Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le projet de loi C-9 : Loi concernant l’élection et le mandat des chefs et des conseillers de certaines premières nations et la composition de leurs conseils respectifs (titre abrégé : « Loi sur les élections au sein de premières nations ») a été présenté à la Chambre des communes et adopté en première lecture le 29 octobre 2013. Le projet de loi C 9 a été présenté à la première session de la 41e législature sous la numérotation S 6 et est mort au Feuilleton par suite de la prorogation du Parlement, le 13 septembre 2013. À ce moment, le projet de loi S-6 avait reçu une deuxième lecture et avait été renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Conformément à l’ordre de la Chambre des communes adopté le 21 octobre 2013 permettant au gouvernement au début de la nouvelle session de rétablir les projets de loi à la dernière étape achevée à la session précédente, le projet de loi C 9 est réputé lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord lors de sa présentation.
Il prévoit un régime législatif distinct de celui de la Loi sur les Indiens (LI) 1 pour l’élection des chefs et conseillers des Premières nations. Parmi les principaux changements proposés dans le projet de loi, il convient de mentionner la prolongation des mandats des chefs et des conseillers et la possibilité de fixer une journée commune pour la tenue des élections dans plusieurs Premières nations. Les Premières nations pourront choisir d’appliquer le nouveau régime électoral proposé par le projet de loi ou, dans certaines circonstances, pourront y être assujetties par voie d’arrêté ministériel 2. Elles pourront également choisir de se soustraire à l’application du projet de loi en adoptant leur propre code électoral communautaire, à certaines conditions.
À l’heure actuelle, les communautés des Premières nations utilisent trois méthodes principales pour choisir leurs chefs et leurs conseils :
Un petit nombre de Premières nations (entre 10 et 15) ont recours à d’autres mécanismes pour choisir leurs dirigeants, par exemple un système héréditaire ou un système de clan.
Ces diverses méthodes de sélection des dirigeants trouvent leurs origines dans le paragraphe 74(1) de la LI qui confère au Ministre le pouvoir de déclarer - quand cela est utile à la bonne administration d’une bande - que le conseil de la bande sera choisi selon la procédure énoncée dans la LI.
Selon Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, 240 Premières nations tiennent des élections conformément à la LI, 341 appliquent plutôt des codes « coutumiers » ou communautaires et 36 choisissent leurs dirigeants selon leurs ententes d’autonomie gouvernementale 4.
Les articles 74 à 80 de la LI fixent le cadre pour l’élection des conseils de bande. De nature assez générale, ces dispositions énoncent uniquement les grandes règles concernant la taille des conseils, le droit de vote des membres, les mandats, les vacances et l’annulation des élections. Le Règlement sur les élections au sein des bandes d’Indiens 5 pris en vertu de la LI est beaucoup plus détaillé et donne des règles sur les mises en candidature, les listes électorales, les bureaux de scrutin, le mode de vote et les appels consécutifs à une élection.
Voici quelques dispositions électorales de la LI :
Les élections tenues selon le régime de la LI et le code coutumier sont assujetties aux dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) 6.
Le pouvoir des Premières nations d’établir leurs propres mécanismes de sélection de leurs dirigeants au moyen d’élections communautaires fondées sur la coutume (« élections coutumières ») est reconnu dans la LI puisqu’il s’agit, en fait, du processus « par défaut ». Dans le passé, les Premières nations ont toujours choisi leurs dirigeants de cette manière, jusqu’à ce que le Ministre décrète que les dispositions électorales de la LI devaient s’appliquer 7. Par exemple, lorsqu’une nouvelle bande voit le jour, son conseil est désigné par la méthode coutumière, à moins que le Ministre déclare que la bande en question devra se conformer au régime électoral de la LI.
Les bandes régies par la coutume se répartissent en deux grandes catégories :
En vigueur depuis 1996, la Politique sur la conversion à un système électoral communautaire du gouvernement fédéral oblige les bandes qui souhaitent revenir au système électoral coutumier, et donc abandonner le régime électoral de la LI, à se doter d’un code écrit; celui-ci doit, entre autres, être conforme à la Charte, prévoir des mécanismes d’appel, contenir des dispositions sur la participation des membres résidant hors de la réserve et exiger l’approbation du code électoral coutumier par la communauté 8.
Les codes électoraux coutumiers sont tous différents les uns des autres. Certains n’apportent que des modifications mineures au régime électoral de la LI, par exemple en prolongeant les mandats. D’autres apportent des changements plus importants et allient, par exemple, des formes traditionnelles de gouvernance (conseils des aînés) et des structures contemporaines de gouvernance (élection du chef et du conseil). Même si la LI ne régit pas les élections « coutumières », aucune Première nation n’a jamais été autorisée à revenir à un régime non électoral de sélection de ses dirigeants.
Affaires autochtones et Développement du Nord Canada et son ministre exercent l’autorité principale sur les Premières nations appliquant le régime électoral de la LI. Cette loi et ses règlements régissent le fonctionnement du régime électoral et régulent dès lors, dans une grande mesure, les processus de sélection des dirigeants des Premières nations. Il est important de noter qu’en vertu du régime électoral de la LI, le Ministère examine les appels interjetés après une élection. S’il détermine qu’une pratique électorale frauduleuse ou qu’une infraction à la LI ou à ses règlements a pu modifier l’issue des élections, il peut conseiller au gouverneur en conseil d’annuler les élections. De plus, les fonctionnaires ministériels offrent une formation et un soutien au personnel électoral.
Par contre, le Ministère n’intervient que très peu dans le processus de sélection des dirigeants des Premières nations qui ont conclu une entente d’autonomie gouvernementale. Il exige toutefois que celles-ci rédigent et ratifient une Constitution en harmonie avec la Charte et que les règles régissant le processus de sélection de leurs dirigeants soient claires et transparentes.
Comme il a été mentionné plus tôt, le Ministère oblige également les Premières nations qui « reviennent au régime coutumier » à respecter les exigences de sa politique. Tous les codes électoraux élaborés par les Premières nations doivent être soumis à son approbation. Ils sont ensuite examinés par des fonctionnaires qui s’assurent de leur conformité à la politique. Le cas échéant, le Ministre peut prendre un arrêté visant à soustraire les Premières nations concernées à l’application des dispositions électorales de la LI. Le Ministère cesse alors de superviser l’évolution de leurs codes électoraux.
En mai 2010, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a publié un rapport intitulé Élections chez les Premières nations : Une question de choix fondamental 9 et traitant des élections des conseils de bande tenues sous le régime de la LI et de ses règlements. Dans son rapport, le Comité a constaté que le mandat actuel de deux ans imposé aux Premières nations par la LI est trop court pour leur permettre de maintenir la stabilité politique et économique, ce qui crée souvent de profondes divisions au sein des communautés. Il a également fait remarquer que les régimes électoraux de la LI présentent une multitude de difficultés et d’incohérences administratives qui sont à l’origine de fréquents appels consécutifs à une élection.
Le Comité a recommandé que des mesures immédiates soient prises pour créer une commission électorale et d’appels indépendante des Premières nations afin de renforcer la capacité électorale de ces dernières, d’instaurer un mécanisme d’appel efficace et d’appuyer la mise au point de pratiques efficaces et transparentes. Il a également recommandé à Affaires autochtones et Développement du Nord Canada d’aider les Premières nations qui suivent le régime électoral de la LI à revenir à un régime électoral communautaire. Le rapport souligne la nécessité d’établir des objectifs et des échéanciers clairs pour faciliter le retour aux codes électoraux communautaires. Il recommande également que les Premières nations qui ont recours à la méthode coutumière pour choisir leurs dirigeants reçoivent des fonds pour pouvoir mettre à jour leurs codes et s’assurer qu’ils sont compatibles avec les lois canadiennes et les pratiques efficaces de gouvernance.
Ces récentes années, plusieurs initiatives de réforme du régime électoral des Premières nations ont eu lieu.
Les tentatives de réforme du régime électoral de la LI sont une réponse à l’insatisfaction croissante des Premières nations à l’égard du fonctionnement de ce régime, notamment de ses faiblesses administratives telles que les mécanismes de nomination flous et le vote par correspondance qui ouvre la porte aux abus.
D’autres critiques importantes du régime électoral de la LI ont trait au degré d’intervention du Ministre, à l’absence de processus d’appel adapté et autonome, ainsi qu’au manque de souplesse dans l’établissement des mandats et dans la détermination de la taille des conseils.
Un autre facteur important qui milite en faveur d’une réforme est le nombre de contestations judiciaires des élections fondées sur la Charte, particulièrement en ce qui concerne l’obligation de résider dans la réserve pour pouvoir voter ou présenter sa candidature.
L’une des principales démarches entreprises pour réformer la politique a été l’initiative menée conjointement de 1998 à 2001 par l’Assemblée des Premières Nations et Affaires indiennes et du Nord Canada en matière de développement de politiques (services fonciers et fiduciaires). En guise de réponse au Rapport de la Commission royale des peuples autochtones de 1996, cette initiative devait mener à des options de politique sur certaines grandes questions : élections, appartenance à la bande, ajouts aux réserves et environnement. En ce qui concerne les élections, elle proposait notamment d’établir des régimes électoraux communautaires et de supprimer l’obligation d’appliquer la LI comme mesure préliminaire au rétablissement des formes traditionnelles de sélection des dirigeants. À ces égards, les mesures suivantes ont été proposées :
En prévision de la promulgation d’une loi fédérale, le Comité consultatif ministériel conjoint (CCMC) a été constitué en novembre 2001 pour prodiguer au Ministre des conseils d’ordre technique concernant les modifications susceptibles d’être apportées aux dispositions de la LI en matière de gouvernance. Ses conseils devaient porter notamment sur :
En mars 2002, au terme de vastes consultations auprès de dirigeants des Premières nations et d’organisations autochtones, le CCMC a publié son rapport. Il a examiné divers moyens de modifier la LI dans le but d’améliorer les règles régissant le choix des dirigeants et le droit de vote. Il a dégagé un éventail de questions relatives aux élections au sein des bandes sous le régime de la LI, dont les suivantes :
Le CCMC recommandait également que la durée du mandat passe de deux à quatre ou cinq ans.
Le 9 octobre 2002, le gouvernement fédéral a déposé le projet de loi C-7 : Loi concernant le choix des dirigeants, le gouvernement et l’obligation de rendre compte des bandes indiennes et modifiant certaines lois (titre abrégé : « Loi sur la gouvernance des premières nations ») afin de permettre aux Premières nations d’élaborer et d’adopter des codes régissant le choix de leurs dirigeants, la gestion et la responsabilité financières et l’administration de leur gouvernement en fonction des besoins de leurs communautés 12. Concernant le choix des dirigeants, le projet de loi contenait des dispositions sur :
Pour diverses raisons complexes, le projet de loi C-7 a suscité une vive controverse. Les témoignages entendus par le Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Nord et des ressources naturelles de la Chambre des communes ont fait ressortir de grandes divergences d’opinions quant à ses objectifs, avantages et conséquences.
De l’avis du gouvernement, ce projet de loi visait à « moderniser » les dispositions de la LI concernant la gouvernance et à combler les lacunes du régime en fournissant aux Premières nations les outils dont elles avaient besoin pour administrer leurs affaires de façon efficace et responsable 13.
Les Premières nations ont soutenu que le projet de loi portait atteinte à leur droit inhérent à l’autonomie gouvernementale et que « l’unique option dont pouvaient se prévaloir les bandes assujetties à l’article 74 [de la LI sur l’élection des chefs et des conseils] aurait pu porter atteinte à leur droit d’opter pour un régime coutumier, tandis que la limite de temps exclusivement applicable aux bandes ayant choisi un régime coutumier aurait pu, de fait, soumettre ces dernières à un régime qu’elles n’avaient pas choisi 14 ». Dans son rapport, le CCMC fait remarquer que le fait d’« imposer un régime à une bande qui préfère choisir ses dirigeants au moyen d’un autre régime porterait atteinte à ce droit 15 ».
Le projet de loi C-7 est mort au Feuilleton en raison de la prorogation du Parlement le 12 novembre 2003 et n’a jamais été redéposé depuis.
Plusieurs décisions ont été rendues par les tribunaux concernant les régimes électoraux des Premières nations, tant ceux prévus par la LI que les codes coutumiers. La plus connue est probablement la décision Corbiere, qui établit que la LI est contraire à la Charte en limitant le vote aux seuls citoyens qui résident dans les réserves.
Le paragraphe 77(1) de la LI concerne l’admissibilité des électeurs et précise notamment qu’un « électeur » doit être un membre inscrit de la bande qui a au moins 18 ans et qui « réside ordinairement sur la réserve ».
Le 20 mai 1999, dans l’affaire Corbiere c. Canada (Ministre des Affaires indiennes et du Nord) 16, la Cour suprême du Canada a statué que l’expression « réside ordinairement sur la réserve » était contraire au droit à l’égalité des membres de bande résidant hors réserve aux termes de l’article 15 de la Charte et que cette atteinte n’était pas justifiée au regard de l’article premier de la Charte 17. La Cour a suspendu sa décision pour une période de 18 mois afin de donner au Parlement le temps de s’y conformer, et elle a ordonné que, si la LI n’était pas modifiée dans le délai prévu, les mots relatifs au lieu de résidence soient considérés comme supprimés du paragraphe 77(1). Comme le Parlement n’a pas encore modifié le paragraphe 77(1), la disposition s’applique comme si ces mots n’existaient pas. Depuis novembre 2000, les membres d’une bande résidant hors réserve ont généralement le droit de voter aux élections tenues sous le régime de la LI.
En 2007, dans l’affaire Esquega c. Canada (décision Gull Bay) 18, la Cour fédérale du Canada a jugé que le paragraphe 75(1) de la LI, concernant l’admissibilité des candidats à une élection, était contraire à la Charte 19. La Cour d’appel fédérale a toutefois jugé que la décision de la Cour fédérale de supprimer le paragraphe 75(1) dans son intégralité était « plus vaste que nécessaire » puisqu’elle « aurait [aussi] pour effet de supprimer l’obligation pour tout candidat d’être un “électeur” […] permettant ainsi aux personnes de moins de 18 ans, non membres de la bande ou par ailleurs inaptes d’être présentées à un poste électif 20 ». La Cour d’appel fédérale a annulé la décision de 2007, statuant plutôt que le paragraphe 75(1) était invalide seulement « dans la mesure où il interdit aux électeurs ne résidant pas dans la réserve d’être présentés au poste de conseiller 21 ».
Au cours des deux dernières années, l’Assembly of Manitoba Chiefs (AMC) et l’Atlantic Policy Congress of First Nations Chiefs (APC) ont mené des discussions sur la réforme électorale dans leurs régions respectives. Avec le soutien d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, les deux organisations ont invité des dirigeants des Premières nations de leurs régions, des techniciens en matière de gouvernance et des membres des communautés à s’engager dans un processus d’examen des améliorations susceptibles d’être apportées au régime de la LI pour l’élection des conseils de bande 22.
Au terme de discussions régionales, l’AMC et l’APC ont produit des documents de travail contenant diverses recommandations visant l’amélioration du régime électoral des Premières nations. En avril 2010, les organisations ont adressé leurs recommandations au ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord 23.
En octobre 2010, un processus d’engagement national, dirigé par l’APC et l’AMC, en collaboration avec Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, a été lancé dans le but d’élaborer une mesure législative optionnelle inspirée des recommandations de l’AMC et l’APC. Entre octobre 2010 et mars 2011, les deux organisations ont présenté leurs projets aux dirigeants et aux organisations des Premières nations de l’ensemble du pays et sollicité leurs commentaires sur certaines réformes législatives clés, dont les suivantes 24 :
Les deux organisations ont diffusé des documents d’information au moyen de présentations et sur leur site Web. Elles ont également fait parvenir des documents par la poste aux Premières nations qui tiennent des élections sous le régime de la LI. L’APC a dirigé le processus d’engagement dans la région de l’Atlantique, tandis que l’AMC s’est occupée des régions de l’Ouest. Selon le Report of the National Engagement on Electoral Reform publié par l’APC, le volume de commentaires reçus des Premières nations variait d’une région à l’autre du pays 25.
Le projet de loi S-6 compte 44 articles. Son but n’est pas de remplacer le régime électoral de la Loi sur les Indiens, mais de proposer un régime de rechange pour l’élection du chef et des membres des conseils des Premières nations.
Il existe des similitudes et de grandes différences entre le nouveau régime électoral et celui de la LI. Par exemple, le projet de loi est semblable à la LI en ce qu’il autorise le Ministre à assujettir à la nouvelle mesure législative, par voie d’arrêté, une Première nation qui a son propre code électoral communautaire. En revanche, le projet de loi s’écarte de la LI et en développe le régime électoral en allongeant le mandat des chefs et des conseillers, en conférant expressément aux tribunaux la compétence d’entendre les appels interjetés après une élection et en créant des infractions relatives à l’élection des chefs et des conseillers et les peines connexes.
La suite de la présente section décrit les principales dispositions du projet de loi, y compris celles mentionnées ci-dessus.
L’article 2 donne les définitions applicables sous le régime du projet de loi, dont les suivantes :
Le paragraphe 3(1) autorise le Ministre à ajouter, par arrêté, le nom d’une Première nation à l’annexe des Premières nations participant au nouveau régime électoral. Le paragraphe 74(1) de la LI autorise également le Ministre à déclarer, par arrêté, qu’une Première nation sera assujettie aux dispositions électorales de la LI « [l]orsqu’il le juge utile à la bonne administration d’une bande ». Le projet de loi précise toutefois que le Ministre ne peut prendre l’arrêté que dans les circonstances suivantes :
Comme le paragraphe 74(1) de la LI, le paragraphe 3(2) du projet de loi précise que l’arrêté ministériel doit indiquer à quelle date la Première nation doit tenir sa prochaine élection.
L’article 5 du projet de loi indique à quelle date doivent se tenir les élections en fonction de l’arrêté ministériel pris en vertu du paragraphe 3(1) du projet de loi :
L’article 6 précise que les élections subséquentes, autres que partielles, doivent avoir lieu dans les 30 jours précédant la date à laquelle prend fin le mandat du chef et des conseillers.
Le conseil de la Première nation peut, en conformité avec les règlements, ordonner la tenue d’une élection partielle lorsque le poste de chef ou un poste de conseiller devient vacant plus de trois mois avant la fin du mandat du titulaire (art. 25).
À l’instar du paragraphe 74(2) de la LI, le paragraphe 7(1) du projet de loi prévoit que le conseil doit normalement se composer d’un chef ainsi que d’un conseiller pour 100 membres de la Première nation et que le nombre de conseillers ne doit jamais être inférieur à deux ou supérieur à 12. Le paragraphe 7(2) ajoute que le conseil peut, par résolution, réduire le nombre de conseillers, sans toutefois aller en deçà de deux, la réduction s’appliquant à compter de l’élection suivante qui n’est pas une élection partielle.
Le paragraphe 75(1) de la LI précise que « [s]eul un électeur résidant dans une section électorale peut être présenté au poste de conseiller pour représenter cette section au conseil de la bande ». Le paragraphe 9(1) du projet de loi précise de la même façon que seul un électeur d’une Première nation peut présenter sa candidature au poste de chef ou de conseiller de cette Première nation, mais sans faire mention de « sections électorales » distinctes 27 au sein d’une Première nation, ni de l’obligation de résider dans la réserve pour être éligible 28.
Le paragraphe 9(2) interdit expressément à quiconque de présenter sa candidature au poste de chef et au poste de conseiller lors d’une même élection 29.
D’autres dispositions contiennent des détails sur le processus de mise en candidature (par. 9(3) et 9(4)) et sur les circonstances justifiant l’imposition à un candidat d’une caution d’un montant maximal de 250 $ (art. 11). Le gouverneur en conseil peut prendre un règlement établissant le processus de mise en candidature (al. 41d)).
Les articles 10 et 12 précisent certaines infractions liées au processus de mise en candidature. Par exemple, il est interdit à quiconque d’influencer, par intimidation ou par la contrainte, le processus de mise en candidature ou de perturber intentionnellement la conduite d’une réunion de mise en candidature. Les agents électoraux peuvent ordonner l’expulsion de la salle de quiconque « commet une infraction à la présente loi qui menace l’ordre public dans [le] lieu [où se tient la réunion de mise en candidature] ». La rubrique 2.11 « Infractions et peines » du présent résumé législatif traite un peu plus longuement des peines prévues pour cette infraction et d’autres délits.
Ces dispositions décrivent les infractions relatives au déroulement des élections tenues en vertu de la LI 30. Elles énoncent également des règles visant à :
Les peines prévues pour les infractions à ces règles sont énoncées à l’article 21 du projet de loi ainsi qu’aux dispositions des articles 39 et 40 relatives aux peines. Le gouverneur en conseil peut également prendre un règlement régissant le déroulement du vote (al. 41f)).
Les postes de chef et de conseiller sont attribués à la majorité simple (art. 23). En cas d’égalité des voix entre deux ou plusieurs candidats au même poste, l’agent électoral de la Première nation doit « procéder à un tirage au sort pour déterminer à quel candidat le vote sera attribué » (art. 24) 31.
L’article 28 prévoit que le chef et les conseillers auront un mandat de quatre ans à compter de la date à laquelle prend fin le mandat de leurs prédécesseurs. Comme le sous-alinéa 78(2)a)(i) de la LI, l’alinéa 28(2)a) précise que le poste d’un chef ou d’un conseiller devient vacant si le titulaire est déclaré coupable d’un acte criminel et condamné à une peine d’emprisonnement de plus de 30 jours consécutifs.
Contrairement aux dispositions électorales de la LI, qui autorisent le Ministre et le gouverneur en conseil à rejeter les résultats d’une élection dans certaines circonstances 32, le processus de contestation de la validité d’une élection tenue sous le régime du projet de loi relève exclusivement de la compétence des tribunaux.
Pour contester une élection, l’électeur d’une Première nation doit d’abord présenter une requête à la Cour fédérale ou à la cour supérieure de la province « où se trouvent une ou plusieurs réserves de la première nation participante en cause » (art. 31 et 33). La requête doit être déposée dans les 30 jours suivant l’annonce des résultats de l’élection (art. 32).
La requête doit énoncer les motifs sur lesquels est fondée l’allégation qu’une contravention à une disposition du projet de loi ou du règlement « a vraisemblablement influé sur le résultat » de l’élection (art. 31). Le tribunal peut invalider les résultats de l’élection en s’appuyant sur ces motifs (par. 35(1)).
L’article 36 établit une nouvelle infraction en interdisant l’achat ou la vente de signatures sur une pétition de destitution. Les règles régissant la destitution d’un chef ou d’un conseiller par voie de pétition peuvent être établies par règlement (al. 41g)).
Ces dispositions décrivent diverses infractions ainsi que les peines connexes. La peine imposée à une personne qui commet une infraction décrite à l’article 38, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, est une amende maximale de 1 000 $ ou un emprisonnement maximal de trois mois, ou les deux. D’autres infractions se prêtent à une déclaration de culpabilité par mise en accusation ou par procédure sommaire, les deux entraînant des peines; dans le cas d’une déclaration de culpabilité par mise en accusation, la peine pour certaines infractions est une amende maximale de 5 000 $ ou un emprisonnement maximal de cinq ans, ou les deux (art. 39). Tout candidat déclaré coupable d’une infraction prévue aux articles du projet de loi peut être passible d’une peine additionnelle d’inéligibilité pendant une période de cinq ans suivant la date de sa condamnation (art. 40).
L’article 41 confère au gouverneur en conseil de vastes pouvoirs de nature générale de prendre des règlements relatifs aux élections ainsi qu’à toute autre mesure d’ordre réglementaire prévue par le projet de loi (al. 41i)). La plupart des règles et procédures relatives au déroulement des élections et au mécanisme de destitution d’un chef ou d’un conseiller par voie de pétition ne sont pas décrites explicitement dans le projet de loi et peuvent donc faire l’objet d’un règlement (al. 41f) et 41g)).
Le Ministre peut, par arrêté, autoriser une Première nation à se retirer du régime si elle adopte un « code électoral communautaire » qui établit les règles régissant l’élection de son chef et de ses conseillers 33. Le code doit remplir certaines conditions, par exemple, recevoir l’appui de la majorité des votes exprimés lors d’un vote auquel ont participé la majorité des électeurs de la Première nation (al. 42(1)b)) et être publié sur un site Internet tenu par ou pour la Première nation ou dans la Gazette des premières nations (al. 42(1)c)).
Du point de vue d’Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, le projet de loi renforcera la gouvernance des Premières nations et stimulera le développement social et économique de leurs communautés. Le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord Canada, John Duncan, a déclaré que le nouveau régime électoral « aidera [les Premières nations] à créer la stabilité nécessaire pour favoriser les investissements commerciaux dynamiques […] lesquels stimuleront le développement économique, la création d’emplois et amélioreront la qualité de vie de la collectivité » des Premières nations. Le Ministre et le Ministère ont également insisté sur le fait que le projet de loi offre aux conseils de bande des Premières nations le choix de se prévaloir ou non du nouveau cadre électoral 34.
Les Premières nations ont eu l’occasion de se prononcer sur la réforme du régime électoral au cours du processus d’engagement national. Au terme des consultations, l’Atlantic Policy Congress of First Nations Chiefs (APC) et l’Assembly of Manitoba Chiefs (AMC) ont transmis au gouvernement fédéral le rapport et les recommandations découlant de ce processus. Les opinions sur le projet de loi sont divisées parmi les organisations des Premières nations qui ont participé au processus d’engagement : certaines y sont favorables, tandis que d’autres sont d’avis qu’il ne reflète pas le rapport ni les recommandations.
Certains dirigeants ont exprimé leur ferme appui pour le nouveau régime électoral. Dès l’annonce du projet de loi, en décembre 2011, le chef Lawrence Paul, de la Première Nation de Millbrook, et le chef Candice Paul, de la Première Nation St. Mary’s, anciens co-présidents de l’APC, se sont dits de l’avis du gouvernement, affirmant que ce projet de loi favorisera la saine gouvernance et stimulera le développement économique des communautés des Premières nations 35. Ron Evans, grand chef de l’AMC durant le processus d’engagement, a lui aussi publiquement appuyé le projet de loi 36.
Par contre, l’actuel grand chef de l’AMC, Derek Nepinak, a exprimé sa vive opposition au projet de loi. Dans une déclaration écrite, citée par divers médias le 7 décembre 2011 37, il soutient que le projet de loi ne donne pas suite aux recommandations formulées par l’AMC et qu’il constitue un semblant de « tentative de la part du Ministre d’étendre la compétence gouvernementale et son contrôle des processus électoraux des Premières Nations établis en vertu de la Loi sur les Indiens ou d’un code coutumier ». Le grand chef Nepinak a notamment critiqué le pouvoir du Ministre d’assujettir les Premières nations au projet de loi dans certaines circonstances et sans leur consentement, l’absence de mécanisme d’appel pour les Premières nations et le tirage au sort pour départager les votes lors des élections des chefs et des conseillers des conseils.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
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