Le préambule de la Loi sur le lobbying dispose que la liberté d'accès aux institutions de l'État est une affaire d'intérêt public importante, que le lobbying auprès des titulaires d'une charge publique est légitime, qu'il est souhaitable que les titulaires d'une charge publique et la population soient en mesure de savoir qui se livre à des activités de lobbying, et qu'un système d'enregistrement des lobbyistes rémunérés ne doit pas faire obstacle à cette liberté d'accès.
En 2008, des modifications de fond apportées à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes sont entrées en vigueur. La Loi a été renommée Loi sur le lobbying parce qu'elle visait désormais la réglementation des activités des lobbyistes au lieu d'un simple suivi au moyen d'un système d'enregistrement.
Le Code de déontologie des lobbyistes, dont la version actuelle est entrée en vigueur le 1er décembre 2015, fixe les normes d'éthique que les lobbyistes ont l'obligation de respecter afin de préserver la confiance de la population dans « l'intégrité, l'objectivité et l'impartialité de la prise de décisions du gouvernement ». À ce titre, il complète les exigences de la Loi sur le lobbying en matière de divulgation et d'enregistrement.
Les modifications législatives suivantes ont découlé de l'adoption de la Loi sur le lobbying :
En 2011 et 2012, le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes a procédé à l'examen parlementaire quinquennal prévu dans la Loi sur le lobbying. Ce comité a présenté un rapport à la Chambre des communes contenant 11 recommandations visant à modifier la Loi, mais aucune de ces recommandations n'a mené à une modification législative à ce jour. Alors que l'examen parlementaire de la Loi sur le lobbying devrait avoir lieu tous les cinq ans selon les dispositions de la Loi, le deuxième examen aurait dû se tenir en 2017, mais n'a toujours pas eu lieu au moment de la révision de la présente étude.
Le terme « lobbying » renvoie en général aux communications qui ont pour but d'inciter les législateurs et d'autres fonctionnaires à prendre parti pour une cause.
Le lobbying à l'échelle fédérale a tout d'abord été régi par la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, qui est entrée en vigueur en 1989 et qui a permis d'instaurer un système d'enregistrement destiné à actualiser pour tous le droit d'être informés sur ceux qui essaient d'influencer la politique gouvernementale au Canada. En 2008, à la suite de l'adoption de la Loi fédérale sur la responsabilité en 2006, des modifications de fond ont été apportées à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, qui a été renommée Loi sur le lobbying parce qu'il ne s'agissait plus d'effectuer un simple suivi au moyen d'un système d'enregistrement, mais bien de régir désormais les activités des lobbyistes. À l'heure actuelle, plus de 6 800 lobbyistes inscrits font du lobbying auprès de titulaires d'une charge publique fédérale 1.
En plus de la Loi sur le lobbying, la première version du Code de déontologie des lobbyistes (le Code), entrée en vigueur en mars 1997, a établi les normes d'éthique que les lobbyistes doivent respecter pour préserver la confiance de la population dans « l'intégrité, l'objectivité et l'impartialité de la prise de décisions du gouvernement 2 ». À ce titre, le Code complète les exigences de la Loi sur le lobbying en matière de divulgation et d'enregistrement et les lobbyistes sont tenus de se conformer à ses dispositions. La version actuelle du Code est entrée en vigueur le 1er décembre 2015.
La présente étude propose un historique de la Loi sur le lobbying 3 et donne un aperçu du fonctionnement concret de cette loi et du Code de déontologie des lobbyistes 4. Elle aborde également les questions soulevées par l'examen quinquennal de la Loi, qui s'est déroulé en 2011 et 2012.
C'est le 30 septembre 1989, après de vastes consultations et un débat soutenu, que la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes (LEL) est entrée en vigueur au Canada 5. Cette loi visait à imposer une transparence aux activités des lobbyistes sans entraver leur accès au gouvernement. Elle répondait au sentiment général de l'époque que les gens qui cherchaient à influencer le gouvernement par le biais de leurs contacts politiques ou personnels abusaient du système. De fait, entre 1965 et 1985, plus de 20 projets de loi d'initiative parlementaire ont été présentés au Parlement, généralement à la suite de scandales ou d'un tollé public 6.
On estimait que l'adoption de la LEL permettrait d'obtenir des renseignements sûrs et précis sur les activités des lobbyistes, et qu'il serait ainsi possible de dissiper une grande partie du mystère entourant le lobbying et, par le fait même, d'éliminer les conjectures et les insinuations associées à ces activités. Les lobbyistes rémunérés étaient désormais tenus de s'inscrire et de divulguer certains renseignements dans un registre public 7. Aux termes de la LEL, le directeur des lobbyistes était chargé d'appliquer les dispositions relatives à la divulgation d'information et de tenir un registre public. Il ne s'agissait pas de réglementer les activités des lobbyistes ni leurs méthodes.
La LEL a considérablement évolué avec le temps 8, en grande partie grâce aux dispositions relatives à l'examen législatif, qui exigent que son contenu et son application soient examinés périodiquement 9. Le dernier examen complet de la LEL a été effectué en 2001 par le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes (Comité de l'industrie). Dans son rapport, le Comité a formulé plusieurs recommandations visant à améliorer l'application de la LEL 10.
Le projet de loi C-15, Loi modifiant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes donnait suite à certaines des principales recommandations du Comité de l'industrie. Ce texte législatif visait à améliorer l'application de la LEL et à étendre les pouvoirs d'enquête prévus aux termes de celle-ci, à simplifier et harmoniser les conditions d'enregistrement des lobbyistes, et à clarifier et améliorer la formulation de la Loi. Par exemple, le projet de loi explicitait la définition de « lobbying » de trois façons :
Le projet de loi C-15 a reçu la sanction royale le 11 juin 2003, mais il n'est entré en vigueur que le 20 juin 2005, en même temps que le Règlement modifiant le Règlement sur l'enregistrement des lobbyistes. Ce délai a été nécessaire pour mettre à jour le Règlement sur l'enregistrement des lobbyistes et le système de transmission électronique des inscriptions en ligne.
Le projet de loi ajoutait également à la LEL le nouvel article 14.1, qui prévoyait que le Parlement procède à un examen quinquennal des dispositions et de l'application de cette loi.
L'adoption de la Loi fédérale sur la responsabilité en décembre 2006 a considérablement modifié la LEL, dont le titre a été remplacé par Loi sur le lobbying (LL) 12.
Les modifications étaient en partie destinées à mettre en œuvre les recommandations formulées par le juge John Gomery dans le rapport de la Commission d'enquête sur le programme de commandites et les activités publicitaires, publié le 1er février 2006 13. La Commission avait été chargée d'étudier les questions soulevées dans le rapport de 2003 de la vérificatrice générale du Canada 14. Dans son rapport, le juge Gomery recommandait que le directeur des lobbyistes rende compte directement au Parlement des questions relatives à l'application de la LEL. Le Bureau du directeur des lobbyistes devait disposer de ressources suffisantes pour faire connaître et appliquer les dispositions de la LEL, ainsi que pour permettre à son personnel d'enquêter et d'entamer des poursuites en cas d'infraction à la LEL. Le rapport recommandait également que le délai d'enquête et de poursuite passe de deux à cinq ans à partir du moment où le directeur avait connaissance d'une infraction.
Les changements suivants découlent des modifications apportées à la LEL qui sont entrées en vigueurle 2 juillet 2008, au même moment que le changement de nom officiel de la LEL, devenue Loi sur le lobbying :
En mars 2011, le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes (Comité ETHI) a entamé l'examen parlementaire quinquennal prévu dans la Loi sur le lobbying. Après avoir procédé à l'examen de la Loi de décembre 2011 à mai 2012, le Comité a présenté un rapport à la Chambre des communes en mai 2012 16. Le rapport contient 11 recommandations visant à modifier la Loi; dont aucune n'a mené à une modification législative à ce jour. La réponse du gouvernement au rapport a été présentée à la Chambre en septembre 2012 17.
La LL a remplacé le poste de directeur des lobbyistes par celui de commissaire au lobbying, qui est un haut fonctionnaire indépendant du Parlement chargé de promouvoir et de faire mieux comprendre, accepter et respecter la LL. Il a pour mandat de faire de la sensibilisation, notamment auprès des lobbyistes, de leurs clients et des titulaires d'une charge publique, et de faire respecter la LL par des mesures limitées (voir la rubrique 3.1.5 « Infractions et sanctions » de la présente étude). La LL confère également au commissaire de vastes pouvoirs d'enquête en vertu à la fois de ses dispositions et de celles du Code 18. Toutes les enquêtes doivent être secrètes, et le commissaire doit rendre compte au Parlement de ses constatations et conclusions. Le commissaire est également tenu de remettre au Parlement un rapport annuel sur l'application de la LL. Il peut en outre rédiger un rapport spécial sur toute question qu'il juge importante dans le cadre de son mandat.
Malgré ses pouvoirs d'enquête élargis, le commissaire, comme l'ancien directeur des lobbyistes, ne peut pas imposer de sanctions administratives ou pécuniaires en lieu et place d'accusations au criminel 19. Le commissaire doit suspendre l'enquête et informer les autorités compétentes qu'il a des raisons valables de croire qu'une personne a commis une infraction à la LL ou à toute autre loi fédérale ou provinciale.
Le préambule de la LL dispose que la liberté d'accès aux institutions de l'État est une affaire d'intérêt public importante, que le lobbying auprès des titulaires d'une charge publique est légitime, qu'il est souhaitable que les titulaires d'une charge publique et la population soient en mesure de savoir qui se livre à des activités de lobbying, et qu'un système d'enregistrement des lobbyistes rémunérés ne doit pas faire obstacle à cette liberté d'accès.
La LL définit les activités qui, lorsqu'elles sont rémunérées, constituent du lobbying et elle les énumère. En règle générale, il s'agit des communications avec des titulaires d'une charge publique concernant la modification de lois, de règlements, de politiques ou de programmes fédéraux; l'obtention d'avantages comme des subventions ou des contributions; dans certains cas, l'obtention d'un marché public. De plus, dans le cas des lobbyistes-conseils (qui travaillent pour des clients), il y a lobbying lorsqu'une rencontre est organisée entre un titulaire d'une charge publique et une autre personne 20.
Selon la définition de la LL, les titulaires d'une charge publique sont, à quelques exceptions près, toutes les personnes élues ou nommées à un poste au gouvernement fédéral, notamment les députés, les sénateurs et les membres de leur personnel 21. La LL définit également la notion de « titulaire d'une charge publique désignée ». Il s'agit des principaux décideurs du gouvernement, dont les ministres d'État, les membres exonérés de leur personnel, les hauts fonctionnaires (p. ex. sous‑ministres et sous‑ministres adjoints) et autres titulaires dont les postes sont désignés par règlement (p. ex. certains hauts gradés des Forces canadiennes). La LL considère notamment comme TCPD toute personne membre d'une équipe de transition du premier ministre. Les TCPD sont assujettis aux contraintes d'après‑mandat sur le lobbying, et les lobbyistes doivent respecter certaines exigences en matière de divulgation lorsqu'ils rencontrent des TCPD.
Un règlement modifiant le Règlement désignant certains postes comme postes de titulaire d'une charge publique désignée est entré en vigueur le 20 septembre 2010 22. Les modifications ont ajouté les députés, les sénateurs et certains membres du personnel du Bureau du chef de l'Opposition à la liste des titulaires d'une charge publique désignée.
La LL s'applique aux lobbyistes rémunérés qui communiquent avec des titulaires d'une charge publique fédérale pour le compte de tiers. Elle regroupe les lobbyistes en deux catégories :
L'article 10 de la LL permet au commissaire au lobbying du Canada de publier des bulletins d'interprétation et de fournir des avis portant sur l'exécution, l'interprétation ou l'application de la Loi. En 2009, la commissaire de l'époque, Karen E. Shepherd, s'est fondée sur cette disposition pour publier un bulletin d'interprétation sur la notion de « partie importante des fonctions » d'un employé, dans le but d'aider les lobbyistes salariés à respecter les termes de l'article 7 de la LL, qui précise notamment les circonstances dans lesquelles les lobbyistes salariés sont tenus de fournir des renseignements 25.
Dans ce bulletin d'interprétation, la commissaire fixe le seuil à partir duquel les activités de lobbying représentent une partie importante des fonctions d'un employé à 20 % de l'ensemble des fonctions. Elle y suggère également des méthodes pour calculer le seuil de 20 % et fournit des exemples d'activités qui ne sont pas visées par l'exigence d'enregistrement et qui, par conséquent, ne doivent pas être prises en compte dans le calcul de la partie importante des fonctions.
Les TCPD, dont les députés et les sénateurs, ne sont pas autorisés à faire du lobbying pendant cinq ans après la cessation de leurs fonctions 26. L'interdiction s'applique également aux personnes désignées par le premier ministre comme étant celles qui l'ont soutenu et conseillé pendant la période de transition entre l'élection et l'assermentation. La période de cinq ans commence à la date à laquelle l'intéressé cesse ses fonctions au sein de l'équipe. Quiconque enfreint cette disposition est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d'une amende maximale de 50 000 $. Le commissaire a également le pouvoir de rendre publics toute infraction commise à cet égard et le nom du coupable. L'interdiction ne s'applique pas aux personnes qui ont assumé des charges publiques désignées dans le cadre de programmes d'échange.
Un ancien TCPD peut demander une exemption à cette interdiction au commissaire. Avant d'accorder une exemption, le commissaire doit se demander s'il respecte l'objet de la LL et tenir compte des critères prévus à cet égard (à savoir si le demandeur n'a été TCPD que pendant une courte période, s'il a été employé à titre intérimaire ou à des fins administratives seulement ou s'il s'agissait d'un étudiant). Le commissaire est tenu de rendre publiques et de justifier toutes les exemptions accordées. La liste des exemptions à l'interdiction de faire du lobbying pendant cinq ans, accordées depuis l'entrée en vigueur des dispositions de la LL en 2008, est disponible sur le site Web du Commissariat au lobbying du Canada 27.
Les critères d'exemption applicables aux membres de l'équipe de transition d'un premier ministre sont différents de ceux qui visent les autres TCPD. Par exemple, certains facteurs peuvent entrer en ligne de compte : les circonstances dans lesquelles le membre de l'équipe de transition a quitté ses fonctions dans l'équipe; le pouvoir et l'influence qu'il exerçait au sein de l'équipe; la mesure dans laquelle son nouvel employeur pourrait, en l'engageant, obtenir un avantage commercial injuste. En effet, les membres d'équipes de transition sont très étroitement associés aux plus importantes sphères du gouvernement – et souvent au recrutement de fonctionnaires de haut niveau –, et ils pourraient donc influer considérablement sur ces organisations s'il leur était permis de faire du lobbying dans les cinq ans suivant la cessation de leurs fonctions.
La Loi sur le lobbying, comme la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes avant elle, impose aux lobbyistes l'obligation de signaler, dans une première déclaration, toutes les communications qu'ils ont avec des titulaires d'une charge publique. L'information est présentée sous la forme et de la façon indiquées par le Règlement sur l'enregistrement des lobbyistes. Les formulaires et la réglementation font partie intégrante de la mise en œuvre de la LL. Le Règlement ajoute des renseignements exigibles à ceux que prévoit la LL. Il s'agit, entre autres, du nom du client ou de l'employeur, de l'objet du lobbying, du nom de l'organisme fédéral concerné, des méthodes de lobbying, de la déclaration d'ancien titulaire d'une charge publique et des fonctions exercées, ainsi que de la déclaration d'ancien TCPD et de la date à laquelle le candidat a quitté ce poste.
Outre l'inscription initiale, les dispositions de la LL exigent que les lobbyistes remettent des déclarations mensuelles s'ils ont des communications orales et organisées avec des TCPD. Les communications orales et organisées sont les appels téléphoniques, les réunions et toutes les autres communications planifiées.
La déclaration doit indiquer, pour chaque communication au cours d'un même mois, la date de la communication avec un TCPD, le nom et le titre de tous les TCPD avec lesquels le lobbyiste a communiqué et l'objet de la communication. Le lobbyiste doit remettre la déclaration au commissaire au lobbying pas plus tard que le 15e jour suivant la fin du mois faisant l'objet du rapport 28.
L'article 9 de la LL confère au commissaire au lobbying le mandat de créer et de tenir à jour un registre des lobbyistes. Ce registre est considéré par le commissaire comme le principal moyen d'améliorer la transparence des activités de lobbying à l'échelle fédérale 29. Il s'agit d'une base de données Web publique et gratuite.
Les lobbyistes doivent attester l'exactitude des renseignements contenus dans leurs déclarations mensuelles. Le personnel du Commissariat au lobbying vérifie ensuite qu'elles sont complètes avant de les verser au registre. Les lobbyistes ne paient pas de droits d'inscription.
La Loi sur l'enregistrement des lobbyistes prévoyait des sanctions pour les infractions à ses dispositions (p. ex. défaut de s'inscrire au registre) et pour les cas de déclarations fausses ou trompeuses. Outre ces exigences, la Loi sur le lobbying renferme des dispositions relatives au défaut de produire les déclarations exigibles et aux déclarations fausses ou trompeuses des TCPD en réponse à une demande de renseignements du commissaire. Toute personne reconnue coupable de ces infractions par voie de déclaration de culpabilité par procédure sommaire est passible d'une amende maximale de 50 000 $ (par rapport à 25 000 $ en vertu de la LEL) ou d'une peine d'emprisonnement maximale de six mois, ou les deux. Si elle est reconnue coupable de ces infractions par voie de mise en accusation, la personne encourt une amende maximale de 200 000 $ (par rapport à 100 000 $ aux termes de la LEL) ou une peine d'emprisonnement maximale de deux ans, ou les deux. La LL dispose également que toute personne reconnue coupable d'avoir enfreint d'autres dispositions, sauf s'il s'agit du Code, est passible d'une amende maximale de 50 000 $ (comparativement à 25 000 $ en vertu de la LEL). Le délai de prescription pour les poursuites par voie de déclaration de culpabilité par procédure sommaire est d'au plus cinq ans après que le commissaire a eu connaissance des faits et dix ans après la commission de l'infraction 30.
Le commissaire peut interdire à toute personne reconnue coupable d'une infraction à la LL de faire du lobbying pendant une période maximale de deux ans. Il doit être convaincu que l'interdiction est nécessaire et dans l'intérêt public et il doit également tenir compte de la gravité de l'infraction et de l'existence d'infractions antérieures. Il a par ailleurs le pouvoir de rendre publics des renseignements au sujet de l'auteur d'une infraction à la LL, notamment son nom, la nature de l'infraction, la sanction appliquée et toute interdiction qu'il lui a imposée.
En 1995, la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes a été modifiée et la disposition imposant un code de déontologie pour les lobbyistes et la présentation d'un rapport annuel au Parlement sur l'application du code a été adoptée. Après de vastes consultations auprès de tous les lobbyistes inscrits et de parlementaires, de journalistes et d'universitaires et un examen mené par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, le Code de déontologie des lobbyistes a été publié dans la Gazette du Canada, puis est entré en vigueur le 1er mars 1997 31.
Le Code fixe des normes de conduite applicables à tous les lobbyistes qui communiquent avec des titulaires d'une charge publique au gouvernement fédéral. Il constitue la contrepartie des obligations que les fonctionnaires sont tenus de respecter dans leurs relations avec la population et les lobbyistes. Le Codecommence par un préambule qui énonce son objet et son contexte. Suit une série de principes qui sont assortis de règles précises. Les principes fixent les paramètres fonctionnels du Code et constituent le cadre qui permet de concrétiser ses buts et objectifs, mais ils ne donnent pas lieu à des normes précises. Les règles précisent la conduite à adopter en certaines circonstances. Les obligations ou exigences énoncées dans le Code peuvent être classées selon trois thèmes : transparence, confidentialité et conflits d'intérêts.
Le commissaire au lobbying est chargé de faire enquête sur les infractions possibles au Code et ces enquêtes doivent être confidentielles. En février 2007, l'introduction du Code a été modifiée pour préciser qu'une enquête peut porter sur une violation présumée d'un principe ou d'une règle du Code. Auparavant, le conseiller en éthique estimait que seule l'infraction à une règle pouvait donner lieu à une enquête 32. Lorsqu'il y a enquête officielle, le commissaire doit remettre au Parlement un rapport sur les constatations des enquêteurs, leurs conclusions et les motifs de ces conclusions. À l'instar de la LEL, la LL ne prévoit pas de sanctions pour les infractions au Code. Elle n'explique pas non plus les mesures que doit adopter le Parlement en cas d'infraction au Code. Par ailleurs, aucun délai de prescription ne s'applique aux poursuites pour infraction au Code.
Le 16 octobre 2014, la commissaire au lobbying du Canada de l'époque, Karen E. Shepherd, a publié un Code de déontologie des lobbyistes révisé en même temps qu'un document d'information qui présentait les raisons qui sous-tendent les révisions apportées au Code 33. La commissaire a invité toutes les parties intéressées à faire part de leur point de vue sur le Code révisé lors d'une consultation qui s'est déroulée du 16 octobre 2014 au 19 décembre 2014. Le 21 mai 2015, la commissaire a soumis le Code de déontologie des lobbyistes révisé aux membres du Comité ETHI afin de connaître leur point de vue sur cette nouvelle mouture. Le 7 novembre 2015, la commissaire a publié ses modifications proposées dans la Gazette du Canada. La version actuelle du Code est entrée en vigueur le 1er décembre 2015.
Pour faciliter l'application des règles du Code, le Commissariat au lobbying du Canada a publié des directives sur la manière d'atténuer les conflits d'intérêts en matière d'accès préférentiel (en lien avec les règles 7 et 8 du Code), d'activités politiques (en lien avec la règle 9 du Code) et de cadeaux (en lien avec la règle 10 du Code) 34.
En citant l'enquête Oliphant 35, le site Web du commissariat indique que la commissaire au lobbying considère les principes suivants pour déterminer si un lobbyiste a placé un titulaire d'une charge publique dans un conflit d'intérêts réel ou apparent :
Une personne informée, considérant l'affaire de manière réaliste et pratique et après y avoir attentivement réfléchi, jugerait-elle que l'activité exercée par un lobbyiste a créé un sentiment d'obligation chez un titulaire d'une charge publique, ou une tension entre les intérêts personnels du titulaire d'une charge publique et son devoir de servir l'intérêt public? 36
Fait à noter concernant l'interaction entre lobbying et conflits d'intérêts : le 22 mars 2018, le Commissariat au lobbying du Canada (CAL) et le Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique (CCIE) ont conclu un « Protocole d'entente » dont l'objet est
d'établir un cadre favorisant la collaboration entre le CCIE et le CAL sur les questions d'éducation et de sensibilisation, afin de conseiller les titulaires de charge publique et les lobbyistes relativement aux obligations que leur imposent leurs régimes respectifs, et de faire en sorte que ces questions soient traitées de façon uniforme, claire et précise 37.
Le projet de loi C-15 de 2003 a notamment ajouté à la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes – devenue la Loi sur le lobbying – l'article 14.1, qui prévoit que la Loi doit faire l'objet d'un examen quinquennal :
14.1(1) Est désigné ou constitué un comité du Sénat, de la Chambre des communes ou des deux chambres, chargé spécialement de l'examen, tous les cinq ans suivant l'entrée en vigueur du présent article, des dispositions et de l'application de la présente loi.
(2) Dans un délai d'un an à compter du début de l'examen ou tout délai plus long autorisé par le Sénat, la Chambre des communes ou les deux chambres, selon le cas, le comité remet au Parlement son rapport, accompagné des modifications qu'il recommande.
L'article 14.1 est entré en vigueur le 20 juin 2005 38.
Le 15 décembre 2010, la Chambre des communes a adopté à l'unanimité une motion chargeant le Comité ETHI de procéder à l'examen de la LL à la Chambre des communes 39.
Avant la dissolution de la 40e législature, le Comité ETHI a eu la possibilité d'entendre la commissaire au lobbying du Canada de l'époque, Karen E. Shepherd, à deux occasions : le 14 décembre 2010, en prévision de l'examen de la LL, et le 23 mars 2011, au moment où débutait l'examen officiel. La commissaire a formulé plusieurs recommandations visant à améliorer l'application de la LL.
Lorsqu'elle a témoigné le 14 décembre 2010, la commissaire Shepherd a évoqué les questions que le Comité pourrait envisager d'aborder dans le cadre de l'examen législatif. Elle a attiré l'attention du Comité sur certains aspects susceptibles d'être approfondis, à savoir les mécanismes d'application prévus dans la LL, le champ d'application de la LL et les exigences en matière de divulgation 40.
Dans ses déclarations préliminaires au Comité le 23 mars 2011, la commissaire Shepherd a signalé que le système de lobbying à l'échelle fédérale fonctionnait plutôt bien, mais qu'il était toujours possible de l'améliorer 41.
Dans un document intitulé Mise en œuvre de la Loi sur le lobbying : Observations et recommandations fondées sur l'expérience des cinq dernières années, la commissaire Shepherd avait recommandé les neuf mesures suivantes visant à réformer la LL :
- Recommandation 1 : Les dispositions relatives à la « partie importante des fonctions » devraient être supprimées de la Loi sur le lobbying et il y aurait lieu de considérer un nombre restreint d'exemptions.
- Recommandation 2 : La Loi devrait être modifiée de manière à exiger que les déclarations mensuelles de communication énumèrent les noms de chacun des lobbyistes salariés qui a, en effet, participé à la communication, en plus du nom du cadre le plus haut placé.
- Recommandation 3 : La formule prescrite des communications aux fins des déclarations mensuelles de communication devrait être changée de « orale et organisée » à simplement « orale ».
- Recommandation 4 : La Loi devrait être modifiée de manière à exiger que les lobbyistes divulguent toute communication orale au sujet de questions prescrites avec les TCPD, sans égard à qui l'a initiée.
- Recommandation 5 : La Loi devrait être modifiée de manière à rendre explicite l'exigence selon laquelle les lobbyistes-conseils doivent divulguer le client ultime de la démarche par opposition à la firme qui les embauche.
- Recommandation 6 : Le mandat explicite de sensibilisation et d'éducation devrait être maintenu dans la Loi sur le lobbying afin de soutenir les efforts de sensibilisation de la Commissaire au bien-fondé et aux exigences de la Loi.
- Recommandation 7 : La Loi devrait être modifiée de manière à établir un régime de pénalités administratives pécuniaires administré par la Commissaire au lobbying pour les infractions à la Loi et au Code.
- Recommandation 8 : L'exigence pour la Commissaire de mener les enquêtes en secret devrait être maintenue dans la Loi sur le lobbying.
- Recommandation 9 : Une disposition d'immunité semblable à celle prévue dans les articles 18.1 et 18.2 de la Loi sur le vérificateur général devrait être ajoutée à la Loi sur le lobbying 42.
En mai 2012, le Comité ETHI a présenté à la Chambre des communes un rapport sur son premier examen quinquennal de la Loi sur le lobbying. Le Comité y a fait 11 recommandations de modifications législatives. La réponse du gouvernement au rapport du Comité, présentée à la Chambre en septembre 2012, regroupe les recommandations du Comité en trois catégories : celles que le gouvernement appuie, celles dont le gouvernement reconnaît l'esprit et pour lesquelles il « évaluera différentes approches pour les mettre en œuvre de manière à maximiser leur efficacité tout en minimisant le fardeau administratif » et celles dont le gouvernement prend note et sur le mérite desquelles il continuera de se pencher 43. Le tableau 1, qui suit, présente les recommandations du Comité ETHI selon les regroupements faits par le gouvernement dans sa réponse au rapport. Aucune de ces recommandations n'a mené à une modification législative à ce jour.
Recommandations que le gouvernement appuie | Recommandations dont le gouvernement reconnaît l'esprit | Recommandations dont le gouvernement prend note et sur le mérite desquelles il continuera de se pencher |
---|---|---|
Recommandation 5 : Veiller à ce que les déclarations mensuelles de communication énumèrent les noms de tous les lobbyistes salariés ayant participé à des entretiens oraux organisés [en plus du cadre dirigeant responsable de faire des rapports]. |
Recommandation 1 : Tous les fonctionnaires occupant un poste de directeur général ou d'un niveau supérieur devraient être considérés comme des titulaires de charge publique désignée et être assujettis à toutes les lois applicables. |
Recommandation 2 : Éliminer le critère de « la partie importante des fonctions » pour les lobbyistes salariés. |
Recommandation 9 : Conserver l'interdiction de cinq ans, et confier à une autorité unique l'interprétation et l'administration des restrictions applicables après la cessation d'emploi des titulaires de charge publique. |
Recommandation 3 : Abolir la distinction entre lobbyistes salariés (personnes morales) et lobbyistes salariés (organisations). |
Recommandation 10 : Enchâsser le processus d'examen administratif dans la Loi. |
Recommandation 4 : Exiger des lobbyistes salariés qu'ils fournissent une déclaration au même titre que le premier dirigeant de l'entreprise ou de l'organisation. |
Recommandation 11 : Habiliter la commissaire au lobbying à imposer des sanctions pécuniaires administratives. Envisager d'imposer des interdictions temporaires pour les infractions à la Loi (comme le prévoient les lois provinciales de Terre-Neuve-et-Labrador et du Québec). |
|
Recommandation 6 : Inclure dans les déclarations concernant les lobbyistes salariés les membres de conseils d'administration (directeurs d'entreprises et d'associations), les partenaires et les propriétaires uniques. |
||
Recommandation 7 : Interdire de manière explicite la réception de cadeaux de lobbyistes. |
||
Recommandation 8 : Interdire à une personne ou à une entité de faire du lobbying auprès du gouvernement sur un sujet donné, si la personne ou l'entité fournit à contrat des conseils à un titulaire de charge publique sur le même sujet. |
Source : Tableau préparé par les auteurs à partir des renseignements tirés de Gouvernement du Canada, Réponse du gouvernement aux recommandations du troisième rapport du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique intitulé Examen législatif de la Loi sur le lobbying : les cinq premières années, 17 septembre 2012.
Le deuxième examen quinquennal de la LL qui aurait dû être réalisé en 2017 conformément aux dispositions de la Loi, n'a pas eu lieu cette année-là. Lors d'une comparution devant le Comité ETHI en mai 2018, Nancy Bélanger, qui a été nommée commissaire au lobbying du Canada le 30 décembre 2017, a mentionné ce qui suit : « Nous nous préparons aussi pour l'examen législatif à venir de la [Loi sur le lobbying]. Nous serons prêts à vous rencontrer lorsque cet exercice commencera 44. » Le Rapport annuel 2018-2019 du commissariat au lobbying du Canada, présenté au Parlement le 18 juin 2019, reprend la même idée : « L'examen législatif de la Loi sur le lobbying est prévu. Les recommandations de la commissaire visant à renforcer la Loi continuent d'être élaborées et elle sera prête à les communiquer lorsque le Parlement le lui demandera 45. »
La commissaire Bélanger a comparu devant le Comité ETHI le 9 mars 2020 pour présenter un survol de ses travaux. Elle a affirmé à cette occasion que
la Loi sur le lobbying doit faire l'objet d'un examen législatif depuis 2017. J'ai élaboré un certain nombre de recommandations ciblées pour l'amélioration du cadre fédéral en matière de lobbying. Elles sont fondées sur des valeurs et visent à améliorer la transparence, l'équité, la clarté et l'efficacité. Si la [Loi] est examinée, je suis prête à transmettre un résumé de mes recommandations ou un document plus complet qui détaille le raisonnement sous-jacent à chacune d'elles. 46
La commissaire Bélanger a précisé qu'elle avait formulé 11 recommandations, qui concernent l'enregistrement et la conformité. En ce qui concerne l'enregistrement, elle a exprimé le souhait d'éliminer le seuil lié à « une partie importante des fonctions » en raison des difficultés liées à son application. La commissaire a notamment recommandé que l'enregistrement se fasse par défaut et qu'il soit assorti de critères très précis. Elle a également recommandé d'exiger qu'un organisme s'enregistre après une période de trois mois s'il atteint le seuil prescrit ou s'il demande plus de 10 000 $ en échange de ses services de lobbying 47.
En ce qui concerne les rapports de communication mensuels, la commissaire Bélanger a argué que
la personne qui organise la rencontre ou le fait qu'elle soit organisée à l'avance ne devrait rien changer pour les Canadiens. Mais les conversations qui se déroulent pendant l'heure qui précède un vol devraient être importantes. À mon avis, elles sont importantes. Toute personne qui se trouve dans la salle pendant le lobbying devrait être nommée 48.
Dans le rapport publié en 2001 sur la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes, le Comité de l'industrie concluait son étude en décrivant le système d'enregistrement des lobbyistes comme une « activité en devenir ». Le Comité y faisait remarquer que, de même que notre pensée doit continuer d'évoluer sur des questions comme la transparence et l'accès au gouvernement, le cadre législatif doit demeurer souple et adaptable. Cette observation reste pertinente aujourd'hui. Par ailleurs, l'examen parlementaire de la Loi sur le lobbying, qui devrait désormais avoir lieu tous les cinq ans, pourrait permettre à cette loi de demeurer à jour pendant que notre démocratie parlementaire continue d'évoluer. Cependant, il est à noter que le deuxième examen quinquennal de la Loi n'avait toujours pas eu lieu au moment de la révision de la présente étude.
† Les études générales de la Bibliothèque du Parlement sont des analyses approfondies de questions stratégiques. Elles présentent notamment le contexte historique, des informations à jour et des références, et abordent souvent les questions avant même qu’elles deviennent actuelles. Les études générales sont préparées par le Service d’information et de recherche parlementaires de la Bibliothèque, qui effectue des recherches et fournit des informations et des analyses aux parlementaires ainsi qu’aux comités du Sénat et de la Chambre des communes et aux associations parlementaires, et ce, de façon objective et impartiale. [ Retour au texte ]
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Du consentement unanime, il est ordonné, – que le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique soit le comité désigné aux fins de l'article 14.1 de la Loi sur le lobbying.[ Retour au texte ]
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