Résumé législatif du Projet de loi C-6

Résumé Législatif
PROJET DE LOI C-6 : LOI SUR LA PROCRÉATION ASSISTÉE
Monique Hébert, Division du droit et du gouvernement
Nancy Miller Chenier, Division des affaires politiques et sociales
Sonya Norris, Division des sciences et de la technologie
Publication no 37-3-LS-466-F
PDF 339, (26 Pages) PDF
2004-02-17

TABLE DES MATIÈRES

CONTEXTE

DESCRIPTION ET ANALYSE

A. Déclaration de principes (art. 2)

B. Définitions et application (art. 3 et 4)

C. Actes interdits et activités réglementées (art. 5 à 13)
1. Actes interdits
2. Activités réglementées

D. Renseignements personnels et accès à l’information (art. 14 à 19)

E. Responsabilités du Ministre (art. 20)

F. Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée (art. 21 à 39)

G. Mise en œuvre (art. 40 à 44)

H. Inspection et contrôle d’application (art. 45 à 59)

I. Infractions (art. 60 à 64)

J. Règlements (art. 65 à 67)

K. Accords d’équivalence (art. 68 et 69)

L. Examen parlementaire (art. 70)

M. Disposition transitoire (art. 71)

N. Modifications corrélatives (art. 72 à 77)

O. Entrée en vigueur (art. 78)

COMMENTAIRE

BRÈVE CHRONOLOGIE DES MESURES PRISES PAR LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL


PROJET DE LOI C-6 : LOI SUR LA PROCRÉATION ASSISTÉE*

 

CONTEXTE

Le projet de loi C-6 : Loi concernant la procréation assistée et la recherche connexe, est réputé avoir franchi toutes les étapes du processus législatif à la Chambre des communes le 11 février 2004(1). Il a franchi les étapes de la première et de la deuxième lectures au Sénat les 11 et 13 février 2004 respectivement. Se fondant sur le pouvoir du gouvernement fédéral en matière de droit criminel, cette loi interdira certaines activités et réglementera d’autres activités relatives à la reproduction humaine assistée et à des recherches connexes. Le gouvernement a indiqué que cette loi exhaustive protégera la santé et la sécurité des Canadiens qui ont recours à la procréation assistée (PA), interdira les pratiques inacceptables et réglementera les activités de PA et les recherches connexes.

Depuis 1989, année où le gouvernement fédéral a créé la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction, le Canada tente de définir les contrôles législatifs et réglementaires à mettre en place pour régir la PA. En 1993, la Commission royale a présenté son rapport final, Un virage à prendre en douceur,qui recommandait de procéder immédiatement à la réglementation des activités visées pour protéger les intérêts de tous les Canadiens. En 1995, le ministre de la Santé a annoncé un moratoire volontaire provisoire visant plusieurs activités préoccupantes, notamment le clonage humain et la rémunération des mères porteuses. Le projet de loi C-47 : Loi concernant les techniques de reproduction humaine et les opérations commerciales liées à la reproduction humaine, présenté au Parlement en 1996, aurait interdit certaines activités, mais n’aurait pas établi de mécanisme clair de réglementation d’autres activités pouvant être réalisées dans certaines conditions prescrites. Ce projet de loi est mort au Feuilleton lorsque des élections générales ont été déclenchées en 1997. Une mesure législative semblable (le projet de loi C-56) est elle aussi morte au Feuilleton après avoir été présentée au cours de la 1re session de la 37e législature.

Le 3 mai 2001, le ministre de la Santé a invité le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes à procéder à un examen exhaustif des Propositions relatives au projet de loi régissant l’assistance à la procréation. En décembre 2001, le Comité de la santé a déposé son rapport; parmi les nombreuses mesures recommandées, il était proposé de présenter un projet de loi en priorité. Le projet de loi C-13 : Loi sur la procréation assistée, a été déposé au cours de la 2e session de la 37e législature, mais est mort au Feuilleton à la prorogation du Parlement.

Comme le projet de loi C-13, sa version antérieure, le projet de loi C-6 : Loi sur la procréation assistée (titre abrégé), comprend un bon nombre mais non la totalité des recommandations du Comité de la Santé. Une mesure importante recommandée par le Comité et reprise dans le projet de loi est la création d’un organisme réglementaire chargé de donner les autorisations, d’assurer une surveillance et d’appliquer la Loi. Cette loi interdira une série d’activités que beaucoup de Canadiens considèrent contraires à la dignité humaine ou aux valeurs sociétales et en permettrait d’autres, sous réserve de la supervision et de la réglementation du gouvernement.

DESCRIPTION ET ANALYSE

A. Déclaration de principes (art. 2)

L’article 2 du projet de loi énonce six principes qui s’appliquent à la réglementation de la Loi concernant la procréation assistée :

  • la santé et le bien-être des enfants issus des techniques de procréation assistée doivent prévaloir dans les décisions concernant l’usage de celles-ci;
  • la prise de mesures visant à la protection et à la promotion de la santé, de la sécurité, de la dignité et des droits des êtres humains constitue le moyen le plus efficace de garantir les avantages que présentent pour les individus, les familles et la société en général les technologies de procréation assistée et la recherche dans ce domaine;
  • si ces techniques concernent l’ensemble de notre société, elles visent davantage les femmes que les hommes, et la santé et le bien-être des femmes doivent être protégés lors de l’application de ces techniques;
  • il faut encourager et mettre en pratique le principe selon lequel l’utilisation de ces techniques est subordonnée au consentement libre et éclairé de la personne qui y a recours;
  • les personnes qui cherchent à avoir recours aux techniques de procréation assistée ne doivent pas faire l’objet de discrimination fondée sur leur orientation sexuelle ou leur statut matrimonial;
  • la commercialisation des fonctions reproductives de la femme et de l’homme ainsi que l’exploitation des femmes, des hommes et des enfants à des fins commerciales soulèvent des questions de santé et d’éthique qui en justifient l’interdiction;
  • il importe de préserver et de protéger l’individualité et la diversité humaines et l’intégrité du génome humain.

Étant énoncés dans le corps du projet de loi et non pas simplement dans un préambule, ces principes ont une force légale plus grande.

B. Définitions et application (art. 3 et 4)

L’article 3 contient la plupart des définitions applicables au projet de loi. Il définit des termes essentiels comme « donneur », « embryon », « fœtus » et « embryon in vitro », et plusieurs termes scientifiques comme « chimère », « génome », « clone humain » et « hybride ». Ces définitions précises sont importantes pour mieux comprendre de nombreux articles du projet de loi, surtout en ce qui concerne les actes « interdits » et les activités « réglementées ».

L’article 4 indique que la Loi lie le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

C. Actes interdits et activités réglementées (art. 5 à 13)

Le projet de loi crée deux grandes catégories d’activités :

  • les « actes interdits », qui ne doivent pas être accomplis, quelles que soient les circonstances;
  • les « activités réglementées », qui ne peuvent être exercées que conformément à la Loi et au règlement.

1. Actes interdits

L’article 5 énumère la plupart des actes qu’interdit spécifiquement la nouvelle Loi. Les autres actes interdits (notamment ceux qui portent sur la maternité de substitution, l’achat et la vente de gamètes et d’embryons humains, l’utilisation de matériel humain sans autorisation et l’acquisition de gamètes de mineurs) sont visés aux articles 6 à 9.

L’article 5 interdit les actes suivants :

  • créer un clone humain pour la reproduction ou à des fins thérapeutiques (al. 5(1)a));
  • créer un embryon in vitro à des fins autres que la création d’un être humain ou que l’apprentissage ou l’amélioration des techniques de procréation assistée (al. 5(1)b));
  • créer un embryon à partir de tout ou partie d’une cellule prélevée sur un embryon ou un fœtus dans l’intention de créer un être humain ou encore le transplanter dans un être humain (al. 5(1)c));
  • conserver un embryon en dehors du corps d’une personne de sexe féminin pendant plus de 14 jours, compte non tenu de toute période au cours de laquelle son développement est suspendu (al. 5(1)d));
  • choisir le sexe de l’embryon sauf pour prévenir, diagnostiquer ou traiter des maladies ou des anomalies liées au sexe (al. 5(1)e));
  • modifier la lignée germinale, c’est-à-dire modifier le génome d’une cellule d’un être humain ou d’un embryon in vitro de manière à rendre la modification transmissible aux descendants (al. 5(1)f));
  • transplanter l’ovule, le spermatozoïde, l’embryon ou le fœtus d’une autre forme de vie dans un être humain (al. 5(1)g));
  • utiliser du matériel reproductif humain ou un embryon in vitro qui est ou a été transplanté dans un individu d’une autre forme de vie avec l’intention de créer un être humain (al. 5(1)h));
  • créer une chimère(2) ou la transplanter dans un être humain ou dans un individu d’une autre forme de vie (al. 5(1)i));
  • créer un hybride(3) en vue de la reproduction ou transplanter un hybride dans un être humain ou dans un individu d’une autre forme de vie (al. 5(1)j)).

Les paragraphes 5(2) et (3) interdisent d’offrir d’accomplir un de ces actes interdits ou de faire de la publicité à son égard et de rétribuer ou d’offrir de rétribuer une personne pour qu’elle l’accomplisse.

Le paragraphe 6(1) interdit de rétribuer une personne de sexe féminin pour qu’elle agisse à titre de mère porteuse, d’offrir de verser la rétribution ou de faire de la publicité pour le versement d’une telle rétribution. Le paragraphe 6(2) interdit d’accepter d’être rétribué pour obtenir les services d’une mère porteuse, d’offrir d’obtenir ces services moyennant rétribution ou de faire de la publicité pour offrir d’obtenir de tels services. Le paragraphe 6(3) interdit de rétribuer une personne à titre d’intermédiaire pour qu’elle obtienne les services d’une mère porteuse, d’offrir de verser cette rétribution ou de faire de la publicité pour le versement d’une telle rétribution. Le paragraphe 6(4) dispose que nul ne peut induire une personne de sexe féminin à devenir mère porteuse ni lui conseiller de le devenir s’il a des motifs de croire qu’elle a moins de 21 ans. Nul ne peut non plus pratiquer un acte médical pour aider une telle personne à devenir mère porteuse. Le paragraphe 6(5) dispose que l’article 6 ne porte pas atteinte à la validité, en vertu du droit provincial, de toute entente aux termes de laquelle une personne accepte d’être mère porteuse.

Le paragraphe 7(1) interdit d’acheter ou d’offrir d’acheter des ovules ou des spermatozoïdes, ou de faire de la publicité pour un tel achat. Le paragraphe 7(2) interdit non seulement d’acheter ou d’offrir d’acheter un embryon in vitro ou de faire de la publicité pour un tel achat, mais encore de vendre ou d’offrir de vendre un embryon in vitro ou de faire de la publicité pour une telle vente. Le paragraphe 7(3) élargit l’interdiction et interdit d’acheter ou d’offrir d’acheter des cellules humaines ou des gènes humains, ou de faire de la publicité pour un tel achat, avec l’intention de les utiliser pour la création d’un être humain. Enfin, le paragraphe 7(4) indique qu’est assimilé au fait d’acheter ou de vendre le fait d’acquérir ou de disposer en échange de biens ou services.

L’article 8 prévoit que consentement écrit du donneur est nécessaire pour l’emploi de matériel reproductif humain ou d’embryons in vitro. Les règlements établiront la forme et la nature du consentement. Plus précisément, le paragraphe 8(1) interdit d’utiliser du matériel reproductif humain dans le but de créer un embryon sans le consentement écrit du donneur. Le paragraphe 8(2) interdit de prélever du matériel reproductif humain sur un donneur après sa mort dans le but de créer un embryon sans le consentement écrit du donneur. Le paragraphe 8(3) interdit d’utiliser un embryon in vitro sans le consentement écrit du donneur.

Enfin, l’article 9 dispose que nul ne peut obtenir l’ovule ou le spermatozoïde d’une personne de moins de 18 ans ni utiliser un tel ovule ou spermatozoïde, sauf pour le conserver ou pour créer un être humain qui sera élevé par cette personne.

2. Activités réglementées

Les articles 10 à 12 interdisent à quiconque d’accomplir une « activité réglementée » à moins que cette activité ne soit permise par une autorisation et exercée en conformité avec les règlements. Les activités réglementées sont les suivantes :

  • modifier, manipuler ou traiter du matériel reproductif humain dans le but de créer un embryon (par. 10(1));
  • modifier, manipuler, traiter ou utiliser un embryon in vitro (par. 10(2));
  • obtenir, conserver, céder, éliminer, importer ou exporter soit tout ou partie d’un ovule ou d’un spermatozoïde dans le but de créer un embryon, soit un embryon in vitro dans n’importe quel but (par. 10(3));
  • combiner une partie ou une proportion du génome humain prévues par règlement avec une partie du génome d’une espèce prévue par règlement (par. 11);
  • rembourser les frais supportés a) par un donneur pour le don d’un ovule ou d’un spermatozoïde, b) par quiconque pour l’entretien ou le transport d’un embryon in vitro, ou c) par une mère porteuse pour agir à ce titre, et il est interdit de rembourser ces frais s’ils ne font pas l’objet d’un reçu (par. 12(1) et (2)). Les mères porteuses, toutefois, ne peuvent être remboursées de leurs pertes de revenus à moins a) qu’un médecin qualifié ne certifie par écrit que le fait pour la mère porteuse de continuer à travailler pourrait présenter un risque pour sa santé; et b) que le remboursement ne soit effectué en conformité avec les règlements et une autorisation (par. 12(3)).

De plus, l’article 13 interdit d’exercer une activité réglementée dans un établissement donné, qui n’est pas visé par une autorisation pour l’exercice de cette activité.

D. Renseignements personnels et accès à l’information (art. 14 à 19)

Ces articles portent principalement sur la collecte de renseignements sur la santé et leur conservation dans un registre de renseignements médicaux personnels. Les renseignements médicaux, définis à l’article 2, portent sur l’identité, les caractéristiques personnelles, l’information génétique et les antécédents médicaux de trois catégories de personnes : les donneurs de matériel reproductif humain ou d’embryons in vitro, les personnes qui ont eu recours à une technique de procréation assistée et les personnes qui sont issues d’une telle technique. Les renseignements médicaux portent également sur la garde du matériel reproductif humain ou de l’embryon in vitro donnés ainsi que sur l’utilisation qui en est faite.

Les articles 14 à 16 énoncent les exigences des autorisations en matière de renseignements médicaux. Le paragraphe 14(1) dispose qu’il est interdit au titulaire d’une autorisation d’accepter un don ou d’exercer une activité réglementée sans avoir au préalable les renseignements médicaux prévus par règlement. L’alinéa 14(2)a) dispose que le titulaire d’une autorisation est tenu d’informer par écrit les personnes concernées des exigences relatives à la conservation, à l’utilisation, à la fourniture et à la destruction du matériel ou de l’embryon in vitro et à la rétention, à l’utilisation, à la communication et à la destruction des renseignements médicaux avant d’accepter un don ou des renseignements médicaux. Les alinéas 14(2)b) et c) exigent que le titulaire d’une autorisation mette à la disposition des personnes concernées des services professionnels de consultation dans la mesure prévue par le règlement, s’assure que ces personnes reçoivent lesdits services et obtienne le consentement écrit des personnes concernées en ce qui touche le traitement du matériel reproductif, des embryons et des renseignements médicaux. Conformément aux règlements, le titulaire d’une autorisation est également tenu de fournir aux personnes concernées les renseignements que l’Agence met à la disposition du public en vertu de l’alinéa 19i) en ce qui concerne les résultats globaux des techniques de procréation assistée obtenus par les titulaires d’autorisation (al. 14(2)d)).

Les articles 15 et 16 établissent les circonstances dans lesquelles des renseignements médicaux peuvent ou doivent être communiqués, y compris l’obligation au paragraphe 15(3) d’informer l’Agence de tous les transferts d’embryons à un autre titulaire, en conformité avec les règlements. L’article 16 établit en plus les circonstances dans lesquelles de telles informations peuvent ou doivent être détruites.

L’article 17 dispose que l’Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée, créée en vertu de l’article 21, tiendra un registre où figurent les renseignements médicaux prévus par la Loi.

En vertu du paragraphe 18(1), l’Agence peut utiliser les renseignements médicaux ainsi que les autres renseignements relatifs aux activités réglementées pour la mise en oeuvre et le contrôle d’application de la Loi ou pour la détermination des risques pour la santé et la sécurité, des violations possibles ou réelles des droits de la personne ou des problèmes d’éthique relatifs à la procréation assistée. Les paragraphes 18(2) à (8) énoncent les circonstances dans lesquelles l’Agence peut ou doit communiquer des renseignements médicaux sous sa garde et les conditions de la communication. En règle générale, les renseignements médicaux sur un donneur doivent demeurer confidentiels et ne peuvent être communiqués qu’avec le consentement écrit de l’intéressé (18(2)). Cependant, cette règle est assortie d’exemptions telles que les suivantes :

  • l’Agence doit communiquer, sur demande, les renseignements médicaux sur le donneur aux personnes ayant recours à une technique de procréation assistée ainsi qu’aux personnes qui sont issues d’une telle technique et à leurs descendants, mais la communication de l’identité du donneur ou de renseignements susceptibles de servir à l’identifier ne peut être faite qu’avec son consentement écrit (par. 18(3));
  • l’Agence doit fournir les renseignements sur le lien de parenté qui existe entre deux personnes qui ont lieu de croire qu’elles sont génétiquement parentes à l’issue d’une procréation assistée, si elles demandent de tels renseignements par écrit (par. 18(4));
  • l’Agence doit communiquer les renseignements médicaux pour se conformer à des exigences d’ordre judiciaire ou dans la mesure où l’exige une disposition d’un texte législatif fédéral ou provincial portant sur la santé et la sécurité mentionné dans les règlements (par. 18(5));
  • l’Agence peut communiquer l’identité d’un donneur à un médecin pour contrer toute risque pour la santé et la sécurité d’une personne ayant eu recours à une technique de procréation assistée ou d’une personne issue d’une telle technique ou d’un descendant de celle-ci (par. 18(7));
  • l’Agence peut communiquer des renseignements médicaux – sauf l’identité d’une personne ou des renseignements susceptibles de servir à identifier une personne – à des fins de recherche scientifique ou statistique (par. 18(8)).

L’article 19 indique la nature des renseignements que l’Agence est tenue de mettre à la disposition du public. Il s’agit des renseignements réglementaires qui peuvent comprendre des informations concernant la Loi, l’Agence, les instructions impératives données par le Ministre, les activités relatives aux autorisations, les résultats compilés de techniques de procréation assistée, des mesures destinées à prévenir ou à limiter les menaces pour la santé ou la sécurité des personnes découlant des activités réglementées, des accords d’application, des accords d’équivalence, et des rapports et documents de contrôle et d’évaluation des progrès pertinents. Les modalités et la manière dont les renseignements doivent être mis à la disposition du public seront établies par règlement.

E. Responsabilités du Ministre (art. 20)

Le Ministre est responsable de la politique du gouvernement du Canada en matière de procréation assistée et de toute autre question reliée à la Loi, ainsi que de l’Agence.

F. Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée (art. 21 à 39)

L’article 21 porte création de l’Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée (l’Agence), dotée de la personnalité morale et assujettie à la Loi sur les langues officielles, dont le siège social est situé au Canada en un lieu désigné par le gouverneur en conseil. Les objectifs de l’Agence, énoncés à l’article 22, consistent à :

  • à protéger et à promouvoir la santé et la sécurité ainsi que la dignité humaine et les droits de la personne au Canada;
  • à promouvoir l’application de principes d’éthique.

En vertu de l’article 23, l’Agence est tenue d’exercer ses pouvoirs d’une manière compatible avec les principes établis dans la déclaration de l’article 2.

Le paragraphe 24(1) énonce les pouvoirs de l’Agence, à savoir :

  • exercer des pouvoirs relatifs aux autorisations;
  • conseiller le Ministre;
  • surveiller et analyser l’évolution du dossier de la procréation assistée au Canada et à l’étranger;
  • consulter des personnes ou des organisations;
  • obtenir, analyser et gérer les renseignements médicaux prévus par la Loi;
  • informer le public et les milieux professionnels sur la procréation assistée et toute autre question prévue par la présente loi – ainsi que sur leur réglementation dans le cadre de la présente loi – et sur les facteurs de risque liés à l’infertilité;
  • désigner des inspecteurs et des analystes;
  • exercer toutes autres attributions qui sont nécessaires à la réalisation de sa mission.

En vertu du paragraphe 24(2), à la demande du Ministre, l’Agence fournit à ce dernier des conseils en matière de procréation assistée, des renseignements médicaux autres que l’identité d’une personne, et des renseignements généraux sur son administration et sa gestion. En vertu de l’article 25, le Ministre peut donner à l’Agence des instructions impératives en matière d’orientation en ce qui concerne l’exercice de ses pouvoirs; ces instructions, auxquelles l’Agence doit se conformer, n’ont pas d’effet sur les questions relatives à des personnes déterminées dont l’Agence est déjà saisie.

Les articles 26 à 32 portent sur les critères de nomination, les mandats, la composition, la rémunération et les responsabilités du conseil d’administration de l’Agence. Le conseil est composé d’au plus 13 membres, dont le président du conseil et le président-directeur-général. Les administrateurs doivent, dans la mesure du possible, représenter une variété de milieux et de disciplines. Sauf pour le président du conseil et le président-directeur général, ils sont nommés pour un mandat d’au plus trois ans (art. 26). Le conseil d’administration tient un minimum de deux réunions par an (art. 27). Le sous-ministre de la Santé, ou son substitut, et la personne choisie, en leur sein, par les sous-ministres des ministères responsables de la santé dans les provinces et territoires, ou le substitut de cette personne choisi par eux, peuvent assister aux réunions du conseil d’administration et participer aux délibérations (art. 28).

L’article 30 charge le conseil d’administration d’assurer la direction générale de l’Agence et notamment de fournir des conseils au Ministre, d’approuver les objectifs et les politiques opérationnelles et le budget et d’évaluer le rendement de l’Agence. L’article 32 précise quels pouvoirs (du conseil d’administration ou de l’Agence) peuvent être délégués au président-directeur général ou à l’un des comités de l’Agence, de même que ceux qui ne peuvent pas l’être.

En vertu de l’article 33, le conseil d’administration peut constituer des groupes consultatifs composés de ses membres et d’autres personnes et chargés d’étudier toute question qu’il leur soumet et de présenter un rapport et des recommandations à cet égard.

Le président du conseil et le président-directeur-général de l’Agence sont nommés par le gouverneur en conseil, le premier pour un mandat renouvelable d’au plus trois ans, le second pour un mandat renouvelable d’au plus cinq ans (art. 34 et 36).

G. Mise en œuvre (art. 40 à 44)

Le paragraphe 40(1) donne à l’Agence la responsabilité de délivrer des autorisations concernant les activités réglementées. Ce pouvoir doit être exercé conformément aux règlements. Le paragraphe 40(2) précise que les autorisations visant l’utilisation d’embryons in vitro à des fins de recherche ne peuvent être délivrées que si l’Agence est convaincue que cette utilisation est nécessaire pour la recherche en cause. Toutefois, l’Agence ne peut délivrer d’autorisation visant la recherche sur des embryons in vitro à moins qu’elle ne soit convaincue que l’utilisation de ces embryons soit nécessaire pour la recherche en cause (par. 40(2)). Elle ne peut non plus délivrer d’autorisation visant la recherche sur des cellules souches embryonnaires à moins d’avoir reçu le consentement écrit des donneurs originaux de gamètes et du donneur de l’embryon, conformément au document intitulé Recherche sur les cellules souches pluripotentes humaines : Lignes directrices, publié par les Instituts de recherche en santé du Canada en mars 2002, comme il est précisé par règlement (par. 40(3.2)). Le paragraphe 40(3) traite de la délivrance des autorisations pour des essais cliniques tandis que le paragraphe 40(4) précise que chaque autorisation doit porter le nom de la personne désignée comme responsable d’assurer l’observation de la Loi. Aux termes du paragraphe 40(5), l’Agence peut délivrer une autorisation au propriétaire ou à l’exploitant d’un établissement qui sera utilisé pour la réalisation d’une activité réglementée par un autre titulaire d’une autorisation. Enfin, le paragraphe 40(6) permet à l’Agence d’assortir toute autorisation de conditions, soit au moment de la délivrance des autorisations, soit par la suite, alors que le paragraphe 40(7) n’autorise pas le recouvrement des coûts de délivrance d’autorisations.

Les articles 41 et 42 permettent la modification, le renouvellement, la suspension et la révocation des autorisations, conformément aux règlements. L’article 43 dispose que l’Agence, dans l’exercice de ses pouvoirs de délivrance des autorisations, peut prendre en compte les renseignements et les observations qui lui sont fournis par quiconque et demander conseil à des experts. L’Agence doit communiquer ces renseignements et ces observations sur demande à moins que cela ne pose un risque pour la santé ou la sécurité d’une personne. Cependant, les renseignements qui servent à identifier les donneurs, les personnes ayant eu recours à une technique de procréation assistée ou les personnes qui sont issues d’une telle technique ne peuvent être communiqués, sauf au demandeur ou au titulaire d’une autorisation s’il est établi qu’ils en ont besoin pour appuyer leur demande. Les personnes qui fournissent de bonne foi des renseignements à l’Agence relativement à une demande d’autorisation bénéficient de l’immunité, au civil comme au pénal, en ce qui a trait aux renseignements fournis.

Le paragraphe 44(1) accorde à l’Agence le pouvoir de prendre les mesures raisonnables pour prévenir ou limiter la menace que l’exercice d’une activité réglementée constitue ou est susceptible de constituer pour la santé et la sécurité humaines. Ainsi, l’Agence peut autoriser l’inspecteur à prendre la direction de l’établissement en question, et les frais engagés par l’inspecteur sont à la charge du titulaire de l’autorisation (par. 44(2) et 44(3)). Aux termes du paragraphe 44(4), la personne qui agit dans le cadre de cet article n’encourt, jusqu’à preuve de mauvaise foi, aucune responsabilité personnelle pour les actes qui en découlent.

H. Inspection et contrôle d’application (art. 45 à 59)

L’article 45 contient les définitions des termes « document » et « matériel » qui s’appliquent à cette partie du projet de loi (inspection et contrôle d’application) de même qu’aux pouvoirs de réglementation énoncés à l’article 65.

L’article 46 autorise l’Agence à désigner des inspecteurs pour l’application de la Loi. Les inspecteurs doivent obligatoirement être des fonctionnaires fédéraux, provinciaux ou territoriaux(4) ou des personnes ayant les qualifications précisées par règlement.

L’article 47 énumère les divers pouvoirs des inspecteurs. L’article 48 traite des mandats nécessaires pour la visite des habitations; l’article 49 porte sur les fausses déclarations et l’entrave à l’action de l’inspecteur; l’article 50 traite de la saisie, de l’entreposage et du transfert du matériel ou de documents. Aux termes du paragraphe 51(1), le saisi peut, dans les 60 jours, demander la restitution du matériel ou des documents saisis, et un juge de la cour provinciale peut rendre une ordonnance de restitution immédiate ou différée conformément aux critères énoncés aux paragraphes 51(2) et 51(3). L’article 52 énonce les cas où le matériel et les documents saisis sont confisqués au profit de la Couronne et précise qu’il incombe à l’Agence d’ordonner les modalités de la disposition. À cet égard, aux termes de l’article 54, l’Agence doit faire des efforts utiles pour préserver les spermatozoïdes, les ovules et les embryons in vitro viables qui sont saisis. Leur disposition ne peut se faire :

  • qu’après avoir obtenu le consentement du donneur, dans le cas du matériel reproductif humain, ou celui du responsable, au sens des règlements, dans tous les autres cas;
  • qu’en observant les modalités prévues par règlement, si l’Agence n’est pas en mesure d’identifier ou de joindre le donneur ou le responsable.

Si le donneur ou le responsable ne donnent pas leur consentement, l’Agence peut, aux termes du paragraphe 54(3), leur remettre le matériel ou en disposer selon les modalités réglementaires.

Les articles 55 à 57 traitent de la désignation et du rôle des analystes ainsi que de l’utilisation du certificat de l’analyste dans les poursuites criminelles.

Aux termes de l’article 58, l’Agence peut, pour le contrôle d’application de la Loi, conclure des accords avec tout ministère ou organisme fédéral, provincial ou territorial ou avec les organismes chargés de faire respecter la Loi. L’article 59 autorise l’Agence à fournir de l’aide pour les enquêtes et les poursuites relatives à toute infraction à la Loi.

I. Infractions (art. 60 à 64)

Aux termes de l’article 60, quiconque contrevient aux articles 5 à 9 (actes interdits) commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, une amende maximale de 500 000 $ et un emprisonnement maximal de dix ans, ou l’une de ces peines. Le contrevenant reconnu coupable par procédure sommaire encourt une amende maximale de 250 000 $ et un emprisonnement maximal de quatre ans, ou l’une de ces peines.

L’article 61 dispose que quiconque contrevient aux autres dispositions de la Loi, aux règlements ou aux conditions d’une autorisation commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité, par mise en accusation, une amende maximale de 250 000 $ et un emprisonnement maximal de cinq ans, ou l’une de ces peines. Le contrevenant reconnu coupable par procédure sommaire encourt une amende maximale 100 000 $ et un emprisonnement maximal de deux ans, ou l’une de ces peines.

L’article 62 accorde au tribunal qui prononce la sentence le pouvoir d’ordonner la confiscation et la disposition de tout matériel ou de tous documents liés à l’infraction. De plus, à la demande du procureur général du Canada, le tribunal qui prononce la sentence peut interdire au contrevenant tout acte qui pourrait entraîner la perpétration d’une infraction à la Loi.

Il est nécessaire d’obtenir le consentement du procureur général du Canada avant d’engager des poursuites pour infraction à la Loi (art. 63).

Aux termes de l’article 64, l’Agence peut porter à la connaissance des « parties intéressées » – y compris les ordres professionnels ou les organismes disciplinaires constitués sous le régime d’une loi fédérale, provinciale ou territoriale – l’identité des personnes inculpées d’infraction à la Loi ou à propos desquelles il existe des motifs raisonnables de croire qu’elles ont violé un code de déontologie.

J. Règlements (art. 65 à 67)

L’article 65 fait état des pouvoirs en matière de réglementation du gouverneur en conseil. Des règlements peuvent être pris relativement à 26 points distincts, dont la plupart sont complémentaires à des dispositions précises de la Loi. Notamment, le gouverneur en conseil peut prendre des règlements :

  • définissant « donneur » pour ce qui est d’un embryon in vitro (alinéa 65(1)a));
  • concernant le consentement requis pour l’utilisation du matériel reproductif humain ou d’un embryon in vitro, ou le prélèvement de matériel reproductif humain au titre de l’article 8 (c.‑à-d. utiliser du matériel reproductif humain dans le but de créer un embryon ou utiliser un embryon in vitro à quelque fin que ce soit) (al. 65(1)b));
  • désignant les activités réglementées ou catégories d’activités réglementées qui peuvent faire l’objet d’une autorisation aux termes des articles 10 et 11 (c.-à-d. modifier, manipuler ou traiter du matériel reproductif humain dans le but de créer un embryon; modifier, manipuler, traiter ou utiliser un embryon in vitro; conserver, céder, importer, etc. un embryon in vitro à quelque fin que ce soit, ou des spermatozoïdes ou des ovules humains dans le but de créer un embryon; ou combiner une partie du génome humain avec une partie du génome d’une autre espèce) (al. 65(1)c));
  • concernant les frais raisonnables qui peuvent faire l’objet d’un remboursement dans le cadre de l’article 12(1) (c.-à-d. aux donneurs de spermatozoïdes et d’ovules) (al. 65(1)e));
  • concernant les pertes de revenus qui peuvent être remboursées aux mères porteuses en vertu du paragraphe 12(3) (al. 65(1)e.1))
  • concernant le nombre d’enfants qui peuvent être créés à partir des gamètes d’un donneur au moyen d’une technique de procréation assistée (al. 65(1)g));
  • concernant les conditions applicables aux autorisations (al. 65(1)h));
  • concernant la délivrance d’autorisations pour les essais cliniques touchant une activité réglementée visés au paragraphe 40(3), la façon de procéder à ces essais et les questions connexes liées au consentement (al. 65(1)i));
  • concernant la délivrance, la modification, le renouvellement, la suspension, le rétablissement et la révocation des autorisations (al. 65(1)k));
  • concernant la collecte, l’utilisation et la communication des renseignements médicaux (al. 65(1)o));
  • concernant les services de consultation reçus dans le cadre de l’alinéa 14(2)b) relativement au don de matériel reproductif humain ou d’un embryon in vitro ou à la communication de renseignements médicaux (al. 65(1)p));
  • précisant l’avis qui doit être donné à l’Agence lorsque le titulaire d’une autorisation transfère un embryon in vitro à un autre titulaire (al. 65(1)s.1));
  • concernant la destruction, par les titulaires d’une autorisation, de renseignements médicaux, de matériel reproductif humain ou d’embryons in vitro dans le cadre des paragraphes 16(2) ou 16(3) (al. 65(1)t));
  • précisant les renseignements qui doivent être mis à la disposition du public dans le cadre de l’article 19 et les modalités afférentes (al. 65(1)v));
  • précisant la façon dont l’Agence doit disposer du matériel reproductif humain, de tout ou partie d’embryons in vitro ou de fœtus pour l’application des paragraphes 54(2) ou 54(3) (al. 65(1)z));
  • fixant une date d’expiration relativement aux activités réglementées maintenues en vertu d’une clause d’antériorité qui peuvent être exercées sans une autorisation, aux termes de l’article 71 (al. 65(1)aa));
  • exemptant des activités réglementées ou des catégories d’activités réglementées de l’application de la Loi, sous réserve des conditions fixées (al. 65(1)bb)).

Conformément aux paragraphes 65(2) à 65(4), les règlements peuvent incorporer tout document par renvoi, y compris toute modification qui y est apportée; cependant, l’incorporation par renvoi d’un document dans un règlement ne lui confère pas pour autant, pour l’application de la Loi sur les textes réglementaires, valeur de règlement. De plus, toute modification apportée dans une seule langue officielle au document incorporé par renvoi – avec ses modifications successives – dans les deux langues officielles ne peut être incorporée tant qu’elle n’est pas apportée dans l’autre langue.

L’article 66 traite de l’étude des règlements faite par le Parlement. Sous réserve des exceptions mentionnées à l’article 67, le Ministre doit, aux termes de l’article 66, déposer tout projet de règlement devant les deux chambres du Parlement. Le projet doit être renvoyé au comité compétent de chaque chambre, qui dans le cas de la Chambre des communes, est le Comité permanent de la santé (ou, à défaut, le comité compétent de la Chambre). Une fois déposé devant le Parlement, le règlement ne peut être pris avant le premier en date des jours suivants :

  • le trentième jour de séance suivant le dépôt;
  • le cent soixantième jour civil suivant le dépôt;
  • le lendemain du jour où le comité de chaque chambre a présenté son rapport.

Le Ministre doit tenir compte de tout rapport présenté par un comité. S’il n’est pas donné suite à l’une ou l’autre des recommandations que contient un rapport, le Ministre dépose à la chambre d’où provient le rapport une déclaration motivée à cet égard. Il n’est pas nécessaire de déposer de nouveau le projet de règlement devant le Parlement, même s’il a subi des modifications.

Cependant, aux termes de l’article 67, l’obligation de dépôt devant le Parlement ne s’applique pas si le Ministre estime que le projet de règlement n’apporte pas de modification de fond notable à des règlements existants ou que la prise du règlement doit se faire sans délai en vue de protéger la santé ou la sécurité humaines. Dans ces cas, le Ministre doit déposer devant les deux chambres du Parlement une déclaration énonçant les motifs sur lesquels il se fonde.

K. Accords d’équivalence (art. 68 et 69)

Aux termes des articles 68 et 69, les provinces et les territoires peuvent adopter leurs propres lois et règlements concernant la reproduction humaine assistée pour autant que ceux-ci sont équivalents aux dispositions précisées de la Loi. Cependant, des accords d’équivalence ne peuvent être conclus relativement aux actes interdits visés par les articles 5 à 9 (contrairement aux activités réglementées visées par les art. 10 à 13).

Plus précisément, selon l’article 68, le gouverneur en conseil peut déclarer que certains articles de la Loi ne s’appliquent pas dans une province ou un territoire si le Ministre et le gouvernement provincial ou territorial conviennent par écrit qu’il existe des lois équivalentes dans la province ou le territoire en question. La durée de l’accord ne peut dépasser cinq ans, mais celui-ci peut être renouvelé. Cependant, l’Agence peut toujours prendre des mesures pour prévenir ou limiter la menace que l’exercice d’une activité réglementée constitue pour la santé et la sécurité humaines. En outre, même si des accords de ce genre sont en place, toute personne exerçant une activité qui, sous le régime de la Loi fédérale, constituerait une activité réglementée, doit se conformer aux exigences concernant les renseignements médicaux énoncées dans les dispositions législatives fédérales. Enfin, aux termes de l’article 69, chacune des parties à l’accord peut y mettre fin en donnant à l’autre un préavis écrit de six mois.

L. Examen parlementaire (art. 70)

L’article 70 prévoit qu’un examen parlementaire de la Loi sera effectué par un comité soit de la Chambre des communes, soit du Sénat, soit mixte, désigné ou constitué spécialement à cette fin. L’examen doit se faire dans les trois ans suivant l’entrée en vigueur de l’article 21 (la constitution de l’Agence) et le rapport produit doit être présenté dans un délai d’un an suivant le début de l’examen, ou dans un délai plus long qui aura été autorisé.

M. Disposition transitoire (art. 71)

L’article 71 exempte des exigences relatives à l’obtention d’une autorisation la personne qui exerce une activité réglementée au moins une fois au cours de l’année précédant l’entrée en vigueur des dispositions relatives aux activités réglementées dans le cadre des articles 10 à 13. Les activités ainsi maintenues en vertu d’une clause d’antériorité peuvent être exercées par la suite jusqu’à la date fixée par règlement.

N. Modifications corrélatives (art. 72 à 77)

Aux termes de ces articles du projet de loi, des changements doivent être apportés à plusieurs lois fédérales existantes comme conséquence de l’adoption et de l’entrée en vigueur de la Loi.

O. Entrée en vigueur (art. 78)

L’article 78 prévoit que les dispositions du projet de loi entrent en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret par le gouverneur en conseil.

COMMENTAIRE

Le gouvernement fédéral a présenté aux Canadiens une loi exhaustive qui contient des interdictions et des mesures de contrôle réglementaires concernant les activités relatives à la reproduction humaine assistée et la recherche connexe. Comme le montre la chronologie ci‑dessous, le gouvernement fédéral travaille depuis une dizaine d’années à l’adoption d’une loi à ce sujet.

En déposant le projet de loi C-56 (un prédécesseur du projet de loi C-6) à la 1re session de la 37e législature, la ministre de la Santé a remercié le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes pour le rôle qu’il a joué en consultant la population et en examinant à fond l’avant-projet de loi. Dans la réponse à la question portant sur les différences entre le projet de loi et les recommandations faites par le Comité permanent, il a été noté que « l’essentiel » des recommandations avait été incorporé([5]). La réponse se lit ensuite comme suit : « Ce n’est que pour des raisons majeures – considérations liées à la Charte, importants problèmes d’exercice des pouvoirs, réalités opérationnelles et nécessité de ne pas compromettre la disponibilité des services de procréation assistée – que certaines des recommandations du Comité permanent n’ont pas été incorporées. »

Au cours des jours qui ont suivi le dépôt du projet de loi C-56, les réactions des médias étaient mixtes. Dans un article, l’auteur vantait les efforts déployés par le gouvernement afin de maintenir l’équilibre « entre, d’une part, les progrès incessants de la science et, d’autre part, la dignité inhérente de la vie humaine »(6). Un autre journaliste a fait remarquer que, tandis que l’aspect éthique de l’utilisation d’embryons in vitro « excédentaires » pour la recherche sur les cellules souches était un sujet brûlant, le débat avait aussi « attiré une attention souhaitée sur les problèmes de fertilité de milliers de Canadiens »(7). Un autre encore a fait valoir que, en continuant d’autoriser les dons anonymes, la loi maintenait l’erreur commise dans de nombreuses lois provinciales concernant l’adoption et laissait les enfants issus de cette technique aux prises avec « un sentiment aigu d’absence de liens » similaire à celui éprouvé par les enfants adoptés(8).

Après avoir été présenté à nouveau comme projet de loi C-13 (la version antérieure du projet de loi C-6) à l’automne 2002, le projet de loi a continué de susciter des réactions mitigées. Les membres des milieux médical et de la recherche se sont de nouveau dits inquiets de ce que le projet de loi « criminalise » certaines activités en les visant par des interdictions absolues. À leur avis, les techniques de procréation assistée et la recherche connexe devraient appartenir à la catégorie des « activités réglementées » et assujetties à des contrôles réglementaires plutôt que d’être carrément interdites.

D’autres intervenants ont fait valoir que le projet de loi devrait se limiter aux seuls actes interdits. C’était la position du Bloc Québécois, dont le porte-parole en matière de santé a présenté une motion à la Chambre le 22 novembre dernier pour scinder le projet de loi en deux et n’en retenir que les aspects nécessaires aux interdictions. Le porte-parole du Bloc soutenait que le gouvernement fédéral ne possédait pas les pouvoirs constitutionnels pour « contrôler » – plutôt que « interdire » – certaines activités de procréation assistée. Cette responsabilité, d’affirmer le député, relève de la compétence des provinces.

Dans l’ensemble, la plupart des témoins qui ont comparu devant le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes ont exprimé un soutien général à l’égard du projet de loi et son classement des activités en deux catégories distinctes, bien qu’il y ait eu désaccord sur le fait que certaines activités doivent être interdites ou réglementées. Le clonage en est un exemple. Nombre de témoins étaient d’avis que le clonage à des « fins thérapeutiques » (c.-à-d. pour traiter une maladie ou un trouble médical) ne devrait pas être une activité interdite en vertu de l’alinéa 5(1)a), mais plutôt une activité réglementée aux termes de l’article 10, pouvant être exécutée sur autorisation et en conformité avec les règlements. Il ne faut pas confondre le clonage à des « fins thérapeutiques » avec le clonage à des « fins de procréation », ce dernier visant essentiellement à la réplication pour le plaisir de la chose, sans raison thérapeutique sous-jacente. Personne n’a soutenu que le clonage à des « fins de procréation » devrait être permis.

On a aussi beaucoup débattu de la question de savoir si la recherche sur les embryons in vitro « excédentaires » devrait être permise. L’alinéa 5(1)b) interdit de « créer » un embryon in vitro à des fins autres que la création d’un être humain ou que l’apprentissage ou l’amélioration des techniques de procréation assistée, mais il n’interdit pas leur « utilisation » ultérieure pour la recherche ou à d’autres fins. Pareilles utilisations appartiendraient à la catégorie des activités réglementées aux termes du paragraphe 10(2), dont l’exécution exige une autorisation et le respect des règlements.

Nombre de témoins, notamment les groupes confessionnels, se sont fermement opposés à ce que les embryons in vitro soient utilisés à des fins de recherche. À leur avis, cela équivaudrait à traiter ces embryons comme rien de plus que des objets utiles et signifierait, en fin de compte, prendre une vie humaine. D’autres témoins ont toutefois fortement appuyé la recherche sur les embryons in vitro ne servant plus à la fertilisation in vitro, parce qu’ils peuvent servir à soulager la souffrance et les maladies.

Dans son rapport de 2001 intitulé Assistance à la procréation : bâtir la famille, le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes s’était également dit inquiet de ce que les embryons soient utilisés à des fins recherche. Toutefois, reconnaissant que la recherche sur les cellules souches embryonnaires peut mener à des percées, le Comité a recommandé qu’elle soit autorisée comme activité réglementée, mais seulement en dernier recours. Plus précisément, il a recommandé que :

La recherche faisant appel à des embryons soit une activité réglementée nécessitant une autorisation. Même si les autres critères du règlement sont tous respectés, aucune autorisation ne sera délivrée à moins que le demandeur ne démontre clairement qu’il ne peut effectuer sa recherche avec aucun autre matériel biologique. [Recommandation 14]

En réponse à la recommandation du Comité, le paragraphe 40(2) prévoit que l’autorisation visant l’utilisation d’un embryon in vitro à des fins de recherche ne peut être délivrée que si l’Agence est convaincue que l’utilisation est nécessaire pour la recherche en cause. Certains se sont inquiétés du fait que le libellé de l’article soit perçu comme étant faible et y ont présenté des amendements, qui ont été rejetés, retirés ou n’ont pas été proposés. En fin de compte, l’article controversé a été renvoyé à la Chambre des communes sans être amendé. Cependant, à l’étape du rapport, la Chambre des communes a adopté un amendement qui restreint davantage la délivrance d’autorisations visant la recherche sur des embryons. Elle a en effet ajouté le paragraphe 40(3.2), lequel interdit à l’Agence de délivrer une autorisation visant la recherche sur des cellules souches embryonnaires à moins d’avoir reçu le consentement écrit des donneurs originaux de gamètes et du donneur de l’embryon, conformément au document Recherche sur les cellules souches pluripotentes humaines : Lignes directrices, publié par les Instituts de recherche en santé du Canada en mars 2002, ainsi qu’il est précisé par règlement. Cette nouvelle restriction, soulignons-le, s’applique uniquement à la « recherche sur les cellules souches » des embryons. Elle diffère de la restriction prévue par le paragraphe 40(2), qui s’applique à « toute » recherche sur les embryons.

La question de l’anonymat du donneur faisait également problème dans le projet de loi. Bien que, en général, le projet de loi permette de communiquer des renseignements sur la santé du donneur à une personne qui a eu recours à une technique de procréation assistée ou à une personne issue d’une telle technique, il ne permet pas (art. 15 et 18), en principe, de divulguer des renseignements permettant d’identifier le donneur, à moins que ce dernier n’y consente par écrit.

Dans son rapport de 2001, le Comité a recommandé la mise sur pied d’un système ouvert où les dons ne pourraient être acceptés que si le donneur consent à ce qu’on divulgue son identité (recommandation 19). Nombre de témoins qui ont comparu devant le Comité pendant l’étude du projet de loi ont plaidé de façon convaincante en faveur d’un système ouvert, dans l’intérêt de l’enfant et de son besoin de savoir. Toutefois, il n’y a pas eu consensus sur cette question et les nombreux amendements proposés pour exiger la divulgation des renseignements d’identification ont été rejetés. La question de l’anonymat des donneurs, toutefois, a continué de préoccuper bon nombre de députés. Le 1er avril 2003, le porte-parole de l’Alliance canadienne en matière de santé a présenté une motion selon laquelle le projet de loi ne devrait pas franchir l’étape de la troisième lecture et devrait plutôt être renvoyé de nouveau au Comité permanent de la santé pour qu’il examine encore l’article 18, afin de permettre aux enfants issus des techniques de procréation assistée de connaître l’identité de leurs parents biologiques. Cette motion a été rejetée par un vote de la Chambre des communes le 29 avril 2003.

Dans son rapport de 2001, le Comité a formulé une autre recommandation, qui n’a pas pleinement été retenue dans le projet de loi et qui a suscité la controverse. Elle traitait de la rétribution du donneur et de la mère porteuse pour services rendus.

Préoccupé par la commercialisation des gamètes et embryons humains et la tendance à les considérer comme des objets utiles, le Comité, dans son rapport de 2001, s’est carrément opposé à la rétribution financière du donneur et de la mère porteuse (recommandations 10 et 13). Quant au projet de loi, bien qu’il interdise la rétribution du donneur, de la mère porteuse ou des intermédiaires en vertu des articles 6 et 7, il permettrait de rembourser les frais supportés par le donneur et la mère porteuse (art. 12) sur présentation d’un reçu et en conformité avec les règlements et avec autorisation. Le gouvernement a proposé un amendement qui aurait atténué la règle en permettant à la mère porteuse de se faire rembourser ses « frais » sans avoir à présenter un reçu, alors que des amendements plus restrictifs ont été proposés par d’autres membres du Comité. Aucun de ces amendements n’a été adopté en Comité; toutefois, la Chambre des communes en a adopté un à l’étape du rapport, en ajoutant le paragraphe 12(3). Ce nouveau paragraphe précise clairement, d’un côté, que les pertes de revenus survenus pendant la grossesse d’une mère porteuse sont des dépenses remboursables. D’un autre côté, la disposition interdit un tel remboursement à moins a) qu’un médecin qualifié ne certifie par écrit que le fait pour la mère porteuse de continuer à travailler pourrait présenter un risque pour sa santé, et b) que le remboursement ne se fasse en conformité avec les règlements et une autorisation (nouveau par. 12(3)).

En fin de compte, sur les 170 amendements présentés (mais pas nécessairement proposés), 30 au total ont été apportés au projet de loi par le Comité. Quant à la Chambre des communes, elle en a apporté 17 autres à l’étape du rapport.

Bien que certains puissent faire valoir que le projet de loi demeure imparfait et qu’il doit être amélioré, d’autres soutiendront sans doute que, malgré ses lacunes, il aurait dû être présenté depuis longtemps et devrait être adopté le plus tôt possible. En effet, depuis plus de dix ans, on exhorte le gouvernement à légiférer en matière de procréation assistée et de recherche connexe. D’aucuns diront qu’il est encore plus urgent d’adopter une telle loi parce que des chercheurs ont récemment affirmé avoir réussi le clonage de l’être humain.

BRÈVE CHRONOLOGIE DES MESURES PRISES PAR LE GOUVERNEMENT FÉDÉRAL

1989 - La Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction est constituée.

1993 - La Commission royale formule 293 recommandations, dont la plupart portent sur les mesures que le gouvernement fédéral doit prendre.

1993-1996 - Un Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur les techniques de reproduction et de génétique est mis sur pied avec l’appui de Santé Canada avec pour tâche de conseiller les sous-ministres de la Santé.

1995-Le ministre de la Santé annonce l’adoption d’un moratoire volontaire sur certaines techniques de reproduction et de génétique.

1996 - Le ministre de la Santé met sur pied le Comité consultatif sur les techniques de reproduction et de génétique qui a pour mandat de conseiller Santé Canada sur l’observation du moratoire et les autres développements.

1996 - Santé Canada applique le Règlement sur le traitement et la distribution du sperme destiné à la reproduction assistée.

1996 - Le ministre de la Santé dépose le projet de loi C-47 : Loi sur les techniques de reproduction humaine et de manipulation génétique, qui vise à interdire certaines techniques de reproduction et de génétique.

1996 - Santé Canada publie un document de travail intitulé Les nouvelles techniques de reproduction et de génétique : Fixer des limites et protéger la santé, dans lequel le Ministère propose un cadre de réglementation pour des normes nationales en matière de pratiques admissibles.

1997 - Le projet de loi C-47 meurt au Feuilleton lors du déclenchement des élections de 1997.

1998 - Le Conseil de recherches médicales, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et le Conseil de recherches en sciences humaines déposent l’Énoncé de politique des trois conseils : éthique de la recherche avec des êtres humains.

1999 - Santé Canada prépare un aperçu sur les techniques de reproduction et de génétique en vue de stimuler les discussions sur la démarche proposée et la gestion d’un cadre de réglementation.

2000 - Santé Canada publie un document de travail qui expose à grands traits diverses dispositions législatives possibles, y compris les actes interdits et les activités réglementées.

2001 - Le gouvernement du Canada soumet au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes l’avant-projet de loi intitulé Propositions relatives au projet de loi régissant l’assistance à la procréation. Le Comité remet son rapport en décembre 2001.

2002 - Les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) produisent des lignes directrices régissant la recherche sur les cellules souches embryonnaires qu’ils appuient financièrement.

 


* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.

(1) Par une motion adoptée le 10 février 2004, la Chambre des communes prévoit le rétablissement à la 3e session de projets de loi qui n’avaient pas reçu la sanction royale au cours de la 2e session de la 37législature et qui sont morts au Feuilleton à la prorogation du Parlement, le 12 novembre 2003. Ces projets de loi pourront être rétablis à l’étape du processus législatif à laquelle ils étaient rendus au moment de la prorogation. Le projet de loi C-6 est la version rétablie du projet de loi C-13, mort au Feuilleton à la fin de la 2e session.

(2) Le mot « chimère » est défini à l’article 2 comme un embryon dans lequel a été introduite au moins une cellule provenant d’une autre forme de vie ou un embryon consistant en cellules provenant de plusieurs embryons, fœtus ou êtres humains.

(3) L’article 2 définit comme suit le mot « hybride » : a)ovule humain fertilisé par un spermatozoïde d’une autre forme de vie; b) ovule d’une autre forme de vie fertilisé par un spermatozoïde humain; c) ovule humain dans lequel a été introduit le noyau d’une cellule d’une autre forme de vie; d) ovule d’une autre forme de vie dans lequel a été introduit le noyau d’une cellule humaine; e) ovule humain ou d’une autre forme de vie qui, de quelque autre façon, contient des compléments haploïdes de chromosomes d’origine humaine et d’une autre forme de vie.

(4) Le projet de loi ne fait pas expressément mention des territoires ou des gouvernements territoriaux. Cependant, ceux-ci sont implicitement inclus en vertu du paragraphe 35(1) de la Loi d’interprétation fédérale qui prévoit que, dans tous les textes législatifs fédéraux, le terme « province » englobe les trois territoires.

(5) Santé Canada, « Information – Loi proposée concernant la procréation assistée – Questions fréquemment posées », communiqué, 9 mai 2002.

(6) James Travers, « Tiptoeing on Stem Cells », The Chronicle-Herald [Halifax], 17 mai 2002 [traduction].

(7) Charles Fidelman, « Fertile Ground for Debate: Stem-cell Bill Draws Attention to Fecundity Decline », Montreal Gazette, 11 mai 2002 [traduction].

(8) Éditorial, Calgary Herald, le 13 mai 2002 [traduction].


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