Résumé législatif du projet de loi C-60 : Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières)

Résumé Législatif
Résumé législatif du projet de loi C-60 : Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières)
Christine Kostiuk, Division des affaires internationales, du commerce et des finances
Publication no 40-2-LS-670-F
PDF 62, (9 Pages) PDF
2010-02-12

Table des matières

Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.


Contexte

Le projet de loi C-60 : Loi portant mise en œuvre de l’Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d’Amérique (titre abrégé : « Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières) ») a été présenté à la Chambre des communes le 27 novembre 2009. Un communiqué de Sécurité publique Canada, le ministère responsable du projet de loi, diffusé le jour de la première lecture, reprend les propos suivants du ministre de la Justice, l’honorable Rob Nicholson :

Le projet de loi constitue une nouvelle approche d’application de la loi à la frontière […] Avec les modifications réglementaires qu’il comporte, le projet de loi assurera un cadre juridique adéquat, ainsi que des opérations d’application de la loi efficaces sur les eaux limitrophes.(1)

A. L’Accord « Shiprider »

Le projet de loi C-60 met en œuvre l’Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d’Amérique, signé le 26 mai 2009 par le ministre canadien de la Sécurité publique, Peter Van Loan, et la secrétaire au département américain de la Sécurité intérieure, Janet Napolitano.

L’Accord convertit en programme permanent le projet pilote canado-américain – appelé couramment « Shiprider » – qui a été établi en 2005 pour remédier aux problèmes de sécurité à la frontière maritime. Shiprider autorisait les agents armés de la Garde côtière américaine et de la Gendarmerie royale du Canada à patrouiller conjointement dans les voies navigables communes et à continuer de poursuivre facilement les suspects d’un pays à l’autre. Il permettait aussi à chaque gouvernement d’attribuer aux agents participants de l’autre pays les pouvoirs d’agent de la paix pour faciliter l’exécution de ses lois de l’autre côté de la frontière internationale.

Shiprider a d’abord été implanté au poste de Windsor-Detroit de l’équipe intégrée de la police des frontières (EIPF). L’idée d’une coopération dans les opérations transfrontalières d’application de la loi au moyen d’une EIPF remonte au milieu des années 1990, mais c’est seulement après 2001 que le Canada et les États-Unis se sont engagés officiellement à établir une série d’EIPF dans le cadre de leur gestion concertée de leur frontière commune. Le programme des EIPF vise les régions situées entre les différents points d’entrée le long de la frontière et fait intervenir les organismes suivants : la Gendarmerie royale du Canada, l’Agence des services frontaliers du Canada, la Garde côtière américaine, le US Customs and Border Protection/Office of the Border Patrol et le US Joint Task Force–North(2). Shiprider s’inscrivait donc dans le prolongement du programme des EIPF.

En 2007, Shiprider a été étendu à d’autres secteurs de la frontière maritime, en particulier le long des côtes de la Colombie-Britannique et de l’État de Washington. En 2008, forts du succès de Shiprider, les gouvernements du Canada et des États-Unis ont annoncé leur intention de négocier un accord cadre pour l’établissement d’un programme conjoint permanent d’application de la loi dans les secteurs frontaliers maritimes. Leurs efforts ont mené à la signature, en mai 2009, de l’Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi.

L’Accord a pour objet de fournir aux parties des moyens supplémentaires, dans les voies navigables communes, de prévenir, de détecter et d’éliminer les infractions criminelles ou autres violations de la loi, y compris le commerce illicite de la drogue, la migration clandestine, le trafic d’armes à feu, la contrebande de marchandises et d’espèces contrefaites et le terrorisme, ainsi que de mener des enquêtes et d’engager des poursuites à leur égard(3). Les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi visées par l’Accord sont axées sur le renseignement, fondées sur une évaluation conjointe Canada-États-Unis des risques et menaces et coordonnées avec les programmes et activités existants de coordination policière transfrontalière.

Pour que l’Accord entre en vigueur, les deux pays doivent mener à terme des démarches internes après la signature. Au Canada, il faut qu’un projet de loi de mise en œuvre soit présenté à la Chambre des communes et adopté par la Chambre et le Sénat. Aux États-Unis, il n’est pas nécessaire d’adopter un projet de loi, mais le gouvernement américain met la dernière main à des procédures internes visant à intégrer l’Accord dans la législation nationale et à le faire entrer en vigueur.

Description et analyse

A. Définitions, objet et dispositions générales (art. 2 à 4)

L’article 2 du projet de loi définit les principaux termes et notions énoncés. Dans le présent résumé législatif, quelques définitions méritent d’être soulignées. D’abord, la « Commission » mentionnée dans le projet de loi est la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada constituée par l’article 45.29 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada(4). Le terme « agent désigné » s’entend d’une personne physique nommée comme agent maritime transfrontalier d’application de la loi par le Canada ou les États-Unis. Une « opération intégrée transfrontalière » est le déploiement d’un bateau dont l’équipage se compose d’agents désignés du Canada et des États-Unis pour le contrôle transfrontalier d’application de la loi dans les zones non contestées de la mer ou des eaux internes longeant la frontière internationale. Enfin, le « ministre » est le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.

L’article 3 expose l’objet du projet de loi, à savoir la mise en œuvre de l’Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi entre le Canada et les États-Unis d’Amérique. Les objectifs de l’Accord, comme nous l’avons indiqué plus haut, consistent à mettre en place des moyens supplémentaires de prévenir, de détecter et d’arrêter les infractions criminelles et autres violations de la loi dans les zones non contestées de la mer ou des eaux internes longeant la frontière entre les deux pays et à faciliter les enquêtes et les poursuites judiciaires à l’égard de ces infractions et violations.

L’article 4 établit les principes fondamentaux de l’Accord et de la loi proposée. Il dit que le Canada et les États-Unis ont un intérêt mutuel pour le maintien de la sécurité dans les zones non contestées de la mer ou des eaux internes longeant la frontière internationale entre les deux pays; que les opérations intégrées transfrontalières doivent respecter la souveraineté de chaque État, être axées sur le renseignement et fondées sur une évaluation des risques et menaces et s’effectuer dans le respect de la primauté du droit; et qu’au Canada, les opérations intégrées transfrontalières doivent toutes s’effectuer dans le respect de la Charte canadienne des droits et libertés.

B. Dispositions générales de mise en œuvre (art. 5 à 15)

Les articles 5 à 7 du projet de loi visent la création de l’autorité centrale du Canada, l’organisme chargé de coordonner la mise en œuvre de l’Accord conformément à l’article 5 de celui-ci. Au Canada, l’autorité centrale est le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada ou son délégué. Elle assure la direction et la gestion des opérations intégrées transfrontalières et peut nommer des agents maritimes transfrontaliers d’application de la loi.

Les articles 7 à 10 exposent les exigences à remplir pour la nomination d’un agent désigné, c’est-à-dire d’un agent maritime transfrontalier d’application de la loi. Cette personne ne peut être nommée par l’autorité centrale que si elle a réussi la formation des agents désignés. L’article 7 de l’Accord exige que les autorités centrales du Canada et des États-Unis coordonnent l’élaboration et approuvent le contenu d’un programme de formation conjoint des agents désignés qui porte sur les lois et règlements applicables, les considérations constitutionnelles et les politiques des deux parties, notamment le recours à la force et les procédures opérationnelles.

L’article 11 prévoit que, dans le cadre d’une opération intégrée transfrontalière, les agents désignés ont qualité d’agent de la paix au Canada et sont donc investis, pour le contrôle d’application des lois, des pouvoirs d’un membre de la Gendarmerie royale du Canada.

Les articles 12 et 13 précisent que le droit canadien s’applique aux personnes détenues ou mises sous garde au Canada ainsi qu’aux bateaux et autres « objets » saisis au Canada dans le cadre d’une opération intégrée transfrontalière. De plus, les personnes détenues et les bateaux et autres objets saisis ne peuvent être transportés hors du Canada qu’en conformité avec le droit canadien.

En vertu de l’article 14, les bateaux et autres objets saisis aux États-Unis demeurent sous la garde et le contrôle de l’agent désigné américain s’ils sont transportés au Canada par nécessité opérationnelle ou géographique.

L’article 15 dispose que les lois fédérales régissant l’importation ou l’exportation de biens ne s’appliquent pas à l’importation ni à l’exportation de bateaux ou d’autres « objets » dans les cas visés par le projet de loi.

C. Dispositions sur la Commission des plaintes du public (art. 16 à 25)

Les articles 16 à 24 établissent une commission des plaintes du public, qui est la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada, et énoncent la procédure que doit suivre un membre du public pour déposer une plainte concernant la conduite d’un agent désigné dans l’exercice de ses attributions pendant une opération intégrée transfrontalière. La création de cette commission est prévue par l’article 11 de l’Accord, selon lequel il doit y avoir un mécanisme pour obliger les agents désignés à rendre compte de leur conduite.

Selon la procédure de règlement des plaintes, l’autorité centrale doit être avisée de toutes les plaintes reçues par la Commission relativement aux activités des agents désignés. Elle détermine si la plainte peut être réglée à l’amiable et elle peut tenter de la régler ainsi avec le consentement des parties. Le terme « peut » indique que, même si elle est tenue d’examiner la possibilité d’un règlement à l’amiable, l’autorité centrale dispose d’une certaine latitude dans sa décision à ce sujet. Dans le cas où elle ne peut régler la plainte à l’amiable, elle doit la renvoyer devant la Commission pour examen.

Le président de la Commission examine chacune des plaintes renvoyées devant la Commission. Il peut ensuite présenter au Ministre et à l’autorité centrale un rapport assorti de conclusions et de recommandations, enquêter sur la plainte ou prévoir la tenue d’une audience pour enquêter sur la plainte, s’il estime dans l’intérêt public d’agir ainsi. Il peut également déposer lui-même une plainte concernant la conduite d’un agent désigné s’il est convaincu qu’il existe des motifs raisonnables d’enquête. En outre, la Commission dispose, relativement à la plainte dont elle est saisie, des pouvoirs dont jouit une commission d’enquête en vertu des alinéas 24.1(3)a) à (c) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada(5).

L’article 25 dispose que l’autorité centrale doit conserver un dossier de toutes les plaintes qu’elle reçoit en application du projet de loi et mettre ce dossier à la disposition de la Commission sur demande.

D. Modifications corrélatives à d’autres lois (art. 26 à 32)

Le projet de loi prévoit des modifications corrélatives à diverses lois existantes, à savoir le Code criminel, la Loi sur les douanes, la Loi sur les licences d’exportation et d’importation, la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Les articles 26 à 32 modifient ces lois, et ce, en raison de la création des postes d’agent désigné et du pouvoir accru de la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada d’examiner la conduite des agents désignés.

E. Entrée en vigueur (art. 33)

Les dispositions du projet de loi C-60 entrent en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret.


Notes

*  Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]

  1. Sécurité publique Canada, Le gouvernement du Canada présente un projet de loi pour lutter contre la criminalité dans les voies navigables communes, communiqué, Ottawa, 27 novembre 2009.
  2. Gendarmerie royale du Canada, Évaluation des menaces 2007 des EIPF canado-américaines, 27 mai 2008.
  3. Accord cadre sur les opérations intégrées transfrontalières maritimes d’application de la loi entre le gouvernement du Canada et le gouvernement des États-Unis d’Amérique pdf (41.2 Kb, 18 pages), 26 mai 2009, art. 1.
  4. Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C., 1985, ch. R-10.
  5. Aux termes de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, al. 24.1(3)a) à c) :
    (3) La commission d’enquête dispose, relativement à la question dont elle est saisie, des pouvoirs suivants :

    a) assigner des témoins, les enjoindre à témoigner sous serment, oralement ou par écrit, et à produire les documents et pièces dont ils ont la responsabilité et que la commission estime nécessaires à une enquête et études complètes;

    b) recevoir des serments;

    c) recevoir et accepter les éléments de preuve et renseignements, fournis sous serment ou sous forme d’affidavit, qu’elle estime indiqués, qu’ils soient ou non recevables devant un tribunal [...]

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