Le programme de péréquation est un programme de paiements de transfert fédéral visant à réduire les écarts de capacité de prélèvement fiscal entre les dix provinces canadiennes. Ainsi, le programme contribue à faire en sorte que tous les Canadiens aient accès à des niveaux de services publics sensiblement comparables.
Le programme de péréquation est entièrement financé par les recettes générales du gouvernement du Canada. De même, les provinces ne contribuent pas financièrement au programme et le transfert n’influe pas sur la capacité de chaque province de lever des impôts.
Afin de déterminer quelles provinces ont droit aux paiements de péréquation et de calculer le montant de ceux-ci, on compare la capacité fiscale par habitant de chaque province à la capacité fiscale moyenne de toutes les provinces. Si la capacité fiscale d’une province est inférieure à la moyenne, elle a droit à des paiements de péréquation pour combler la différence, mais si sa capacité fiscale est supérieure à la moyenne, elle n’y a pas droit.
Le mécanisme utilisé pour établir le montant total des paiements de péréquation a été modifié plusieurs fois depuis la création du programme, en 1957. Les deux dernières séries de réformes majeures ont eu lieu en 2007 et 2009. En 2007, le traitement des recettes fiscales tirées des ressources naturelles a changé et on a fixé un plafond de capacité fiscale. En 2009, on a limité la croissance du montant total des paiements de péréquation en fonction de celle du produit intérieur brut nominal du Canada.
Le programme de péréquation a fait l’objet de plusieurs critiques. On a entre autres avancé que le programme peut encourager les provinces bénéficiaires à prendre des décisions visant à maximiser leurs paiements de péréquation plutôt que leur croissance économique à long terme, et que le processus décisionnel concernant le programme de péréquation est souvent politisé.
Le programme de péréquation est un programme de paiements de transfert fédéral créé en 1957 afin de réduire les écarts de capacité de prélèvement fiscal entre les dix provinces canadiennes. En compensant la faiblesse relative de l’assiette fiscale ou des ressources des provinces moins prospères, la péréquation contribue à faire en sorte que les Canadiens qui y résident aient accès à des niveaux de services publics sensiblement comparables, à des taux d’imposition sensiblement comparables, indépendamment de la province en question. Un autre programme de transfert fédéral, la formule de financement des territoires, vise le même objectif pour les gouvernements territoriaux.
La péréquation est entièrement financée par les recettes générales du gouvernement du Canada. Les provinces ne participent pas au transfert, sauf dans la mesure où elles ont droit à des paiements de péréquation. Les gouvernements provinciaux ne contribuent pas financièrement au programme et le transfert n’influe pas sur la capacité de chaque province de lever des impôts. Les paiements de péréquation ne sont assortis d’aucune condition quant à l’utilisation des fonds et les provinces bénéficiaires ne sont assujetties à aucune norme à cet égard. Elles décident pour leur population et rendent des comptes à leurs électeurs pour les services fournis.
Le mécanisme utilisé pour établir le montant total des paiements de péréquation, ainsi que le montant versé à chaque province admissible, a changé plusieurs fois depuis la création du programme. Les deux plus récentes séries de réformes majeures qu’il a subies remontent à 2007 et 2009.
En 2007, le gouvernement fédéral a rétabli une approche fondée sur une formule, qui a remplacé le régime à enveloppe fixe mis en place en 2004. En 2009, il a changé la formule afin de limiter le montant total des paiements de péréquation. À l’époque, l’Ontario – la province la plus peuplée du pays – était sur le point de bénéficier elle aussi de la péréquation. Depuis, le programme de péréquation a été renouvelé pour des périodes de cinq ans, sans que des changements importants y soient apportés.
Cela s’est récemment fait par le biais de la Loi no 1 d’exécution du budget de 2023, dont l’adoption par le Parlement a autorisé la ministre des Finances à verser aux provinces des paiements de péréquation pour une période supplémentaire de cinq ans, qui prendra fin le 31 mars 2029.
Les paiements de péréquation s’élèvent au total à 25,3 milliards de dollars en 2024-2025, ce qui représente 4,7 % du total des charges fédérales 1. À l’heure actuelle, sept provinces y ont droit : le Manitoba, l’Ontario, le Québec, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle‑Écosse, l’Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve-et-Labrador. Le Québec est la province qui reçoit le plus, soit 52,7 % de la totalité des paiements de péréquation en 2024-2025. Cela tient principalement au fait qu’elle est davantage peuplée que les autres provinces bénéficiaires. En 2024-2025, c’est l’Île-du-Prince-Édouard qui reçoit le paiement de péréquation par habitant le plus élevé (3 718 $) et l’Ontario, le moins élevé (38 $) 2. Comme le montre le tableau 1, les paiements de péréquation peuvent représenter près de 20 % des revenus gouvernementaux dans certaines provinces, notamment le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard.
Province | En millions de dollars ($) | En dollars par habitant ($) | En pourcentage du revenu total (%) |
---|---|---|---|
Manitoba | 4 352 | 3 109 | 19,4 |
Ontario | 576 | 38 | 0,3 |
Québec | 13 316 | 1 545 | 8,9 |
Nouveau-Brunswick | 2 897 | 3 629 | 21,9 |
Nouvelle-Écosse | 3 284 | 3 252 | 20,7 |
Île-du-Prince-Édouard | 610 | 3 718 | 19,4 |
Terre-Neuve-et-Labrador | 218 | 412 | 2,1 |
Sources : Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Ministère des Finances, Principaux transferts fédéraux; Trevor Tombe, « Equalization Simulator », Finances of the Nation Equalization Payments Simulator, base de données, consultée le 12 septembre 2024; et de documents budgétaires provinciaux pour l’année 2024-2025.
Le programme de péréquation s’appuie sur une formule mathématique pour déterminer quelles provinces ont droit aux paiements de transfert et pour en calculer le montant. Depuis 2009, le montant total des paiements a augmenté au même rythme qu’une moyenne mobile du produit intérieur brut (PIB) nominal du Canada sur trois ans.
La structure de base du programme de péréquation est relativement simple. Il s’agit d’évaluer la capacité de chaque province de générer ses propres recettes fiscales et de la comparer à la capacité fiscale moyenne de toutes les provinces. À l’exception des frais d’utilisation (des services publics), toutes les sources de recettes publiques provinciales sont réparties en cinq catégories : impôts sur le revenu des particuliers, impôts sur le revenu des sociétés, taxes à la consommation, impôts fonciers et recettes tirées des ressources naturelles.
Exception faite de ces recettes tirées des ressources naturelles, la formule de péréquation permet d’évaluer la capacité fiscale dans chacune des quatre autres catégories en calculant le revenu par habitant que chaque province pourrait générer si toutes les provinces avaient le même taux d’imposition. En raison de la diversité des ressources et des structures de redevances des provinces, on se sert des recettes réelles tirées des ressources pour mesurer la capacité fiscale, plutôt que de créer un taux d’imposition national moyen.
Pour savoir quelles provinces sont admissibles au programme de péréquation – et pour déterminer le montant de celle-ci –, on compare la capacité fiscale par habitant de chaque province dans les cinq catégories de revenu à la capacité fiscale moyenne des dix provinces. Si, selon la formule, la capacité d’une province de générer ses propres recettes est inférieure à la moyenne, elle a droit à des paiements de péréquation pour combler la différence. Si elle est supérieure, elle n’y a pas droit.
Les changements apportés en 2007 et 2009 ont rendu le programme plus complexe.
Avant 2004, la totalité des recettes tirées des ressources naturelles était incluse dans le calcul de la péréquation, sauf que les ressources de l’Alberta n’étaient pas visées par la norme servant à établir le droit à des paiements de péréquation. Depuis 2007, les ressources énergétiques de l’Alberta sont visées par la norme et les provinces admissibles reçoivent des paiements de péréquation calculés soit en incluant 50 % des recettes tirées des ressources naturelles, soit en les excluant complètement. Les provinces admissibles reçoivent automatiquement des paiements de péréquation selon l’option qui produit le montant le plus élevé par habitant.
La décision d’avoir deux options en ce qui concerne les recettes tirées des ressources naturelles résulte d’un compromis politique. D’une part, le gouvernement fédéral a accepté les recommandations du Groupe d’experts sur la péréquation et la formule de financement des territoires, qui lui conseillait, en 2006, d’inclure 50 % desdites recettes dans la formule de péréquation 3. D’autre part, il s’est estimé lié par sa promesse, faite avant les élections de 2006, d’exclure les recettes en question de la formule.
En 2009, le gouvernement du Canada a plafonné le programme de péréquation afin que la croissance du montant total des paiements reste viable à l’avenir. Comme il a été mentionné auparavant, le plafond est relevé au rythme d’une moyenne mobile du PIB nominal sur trois ans.
Ce plafond a plusieurs conséquences. Ainsi, comme il est mentionné plus haut, le montant total des paiements de péréquation n’est plus fixé par une formule et il ne change pas en fonction de l’évolution des disparités fiscales provinciales, mais de celle du PIB nominal. De plus, une augmentation du paiement de péréquation d’une province fait baisser le paiement des autres provinces bénéficiaires du programme lorsque les disparités fiscales entre les provinces augmentent plus rapidement que la croissance du PIB national et, donc, le plafond du montant total des paiements de péréquation.
Le plafond sert également de plancher, puisque le montant total des paiements de péréquation augmente en fonction du PIB, même en cas de réduction des disparités fiscales entre les provinces, ce qui aurait entraîné une baisse du montant total des paiements de péréquation à l’époque où ceux-ci étaient déterminés par l’évolution des disparités fiscales. Lorsque le montant total des paiements de péréquation calculé en fonction des disparités fiscales est inférieur à celui calculé en fonction de la croissance du PIB, le gouvernement fédéral peut répartir l’excédent selon un montant égal par habitant parmi les provinces bénéficiaires; c’est ce que l’on appelle les paiements de rajustement. Toutefois, si une province non bénéficiaire se retrouve avec une capacité fiscale par habitant plus faible qu’une province bénéficiaire à la suite du versement des paiements de rajustement, la province non bénéficiaire devient admissible aux paiements de rajustement. C’est pour cette raison que l’Ontario a reçu des paiements de péréquation en 2018-2019, 2023-2024 et 2024-2025.
Le programme de péréquation comprend également un plafond qui peut limiter le montant que les provinces admissibles perçoivent par habitant. Ce plafond a été instauré en 2007 pour tenir compte de l’incidence possible de l’exclusion partielle des recettes tirées des ressources naturelles sur la capacité fiscale des provinces.
Comme les provinces peuvent percevoir des recettes de l’exploitation de leurs ressources naturelles et les dépenser comme bon leur semble, leur capacité fiscale réelle comprend la totalité de ces recettes. Toutefois, comme il est mentionné plus haut, le programme de péréquation ne tient compte que de la moitié – au plus – de ces recettes pour mesurer la capacité fiscale. Par conséquent, il est possible qu’une province ait droit à des paiements de péréquation qui, une fois perçus, lui donnent une capacité fiscale réelle supérieure à celle d’une province qui n’a pas droit à de tels paiements. Le plafond instauré en 2007 vise à éliminer cette possibilité. Ainsi, la somme de la capacité fiscale autonome – qui comprend toutes les sources de revenus – et des paiements de péréquation des provinces bénéficiaires ne peut être supérieure à la capacité fiscale de la province non bénéficiaire la plus pauvre.
En 2009, le gouvernement a changé la norme utilisée pour plafonner la capacité fiscale globale d’une province bénéficiaire lorsque la population des provinces bénéficiaires représente 50 % ou plus de la population canadienne. Dans un tel cas, la norme devient la moyenne de la capacité fiscale des provinces bénéficiaires. Cette modification a été apportée quand l’Ontario a touché des paiements de péréquation pour la première fois, faisant ainsi passer la population des provinces bénéficiaires au-delà de 50 %. Sans cette modification, la capacité fiscale de la province non bénéficiaire la plus pauvre aurait été celle de la Colombie-Britannique, qui était beaucoup plus élevée. Les réductions découlant du plafond de capacité fiscale auraient donc été plus faibles et les paiements totaux de péréquation plus élevés 4. En utilisant plutôt la moyenne de la capacité fiscale des provinces bénéficiaires, qui est inférieure à la capacité fiscale de la province non bénéficiaire la plus pauvre, les paiements de péréquation totaux s’en trouvent réduits.
Au cours d’une année donnée, le paiement de péréquation repose sur une moyenne mobile pondérée de la capacité fiscale des provinces sur trois ans, avec deux années de décalage. Ainsi, la capacité fiscale d’une province en 2024-2025 correspond à la somme de 50 % de sa capacité fiscale pour 2020-2021, 25 % pour 2021-2022 et 25 % pour 2022-2023. La population d’une province pour une année donnée est calculée de la même manière.
La moyenne mobile pondérée a été adoptée en 2007 afin de stabiliser les fluctuations annuelles des paiements de péréquation des provinces et, par conséquent, de remédier à l’instabilité et à l’incertitude caractéristiques de la formule d’avant 2004. L’utilisation de données remontant à au moins deux ans dans la moyenne pondérée élimine la nécessité de recalculer les paiements à chaque révision de ces données. Avec la formule d’avant 2004, la révision fréquente des paiements de péréquation compliquait la planification budgétaire des gouvernements provinciaux.
Le programme de péréquation a fait l’objet de plusieurs critiques. On a notamment avancé qu’il peut encourager les provinces bénéficiaires à prendre des décisions visant à maximiser leurs paiements de péréquation plutôt que leur croissance à long terme. Par exemple, une province bénéficiaire de bonne taille pourrait être tentée d’élever son niveau d’imposition, car cela entraînerait une hausse du niveau d’imposition national moyen utilisé dans le calcul de la capacité fiscale moyenne. Ainsi, cette province bénéficiaire recevrait un montant accru de péréquation 5. De façon similaire, le programme de péréquation pourrait dissuader une province bénéficiaire de développer ses ressources naturelles, car les revenus qu’elle en tirerait feraient augmenter sa capacité fiscale plus rapidement que la moyenne nationale, ce qui conduirait à une réduction de ses paiements de péréquation.
On a aussi décrié la politisation du processus décisionnel du programme de péréquation, en partie parce qu’il est entièrement sous le contrôle du gouvernement fédéral et que celui-ci n’est pas tenu de consulter les provinces. Cette politisation est souvent source de conflits entre les gouvernements fédéral et provinciaux et peut potentiellement mener à des décisions répondant davantage à des impératifs électoraux. Afin de dépolitiser la péréquation, certains commentateurs ont proposé de confier la gestion du programme à une entité neutre et indépendante – analogue à la Commission des subventions du Commonwealth qui est responsable de déterminer la distribution des recettes de la taxe sur les produits et services parmi les états et territoires australiens 6. Cette éventuelle entité pourrait notamment faire des recommandations au gouvernement fédéral concernant les niveaux de paiements et des réformes potentielles.
Parmi les autres préoccupations soulevées à l’égard du programme de péréquation figurent son incidence possible sur le niveau de dépenses publiques dans les provinces, la manière dont on calcule les revenus issus de la production d’hydroélectricité et la nécessité de fixer la croissance des paiements de péréquation selon le PIB nominal.
Le programme de péréquation, qui ne cesse d’évoluer depuis sa création en 1957, a subi des changements relativement importants, en 2007 et en 2009, relativement au montant total des paiements et à leur répartition entre les provinces. Depuis, le programme a été renouvelé à quelques reprises sans que des changements majeurs y soient apportés. En 2023, il a été renouvelé pour une période supplémentaire de cinq ans, qui prendra fin le 31 mars 2029.
* La présente publication s’inspire d’une publication antérieure de la Bibliothèque du Parlement rédigée par Michael Holden.
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