (articles 14-16)
      3.  Décrets et règlements (articles 17 et 18)

   C.  Partie 2 : Modifications connexes (articles 19-59)
      1.  Loi sur le tribunal canadien du commerce extérieur (articles 19-25)
      2.  Loi sur les douanes (articles 26-30)
      3.  Tarif des douanes (articles 31-46)
      4.  Loi sur les licences d’importation et d’exportation (articles 47-50)
      5.  Loi sur la gestion des finances publiques (article 51)
      6.  Loi sur l’importation des boissons enivrantes (articles 52 et 53)
      7.  Loi sur l’Office national de l’énergie (articles 54-59)

   D.  Partie 3 : Entrée en vigueur (article 60)

COMMENTAIRE


PROJET DE LOI C-32 : LOI PORTANT MISE EN OEUVRE DE L’ACCORD DE
LIBRE-ÉCHANGE ENTRE LE GOUVERNEMENT DU CANADA ET LE
GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE DU COSTA RICA*

CONTEXTE

Le 20 septembre 2001, le ministre du Commerce international, Pierre Pettigrew, a déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-32 : Loi portant mise en œuvre de l’Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Costa Rica.

L’Accord de libre-échange Canada-Costa Rica (ALECCR), de même que deux accords parallèles portant sur l’environnement et la main-d’œuvre, ont été signés le 23 avril 2001 et ils entreront en vigueur en janvier 2002 lorsqu’ils auront été approuvés par voie législative dans les deux pays.   Le projet de loi C-32 (la Loi) a pour objet la mise en œuvre de l’ALECCR au Canada.

L’ALECCR a été conçu de manière à tenir compte des différences de taille et de niveau de développement entre les deux pays.  En vertu de l’ALECCR, les taux tarifaires du Canada sont établis de manière à disparaître à un rythme plus rapide que ceux du Costa Rica.  En particulier, le Costa Rica éliminera immédiatement tous les droits qu’il applique aux deux tiers de ses lignes tarifaires et abolira graduellement le reste sur une période de 14 ans.  Pour sa part, le Canada éliminera immédiatement les droits qu’il applique à 86 p. 100 de ses lignes tarifaires et abolira le reste au cours des huit prochaines années.

L’ALECCR aura pour effet d’améliorer l’accès des exportateurs aux marchés costaricains pour de nombreux produits canadiens importants, y compris les pièces d’automobile, les matières plastiques, les produits du bois et de papier de même que les produits du poisson et les produits agricoles.  Les tarifs applicables à la plupart des produits industriels seront éliminés immédiatement et environ 94 p. 100 des produits agricoles profiteront des avantages offerts par l’accès aux marchés.  L’ALECCR permettra aux producteurs canadiens de se positionner avantageusement par rapport à leurs principaux concurrents sur le marché costaricain, y compris les fournisseurs américains, européens et asiatiques.  De plus, il donnera les mêmes chances au Canada qu’aux partenaires commerciaux privilégiés du Costa Rica, par exemple le Mexique et le Chili.

La valeur des exportations canadiennes vers le Costa Rica est relativement faible – soit un peu moins de 86 millions de dollars en 2000, alors que la valeur totale des exportations canadiennes était d’environ 413 milliards de dollars la même année.  Cependant, le Costa Rica compte parmi les marchés d’exportation canadiens qui connaissent la croissance la plus rapide; de fait, les exportations du Canada vers ce pays ont presque quadruplé au cours des dix dernières années.  En 2000, les principaux produits canadiens exportés vers le Costa Rica étaient le blé, les produits de papier, le chlorure de potassium et certains produits de caoutchouc et de plastique.  La Saskatchewan et l’Ontario étaient les deux principales provinces exportatrices.

L’ALECCR n’englobe pas tous les produits d’exportation.   Les négociations concernant la libéralisation du commerce de services se poursuivent actuellement dans le cadre des discussions sur la Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA), mais il n’en est pas question dans l’ALECCR, hormis un engagement général à élargir des relations entre le Canada et le Costa Rica dans ce domaine.  Certains produits sont également exclus de l’entente, y compris les produits agricoles soumis à la gestion de l’offre comme les produits laitiers et ceux de la volaille, des œufs et du bœuf.  De même, le Costa Rica se réserve le droit d’exclure certains autres produits d’importation sensibles comme les pommes de terre et des produits frais et congelés d’origine végétale.   Comme c’est le cas pour les accords de libre-échange canadiens précédents, les industries culturelles sont exemptées des réductions tarifaires.

Conformément à la tendance établie par les autres accords commerciaux, l’ALECCR offre une certaine protection aux producteurs nationaux si une augmentation soudaine des importations provoquait d’importants effets défavorables.  Une mesure de sauvegarde de trois ans existe, mais ne peut être prise, peu importe le produit, qu’au plus à deux reprises pendant la période de transition – habituellement sept ans, mais jusqu’à 14 ans dans le cas de certains produits costaricains.

Le Canada et le Costa Rica considèrent tous deux cet accord de libre-échange comme un modèle possible pour les futurs accords commerciaux, y compris la ZLEA.  De fait, l’ALECCR s’inspire largement d’un accord similaire conclu par le Canada avec le Chili (ALECC) en 1997, lequel se fondait sur l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) signé par le Canada, les États-Unis et le Mexique.

Cependant, l’ALECCR va un peu plus loin que ces accords précédents.  Les innovations comprennent des règles d’origine plus libérales pour certains produits et des accords bilatéraux sans précédent concernant la facilitation du commerce, qui donnent un accès plus rapide et plus facile que jamais auparavant aux marchés costaricains.

Le chapitre sur la politique de la concurrence, dans l’ALECCR, est plus développé que dans d’autres accords de libre-échange, et les deux parties y voient un précédent qui pourrait s’appliquer dans le cadre des négociations relatives à la ZLEA.  Ainsi, les deux pays ont l’obligation :

  • d’interdire par voie législative le comportement anticoncurrentiel;

  • d’établir une autorité de la concurrence indépendante;

  • de veiller à ce que les lois sur la concurrence soient transparentes et non discriminatoires;

  • de créer un cadre concret pour la coopération et la consultation.

DESCRIPTION ET ANALYSE

   A.  Préambule, introduction et dispositions générales (articles 1-8)

      1.  Préambule

Le préambule de la Loi expose les objectifs fondamentaux de l’ALECCR et les valeurs qui les sous-tendent.   Il s’agit notamment de renforcer les liens d’amitié et de coopération entre les deux pays, de créer de nouvelles possibilités d’emploi et de contribuer à l’essor harmonieux du commerce mondial et régional.  Une déclaration selon laquelle on s’inspirera de cet accord dans le cadre des négociations sur la ZLEA est un élément important de la liste des objectifs et des valeurs.

      2.  Titre abrégé, définitions et objet (articles 1-5)

Les articles 1 à 5 du projet de loi C-32 jettent les bases du reste de la Loi.  L’article 1 donne le titre et l’article 2 regroupe les définitions d’un certain nombre de termes clés.  L’article 3 vise à assurer que le projet de loi et tout autre texte législatif visé sont interprétés de manière compatible avec l’ALECCR. 

L’article 4 expose en détail l’objet fondamental de la Loi – soit la mise en œuvre de l’ALECCR, qui a pour objectifs :

  • d’établir le libre-échange entre les deux pays;

  • de promouvoir l’intégration régionale en Amérique par l’élimination des obstacles au commerce et à l’investissement et la contribution au processus d’établissement d’une zone de libre-échange englobant les deux continents américains;

  • d’approfondir les relations entre le Canada et le Costa Rica par la création de possibilités d’investissement et de perspectives de développement économique dans les deux pays;

  • de faciliter les échanges transfrontaliers de biens et de services;

  • de favoriser la concurrence loyale dans la zone de libre-échange;

  • d’établir un cadre pour la coopération future;

  • de créer des mécanismes pour l’application de l’ALECCR et pour le règlement des différends.

La facilitation du commerce des services est explicitement présentée comme l’un des principaux objectifs de l’ALECCR et, par conséquent, de la Loi, mais il est important de noter qu’aucune entente n’a été conclue relativement au commerce des services.  De même, aucune entente n’a été conclue au sujet des investissements, dans ce cas parce qu’un accord suffisant sur la protection des investissements étrangers a déjà été conclu par les deux pays.

L’article 5 dispose que la Loi lie Sa Majesté du chef du Canada.

      3.  Dispositions générales (articles 6-8)

Les articles 6 à 8 sont des dispositions générales conçues pour clarifier certains aspects précis de l’ALECCR. 

Le premier de ces trois articles se trouve également dans d’autres accords commerciaux conclus récemment par le Canada.  Il précise que personne ne peut introduire une plainte ou un grief relativement aux droits et obligations fondés sur la partie 1 de la Loi ou sur l’ALECCR lui-même sans le consentement du procureur général du Canada.

L’article 7 prévoit expressément que l’ALECCR ne s’applique pas aux eaux douces à l’état liquide, gazeux ou solide, y compris les eaux de surface et les eaux souterraines. 

Le dernier article de cette section rappelle qu’aucune des dispositions de la Loi ne doit s’interpréter de manière à porter atteinte à l’ALECCR ou à la mise en œuvre de celui-ci.

   B.  Partie 1 – Mise en œuvre de l’ALECCR (articles 9-18)

Cette série d’articles expose le mode de mise en œuvre de l’ALECCR.  Selon l’article 9, le Parlement approuve l’ALECCR, et l’article 10 précise que le gouverneur en conseil peut désigner tout membre du Conseil privé à titre de ministre chargé de l’application de la Loi.

      1.  Dispositions institutionnelles et administratives (articles 11-16)

Les articles 11 à 16 portent sur la contribution du Canada aux organismes de réglementation et administratifs créés en vertu de l’ALECCR.  Selon les trois premiers articles :

  • le ministre du Commerce international est nommé à titre de représentant principal du Canada à la nouvelle Commission du libre-échange;

  • le Canada s’engage à payer sa quote-part des dépenses de la Commission;

  • le ministre du Commerce international est investi de la responsabilité de désigner un organisme gouvernemental chargé de fournir un soutien administratif à la Commission et aux groupes spéciaux constitués en vertu de l’ALECCR.

      2.  Groupes spéciaux, comités, sous-comités, et groupes de travail (articles 14-16)

Les articles 14 à 16 traitent des nominations aux groupes spéciaux, aux comités et aux autres organismes nécessaires pour l’application de l’ALECCR.  Selon les articles 14 et 15, le gouverneur en conseil peut, conformément à l’ALECCR, choisir les représentants nommés aux groupes spéciaux et aux comités.  En vertu de l’article 16, le Canada est tenu d’assumer sa quote-part des frais liés au fonctionnement de ces organismes, y compris la rémunération, les frais de voyage et les autres dépenses de leurs membres.

Les articles 11 à 16 ne font aucune mention de ce qui serait la quote-part « appropriée » du Canada ni des critères utilisés par le Ministre pour choisir les personnes nommées à la Commission.

      3.  Décrets et règlements (articles 17 et 18)

L’article 17 traite de l’application de la Loi dans les domaines de compétence provinciale.  En vertu des paragraphes 17(1) et (2), le gouverneur en conseil peut prendre et appliquer un règlement dans une province s’il estime cette mesure nécessaire à la mise en œuvre de l’ALECCR.  Si des dispositions appropriées existent déjà dans la province, le gouverneur en conseil peut renoncer à ce droit.  Aux termes du paragraphe 17(3), cependant, le gouvernement de la province doit être consulté avant la prise d’un règlement du genre.  Si un règlement est édicté, le paragraphe 17(4) précise que celui-ci n’est en vigueur que pendant un délai établi.  Cette disposition permet de supposer que les peines imposées le seront uniquement pendant le temps nécessaire pour obtenir l’accord de l’administration provinciale.  Le paragraphe 17(5) porte que les règlements d’application lient Sa Majesté du chef de la province concernée.

L’article 18 expose les droits et les pouvoirs du gouverneur en conseil et les restrictions qu’il peut imposer dans le cadre de l’application de l’accord commercial.  Selon le paragraphe 18(1), le gouverneur en conseil a le droit de prendre les mesures suivantes s’il estime que les recommandations formulées et les décisions prises en vertu de l’ALECCR ne sont pas mises en œuvre à temps ou dans un délai raisonnable :

  • suspendre les droits et les privilèges accordés au Costa Rica ou à des produits, des prestataires de services, des fournisseurs, des investisseurs ou des investissements de ce pays en vertu de l’ALECCR ou d’un texte législatif fédéral;

  • modifier ou suspendre l’application d’une mesure législative fédérale adoptée en vertu de la partie 2, qui traite des autres lois canadiennes modifiées par suite de l’ALECCR;

  • étendre l’application d’un texte législatif fédéral canadien au Costa Rica ou à des producteurs, des fournisseurs, des investisseurs ou des investissements de ce pays;

  • prendre toute autre mesure qu’il estime nécessaire.

Le paragraphe 18(2) précise que les restrictions décrétées s’appliquent pendant la période précisée, mais qu’elles peuvent être révoquées plus tôt que prévu.

   C.  Partie 2 – Modifications connexes (articles 19 à 59)

La partie 2 du projet de loi C-32 apporte des modifications nécessaires à d’autres lois afin qu’elles se conforment aux obligations établies par l’ALECCR.  Voici la liste des lois ainsi modifiées :

  • Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur;

  • Loi sur les douanes;

  • Tarif des douanes;

  • Loi sur les licences d’exportation et d’importation;

  • Loi sur la gestion des finances publiques;

  • Loi sur l’importation de boissons enivrantes;

  • Loi sur l’Office national de l’énergie.

      1.  Loi sur le Tribunal canadien du commerce extérieur (articles 19 à 25)

Ce sont les articles 20 et 22 qui apportent les principaux changements à cette loi.  L’article 20 crée un nouvel article, l’article 19.013, qui énonce les dispositions visant à protéger l’industrie canadienne en cas de pénétration excessive d’importations.  Si une telle allégation est formulée, il est créé, sur recommandation du ministre du Commerce international, un tribunal qui est saisi de la question par le gouverneur général et fait rapport à ce dernier.  L’article 22 du projet de loi modifie l’article 23 de la Loi en ajoutant que les producteurs nationaux qui estiment que des importations concurrentielles du Costa Rica leur causent un préjudice grave peuvent déposer devant le Tribunal du commerce extérieur une plainte écrite à cet effet.

      2.  Loi sur les douanes (articles 26 à 30)

Les modifications apportées à la Loi sur les douanes ont des conséquences minimes et visent essentiellement à incorporer l’ALECCR dans le champ de discussion des autres accords de libre-échange du Canada :

  • l’article 26 ajoute l’ALECCR à la liste des accords de libre échange canadiens et le définit;

  • l’article 27 ajoute l’ALECCR aux dispositions touchant aux autres accords de libre échange canadiens et aux définitions;

  • l’article 28 ajoute le Costa Rica à l’ALENA et à l’ALECC, pour ce qui est du contrôle des importations;

  • l’article 29 ajoute le Costa Rica à une disposition prévoyant que les personnes qui ont payé un tarif à l’importation qu’elles n’étaient pas tenus de payer ont droit à un remboursement;

  • l’article 30 porte que, sur recommandation du Ministre, le gouverneur en conseil peut prendre des règlements en vue de l’interprétation, de l’application et de l’exécution uniformes des chapitres III et V de l’ALECCR.

      3.  Tarif des douanes (articles 31 à 46)

L’article 34 comporte quelques-uns des principaux changements apportés au Tarif des douanes, en particulier à l’article 16.  Le paragraphe 16(2) confère au gouverneur en conseil, sur recommandation du Ministre, le droit de prendre des règlements relatifs à l’origine de biens.  Auparavant, le gouverneur en conseil pouvait considérer, pour l’application de la Loi, que des biens produits hors d’un pays provenaient de ce pays.  La modification ajoute un alinéa qui autorise le gouverneur en conseil à faire aussi le contraire, c’est-à-dire à considérer que des marchandises produites en tout ou en partie dans une zone géographique d’un pays ne proviennent pas de ce pays, ce qui les priverait du traitement préférentiel en vertu de l’ALECCR.

L’article 37 ajoute à l’article 49 du Tarif des douanes des dispositions établissant officiellement les taux de réduction tarifaire de l’ALECCR.  Il autorise de plus le gouverneur en conseil (au nouvel article 49.2) à accorder le bénéfice du tarif du Costa Rica à des marchandises importées qui ne sont pas visées par l’ALECCR.   Enfin, l’article 37 du projet de loi (au nouvel article 49.3 du Tarif) autorise le gouverneur en conseil à limiter les importations globales de certaines marchandises énumérées d’ici à 2010.

L’article 38 (nouvel article 71.1 du Tarif) établit les règles et fixe les restrictions en vertu desquelles les industries nationales peuvent être protégées contre des niveaux d’importation préjudiciables.  Si le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut qu’il y a préjudice grave porté aux producteurs nationaux, le gouverneur en conseil peut suspendre toute réduction de taux consentie aux articles importés en cause ou les assujettir à un droit temporaire.

Toutefois, le droit temporaire est assujetti à certaines limites.   Pour la plupart des marchandises, la somme du droit temporaire et du tarif déjà appliqué à ces produits ne peut dépasser le moins élevé des deux montants suivants : le taux de droits de douane du tarif de la nation la plus favorisée en vigueur avant l’entrée en vigueur de l’article 38 ou le taux des droits de douane du tarif de la nation la plus favorisée en vigueur avant la signature de l’ALECCR.  Seul le premier montant peut s’appliquer aux produits saisonniers tels que les fruits et les légumes.   Ces restrictions limitent les moyens de protection dont disposent les producteurs canadiens, mais elles sont conformes aux dispositions des autres accords de libre-échange canadiens.

Les paragraphes 71.1(3) à (6) fixent les règles régissant la durée des mesures de protection.  Une telle mesure ne peut être prise plus de deux fois au cours des sept premières années de l’ALECCR et aucune mesure ne peut durer plus de trois ans chaque fois.  Des droits temporaires peuvent également être imposés après la première période de sept ans, mais ils doivent faire l’objet d’un accord entre les gouvernements canadien et costaricain.

Il est interdit d’appliquer une deuxième fois une même mesure immédiatement après la fin de la première application : il faut attendre que la durée écoulée depuis l’application initiale de la mesure expirée représente au moins la moitié de la durée initiale d’application.  Par exemple, si la première mesure a duré trois ans, il doit s’être écoulé au moins un an et demi avant que l’on puisse appliquer la mesure une deuxième fois.  De plus, le taux pour la première année de la seconde mesure ne dépassera pas le taux qui était en vigueur au moment de l’adoption de la première mesure.  Le taux applicable au cours de toute année subséquente fera l’objet d’une réduction progressive par tranches égales jusqu’à ce que le taux pour la dernière année de la mesure soit équivalent au taux prévu en l’absence de mesure.

Les paragraphes 71.1(5) et (6) prévoient que, lorsque prend fin l’effet du décret instaurant la mesure, le taux applicable aux marchandises jusqu’à la fin de l’année en cours est celui qui aurait été applicable un an après la prise du décret.  À compter du 1er janvier suivant, le taux applicable est celui que le Ministre spécifie, soit l’une des deux options suivantes :

  • commencer l’année en appliquant le taux qui aurait été applicable si aucune mesure n’avait été prise;

  • accélérer l’élimination graduelle du tarif (par tranches égales) pour que le taux à la fin de la durée de la mesure soit équivalent au taux qui aurait été applicable si aucune mesure n’avait été prise. 

Les paragraphes 71.1(7) et (8) définissent la « cause principale » et précisent les taux des tarifs de la nation la plus favorisée qui s’appliquent aux produits saisonniers, c’est-à-dire les légumes et les fruits, lesquels taux sont donnés aux chapitres 7 et 8 respectivement de la liste des dispositions tarifaires.

L’article 39 ajoute au Tarif douanier le nouvel article 76.1, qui traite des mesures bilatérales d’urgence qui peuvent être prises lorsque le Tribunal canadien du commerce extérieur conclut qu’une augmentation soudaine des importations de produits textiles et de vêtements est telle qu’elle cause un préjudice grave aux producteurs nationaux.  Ces dispositions diffèrent peu des dispositions prévues pour d’autres marchandises non saisonnières au nouvel article 71.1, à l’exception des dispositions suivantes : (1) le Ministre peut prendre immédiatement un décret d’une durée maximale de 180 jours, même sans avoir reçu le rapport du Tribunal canadien du commerce extérieur; (2) le Tribunal peut plus facilement trancher en faveur d’une mesure de protection dans le cas de produits textiles et de vêtements que dans celui d’autres marchandises.  Pour la plupart des produits, il faut avoir la preuve que leur importation est la « cause principale » d’un préjudice grave ou de la menace d’un tel préjudice avant de prendre une mesure; dans le cas des produits textiles et des vêtements, il suffit d’avoir la preuve que leur importation est simplement la « cause » d’un préjudice grave ou de la menace d’un tel préjudice.  Une mesure de protection ne peut être prise à l’égard de ces produits qu’une fois sur une période de sept ans.

Enfin, l’article 46 modifie la Liste des dispositions tarifaires du Tarif douanier en y incluant les dispositions de l’ALECCR.

      4.  Loi sur les licences d’exportation et d’importation (articles 47 à 50)

Les articles 47 à 50 apportent de légères modifications à la Loi sur les licences d’exportation et d’importation en y ajoutant différentes mentions de l’ALECCR, lorsqu’il y a lieu.

      5.  Loi sur la gestion des finances publiques (article 51)

La modification apportée à cette loi concerne l’application de l’ALECCR et de ses dispositions aux sociétés d’État canadiennes et autorise le gouverneur en conseil à donner des instructions et à prendre des règlements à ce sujet.

      6.  Loi sur l’importation de boissons enivrantes (articles 52 et 53)

Les articles 52 et 53 modifient cette loi en portant que les entreprises de distillation sont autorisées à bénéficier du tarif du Costa Rica s’appliquant à leur situation et que le gouverneur en conseil peut définir par règlement « spiritueux », « en vrac » et « embouteillage ».

      7.  Loi sur l’Office national de l’énergie (articles 54 à 59)

Ces articles modifient cette loi par la mention de l’ALECCR, lorsqu’il y a lieu, et en obligeant l’Office national de l’énergie à appliquer l’ALECCR.

   D.  Partie 3 – Entrée en vigueur (article 60)

Le dernier article du projet de loi prévoit que les dispositions de ce dernier ou celles de toute loi édictée ou modifiée en raison de l’ALECCR entrent en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret, pourvu que le gouvernement de la République du Costa Rica soit en train de prendre de façon satisfaisante les mesures nécessaires à la mise en oeuvre de l’ALECCR

COMMENTAIRE

Comme les lois de mise en oeuvre des accords de libre-échange entre le Canada et Israël et le Canada et le Chili, le projet de loi C-32 vise à donner effet à l’ALECCR et à modifier des lois canadiennes en conséquence.  L’accord de libre-échange a déjà été signé et ne peut être modifié sans la reprise de négociations avec le Costa Rica.  Le rôle du Parlement est donc d’accepter ou de rejeter le projet de loi dans son état actuel. 

Comme il est indiqué dans le préambule du projet de loi, l’un des objectifs de l’ALECCR est de promouvoir l’intégration régionale des deux Amériques par un instrument qui, de l’avis des deux parties, contribue à l’établissement de la ZLEA.  Cet accord de libre-échange avec le Costa Rica est modelé sur une entente similaire conclue avec le Chili, laquelle s’inspire de l’ALENA.  Cela explique que les trois accords ont une structure, une portée et une étendue similaires.

Les modèles issus d’accords antérieurs simplifient énormément les négociations et l’on s’attend que l’ALECCR servira également de modèle pour les négociations en cours en vue d’un autre accord de libre-échange avec d’autres pays d’Amérique centrale, notamment le Guatemala, le Nicaragua, le Honduras et le Salvador (CA-4), et finalement pour l’établissement de la ZLEA.  Les détracteurs de l’ALECCR avancent que certaines faiblesses présentées par des accords déjà conclus ont été reprises et intégrées dans l’ALECCR, sans compter les griefs soulevés par l’accord lui-même. 

Parmi les principaux défauts de l’ALENA et d’autres accords qui auraient été conservés dans l’ALECCR figure l’impression que ces accords commerciaux sont destinés à profiter aux entreprises privées, au détriment des citoyens et des gouvernements démocratiques.  Le chapitre 11 de l’ALENA autorise des entreprises privées à poursuivre des gouvernements en cas de perte de bénéfices ou de possibilité de bénéfices découlant de mesures prises par ces gouvernements.  L’ALECCR ne comporte pas de telles dispositions de protection des investissements; toutefois, il renvoie explicitement à un accord conclu par les deux pays en 1998 (APPIE) qui contient de telles dispositions.

Les manifestations de contestation qui ont eu lieu à Seattle et à Québec témoignent de l’impression toujours plus forte que le public a peu à dire dans les négociations de libre-échange et que la souveraineté et la démocratie sont entamées toujours davantage chaque fois qu’un nouvel accord est signé.  Il est probable que cette question et les opinions divergentes qu’elle suscite continueront d’alimenter le débat public.

En réaction à une autre préoccupation croissante découlant de l’ALENA, le projet de loi C-32 comporte une disposition excluant expressément de l’ALECCR l’exportation d’eau douce.  Cette disposition n’interdit pas carrément la vente d’eau douce, mais elle dissipe toute ambiguïté sur la question, du moins en ce qui concerne l’ALECCR.   Elle représente de plus une étape importante pour les futures négociations de la ZLEA.  L’article 7 du projet de loi C-32 confirme la position du Canada aux négociations de la ZLEA et laisse supposer qu’il a l’appui du Costa Rica.

L’aspect le plus important du projet de loi C-32 concerne l’exportation de sucre raffiné.  En vertu de l’ALECCR, les deux parties élimineront graduellement sur une période de huit ans leur tarif sur le sucre raffiné.  Actuellement, le tarif canadien est établi à 8 p. 100 et le tarif du Costa Rica est fixé à 50 p. 100.  L’industrie sucrière canadienne estime que l’ALECCR favorise grandement les producteurs du Costa Rica, qui bénéficient déjà chez eux de prix supérieurs aux prix du marché.

À l’heure actuelle, le Costa Rica ne produit pas de sucre raffiné d’une qualité qui lui permettrait de pénétrer le marché canadien.   Toutefois, si le Costa Rica améliore sa capacité de raffinage, il sera assuré, pendant la période de transition, d’un accès au marché canadien plus grand que l’accès dont jouiront les producteurs canadiens au marché du Costa Rica.  Par exemple, à la neuvième année de l’ALECCR, le Costa Rica pourra exporter au Canada, en franchise de droits, un maximum de 40 000 tonnes métriques (tm) de sucre raffiné.  La quantité que les raffineurs canadiens pourront exporter dans ce pays est inférieure à 7 000 tm.  Ces quantités sont basées sur des pourcentages identiques des marchés intérieurs des deux pays.  À partir de la dixième année, aucun droit ne sera en vigueur au Canada ou au Costa Rica.

Le fait que le Canada ait réussi à négocier des règles plus libérales concernant l’origine du sucre raffiné par rapport à celles de l’ALECC et l’ALENA peut être vu en partie comme un contrepoids à ce désavantage éventuel.   Essentiellement, pour avoir un accès préférentiel au Costa Rica, le sucre raffiné canadien doit avoir été produit de betterave à sucre canadienne ou de canne à sucre du Costa Rica.  Cette condition exclurait de l’ALECCR la plus grande partie de la production canadienne (la betterave à sucre canadienne ne représente qu’un faible pourcentage de la matière première utilisée dans la production du sucre raffiné canadien).

L’exception négociée donne un certain accès au sucre canadien produit à partir d’une matière première de tierce provenance, et ce, en fonction des exportations du Costa Rica au Canada l’année précédente.  À la dixième année de l’ALECCR, le Canada pourra exporter 4 000 tm de sucre raffiné exogène plus l’équivalent de 10 p. 100 des exportations du Costa Rica au Canada qui auront dépassé 40 000 tm l’année précédente.  Le sucre raffiné costaricain ne pourra entrer au Canada en franchise de droits que s’il est produit de sucre brut costaricain.

Actuellement, le Costa Rica ne représente pas une menace pour les producteurs de sucre canadiens; toutefois, ces derniers craignent que l’ALECCR ne serve de précédent dans le cadre de futures négociations.  Plus particulièrement, les voisins du Costa Rica représentés aux discussions du CA-4 – le Guatemala, le Nicaragua, le Honduras et le Salvador – ont déjà des exportations de sucre raffiné de qualité supérieure s’élevant à une fois et demie la quantité totale produite au Canada.  L’intégration de dispositions semblables à celles de l’ALECCR à de futures négociations avec ces pays pourrait causer un préjudice aux secteurs canadiens de la betterave à sucre et du raffinage du sucre.


*    Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur.  Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.


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