Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le 17 juin 2009, le projet de loi C 44 : Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes, a été présenté à la Chambre des communes par le ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités, l’honorable John Baird. Le projet de loi est identique au projet de loi C-14 : Loi modifiant la Loi sur la Société canadienne des postes, qui a été déposé à la deuxième session de la 39e législature et qui est mort au Feuilleton quand le Parlement a été dissous le 7 septembre 2008. Il clarifie le monopole accordé par la loi à la Société canadienne des postes pour la livraison du courrier et permet à d’autres parties de livrer des lettres adressées à des destinataires à l’étranger.
La Loi sur la Société canadienne des postes (1) (LSCP) a été adoptée en 1981 pour faire suite à une série de lois qui régissaient les services postaux canadiens depuis la Confédération. La LSCP avait pour effet de transférer les opérations postales d’un ministère, celui des Postes, à la Société canadienne des postes (la Société), une société d’État. Selon la LSCP, l’objet de la Société est d’exploiter dans l’ensemble du Canada un service postal universel et financièrement autonome qui répondra aux besoins de la population du Canada (2). Selon l’article 5 de la LSCP, le service postal est « le relevage, la transmission et la distribution de messages, renseignements, fonds ou marchandises, dans le régime intérieur et dans le régime international ».
Pour offrir un service postal universel dans l’ensemble du Canada, la Société détient un monopole pour certaines catégories de lettres et certaines activités postales. Les lettres visées par le monopole comprennent les envois de moins de 500 grammes adressés à un destinataire donné qui ne sont pas exclus dans le Règlement sur la définition de lettre (3). Les articles 14 et 15 de la LSCP énumèrent les activités particulières visées par le monopole sous la rubrique « Privilège exclusif de la Société » (4). Le paragraphe 14(1) de la LSCP dispose que la Société « a, au Canada, le privilège exclusif du relevage et de la transmission des lettres et de leur distribution aux destinataires » (5). L’article 15 de la LSCP énumère les activités exclues de ce monopole, dont les envois acheminés à titre gracieux par diverses entités, les documents juridiques rattachés à la procédure judiciaire, les lettres licitement apportées au Canada et aussitôt postées, les envois par porteur moyennant une rétribution au moins égale à trois fois le port exigible pour la distribution au Canada de lettres de destination comparable pesant au plus 50 grammes, le courrier interne au sein d’une organisation, les lettres en cours de transmission par des moyens électroniques ou optiques et les lettres transmises par les forces terrestres, navales ou aériennes d’un pays étranger présentes au Canada avec le consentement du gouvernement canadien.
Le repostage est un service postal transfrontalier fourni par des sociétés privées, habituellement en conjonction avec une administration postale étrangère (6). Récemment, des entreprises canadiennes de repostage ont contesté le monopole de la Société concernant la livraison de courrier adressé à des destinataires étrangers (7). (Les sociétés de repostage sont essentiellement de petites entreprises canadiennes qui travaillent en collaboration avec des administrations postales étrangères qui relèvent le courrier au Canada et l’acheminent dans d’autres pays où il est traité et reposté.) Un point en litige est l’interprétation de la version française du privilège exclusif énoncé au paragraphe 14(1) de la LSCP, à savoir si cette disposition accorde à la Société un monopole sur la livraison de lettres à des destinataires étrangers (8). Dans ces affaires, les tribunaux ont donné raison à la Société et ont maintenu que la bonne interprétation est celle de la version française du paragraphe 14(1) de la LSCP. Par conséquent, la Société a le privilège exclusif de la transmission et de la distribution des lettres à leur destinataire, y compris ceux qui sont à l’extérieur du Canada (9). Le projet de loi C 44 change l’effet de la décision de la Cour sur ce point, mettant en concurrence les entreprises de repostage et la Société dans le marché des envois internationaux en nombre (10).
L’article premier du projet de loi modifie l’article 15 de la LSCP par adjonction d’une restriction additionnelle aux pouvoirs du monopole de la Société. Plus précisément, le privilège exclusif dont il est question à l’article 14 de la LSCP ne s’applique pas aux lettres à livrer à un destinataire à l’étranger.
L’argument traditionnel en faveur des monopoles postaux est que l’ouverture de la concurrence dans certains secteurs peut nuire à la capacité de la Société de fournir un service postal universel (11) au Canada à un prix raisonnable (12). En décembre 2008, un groupe consultatif du gouvernement a terminé son examen stratégique de la Société (13) et recommandé que « le courrier du régime international de départ soit ouvert à la concurrence, comme c’est la pratique (même si cet élément n’est pas régi par la loi), pour faire un pas vers la libéralisation des marchés postaux qui se déroule à l’échelle internationale » (14). Que la concurrence pour le courrier destiné à l’étranger existe bien se voit à la présence des sociétés de repostage, qui offrent leurs services au Canada depuis une vingtaine d’années (15).
La Communauté européenne a tenté d’assurer un service postal universel dans l’ensemble des pays membres en accordant des monopoles à des administrations postales nationales tout en libéralisant ou en ouvrant à la concurrence certains secteurs du service postal (16). Un secteur a été graduellement libéralisé en Europe par la directive 2002/39/CE, celui de la livraison (ou du repostage) de certaines catégories d’envois transfrontaliers (17). Cette directive a pour objet de favoriser la circulation du courrier transfrontalier tout en permettant aux administrations postales nationales d’offrir un service postal universel. On a eu recours à divers moyens pour maintenir un service postal universel national, dont l’accréditation d’entreprises de repostage par des organismes de réglementation nationaux (18). La libéralisation du repostage n’est pas encore complète dans l’ensemble de l’Union européenne (19). L’ouverture à la concurrence dans le secteur du repostage et d’autres secteurs des services postaux a aussi favorisé l’innovation au sein des administrations postales nationales d’Europe (20).
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
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