Résumé législatif du Projet de loi C-62

Résumé Législatif
Résumé législatif du projet de loi C-62 : Loi modifiant la Loi sur la sécurité automobile et une autre loi en conséquence
Alexandre Lavoie, Division des affaires juridiques et sociales
Publication no 41-2-C62-F
PDF 293, (9 Pages) PDF
2015-09-03

1 Contexte

Le projet de loi C-62, Loi modifiant la Loi sur la sécurité automobile et une autre loi en conséquence (titre abrégé : « Loi sur les automobiles plus sécuritaires pour les Canadiens »), a été déposé par l'honorable Lisa Raitt, ministre des Transports et lu pour la première fois à la Chambre des communes le 3 juin 20151. Il modifie la Loi sur la sécurité automobile2 (LSA) afin d'accorder au ministre des Transports (le « Ministre ») de nouveaux pouvoirs qui ressemblent davantage à ceux que possède le gouvernement fédéral américain en matière de rappels de véhicules automobiles3.

Essentiellement, le projet de loi permet au Ministre de prendre les mesures suivantes :

  • ordonner à une entreprise de publier un rappel;
  • ordonner aux constructeurs automobiles de réparer à leur frais les véhicules et les pièces non conformes ou présentant un défaut;
  • ordonner aux constructeurs automobiles ou aux importateurs d'empêcher la vente au détail des véhicules non conformes ou défectueux;
  • exiger des renseignements plus détaillés dans les avis de défaut et les avis de non-conformité;
  • exiger que les entreprises présentes au Canada soient plus au courant des défauts et des cas de non conformité à l'étranger concernant les véhicules semblables à ceux vendus au Canada;
  • imposer aux constructeurs automobiles des amendes pouvant aller jusqu'à 200 000 $ par jour, pour chaque violation de la Loi sur la sécurité automobile, ce montant pouvant être cumulatif;
  • conférer aux inspecteurs de Transports Canada de nouveaux pouvoirs leur permettant de recueillir plus de renseignements pour appliquer la loi et mener des enquêtes4.

Au Canada, l'importation de véhicules automobiles et de pièces de véhicule automobile est assujettie aux normes de sécurité établies en vertu de la LSA5. Quant aux véhicules automobiles et aux pièces de véhicule automobile fabriqués au Canada, ils doivent porter une marque nationale de sécurité attestant qu'ils ont été construits selon les normes de sécurité établies en vertu de la LSA pour pouvoir être transportés d'une province à une autre afin d'y être vendus6.

2 Description et analyse

La description qui suit met l'accent sur certains aspects du projet de loi plutôt que de passer en revue toutes ses dispositions.

2.1 Défauts et non-conformités (art. 3 à 5)

Le projet de loi introduit de nouvelles exigences qui obligent les manufacturiers et importateurs canadiens de véhicules automobiles :

  • à désigner une personne-ressource pour la correspondance avec le Ministre en ce qui concerne les vérifications de conformité (nouvel art. 2.1 de la LSA);
  • à constituer des dossiers relatifs aux incidents, aux rappels et aux enquêtes survenus à l'étranger et concernant des véhicules et des pièces de véhicule comparables à ceux vendus au Canada et à les fournir au Ministre, à sa demande (nouveaux par. 5(2) à (2.3) de la LSA).

De plus, le projet de loi étend aux entreprises qui vendent des véhicules automobiles l'obligation faite aux fabricants et aux importateurs de tels véhicules de fournir au Ministre, à sa demande, les moyens lui permettant d'extraire ou d'analyser les renseignements créés ou recueillis par un véhicule ou une pièce de véhicule (art. 8 modifié de la LSA). Il accorde aussi au Ministre le pouvoir d'ordonner, par arrêté, aux entreprises qui fabriquent, vendent ou importent des véhicules automobiles d'effectuer des tests, des analyses ou des études pour vérifier la présence de possibles défauts ou non-conformités et de lui fournir les résultats de ces vérifications (nouvel art. 8.1 de la LSA).

2.2 Avis de défaut et non-conformité (art. 6 à 8)

Le projet de loi édicte les nouveaux articles 10.3 à 10.9 de la LSA afin de donner au Ministre de nouveaux pouvoirs concernant les avis de défaut et de non-conformité. Ainsi :

  • Une entreprise devra préciser la date à laquelle le défaut décrit dans un avis qu'elle envoie à un propriétaire de véhicule pourra être corrigé, et le Ministre pourra exiger qu'elle lui fournisse des renseignements lui permettant de vérifier que la date indiquée dans l'avis est véritablement celle où la correction pourra s'effectuer au plus tôt (nouvel art. 10.4 de la LSA).
  • S'il est d'avis que des raisons de sécurité le justifient et après réception d'un avis, le Ministre pourra ordonner, par arrêté, à une entreprise qui fabrique, qui vend ou qui importe des véhicules automobiles ou des pièces de véhicule automobile de corriger un défaut ou une non-conformité aux conditions qu'il pourra préciser (nouvel art. 10.5 de la LSA). L'entreprise visée par l'ordre du Ministre pourra corriger le défaut ou la non-conformité en réparant le véhicule ou les pièces, en les remplaçant ou en remboursant les coûts déjà supportés pour les réparer ou le prix de vente du véhicule ou de la pièce (nouvel art. 10.51 de la LSA).
  • Le Ministre pourra ordonner, par arrêté, à une entreprise qui fabrique, qui vend ou qui importe des véhicules automobiles ou des pièces de véhicule automobile de payer les coûts supportés pour corriger le défaut ou la non-conformité (nouvel art. 10.6 de la LSA).
  • Le Ministre pourra ordonner, par arrêté, à une entreprise de s'assurer que tout défaut ou non-conformité d'un véhicule automobile ou d'une pièce de véhicule soit corrigé avant leur première mise en vente au détail (nouvel art. 10.61 de la LSA).

Le Ministre devra fonder sa décision d'ordonner à une entreprise de prendre des mesures concernant un défaut ou une non-conformité sur des tests, des analyses, des inspections, des examens ou des recherches, et il devra avoir préalablement consulté l'entreprise visée. Il devra en outre permettre à l'entreprise visée et à toutes personnes intéressées de faire connaître leur point de vue concernant les mesures qu'il entend ordonner avant de prendre une décision définitive (nouvel art. 10.7 de la LSA).

2.3 Inspections (art. 9 à 11)

Le projet de loi renforce les pouvoirs des inspecteurs de Transports Canada. Ainsi, en plus du pouvoir de vérifier la conformité des véhicules automobiles, les inspecteurs auront désormais celui de recueillir des renseignements concernant des collisions (nouveau par. 14(1.1) et art. 15 et 16 modifiés de la LSA).

En outre, le projet de loi précise que les inspecteurs pourront circuler librement dans une propriété privée pour effectuer une vérification ou une enquête et exiger la présence de toute personne qu'ils estiment utile (nouveaux par. 15(1.1) et (1.2) de la LSA). Ils pourront aussi dorénavant démonter un véhicule ou des pièces de véhicule sur les lieux d'une vérification ou d'une enquête (par. 15(2) modifié de la LSA). Toute personne à qui un inspecteur pose valablement des questions ou demande la communication de documents ou de données informatiques dans le cadre d'une vérification ou d'une enquête devra répondre à ses questions et lui fournir ces documents ou données (art. 16 modifié de la LSA).

Le projet de loi modifie toutefois l'article 15 de la LSA de manière à ce que les inspecteurs de Transports Canada ne puissent plus pénétrer dans une maison d'habitation pour effectuer une inspection ou une enquête (par. 15(1) modifié et nouveau par. 15(1.1) de la LSA).

2.4 Sanctions administratives pécuniaires (art. 2, 12 et 15)

Le projet de loi édicte les nouveaux articles 16.1 à 16.23 de la LSA, qui établissent un régime de sanctions administratives pécuniaires pour certaines contraventions à des dispositions de la LSA, de ses règlements ou d'un arrêté pris aux termes de la LSA. Ce type de sanction est similaire à des amendes imposées par les tribunaux; toutefois, elles sont imposées conformément à une procédure administrative simplifiée. Les principales caractéristiques du nouveau régime établi par le projet de loi sont les suivantes :

  • le gouverneur en conseil désignera les dispositions de la LSA, de ses règlements ou d'un arrêté qui seront visées par le régime de sanctions administratives pécuniaires et établira le montant des sanctions, qui ne pourront dépasser 4 000 $ pour une personne physique et 200 000 $ pour une entreprise, en cas de violation (nouvel art. 16.1 de la LSA);
  • des agents verbalisateurs seront nommés par le Ministre pour enquêter sur de possibles violations aux dispositions désignées par le gouverneur en conseil (nouvel art. 16.11 de la LSA);
  • lorsqu'un agent verbalisateur aura des motifs de croire qu'une violation a été commise, il signifiera au contrevenant, en la forme décidée par le Ministre, un procès-verbal de violation qui contiendra une description des faits reprochés, le montant de la sanction imposée, les modalités de paiement de celle-ci et la procédure à suivre afin de faire réviser la décision (nouveaux art. 16.12 à 16.14 de la LSA);
  • le contrevenant aura le choix de payer la sanction, auquel cas aucune autre poursuite ne pourra être intentée contre lui pour la même contravention (nouvel art. 16.15 de la LSA), ou de demander, dans les 30 jours suivant la signification du procès-verbal de violation, la révision de la décision de l'agent verbalisateur par le Tribunal d'appel des transports du Canada (nouvelle définition de « Tribunal » à l'art. 2 et nouveau par. 16.16(1) de la LSA);
  • le défaut par le contrevenant de payer le montant réclamé dans le procès-verbal de violation ou d'en demander la révision vaudra une déclaration de responsa-bilité à l'égard de la contravention (nouvel art. 16.17 de la LSA);
  • lorsque le contrevenant demande la révision de la décision de l'agent verbali-sateur, le conseiller du Tribunal devra décider, après avoir tenu une audience où le Ministre devra démontrer qu'il y a bien eu violation aux dispositions désignées par le gouverneur en conseil, s'il y a bien eu violation et, dans l'affirmative, s'il y a lieu de modifier le montant de la sanction imposée (nouveaux art. 16.16 et 16.18 de la LSA);
  • la décision du conseiller du Tribunal pourra faire l'objet d'un appel qui sera décidé par un comité du Tribunal (nouvel art. 16.19 de la LSA);
  • aucune sanction administrative pécuniaire ne pourra être imposée plus de deux ans après la commission des faits reprochés (nouvel art. 16.22 de la LSA);
  • les mentions contenues dans le dossier du Ministère indiquant que le contrevenant a commis une violation aux dispositions désignées par le gouverneur en conseil seront radiées cinq ans après le paiement de la sanction, sauf si le Ministre estime que cela est contraire à l'intérêt public (nouvel art. 16.23 de la LSA).

2.5 Infractions et peines (art. 13)

Le projet de loi modifie la LSA de manière à ce que chaque jour au cours duquel une même infraction à cette loi est commise compte pour une infraction distincte (nouveau par. 17(2.1) de la LSA).

2.6 Confiscation (art. 14)

Le projet de loi modifie la LSA de manière à ce que tous véhicules ou pièces de véhicule saisis qui ont servi ou donné lieu à une infraction à cette loi puissent être confisqués par le gouvernement (nouveaux art. 19.1 et 19.2 de la LSA).

2.7 Entrée en vigueur (art. 16)

Le projet de loi entrera en vigueur lorsqu'il recevra la sanction royale, à l'exception des articles 4 (exigences concernant la tenue de dossiers relatifs aux incidents, aux rappels et aux enquêtes survenus à l'étranger) et 12 (sanctions administratives pécuniaires), qui entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret.

3 Commentaire

Au cours des dernières années, les médias ont rapporté des préoccupations selon lesquelles le gouvernement fédéral canadien possède moins de pouvoirs que son homologue américain en ce qui a trait aux rappels de véhicules automobiles7.

Les pouvoirs du ministre des Transports en ce qui concerne les rappels de véhicules automobiles avaient été renforcés une première fois en 2014 par les articles 212 à 230 de la Loi no 1 sur le plan d'action économique de 20148. Ces articles avaient harmonisé la LSA avec la législation américaine, notamment en différenciant un « défaut » et une « non-conformité », en accordant au Ministre le pouvoir d'ordonner à une entreprise d'informer les consommateurs d'un défaut (ce qui peut mener au rappel de véhicules)9 , en augmentant les amendes maximales en cas d'infraction et en exemptant les inspecteurs de Transports Canada d'avoir à témoigner dans un procès en matière civile.

Selon Transports Canada, les dispositions ajoutées à la LSA par le projet de loi C-62 complètent les pouvoirs qui avaient été conférés au Ministre en 2014 et harmonisent davantage le processus de rappels du Canada et avec celui en vigueur aux États Unis10.


Notes

*  Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.Retour au texte ]

  1. Projet de loi C-62, Loi modifiant la Loi sur la sécurité automobile et une autre loi en conséquence, 2e session, 41e législature. [ Retour au texte ]
  2. Loi sur la sécurité automobile, L.C. 1993, ch. 16.[ Retour au texte ]
  3. Transports Canada, Loi sur les automobiles plus sécuritaires pour les Canadiens, document d'information, 3 juin 2015. Ces changements ont été annoncés dans le budget de 2015 : Gouvernement du Canada, « Améliorer la Loi sur la sécurité automobile », dans « Chapitre 4.3 – Protéger les Canadiens », dans Un leadership fort – Un budget équilibré et un plan axé sur des impôts bas pour favoriser l'emploi, la croissance et la sécurité, 21 avril 2015.[ Retour au texte ]
  4. Transports Canada (2015).[ Retour au texte ]
  5. Loi sur la sécurité automobile, par. 5(1). [ Retour au texte ]
  6. Ibid., art. 4 et par.  5(1).[ Retour au texte ]
  7. Par exemple : « Transport Canada aware of deadly GM defect 8 months before recall », CBC News, 29 octobre 2014; Grace Macaluso, « No buyback offer for Canadian owners of Fiat Chrysler vehicles », The Windsor Star, 29 juillet 2015; Tom Krisher et Dee-Ann Durbin, « Fiat Chrysler To Buy Back Defective Vehicles », Huffington Post, 27 juillet 2015.[ Retour au texte ]
  8. Loi nᵒ 1 sur le plan d'action économique de 2014, L.C. 2014, ch. 20, art.  202 à 230.[ Retour au texte ]
  9. Transports Canada, Capacité accrue de prendre des mesures à l'égard des véhicules non sécuritaires pour améliorer la sécurité des Canadiens, communiqué, 28 mars 2014. [ Retour au texte ]
  10. Transports Canada, Loi sur les automobiles plus sécuritaires pour les Canadiens : nouveaux pouvoirs de rappel et amendes aux constructeurs automobiles, communiqué, 3 juin 2015. [ Retour au texte ]

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