Le projet de loi C-2 : Loi prévoyant des règles sur les conflits d’intérêts et des restrictions en matière de financement électoral, ainsi que des mesures en matière de transparence administrative, de supervision et de responsabilisation (titre abrégé : Loi fédérale sur la responsabilité; titre abrégé au moment du dépôt : Loi fédérale sur l’imputabilité) a franchi l’étape de la première lecture à la Chambre des communes le 11 avril 2006. Il apporte une série de modifications à des lois existantes et propose deux nouvelles lois touchant divers domaines qui sont généralement liés à la responsabilité politique. Le projet de loi a aussi été appelé « Loi sur la responsabilité fédérale » dans le programme électoral du Parti conservateur du Canada pendant la campagne de janvier 2006.
La partie 1 du projet de loi édicte la Loi sur les conflits d’intérêts, qui crée pour la première fois une série de règles législatives régissant la conduite des titulaires de charge publique durant l’emploi et l’après-mandat. Non seulement le projet de loi établit une série de mesures visant à assurer le respect de la loi, mais il prévoit aussi un mécanisme de plaintes; de plus, il énonce les pouvoirs au nouveau commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, l’oblige à rendre publics ses rapports et prévoit des sanctions. Le mandat et la nomination du commissaire et la durée de son mandat sont régis par des modifications apportées à la Loi sur le Parlement du Canada, qui interdisent en outre aux députés d’accepter des fonds provenant de certaines fiducies et les obligent à signaler toute fiducie au commissaire. La partie 1 apporte aussi à la Loi électorale du Canada des modifications touchant les dons, les contributions et les cadeaux de nature politique et les poursuites intentées en vertu de cette loi. Elle modifie la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes afin de prévoir la nomination d’un commissaire au lobbying après approbation par le Parlement. Elle étend la portée des enquêtes du commissaire (comparativement aux pouvoirs actuels du directeur des lobbyistes), en plus d’accroître l’autonomie de cette charge par rapport au gouvernement et de lui conférer de nouveaux pouvoirs d’exécution. Les modifications apportées à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique suppriment l’embauche préférentielle des membres du personnel du cabinet d’un ministre.
La partie 2 prévoit un certain nombre de modifications touchant les nominations politiques et crée le poste de directeur parlementaire du budget, dont le mandat consiste à fournir au Parlement des analyses objectives de la situation économique et financière du pays.
La partie 3 édicte une loi créant la charge de directeur des poursuites pénales, investi du pouvoir d’engager et de mener des poursuites pénales pour le compte de l’État. Les modifications apportées à la Loi sur l’accès à l’information étendront l’application de cette dernière à 15 nouvelles entités (hauts fonctionnaires du Parlement, sociétés d’État et fondations), en plus d’établir de nouvelles exceptions et exclusions concernant celles-ci. La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles est modifiée afin de mieux protéger les divulgateurs et de constituer le Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles. La partie 3 crée une commission des nominations publiques; celle-ci est chargée d’établir et de communiquer au Parlement les lignes directrices régissant les processus de sélection en vue des nominations, par le gouverneur en conseil, de membres d’organismes, de commissions et de sociétés d’État.
La partie 4 modifie la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP) afin de désigner les sous-ministres et les hauts fonctionnaires équivalents à titre d’administrateurs des comptes qui seront comptables de certaines questions devant les comités parlementaires; elle durcit en outre les sanctions prévues par la LGFP en cas de fraude. Les autres changements apportés à la LGFP et à d’autres lois touchent des questions de vérification interne dans l’administration publique fédérale.
La partie 5 modifie la Loi sur le vérificateur général afin que ce dernier puisse enquêter sur l’utilisation des fonds publics faite par un plus grand éventail de bénéficiaires de subventions, de contributions et de prêts. Elle modifie aussi la LGFP en ce qui concerne l’équité, l’ouverture et la transparence dans le processus public d’appels d’offres et crée le pouvoir réglementaire de fixer certaines conditions qui sont réputées faire partie intégrante des contrats du gouvernement.
Le débat en deuxième lecture a eu lieu à la Chambre des communes les 25, 26 et 27 avril 2006. Le projet de loi a ensuite été renvoyé au Comité législatif chargé du projet de loi C-2 (« le Comité législatif de la Chambre »), présidé par M. David Tilson. Une certaine controverse a entouré les travaux de ce comité. Celui-ci a multiplié les réunions – il en a tenu 28 en mai et juin et a entendu les témoins en groupes entre le 3 mai et le 6 juin 2006. L’étude article par article du projet de loi (qui en compte 317) a duré une semaine (du 7 au 14 juin). Le Comité législatif a fait rapport du projet de loi le 16 juin avec d’importants amendements, certains émanant du gouvernement et d’autres de l’opposition. Les amendements qu'il a apportés à chacune des parties du projet de loi sont décris dans le présent document.
Le titre abrégé du projet de loi a suscité un débat au sujet de l’emploi du terme « imputabilité », critiqué par certains qui estimaient qu’il valait mieux employer le terme « responsabilité ». En comité, le titre abrégé français du projet de loi a été remplacé par Loi fédérale sur la responsabilité.
Certaines questions relatives aux effets du projet de loi sur les privilèges constitutionnels du Parlement ont donné lieu à une série d’amendements. L’ancien greffier de la Chambre des communes Robert Marleau et le légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes Robert Walsh ont tous deux dit au Comité législatif que l’imposition d’un scrutin secret dans le contexte de la nomination des hauts fonctionnaires du Parlement portait atteinte à l’autonomie constitutionnelle du Parlement en ce qui concerne ses propres procédures. En conséquence, les dispositions imposant un scrutin secret ont été supprimées par le Comité législatif.
Un autre amendement d’ordre général a été effectué à la suite d’observations du légiste au sujet des répercussions possibles du projet de loi sur le privilège parlementaire. Un nouveau paragraphe (2) a été ajouté à l’article 64 de la Loi sur les conflits d’intérêts proposée afin de préserver les « droits, immunités et attributions visés à l’article 4 de la Loi sur le Parlement du Canada ». Cependant, cette disposition de non-dérogation a été révisée à l’étape du rapport, et trois exceptions explicites à la protection du privilège parlementaire ont été créées (ces exceptions sont abordées à la rubrique 11 « Pénalités » de la section C de la partie concernant la Loi sur les conflits d’intérêts proposée).
Le projet de loi a fait l’objet d’un débat à l’étape du rapport à la Chambre des communes le 20 juin 2006, ce qui a donné lieu à quelques autres amendements (intégrés eux aussi dans le présent document). Le 21 juin, l’étape du rapport et la troisième lecture étaient terminées. Le projet de loi a ensuite été envoyé au Sénat pour dépôt et première lecture le 22 juin 2006.
Le projet de loi a été renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et sociales (« le Comité sénatorial ») le 27 juin 2006. Le Comité, présidé par le sénateur Donald Oliver, a tenu une longue série d’audiences durant lesquelles il a entendu plus de 160 témoins, pour ensuite apporter d’importants amendements au projet de loi et en faire rapport au Sénat le 26 octobre 2006.
Le Comité sénatorial s’est intéressé à de nombreux aspects du projet de loi. Quand ils ont étudié la Loi sur les conflits d’intérêts prévue à l’article 2 du projet de loi, les sénateurs ont été particulièrement préoccupés par le cumul des fonctions de conseiller sénatorial en éthique et de commissaire à l’éthique dans le poste de commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique. À la suite des amendements apportés par le Comité sénatorial, le poste de conseiller sénatorial en éthique demeure et le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique est chargé de l’application des codes d’éthique uniquement des titulaires de charge publique et des députés. Les amendements apportés par le Sénat pour préserver le poste de conseiller sénatorial en éthique ont été adoptés par la Chambre des communes le 8 décembre 2006. En revanche, la plupart des autres changements de fond recommandés par le Sénat ont été rejetés, comme on le verra plus loin.
Parmi les amendements du Sénat absents de la version définitive du projet de loi figurent notamment ceux qu’on aborde ci-dessous et qui touchent les rôles des deux chambres du Parlement dans divers contextes, le relèvement du plafond des contributions versées aux termes de la Loi électorale du Canada, le processus de nomination de deux nouveaux hauts fonctionnaires du Parlement et certaines périodes de prescription, ainsi qu’une série de nouvelles modifications de la Loi sur l’accès à l’information.
Sur les conseils du légiste du Sénat, Mark Audcent, le Comité sénatorial avait amendé plusieurs dispositions du projet de loi C-2 qui ne traitaient que de la Chambre des communes pour y ajouter dans chaque cas un pendant pour le Sénat. Des arguments à l’appui du maintien du poste de conseiller sénatorial en éthique ont été présentés par M. Audcent et Jean Fournier, le conseiller sénatorial en éthique actuel.
Le Comité sénatorial a amendé aussi les dispositions du projet de loi relatives au financement des partis politiques, notamment celles qui régissent le plafond des contributions politiques. Il a, entre autres, porté de 1 000 $ à 2 000 $ par année civile le plafond des contributions prévu par l’article 405 de la Loi électorale du Canada pour chacun des destinataires suivants : un parti politique enregistré, une association enregistrée, un candidat ou un candidat à l’investiture ou à la direction d’un parti.
Ont été amendés aussi les processus de nomination du directeur des poursuites pénales et du directeur parlementaire du budget. Le vérificateur de l’approvisionnement devient l’ombudsman de l’approvisionnement. Certains des délais de prescription ont aussi été modifiés.
Plusieurs dispositions modifiant la Loi sur l’accès à l’information ont été amendées. De nouvelles exclusions ont été ajoutées qui visent certains dossiers de la Fondation du Canada pour l’appui technologique au développement durable et du Centre national des Arts. Pour la première fois, l’intérêt public devient une considération, et une nouvelle disposition, l’article 26.1, porte que les responsables d’une institution peuvent communiquer de l’information « pour des raisons d’intérêt public […] si ces raisons justifient nettement les pertes, atteintes ou préjudices qui peuvent en résulter », sauf quand l’information concerne la sécurité nationale. De nouvelles dispositions protègent contre la divulgation les renseignements que possédaient les fondations et les hauts fonctionnaires du Parlement dont les noms sont ajoutés à la Loi sur l’accès à l’information par le projet de loi.
D’autres amendements, pour la plupart relatifs à des questions de forme, ont été apportés au projet de loi à l’étape de la troisième lecture au Sénat. Le projet de loi a ensuite été renvoyé à la Chambre des communes, où beaucoup d’amendements ont été rejetés, certains ont été modifiés et d’autres adoptés tels quels. Un message a été renvoyé au Sénat le 21 novembre 2006. Après un débat au Sénat le 23 novembre, le projet de loi a de nouveau été renvoyé au Comité sénatorial, lequel a alors tenu plusieurs réunions pour entendre des témoins et discuter de leur réaction au message de la Chambre. Il a fait rapport au Sénat le 7 décembre 2006, recommandant que celui-ci agrée les trois amendements apportés par la Chambre dans son message du 21 novembre, qu’il n’insiste pas sur la plupart des amendements apportés lors de l’étude initiale du projet de loi (énoncés dans le rapport du Comité sénatorial au Sénat du 26 octobre), et qu’il insiste uniquement sur les amendements visant à préserver le poste de conseiller sénatorial en éthique et sur un autre amendement (numéro 2), qui exclut le Parlement de la définition de l’expression « entité du secteur public » dans la Loi sur les conflits d’intérêts. Le Sénat a envoyé un message dans ce sens à la Chambre, laquelle a accepté les derniers amendements du Sénat le 8 décembre 2006, et le projet de loi a reçu la sanction royale le 12 décembre 2006.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.
L’article 2 du projet de loi promulgue la Loi sur les conflits d’intérêts (Loi établissant des règles concernant les conflits d’intérêts et l’après-mandat pour les titulaires de charge publique). Essentiellement, cet article donne force de loi au Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat (le Code) du premier ministre, y apporte certaines modifications importantes et confère au nouveau commissaire à l’éthique et aux conflits d’intérêts (le commissaire)(1), qui en est l’administrateur, des pouvoirs un peu plus vastes que ceux du commissaire à l’éthique actuel.
Le Code du premier ministre existe depuis de nombreuses années; chaque nouveau gouvernement le fait évoluer(2). À son accession au pouvoir, le gouvernement conservateur du premier ministre Harper y a apporté d’importantes modifications, dont la plupart sont incorporées au projet de loi. Parallèlement, la nouvelle Loi sur les conflits d’intérêts (LCI) élimine certains éléments du Code, le réorganise et le simplifie. Le régime qui en résulte est plus facile à comprendre que celui du Code actuel.
Les éléments suivants du Code sont absents de la LCI proposée :
Les éléments importants suivants ont été ajoutés ou sont modifiés dans la LCI par rapport au Code :
Depuis le début, le Code ne contient qu’une définition implicite de ce que l’on entend par « conflit d’intérêts ». L’article 4 de la LCI proposée remédie à cette lacune et porte que : « un titulaire de charge publique se trouve en situation de conflit d’intérêts lorsqu’il exerce un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui lui fournit la possibilité de favoriser son intérêt personnel ou celui d’un parent ou d’un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne ». Cet article a été passablement remanié par le Comité sénatorial pour ajouter à la nouvelle LCI les notions de conflit d’intérêts potentiel et de conflit d’intérêts apparent. Par définition, un titulaire de charge publique se trouve en situation de conflit d’intérêts potentiel lorsque sa capacité d’exercer un pouvoir officiel ou une fonction officielle pourrait être influencée par son intérêt personnel ou celui d’un parent ou ami, ou pourrait être influencé de façon irrégulière par celui de toute autre personne. Il se trouve en situation de conflit d’intérêts apparent lorsqu’il existe une perception raisonnable, qu’une personne raisonnablement avertie pourrait avoir à juste titre, que sa capacité d’exercer un pouvoir officiel ou une fonction officielle doit avoir été influencée par son intérêt personnel ou celui d’un parent ou ami, ou doit avoir été influencée de façon irrégulière par celui de toute autre personne. Des modifications corrélatives ont été apportées à d’autres dispositions de la LCI pour couvrir les conflits d’intérêts réels, apparents ou potentiels. Ces amendements sur les conflits d’intérêts potentiels ou apparents ont été rejetés par la Chambre.(4)
L’article 6 précise ensuite qu’il est interdit à un titulaire de charge publique de prendre une décision ou de participer à la prise d’une décision qui pourrait le placer en situation de conflit d’intérêts. La première version du projet de loi interdisait à un parlementaire titulaire de charge publique de participer à un débat ou de voter sur une question qui pourrait le placer dans une telle situation. Cette disposition a été supprimée par le Comité législatif de la Chambre au motif qu’il se serait agi d’une intrusion injustifiée dans les questions internes de la Chambre. Elle a été rétablie à l’étape du rapport pour être de nouveau supprimée par le Comité sénatorial, amendement que la Chambre n’a toujours pas accepté.
Cette définition concerne des personnes qui fournissent des conseils en matière de politiques, de programmes et de finances à un ministre, qu’elles le fassent à temps plein ou à temps partiel et qu’elles soient rétribuées ou non.
Le Code contient une définition de « titulaire de charge publique », laquelle est reprise à l’article 2 de la LCI, avec l’addition d’un nouveau terme, « titulaire de charge publique principal », qui classe dans une catégorie à part les membres du personnel des ministres qui travaillent en moyenne 15 heures par semaine ou plus, les personnes nommées par le gouverneur en conseil qui exercent leurs activités à temps partiel, touchent une rémunération annuelle et bénéficient d’avantages, et les personnes nommées par le gouverneur en conseil qui exercent leurs fonctions officielles à temps plein. Cette catégorie de personnes est visée par les interdictions prévues dans le Code actuel (occuper un emploi, exploiter une entreprise, etc.) et est assujettie aux règles relatives à la divulgation et au dessaisissement de biens, de même qu’à toutes les règles énoncées dans la LCI relativement à l’après-mandat(5).
L’article 12 de la LCI interdit aux parlementaires titulaires de charge publique, à leur famille, aux conseillers ministériels et à tout membre de leur personnel ministériel de voyager à bord d’avions non commerciaux nolisés ou privés, sauf dans le cadre de leurs fonctions officielles. Le commissaire peut toutefois approuver ce type de voyage, dans ces circonstances exceptionnelles.
Les nouvelles dispositions énoncées aux articles 13 et 14 régissent la passation de marchés avec l’État(6). Un parlementaire titulaire de charge publique ne peut pas être partie à un contrat avec une entité du secteur public aux termes duquel il reçoit un avantage (à l’exception de prestations de pension), ni posséder un intérêt dans une société de personnes ou une société privée qui est partie à un contrat avec une entité du secteur public. Dans chaque cas cependant, le commissaire peut autoriser une exception s’il est d’avis qu’elle n’aura vraisemblablement aucune incidence sur la manière dont la personne concernée exerce ses fonctions officielles.
Il est interdit à un titulaire de charge publique qui n’est pas un parlementaire mais qui est responsable d’une entité du secteur public d’autoriser l’entité concernée à conclure un contrat avec son époux, son conjoint de fait, son enfant, son frère, sa sœur, sa mère ou son père, sauf si cela est l’aboutissement d’un processus impartial dans lequel il ne joue aucun rôle.
Un parlementaire titulaire de charge publique responsable d’une entité du secteur public ne peut pas autoriser l’embauche des catégories de personnes précitées (sauf à titre de membre du personnel ministériel ou de conseiller ministériel) apparentées à d’autres ministres, ministres d’État et secrétaires parlementaires, sous réserve de la même exception concernant l’impartialité du processus. Enfin, il est interdit à un parlementaire titulaire de charge publique responsable d’une entité du secteur public d’autoriser l’entité en question à embaucher son époux, son conjoint de fait, son enfant, son frère ou sa sœur, ou son père ou sa mère, et cette règle ne souffre aucune exception.
Une personne se récuse quand elle refuse de prendre une décision ou de participer à un débat ou à un vote qui la place en situation de conflit d’intérêts. L’article 21 de la LCI impose un devoir de récusation simple et direct au titulaire de charge publique; le Comité législatif de la Chambre a cependant précisé que la récusation s’impose aussi bien dans le cas de discussions que dans celui des décisions, des débats et des votes. Les dispositions du Code actuel sont moins directes et semblent faire porter au commissaire à l’éthique la responsabilité de déceler les cas problèmes et d’intervenir.
La LCI conserve la structure générale du Code actuel : communication confidentielle au commissaire, dessaisissement de biens contrôlés (définis à l’art. 20)(7), déclaration publique de certains biens, règles concernant les fiducies sans droit de regard, etc. Il importe toutefois de noter que le libellé de la LCI est plus précis et plus direct. Les changements suivants, contenus à l’article 25, sont dignes de mention :
Une bonne partie des règles relatives à l’après-mandat sont identiques à celles qui figurent dans le Code. Les différences sont signalées ci-dessous.
Les articles 43 à 50 de la LCI proposée réorganisent les dispositions correspondantes du Code et de la Loi sur le Parlement du Canada (LPC) afin de consolider le régime applicable aux titulaires de charge publique et aux ex-titulaires de charge publique en matière d’éthique. L’article 43 reprend l’obligation pour le commissaire de fournir des avis au premier ministre et aux titulaires de charge publique sur l’application de la LCI, obligation qui est actuellement énoncée à l’article 72.07 de la LPC. Dans la version de l’article 43 amendée par le Comité sénatorial, le commissaire peut fournir des avis confidentiels au premier ministre seulement s’il conclut que la personne concernée n’a pas contrevenu à la LCI. Par contre, s’il conclut qu’un titulaire de charge publique y a contrevenu, le commissaire doit faire rapport au premier ministre, remettre un double de son rapport à la personne concernée et rendre son rapport public. La Chambre a rejeté ces amendements.
L’article 44 de la LCI se démarque considérablement du régime actuel dans la mesure où il permet à tout parlementaire qui a des motifs raisonnables de croire qu’un titulaire de charge publique ou ex-titulaire de charge publique quel qu’il soit a contrevenu aux règles de demander au commissaire d’étudier la question. Actuellement, l’article 72.08 de la LPC ne permet ces demandes que lorsqu’elles concernent un ministre, un ministre d’État ou un secrétaire parlementaire en poste. Selon un élément supprimé par le Comité législatif de la Chambre, le parlementaire qui soumettait la demande devait prêter serment ou affirmer solennellement avoir des motifs raisonnables de soumettre sa demande au commissaire. L’article 44 codifie et étoffe les dispositions actuelles du Code (par. 5(4), ajouté en 2006) exigeant du commissaire qu’il tienne compte des renseignements provenant du public qui sont portés à son attention par un député et qui donnent à penser qu’un titulaire de charge publique a contrevenu aux règles. Le comité sénatorial a supprimé une nouvelle exigence de confidentialité énoncée au paragraphe 44(5) de la LCI qui interdit au parlementaire saisi d’une telle information émanant du public de la communiquer à quiconque pendant qu’il décide s’il doit la communiquer au commissaire ou, s’il l’a communiquée au commissaire, tant que celui-ci n’a pas remis son rapport. Il a supprimé aussi le nouveau paragraphe 44(6), lequel porte que, si un parlementaire ne respecte pas l’obligation de confidentialité, le commissaire peut soumettre le cas au président de la Chambre dont relève le parlementaire. La Chambre des communes a rejeté ces amendements. Suivant un amendement proposé par le Comité sénatorial, le commissaire ne peut pas rendre publique une demande à laquelle il a mis fin ou qu’il juge futile ou vexatoire ou entachée de mauvaise foi. Cet amendment aussi a été rejeté par la Chambre.
L’article 45 de la LCI autorise le commissaire à étudier une question de son propre chef s’il a des raisons de croire qu’un titulaire de charge publique ou un ex-titulaire de charge publique a contrevenu à la LCI. Ce nouveau pouvoir reflète un pouvoir analogue conféré au commissaire à l’éthique aux termes du paragraphe 27(4) du Code régissant les conflits d’intérêts des députés. Comme le prévoit déjà l’article 72.09 de la LPC, l’article 46 de la LCI dispose que le commissaire doit donner à l’intéressé la possibilité de présenter son point de vue avant de remettre son rapport.
Aux termes de l’article 47, une décision du commissaire quant à la question de savoir si quelqu’un a contrevenu à la LCI est inattaquable, mais elle « n’est toutefois pas décisive lorsqu’il s’agit de déterminer les mesures à prendre » pour y donner suite, disposition analogue à l’article 23 du Code. Le commissaire peut assigner des témoins à comparaître devant lui et les forcer à témoigner ou à produire des documents, comme c’est le cas du commissaire à l’éthique dans le régime actuel.
L’article 49 perpétue la disposition voulant que le commissaire suspende une étude réalisée aux termes des articles 43, 44 ou 45 s’il a des motifs de croire que la personne mise en cause a commis une infraction à une autre loi, auquel cas il doit en informer l’autorité compétente. L’article 50 maintient l’immunité (en matière civile ou pénale) dont bénéficie actuellement le commissaire à l’éthique aux termes de l’article 72.12 de la LPC.
L’article 51 donne un fondement législatif au registre public établi en vertu du Code. Ce registre contiendra un certain nombre de documents dont la communication est obligatoire aux termes de la LCI : déclarations publiques, déclarations sommaires, listes de cadeaux confisqués, décisions relatives aux demandes de réduction ou d’annulation et autres documents que le commissaire juge indiqués. Les récusations ne seront pas versées au registre si cela a pour effet de révéler des renseignements confidentiels du Cabinet ou des renseignements opérationnels spéciaux(15). Les récusations publiées ne doivent pas contenir des renseignements protégés par le secret professionnel de l’avocat; des renseignements dont une autre loi interdit la communication; des renseignements dont la communication pourrait porter atteinte aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales ou à la détection, la prévention ou la répression d’activités criminelles, subversives ou hostiles; des renseignements qui pourraient porter atteinte au droit à la vie privée d’une personne; ou des renseignements dont la communication pourrait porter atteinte à des intérêts commerciaux.
L’article 52 crée une nouvelle infraction : un titulaire de charge publique qui contrevient à des dispositions données de la LCI est passible d’une pénalité d’au plus 500 $. Les dispositions en question concernent certaines exigences de déclaration, la divulgation des cadeaux et des offres d’emploi et la confirmation du dessaisissement de biens contrôlés.
Aux termes de l’article 53, si le commissaire a des motifs raisonnables de croire qu’un titulaire de charge publique a commis une violation, il peut dresser un procès-verbal en vertu de cet article, mentionnant les faits reprochés, la pénalité qu’il a l’intention d’imposer et le temps que le contrevenant a pour la payer. Si le contrevenant acquitte sa pénalité, cela correspond, selon l’article 55, à un aveu de responsabilité et met fin à la procédure. Cependant, l’article 56 permet à la personne incriminée de présenter des observations au commissaire, qui décide ensuite s’il y a eu violation ou non. Si la personne incriminée n’acquitte pas la pénalité et ne présente pas d’observations au commissaire, elle est réputée avoir commis la violation.
Aux termes de l’article 58, la prise de précautions peut être invoquée dans le cadre de toute procédure en violation. Les principes de la common law susceptibles de fournir une justification ou une excuse s’appliquent à une violation, à la condition que cela ne soit pas incompatible avec la LCI. L’article 60 amendé par le Comité sénatorial précise que les poursuites doivent être amorcées dans les deux ans de la date où le commissaire apprend la violation alléguée et dans les cinq ans qui suivent la date où les éléments constitutifs de la violation ont pris naissance. La Chambre a rejeté cet amendement. Dans sa forme originale, cette disposition prévoyait un délai de prescription de cinq ans à compter de la date où le commissaire a connaissance des éléments constitutifs de la violation.
Quand il impose une pénalité financière à un titulaire de charge publique, le commissaire doit publier la nature de la violation, l’identité de la personne visée et le montant de la pénalité.
L’article 63 dispose expressément que l’article 126 du Code criminel, aux termes duquel toute infraction délibérée à une loi fédérale constitue un acte criminel, ne s’applique pas à la LCI. L’article 65 amendé par le Comité sénatorial reprend les périodes de presciption de deux et cinq ans prévues à l’article 60. La Chambre était contre cet amendement, préférant conserver les périodes de prescription originales de cinq et dix ans. Aux termes de l’article 66, les décisions du commissaire sont définitives et ne peuvent être attaquées, sauf examen par la Cour d’appel fédérale en vertu des alinéas 18.1(4)a), b) ou e) de la Loi sur les Cours fédérales. (La compétence de la Cour est étendue par la voie de l’art. 6 du projet de loi C-2 pour permettre à celle-ci d’entendre ces requêtes.) Les motifs pour lesquels une décision du commissaire peut être renversée par la Cour en vertu de l’article 66 sont les suivants : le commissaire a outrepassé sa compétence; il n’a pas respecté un principe d’équité procédurale; il a agi sur la foi de faux témoignages ou en raison d’une fraude.
Le Comité législatif de la Chambre a ajouté une nouvelle disposition (par. 64(2)) pour préciser qu’aucune disposition de la LCI ne porte atteinte au privilège parlementaire. Cette disposition a été amendée par la suite à l’étape du rapport à la Chambre pour la subordonner à trois exceptions : l’interdiction faite aux parlementaires titulaires de charge publique de participer à un débat ou à un vote sur une question à l’égard de laquelle ils pourraient se trouver en situation de conflit d’intérêts (par. 6(2)); l’obligation faite aux titulaires de charge publique de se récuser dans une discussion, une décision, un débat ou un vote sur une question qui pourrait les placer en situation de conflit d’intérêts (art. 21); et le pouvoir du commissaire d’ordonner à un titulaire de charge publique de prendre les mesures qu’il estime nécessaires pour assurer l’observation de la LCI, y compris la récusation (art. 30). Ces exceptions découlent de la constatation selon laquelle, dans ces cas, la LCI pourrait effectivement porter atteinte au privilège parlementaire. Elles ont été supprimées par le Comité sénatorial de manière que rien dans la LCI ne vienne limiter le privilège parlementaire, mais la Chambre a rejeté cet amendement.
Le Comité législatif de la Chambre a aussi ajouté une disposition prévoyant un examen complet de la LCI après cinq ans, examen confié à un comité de la Chambre des communes, un comité du Sénat ou un comité mixte (art. 67).
Comme on le verra ci-dessous, la Chambre a rejeté les amendements proposés par le Comité sénatorial pour préserver le poste de conseiller sénatorial en éthique, mais le Sénat ayant insisté pour les conserver dans son second message à la Chambre, celle-ci les a finalement agréés le 8 décembre 2006.
L’article 3 du projet de loi assure le transfert automatique du personnel du commissaire à l’éthique au nouveau commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique. La mention du prédécesseur du commissaire dans des contrats et autres instruments vaudra mention du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, lequel prendra sa suite dans toute procédure en cours. Le nouveau commissaire assumera les attributions du commissaire à l’éthique aux termes des deux codes qu’il administre actuellement(16).
Un certain nombre de modifications corrélatives remplaceront la mention du commissaire à l’éthique par la mention du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique dans un certain nombre de lois.
Comme le poste de conseiller sénatorial en éthique est conservé, ces dispositions s’appliqueront à lui et à son bureau comme au commissaire à l’éthique.
Les articles 26 et 27 du projet de loi abrogent toutes les dispositions de la LPC qui s’appliquent au commissaire à l’éthique. En revanche, l’article 28 ajoute à la LPC une série de dispositions s’appliquant au nouveau commissaire. Ces dispositions, et d’autres encore dans cette partie du projet de loi, ont été amendées par le Comité sénatorial pour conserver les dispositions actuelles qui visent le conseiller sénatorial en éthique. Un amendement de l’article 26 ajoutant le paragraphe 20.5(4) à la LPC précise pour plus de certitude que l’administration de la LCI relativement aux titulaires de charge publique qui sont ministres ou secrétaires parlementaires ne fait pas partie des attributions du conseiller sénatorial en éthique. La Chambre avait initialement rejeté les amendements rétablissant le poste de conseiller sénatorial en éthique, mais a fini par les accepter.
Aux termes du nouvel article 81 de la LPC, le commissaire sera nommé par le Cabinet après consultation des chefs des partis reconnus à la Chambre et au Sénat et approbation par résolution du Sénat et de la Chambre des communes. L’exigence selon laquelle les résolutions auraient dû être adoptées à l’issue d’un scrutin secret a été supprimée par le Comité législatif de la Chambre. Le paragraphe 81(2) impose une exigence toute nouvelle, à savoir que la personne nommée doit être un ancien juge, ou un ancien membre d’un conseil, d’une commission ou d’un tribunal ayant une expertise avérée dans les conflits d’intérêts, les arrangements financiers, la discipline professionnelle ou l’éthique. Le Comité législatif de la Chambre a adopté un amendement permettant à un ancien conseiller sénatorial en éthique ou à un commissaire à l’éthique d’être nommé, ce qui permet la nomination des titulaires actuels. Le nouveau commissaire est nommé pour un mandat de sept ans, comparativement à cinq ans pour le commissaire à l’éthique et à sept pour le conseiller sénatorial en éthique. Le commissaire pourra être révoqué pour un motif valable par le gouverneur en conseil sur adresse du Sénat et de la Chambre des communes.
La décision du Comité sénatorial de conserver un poste distinct de conseiller sénatorial en éthique chargé d’administrer le code d’éthique du Sénat reflète une préférence de longue date de cette chambre. La possibilité de nommer un seul conseiller en éthique qui serait chargé de superviser la conduite des députés et des sénateurs, ainsi que celle des membres de l’exécutif avait déjà été envisagée, tout comme l’opportunité d’exiger que celui-ci possède une formation ou de l’expérience dans le domaine juridique. Dans un rapport daté du 10 avril 2003 produit à l’issue de l’étude de ce qui n’était encore à l’époque qu’un avant-projet de loi et un projet de code, le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement avait recommandé que le Sénat ait son propre conseiller, le conseiller sénatorial en éthique. Le gouvernement a acquiescé. Le Comité avait en outre recommandé que la personne en question possède une expérience juridique. Quand il a été déposé, le projet de loi ne tenait pas compte de cette dernière recommandation, et le Sénat n’a pas insisté. Ni le commissaire à l’éthique ni le conseiller sénatorial en éthique ne sont tenus de posséder une formation ou de l’expérience dans le domaine juridique, et ni l’un ni l’autre n’en a, mais, ainsi que nous l’avons signalé, chacun des deux pourrait être nommé au poste.
Le nouvel article 85 de la LPC énonce la mission du nouveau commissaire, à savoir exercer les fonctions prévues aux articles 86 à 88 et donner au premier ministre des avis confidentiels concernant les politiques en matière de conflits d’intérêts et d’éthique. Les fonctions du commissaire à l’égard de la Chambre des communes et de ses députés lui seront conférées par la Chambre, là encore sous la direction d’un comité désigné. Pour ce qui est des titulaires de charge publique, le commissaire exercera à leur égard les fonctions qui lui sont confiées par la LCI.
Le Comité sénatorial a amendé l’article 28 du projet de loi pour créer une nouvelle disposition, l’article 86.1, portant que le commissaire et son personnel ne peuvent être contraints à témoigner sur les faits venus à leur connaissance dans l’exercice de leurs fonctions aux termes de la LPC et leur conférant l’immunité en matière pénale et civile. Cet amendement a reçu l’agrément de la Chambre. Le commissaire ne peut pas, sans le consentement de la personne intéressée, utiliser des renseignements personnels qu’il a recueillis à des fins incompatibles avec celles auxquelles ils ont été recueillis. L’article 91 énonce les obligations de déclaration du commissaire, lesquelles comprennent la production de rapports annuels sur ses activités aux termes du Code de la Chambre des communes sur les conflits d’intérêts et de la LCI. Ces rapports ne doivent contenir aucun renseignement dont le commissaire est tenu d’assurer la confidentialité, comme des renseignements confidentiels du Cabinet.
Les articles 35 à 38 du projet de loi assurent la coordination entre la LCI et plusieurs autres lois de manière à permettre des entrées en vigueur potentiellement différentes pour les dispositions du projet de loi.
L’article 99 du projet de loi ajoute trois nouvelles dispositions à la LPC portant sur les députés et les fiducies. Le nouvel article 41.1 interdit à un député d’accepter un avantage provenant d’une fiducie « établie en raison des fonctions qu’il exerce à […] titre [de député] ». Le député qui contrevient à cette interdiction est passible d’une amende d’au moins 500 $ mais d’au plus 2 000 $ sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.
L’article 41.2 oblige les députés à déclarer au commissaire toute fiducie dont ils pourraient tirer un avantage, conformément aux dispositions du Code régissant les conflits d’intérêts des députés, mais un manquement à cette obligation ne constitue pas une infraction au Code criminel. Dans tous les cas où la fiducie déclarée n’a pas été établie par un parent du député, le commissaire doit ordonner au député de mettre fin à la fiducie, si possible, ou interdire à tout le moins au député d’utiliser tout avantage ou revenu qui en provient pour financer une course à l’investiture, une course à la direction ou une campagne électorale. Même les fonds provenant d’une fiducie établie par un parent du député ne peuvent pas être utilisés à ces fins. Les seules exceptions à la règle concernent les fiducies qui respectent les conditions relatives aux fiducies sans droit de regard énoncées au paragraphe 27(4) de la LCI ou celles qui sont régies par un régime enregistré d’épargne-retraite ou un régime d’épargne-études.
Conformément au paragraphe 41.3(4), l’ordre exigeant la fermeture d’une fiducie ou interdisant d’en tirer des avantages expire quand un député perd sa qualité de député et, pour l’application de cette disposition, il la conserve tout au long de la campagne électorale. Autrement dit, un député candidat aux élections demeure assujetti à ces interdictions durant sa campagne de réélection. Toute contravention à ces dispositions est passible d’une amende d’au moins 500 $ et d’au plus 2 000 $ sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Ces dispositions ne sont pas susceptibles d’un contrôle judiciaire par la Cour fédérale (art. 38).
Le Comité législatif de la Chambre a amendé l’article 99 pour incorporer à la LPC les nouveaux articles 41.4 et 41.5. Ces nouvelles dispositions prévoient que quiconque, y compris le commissaire, a des motifs raisonnables de croire qu’a été commise une infraction visée à l’article 41.1 (interdiction d’accepter des fonds provenant d’une fiducie) doit en informer le comité désigné de la Chambre des communes. Le commissaire devra remettre les ordres pris en vertu de l’article 41.3 (visant à mettre fin à la fiducie ou à interdire d’en tirer avantage) au comité désigné de la Chambre des communes.
Durant la campagne électorale, le Parti conservateur a promis de réviser les règles énoncées dans la Loi électorale du Canada (LEC) sur le financement politique et de renforcer certains des mécanismes d’observation prévus dans celle-ci. Le projet de loi C-2 concrétise un bon nombre de ces propositions(17).
L’article 40 du projet de loi interdit à un candidat d’accepter des cadeaux ou des avantages dont une personne raisonnable pourrait penser qu’ils lui ont été donnés pour influer sur la manière dont il s’acquittera des devoirs de sa charge s’il est élu. (Les modifications ajoutent les art. 92.1 à 92.6 à la LEC.)
On entend par un cadeau ou un avantage toute somme dont le remboursement n’est pas obligatoire et tout service ou tout bien fourni sans frais ou à un prix inférieur à leur valeur commerciale. Cette forme de contribution est distincte des contributions financières autorisées aux termes de la partie 18 de la LEC (voir la rubrique C « Plafonnement des contributions politiques » de la présente section). Les cadeaux et autres avantages provenant de personnes apparentées ou reçus en héritage ou qui constituent une « marque normale ou habituelle de courtoisie ou de protocole » ne sont pas considérés comme des cadeaux interdits.
L’interdiction s’applique dès lors que la personne devient candidat, jusqu’au jour où elle retire sa candidature ou devient député ou, si elle n’est pas élue, jusqu’au jour du scrutin. Pour l’application de cette disposition, la qualité de candidat est acquise dès que l’intéressé obtient l’investiture ou dès que le bref est délivré pour l’élection.
Le candidat doit déclarer au directeur général des élections tous les cadeaux ou avantages dont il retire un gain de plus de 500 $ qu’il a reçus durant la période visée. Il doit aussi déclarer toute série de cadeaux ou avantages provenant de la même personne dont la valeur cumulative dépasse 500 $.
Sa déclaration doit indiquer la nature et la valeur commerciale de chaque cadeau ou avantage; le nom et l’adresse du donateur; et les circonstances dans lesquelles le cadeau ou l’avantage a été donné.
La déclaration doit être remise au directeur général des élections dans les quatre mois suivant le jour du scrutin ou le retrait du bref d’élection. Le directeur général des élections ou un juge peut prolonger le délai prévu pour permettre à l’intéressé de produire la déclaration ou de la corriger en cas de maladie ou de véritable erreur de fait ou de faute commise par inadvertance.
La première version du projet de loi indiquait qu’un candidat élu qui omettait de produire ou de corriger sa déclaration dans les délais prescrits ne pourrait ni siéger ni voter comme député jusqu’à ce qu’il ait remédié à son omission (ancien art. 40 du projet de loi, par. proposé 92.6(2) de LEC). Pendant les travaux du Comité législatif de la Chambre, le légiste et conseiller parlementaire a dit craindre que cette disposition porte atteinte au pouvoir exclusif de la Chambre des communes de prendre des mesures disciplinaires à l’endroit des députés en leur qualité de députés, une qualité qui diffère de leurs autres rôles, comme ceux de ministres ou de secrétaires parlementaires. L’obligation a donc été supprimée.
Aux termes du projet de loi, commet une infraction tout candidat qui accepte un cadeau ou un avantage prohibé, qui omet de déposer la déclaration prévue dans les délais prescrits ou qui remet une déclaration incomplète (art. 56). Cette infraction est punissable d’une amende d’au plus 1 000 $ ou d’une peine de prison d’au plus trois mois ou des deux. Le candidat qui commet une infraction de propos délibéré ou qui produit sciemment une déclaration contenant des renseignements faux ou trompeurs peut se voir infliger une amende d’au plus 5 000 $ ou une peine d’emprisonnement d’au plus cinq ans ou les deux. Les déclarations sur les cadeaux et contributions remises au directeur général des élections sont confidentielles, mais peuvent néanmoins être communiquées au directeur des poursuites pénales, lequel peut les utiliser dans le cadre d’une poursuite intentée aux termes de la LEC (nouveaux par. 92.5(2) et (3)).
Le Parti conservateur a promis durant la campagne d’interdire aux partis politiques et aux candidats l’usage de fonds provenant d’une fiducie. Il estime en effet que le financement politique par la voie de fonds de fiducie manque de transparence et constitue une source de fonds cachée pouvant servir à contourner les règles sur le financement politique.
La LEC est muette sur la question des fiducies. En revanche, Élections Canada traite les sommes versées à une campagne politique et provenant d’une fiducie comme une contribution de l’entité ou du particulier titulaire du fonds, ce qui rend applicables les plafonds et règles énoncés dans la LEC qui visent les particuliers et les entités (personnes morales, syndicats ou associations non constituées). Ainsi, si une contribution provient d’une fiducie appartenant à une personne morale, elle sera assujettie au plafond des personnes morales, à savoir 1 000 $ par année civile. Si elle provient d’une fiducie appartenant à un particulier, elle sera assujettie au plafond correspondant, à savoir 5 000 $(18).
Le projet de loi vise à limiter le recours à des fiducies par la modification des parties de la LEC qui portent sur les transferts de biens, de services et de fonds entre les diverses entités qui composent une organisation politique. Les restrictions en la matière sont peu nombreuses actuellement, et ces transferts ne sont pas considérés comme des contributions pour l’application des plafonds des contributions prévus par la LEC.
Il importe de noter que les modifications n’interdisent pas le recours à des fiducies comme source de contributions politiques, mais imposent simplement des restrictions qui touchent essentiellement les candidats à l’élection.
Le nouveau régime institué par le projet de loi autorise les transferts suivants de produits et de services entre entités politiques (par. 44(1) du projet de loi modifiant le par. 404.2(2) de la LEC) :
Le projet de loi limite les cessions de fonds, y compris de fonds détenus en fiducie, aux suivantes (par. 44(2) du projet de loi ajoutant le par. 404.2(2.1) à la LEC) :
La cession de fonds détenus en fiducie entre les entités suivantes est interdite :
Ainsi, les candidats ne pourront plus recevoir de fonds d’une association de circonscription ou d’un parti politique enregistrés si ces fonds proviennent d’une fiducie.
L’article 99 du projet de loi apporte une modification connexe à la Loi sur le Parlement du Canada interdisant à un député d’accepter directement ou indirectement un avantage ou un revenu provenant d’une fiducie établie en raison des fonctions qu’il exerce à titre de député(19). Tous les députés devront déclarer ces fiducies au commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, lequel pourra leur ordonner d’y mettre fin et interdire l’utilisation des fonds résultant de l’extinction de la fiducie pour financer une course à l’investiture, une course à la direction ou une campagne électorale.
Actuellement, les citoyens canadiens et les résidents permanents sont assujettis aux plafonds suivants en matière de contributions politiques :
Le projet de loi réduira le maximum des contributions que les particuliers peuvent faire aux différentes entités d’une organisation politique et modifiera la répartition des montants entre ces entités. Les plafonds originaux ont été relevés par le Comité sénatorial, mais la Chambre des communes a rejeté ces amendements. Il en résulte que les particuliers peuvent verser les contributions qui suivent :
Si les amendements avaient été acceptés, ces plafonds auraient été de 2 000 $ chacun.
Par conséquent, un particulier peut faire trois contributions maximales de 1 000 $ aux différentes entités qui composent une organisation politique donnée, comme suit : 1 000 $ à un parti enregistré; 1 000 $ à l’ensemble des candidats d’un parti enregistré, des candidats à l’investiture et des associations de circonscription; et 1 000 $ à l’ensemble des candidats à une course à la direction. En outre, il peut verser 1 000 $ à un candidat qui n’est pas membre d’un parti enregistré (par. 46(1)). Encore une fois, si les amendements du Comité sénatorial avaient été acceptés, les contributions maximales auraient été de 2 000 $ chacune.
Les candidats à l’élection, les candidats à l’investiture et les candidats à la direction d’un parti sont autorisés à apporter à leur campagne au plus 5 000 $ prélevés sur leurs propres fonds, et ce montant n'est pas considéré comme une contribution. Le projet de loi ramène ce montant à 1 000 $ (par. 46(3) du projet de loi). L’amendement du Comité sénatorial aurait porté ce montant à 2 000 $, mais il a été rejeté.
L’article 46 a été amendé aussi pour porter que les plafonds des contributions prévus dans la LEC sont multipliés par le nombre d’élections tenues durant une même année civile, mais seulement dans le cas des contributions à un parti enregistré, à un candidat à l’investiture et à un candidat d’un parti enregistré. Cet amendement a été rejeté par la Chambre.
La question des frais acquittés par les participants aux congrès organisés par les partis politiques a suscité passablement de controverse durant l’étude du projet de loi par le Comité sénatorial. Pour plus de certitude, un nouveau paragraphe a été ajouté à l’article 44 pour intégrer un nouveau paragraphe 404.2(7) à la LEC portant que les frais de participation à un congrès d’un parti politique constituent une contribution à ce parti. Cet amendement a été agréé par la Chambre.
Actuellement, les personnes morales et les syndicats sont autorisés à verser au plus 1 000 $ au total par année civile à des candidats à l’élection, des associations de circonscription et des candidats à l’investiture(21). Le projet de loi aura pour effet d’interdire toute contribution politique de la part des personnes morales et des syndicats. (Voir l’art. 43 du projet de loi, qui abroge l’art. 404.1 de la LEC.)
Le projet de loi interdit les contributions en espèces supérieures à 20 $ (art. 49 du projet de loi, qui ajoute à la LEC l’art. 405.31) et porte que si l’identité du donateur d’une contribution en espèces de plus de 20 $ est inconnue, la somme en question doit être remise au directeur général des élections. Actuellement, ce sont les contributions en espèces de plus de 25 $ de source inconnue qui doivent être ainsi remises. Le projet de loi impose par ailleurs la délivrance d’un reçu à l’égard de tout don de plus de 20 $ (par. 45(1) du projet de loi). Le seuil actuel est de 25 $ (par. 404.4(1) de la LEC).
Le projet de loi ramène de 25 $ à 20 $ le montant des contributions qui ne doivent pas être signalées au directeur général des élections si elles ont été recueillies lors d’une réunion ou à l’occasion d’une activité de financement (c’est ce qu’on appelle parfois « passer le chapeau ») (par. 45(2) du projet de loi). L’obligation de communiquer au directeur général des élections certains renseignements au sujet de l’activité ou de la réunion demeure.
Aux termes de l’article 13 de la LEC, le directeur général des élections est nommé par résolution de la Chambre des communes. Le projet de loi prévoyait au départ que cette résolution devrait être adoptée à l’issue d’un scrutin secret tenu conformément au Règlement de la Chambre des communes (ancien art. 111 du projet de loi, qui ajoutait le par. 13(1.1) à la LEC). Le Comité législatif de la Chambre a fini par supprimer l’article 111 du projet de loi à la lumière des observations formulées par le légiste et conseiller parlementaire, selon qui la disposition risquait d’aller à l’encontre de l’article 49 de la Loi constitutionnelle de 1867 voulant que les questions soulevées à la Chambre des communes soient tranchées « à la majorité des voix ». Selon le légiste et conseiller parlementaire, le scrutin secret ne respecterait pas l’obligation constitutionnelle de tenir un vote par oui ou non.
La partie 3 du projet de loi édicte la Loi sur le directeur des poursuites pénales. Le directeur sera chargé d’engager et de mener, pour le compte de l’État, les poursuites relatives aux infractions à la LEC (voir le par. 3(8) de la Loi sur le directeur des poursuites pénales figurant à l’art. 121 du projet de loi)(22). Ce rôle est actuellement dévolu au commissaire aux élections fédérales.
Actuellement, la LEC dispose qu’une poursuite pour infraction à ses dispositions doit être engagée dans les 18 mois suivant la date à laquelle le commissaire aux élections fédérales a connaissance des faits qui lui donnent lieu, au plus tard sept ans après la date de la perpétration(23). Dans sa forme originale, l’article 59 du projet de loi modifiait le paragraphe 514(1) de la LEC de manière à porter à cinq ans la période dont dispose le directeur des poursuites pénales pour intenter une poursuite cinq ans après la date à laquelle le commissaire aux élections fédérales est saisi des faits lui donnant lieu et à dix ans le délai de prescription absolu. Dans la version amendée par le Comité sénatorial, l’article 59 portait que les poursuites aux termes de la LEC devaient être intentées au plus tard deux ans après que le commissaire a été saisi des faits et au plus tard sept ans après que l’infraction a été commise. Cet amendement a été rejeté par la Chambre.
Les articles 65 à 80 du projet de loi C-2 apportent des modifications de fond à la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes (LEL)(25). Ces modifications visent à régler des questions – concernant la divulgation, l’observation, l’application et l’indépendance du directeur des lobbyistes – qui sont soulevées depuis l’entrée en vigueur de la LEL en 1989, surtout dans le cadre des examens parlementaires de ses dispositions(26). La non-observation des règles et des mesures législatives sur le lobbying a particulièrement intéressé le juge John Gomery dans son rapport d’enquête sur le Programme de commandites et les activités publicitaires, rendu public le 1er février 2006. Le projet de loi donne suite à la plupart des recommandations de la Commission Gomery à ce sujet(27).
Le projet de loi apporte les modifications suivantes au système d’enregistrement des lobbyistes :
L’article 68 du projet de loi crée le poste de commissaire au lobbying (le commissaire). Le titulaire de cette charge a rang de haut fonctionnaire du Parlement, et son mode de nomination et de révocation correspond aux nouvelles procédures prévues pour les autres hauts fonctionnaires du Parlement aux articles 109 à 111 et 118 et 119 du projet de loi. (Voir la partie 2 du présent résumé législatif intitulée « Appui au Parlement ».) Le Comité législatif de la Chambre a amendé l’article 68 pour supprimer l’obligation d’assujettir l’adoption de la résolution portant sur la nomination du commissaire à un scrutin secret.
Le nouveau commissaire au lobbying est chargé de mieux faire comprendre, accepter et respecter la LL. En plus d’avoir des pouvoirs accrus en matière d’enquête et de production de rapports et certains outils d’application de la loi (dont il est question ci-dessous), le commissaire se voit confier un mandat d’éducation publique qui consiste tout spécialement à sensibiliser les lobbyistes, leurs clients et les titulaires d’une charge publique (par. 4.2(2) proposé de la LL). Il peut présenter au Parlement un rapport spécial sur toute question relevant de ses compétences qui a besoin d’être examinée avant le dépôt de son rapport annuel (art. 11.1 proposé de la LL). À la suite d’un avis juridique fourni par le conseiller juridique de la Chambre des communes, le Comité législatif de la Chambre a modifié toutes les mentions des rapports « au Parlement » pour préciser que ces rapports sont plutôt remis au président de chaque chambre, qui les dépose devant la chambre qu’il préside.
Sous le régime de la LEL actuelle, le directeur des lobbyistes n’a pas de véritable pouvoir d’enquête(28). Il peut toutefois mener une enquête sur des infractions présumées au Code de déontologie des lobbyistes(29) (art. 10.4 de la LEL). L’article 77 du projet de loi confère au nouveau commissaire au lobbying de vastes pouvoirs d’enquête sur l’application du Code et de la LL. Ces pouvoirs correspondent dans l’ensemble à ceux que le directeur possède à l’heure actuelle relativement au Code (p. ex. pouvoir d’assigner des témoins ou d’obliger à produire des documents, à l’instar d’une cour supérieure).
Selon l’article 10.4 proposé à l’article 77 du projet de loi, le commissaire fait enquête lorsqu’il a des raisons de croire qu’une enquête est nécessaire au contrôle de l’application de la LL ou du Code. Le Comité législatif de la Chambre a amendé l’article 10.4 pour prévoir que les renseignements transmis au commissaire par un parlementaire peuvent servir à justifier la tenue d’une enquête.
Sous le régime de la nouvelle LL, toutes les enquêtes continueront d’être menées sous le sceau du secret(30). L’article 78 du projet de loi oblige le nouveau commissaire à présenter au Parlement un rapport sur ses conclusions après la tenue d’une enquête. Comme nous l’avons indiqué plus haut, à la suite d’un avis juridique donné par le conseiller juridique de la Chambre des communes, le Comité législatif de la Chambre a modifié toutes les mentions des rapports « au Parlement » pour préciser que ces rapports sont remis au président de chaque chambre, qui les dépose devant la chambre qu’il préside.
Le paragraphe 10.4(1.1) proposé de la nouvelle LL autorise le commissaire à refuser d’enquêter ou de poursuivre une enquête dans certains cas (lorsque l’affaire pourrait être mieux traitée en conformité avec la procédure prévue par une autre loi fédérale, que le commissaire est d’avis que les conséquences de cette affaire ne sont pas suffisamment importantes, que l’enquête serait inutile parce que trop de temps s’est écoulé depuis le moment où l’affaire a pris naissance ou que cela est opportun pour tout autre motif justifié). Ce pouvoir de refus semble passablement étendu; il a toutefois peut-être été établi pour permettre au commissaire, par exemple, de prendre en charge des affaires non réglées qui ont déjà été tranchées par l’ancien conseiller en éthique, mais que certaines parties continuent de poursuivre(31).
Le commissaire doit cesser son enquête et en aviser les autorités compétentes s’il a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis une infraction à la LL ou à une autre loi fédérale ou provinciale (par. 10.4(7) proposé de la LL). Par conséquent, le commissaire, comme le directeur actuel, n’aura pas le pouvoir d’imposer des sanctions administratives ou des amendes qui remplacent des accusations au criminel. Il reste à voir si ces nouveaux pouvoirs d’enquête seront réels, puisque l’application de la LL continuera en définitive de reposer sur des sanctions criminelles infligées par une entité qui ne fait pas partie du système d’enregistrement des lobbyistes(32).
L’article 75 du projet de loi vise à faire disparaître la confusion et le manque de cohérence dans le domaine des honoraires conditionnels(33) en incorporant une interdiction générale à la nouvelle LL (art. proposé 10.1)(34). Ainsi, il sera interdit aux lobbyistes de recevoir un paiement qui dépend en tout ou en partie du résultat de leur travail de lobbying et il sera interdit à leurs clients de faire ce type de paiement.
Cette modification donne suite aux préoccupations grandissantes du public, et même de certains parlementaires, relativement à l’apparence de conflit entre la politique du Conseil du Trésor, qui interdit le paiement d’honoraires conditionnels dans certains cas(35), et la LEL, qui oblige les lobbyistes à déclarer ce type d’arrangement (al. 5(2)g))(36). Par conséquent, le paragraphe 69(2) du projet de loi modifie l’alinéa 5(2)g) de la LEL pour obliger les lobbyistes à indiquer dans le formulaire de déclaration que leur engagement ne prévoit pas d’honoraires conditionnels. En outre, l’article 312 du projet de loi aborde l’interdiction de ces honoraires dans le cadre de la Loi sur la gestion des finances publiques.
Actuellement, la LEL s’applique aux lobbyistes rémunérés qui communiquent avec des titulaires d’une charge publique fédérale au nom d’un tiers. Ces titulaires, au sens de la LEL, sont presque tous des personnes élues ou nommées à un poste de l’administration fédérale et incluent les députés et les sénateurs ainsi que leur personnel. Le paragraphe 67(2) du projet de loi original ajoutait « titulaire d’une charge publique de haut rang » à la liste des définitions de la LEL. L’article 67 a été amendé par le Comité sénatorial pour remplacer le terme « titulaire d’une charge publique de haut rang » par le terme « titulaire d’une charge publique désignée » dans la LL proposée, et ce, afin de mieux refléter la variété et la hiérarchie des postes couverts par la définition. Des amendements corrélatifs substituent le nouveau terme à l’ancien partout dans la LL. En outre, la définition a été amendée de manière à exclure expressément le personnel des commissions d’enquête et des institutions parlementaires. Ces amendements ont été approuvés par la Chambre. La nouvelle définition englobe les ministres, les membres de leur personnel et les hauts fonctionnaires (sous-ministres ou sous-ministres adjoints) et a un lien avec les restrictions en matière de lobbying dans l’après-mandat et les nouvelles déclarations obligatoires.
Le Comité législatif de la Chambre a ajouté le nouveau paragraphe 67(3) pour inclure dans la définition de « titulaire d’une charge publique de haut rang » (dorénavant « titulaire d’une charge publique désignée ») les personnes que le premier ministre identifie comme ayant été chargées de l’appuyer et de le conseiller pendant la période de transition qui s’est étendue entre l’élection et son assermentation (voir ci-dessous comment l’interdiction de faire du lobbying pendant cinq ans s’applique aux membres de l’équipe de transition).
Le nouvel article 10.11 de la LL (art. 75 du projet de loi) interdit aux anciens titulaires d’une charge publique désignée d’exercer les activités de lobbying visées par la LL dans les cinq ans suivant la cessation de leur emploi. Actuellement, le paragraphe 29(1) du Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d’intérêts et l’après-mandat interdit aux anciens ministres, hauts fonctionnaires et membres du personnel du cabinet d’un ministre désignés d’agir à titre de lobbyistes-conseils ou d’accepter un emploi de lobbyiste à titre de salariés pour une période de cinq ans qui suit la cessation de leurs fonctions. Le Code crée des obligations pour les anciens titulaires d’une charge publique désignée, mais il n’a pas force de loi. Non seulement le projet de loi leur impose une interdiction de cinq ans, mais il le fait sous le régime de la nouvelle LL plutôt que de la Loi sur les conflits d’intérêts proposée.
Le Comité législatif de la Chambre a ajouté l’article 88.1 au projet de loi. Il s’agit d’une disposition transitoire qui prendra effet dès le projet de loi sera édicté (cependant, les dispositions sur le lobbying entreront en vigueur à une date fixée par décret). Ce mécanisme autonome s’appliquera aux membres de l’équipe de transition qui ont cessé d’exercer leurs fonctions à ce titre après le 26 janvier 2006(37). Pour l’essentiel, les mêmes règles s’appliqueront à ces membres et aux membres des équipes de transition en général après l’entrée en vigueur des dispositions sur le lobbying contenues dans le projet de loi (art. 10.11). L’interdiction de lobbying pendant cinq ans visera les personnes que le premier ministre identifie comme ayant été chargées de l’appuyer et de le conseiller pendant la période de transition qui s’est étendue entre l’élection et son assermentation; la période de cinq ans commencera à la date de cessation des fonctions comme membre de l’équipe de transition; quiconque contrevient à cette règle encourra, par procédure sommaire, une amende maximale de 50 000 $; le directeur des lobbyistes sera habilité à rendre publics les infractions commises et le nom des contrevenants.
À la suite de questions qui ont été soulevées, le Comité législatif de la Chambre s’est penché sur l’application de l’article visant à interdire les activités de lobbying aux anciens membres de l’équipe de transition du premier ministre. Plus précisément, certains membres du comité estimaient que cet article aurait un effet rétroactif, ce qui aurait une incidence sur les choix faits avant l’entrée en vigueur du projet de loi. Des représentants du ministère de la Justice ont toutefois expliqué au comité que l’article aurait un effet rétrospectif et non rétroactif. Il a été question à cet égard du paragraphe 88.1(2). Ainsi, la disposition visant l’équipe de transition ne porterait que sur les activités exercées après l’entrée en vigueur du projet de loi; elle ne rendrait pas illégales les activités exercées par des membres de l’équipe entre la date de cessation de leurs fonctions et la date d’entrée en vigueur du projet de loi.
Conformément au nouveau paragraphe 10.11(3) de la LL, un ancien titulaire d’une charge publique désignée peut toutefois demander une exemption au commissaire, qui peut l’accorder si elle est compatible avec l’objet de la LL et respecte les critères prévus par celle-ci (avoir occupé la charge pendant une courte période seulement, l’avoir occupée à titre intérimaire, avoir exercé des fonctions purement administratives ou avoir obtenu le poste à titre d’étudiant). Le commissaire est tenu de rendre publiques les exemptions accordées, ainsi que les motifs de sa décision.
Le Comité sénatorial aussi a amendé l’article 75 pour ajouter à la LL une nouvelle disposition, l’article 10.111, qui interdit à toute personne ayant un contrat de services avec le gouvernement ou employée par une personne morale ayant un tel contrat de faire du lobbying pendant les cinq ans qui suivent l’expiration du contrat. Cet amendement a été rejeté par la Chambre.
Les amendements apportés à l’étape du rapport à la Chambre (art. 88.11) autoriseront les anciens (voir l’art 88.1, ci-dessus) et futurs membres de l’équipe de transition du premier ministre à demander une exemption au commissaire sous le régime de cette partie. Les critères d’exemption diffèrent toutefois de ceux qui s’appliquent aux autres titulaires d’une charge publique désignée. Dans le cas des membres de l’équipe de transition, on prendra en considération, par exemple, les circonstances dans lesquelles la personne a quitté ses fonctions, l’autorité et l’influence qu’elle exerçait dans l’équipe et la mesure dans laquelle le nouvel employeur pourrait tirer un avantage commercial indu du recrutement de l’ancien membre. Ces critères ont vraisemblablement été établis parce que les membres des équipes de transition sont réputés êtres mêlés de très près aux activités des bureaux gouvernementaux de haut niveau – ils participent souvent à la dotation en personnel de rang supérieur – et il y a un risque qu’ils exercent une influence marquée sur ces bureaux s’ils sont autorisés à faire du lobbying dans les cinq années suivant leur départ de l’équipe.
En vertu de la nouvelle LL, les lobbyistes devront indiquer non seulement s’ils étaient titulaires d’une charge publique (exigence récente), mais aussi s’ils occupaient une charge publique désignée et, dans ce cas, à quelle date ils ont cessé leurs fonctions. Cette exigence semble être liée à la nouvelle interdiction de lobbying pour les titulaires d’une charge publique désignée. En outre, les lobbyistes devront remplir une déclaration mensuelle sur les communications qu’ils ont eues avec ces titulaires dans le cadre de leurs activités de lobbying (nom, date et autres renseignements utiles).
En ce qui concerne la nouvelle obligation de fournir une déclaration mensuelle, l’article 9.1 de la LL (art. 73 du projet de loi) autorise le commissaire au lobbying à communiquer avec des titulaires ou anciens titulaires d’une charge publique désignée pour vérifier les renseignements fournis et à publier les réponses dans le registre public qui se trouve sur Internet (art. 72 du projet de loi). Un amendement apporté par le Comité législatif de la Chambre permettra au commissaire de déterminer les modalités de temps ou autres applicables à la communication des documents demandés et, du reste, de tout renseignement fourni à son bureau en vertu de l’article 9(1) de la LL (voir le par. 72(2)). Le commissaire est tenu de présenter au Parlement un rapport sur l’omission par un titulaire ou ancien titulaire de charge publique désignée de répondre à sa demande de vérification ou le fait que celui-ci a donné une réponse insatisfaisante (par. 9.1(2) proposé de la LL). À l’origine, le nouveau paragraphe 9.1(2) conférait au commissaire le pouvoir de présenter un tel rapport. Un amendement du Comité sénatorial transformant ce pouvoir en obligation a été rejeté par la Chambre des communes. Comme nous l’avons indiqué plus haut, à la suite d’un avis juridique donné par le conseiller juridique de la Chambre des communes, le Comité législatif de la Chambre a modifié toutes les mentions des rapports « au Parlement » pour préciser que ces rapports sont remis au président de chaque chambre, qui les dépose devant la chambre qu’il préside.
L’article 14 de la LEL prescrit des sanctions pour non-respect de ses dispositions. L’article 80 du projet de loi modifie le paragraphe 14(1) de la LEL pour créer une nouvelle infraction, soit l’omission de fournir la déclaration selon les modalités prévues aux paragraphes 5(1), 5(3), 7(1) ou 7(4) de cette loi. Le fait de donner sciemment des renseignements faux ou trompeurs dans la déclaration ou tout autre document fourni au commissaire demeure une infraction. Le projet de loi crée aussi l’infraction consistant à donner sciemment des renseignements faux ou trompeurs dans la réponse à la demande d’information du commissaire prévue au paragraphe 9.1(1) proposé (vérification de l’information auprès du titulaire d’une charge publique désignée).
Toute personne reconnue coupable d’une de ces infractions par procédure sommaire est passible d’une amende maximale de 50 000 $ (auparavant de 25 000 $), d’une peine d’emprisonnement d’au plus six mois ou des deux. Dans le cas d’une déclaration de culpabilité par mise en accusation, la personne encourt une amende maximale de 200 000 $ (auparavant de 100 000 $), une peine d’emprisonnement d’au plus deux ans ou les deux. Les modifications apportées au paragraphe 14(2) de la LEL prévoient que quiconque est déclaré coupable d’avoir contrevenu à des dispositions de la LL autres que celles des paragraphes 5(1), 5(3), 7(1) et 7(4) ou relatives au Code de déontologie des lobbyistes encourt une amende maximale de 50 000 $ (auparavant de 25 000 $).
Le Comité sénatorial a ajouté une autre infraction à la LL. L’article 79.1 interdit d’entraver l’action du commissaire au lobbying ou de son personnel dans l’exercice des attributions qui lui sont conférées par la LL. L’amendement a été rejeté par la Chambre.
Les modifications apportées au paragraphe 14(3) de la LEL auraient porté de deux à dix ans le délai de prescription prévu pour les poursuites par voie de procédure sommaire. Plus précisément, les poursuites n'auraient pas pu être engagées plus de cinq ans après que le commissaire a pris connaissance de l’affaire et, en tout état de cause, plus de dix ans après la date où les faits à l’origine de la poursuite ont eu lieu. L’article 80 a été amendé par le Comité sénatorial pour ramener la période de prescription à deux ans après que le commissaire a été mis au courant des faits et cinq ans après que l’infraction a été commise. Le Comité sénatorial a en outre ajouté au même article une disposition portant qu’une personne qui omet de se conformer à une interdiction donnée par le commissaire est coupable d’une infraction et passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’une amende d’au plus 50 000 $. Les amendements à l’article 80 ont été rejetés par la Chambre.
En plus de modifier les sanctions prescrites par la LEL, le projet de loi habilite le commissaire à interdire toute activité de lobbying à l’auteur d’une infraction à la LL pendant une période d’au plus deux ans. Le commissaire doit estimer que l’interdiction est nécessaire dans l’intérêt public et tenir compte de la gravité de l’infraction et de l’existence de condamnations antérieures. Il se voit aussi attribuer le pouvoir de rendre publique toute information concernant l’auteur d’une infraction à la LL, à savoir son nom, la nature de l’infraction, la peine infligée et, le cas échéant, l’interdiction imposée par le commissaire en matière de lobbying.
Là aussi, étant donné qu’il n’y a jamais eu d’accusations portées en vertu de la LEL et que la plupart des dispositions visant l’application de la nouvelle LL continuent de prévoir des poursuites pénales, on peut se demander dans quelle mesure ces nouveaux pouvoirs d’application seront utiles dans les faits. Il reste à voir, également, quel rôle jouera le nouveau directeur des poursuites pénales (art. 121 du projet de loi) à cet égard.
Actuellement, en vertu des paragraphes 41(2) et (3) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique (LEFP), les membres du personnel du cabinet d’un ministre (et du leader de l’opposition au Sénat et du chef de l’opposition à la Chambre des communes) ont le droit de contourner le processus normal de nomination par concours dans la fonction publique et d’être nommés à des postes en ayant priorité sur toute autre personne, sauf les fonctionnaires mis en disponibilité et les fonctionnaires en congé(38).
L’article 103 du projet de loi C-2 abroge les paragraphes 41(2) et (3). Les articles 100, 102, 104 et 105 apportent des modifications d’ordre administratif à la LEFP pour tenir compte de l’abrogation de ces deux paragraphes.
Aux termes de l’article 101 du projet de loi, les personnes qui, pendant trois ans, ont été employées dans le cabinet d’un ministre ou du leader de l’opposition au Sénat ou du chef de l’opposition à la Chambre des communes pourront se présenter à des postes de la fonction publique par la voie de concours internes (concours ouverts aux fonctionnaires) pendant une période d’un an suivant leur cessation d’emploi. La disposition transitoire (art. 107) leur permettra de conserver la priorité de nomination prévue aux paragraphes 41(2) et (3) de la LEFP pendant une période d’un an après la date de leur cessation d’emploi, si celle-ci est antérieure à la date d’entrée en vigueur du projet de loi.
À l’étape de l’étude par le Comité législatif de la Chambre, l’article 101 a été amendé et comprend maintenant une disposition permettant aux employés du Sénat, de la Chambre des communes, de la Bibliothèque du Parlement et du bureau du commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique et du conseiller sénatorial en éthique de se présenter à des postes de la fonction publique par la voie de concours internes.
L’article 106 du projet de loi autorise le gouverneur en conseil à nommer les sous-ministres (ou administrateurs généraux), les sous-ministres délégués et les conseillers spéciaux de ministres et à fixer leur traitement. Le Comité sénatorial a amendé l’article 106 pour supprimer la mention des conseillers spéciaux de sous-ministres ou d’administrateurs généraux, retirant ainsi ces fonctionnaires de la liste proposée des personnes nommées par décret du gouverneur en conseil. Cet amendement a été accepté par la Chambre. À l’heure actuelle, ce sont les lois constitutives des ministères qui habilitent le gouverneur en conseil à nommer la plupart des administrateurs généraux.
L’article 107, une disposition de transition régissant les dispositions modifiant la priorité de nomination du personnel ministériel, a été amendé par le Comité sénatorial pour créer un régime de transition additionnel à l’intention du personnel ministériel qui jouissait d’une priorité de nomination avant l’entrée en vigueur de l’article 103 du projet de loi et n’a pas cessé d’être ainsi employé avant l’entrée en vigueur de l’article 107, permettant à ces personnes de conserver leur priorité de nomination quand elles cessent d’être employées, conformément aux paragraphes 41(2) ou (3) de la LEFP. Les amendements apportés à l’article 107 ont été rejetés par la Chambre.
Les articles 109 à 111, 118 et 119 du projet de loi C-2 établissent une nouvelle procédure pour la nomination des hauts fonctionnaires du Parlement(39), à savoir le commissaire à l’information, le vérificateur général, le directeur général des élections, le commissaire aux langues officielles, le commissaire à la protection de la vie privée et le nouveau commissaire à l’intégrité du secteur public(40).
Selon cette nouvelle procédure, le gouverneur en conseil nommera les hauts fonctionnaires du Parlement après avoir consulté le chef de chacun des partis reconnus au Sénat et à la Chambre des communes. À l’heure actuelle, les hauts fonctionnaires du Parlement sont nommés par résolution du Sénat et de la Chambre des communes sans que tous les partis aient été consultés (41).
Les éléments de diverses dispositions qui prévoyaient un scrutin secret dans chacune des chambres pour la nomination des hauts fonctionnaires du Parlement ont été supprimés par le Comité législatif de Chambre pour éviter de porter atteinte au privilège parlementaire(42).
Le projet de loi prévoit que le gouverneur en conseil ne peut révoquer les hauts fonctionnaires du Parlement que pour un motif valable. Le vérificateur général, pour sa part, aura un mandat d’au plus 10 ans et, comme à l’heure actuelle, devra cesser ses fonctions à l’âge de 65 ans.
Enfin, en cas d’absence ou d’empêchement d’un haut fonctionnaire du Parlement, toute personne compétente pourra assurer l’intérim pour un mandat maximal de six mois.
Les articles 114 à 116 du projet de loi C-2 modifient la Loi sur le Parlement du Canada (LPC) pour créer le poste de directeur parlementaire du budget à la Bibliothèque du Parlement.
Depuis quelques années, les prévisions budgétaires sont régulièrement démenties par d’énormes excédents imprévus en fin d’exercice, ce qui n’est pas sans irriter certains parlementaires. Ni le Sénat ni la Chambre des communes ne comptent, parmi leurs effectifs réguliers, de personnel spécialisé dans les prévisions budgétaires qui leur permettrait de demander au gouvernement des comptes sur ses projections budgétaires. À l’heure actuelle, les analystes de la Bibliothèque du Parlement s’occupent des consultations prébudgétaires et des autres audiences du Comité permanent des finances de la Chambre des communes (lequel obtient aussi depuis quelques années les services contractuels de prévisionnistes financiers). Des travaux de recherche et d’analyse reposant sur des informations publiques sont fournis aux autres comités et aux parlementaires à titre individuel.
Le directeur parlementaire du budget sera un haut fonctionnaire chargé explicitement de la réalisation de travaux d’analyse relatifs à l’étude des budgets du gouvernement par le Parlement et de l’évaluation des coûts des mesures proposées dans les projets de loi d’initiative parlementaire ainsi que des autres mesures envisagées par le Parlement. Il sera par ailleurs habilité par la loi à obtenir des ministères fédéraux les renseignements économiques et financiers dont il a besoin (sous réserve de certaines restrictions). Le Comité sénatorial a ajouté les mots « gratuitement et en temps opportun » au paragraphe 79.3(1) pour caractériser l’accès aux données financières des ministères dont doit jouir le directeur parlementaire du budget. Cet amendement a été accepté par la Chambre.
Le projet de loi ajoute à la LPC l’article 79.1, qui institue le poste de directeur parlementaire du budget, dont le titulaire sera nommé par le gouverneur en conseil pour un mandat renouvelable d’au plus cinq ans (le mandat, originellement de trois ans, a été allongé par un amendement du Comité législatif de la Chambre. À l’origine, il portait que les nominations seront faites à partir d’une liste de trois candidats soumise par un comité présidé par le bibliothécaire parlementaire. Le Comité sénatorial a amendé l’article 116 pour faire en sorte que la liste de trois noms sera soumise par les leaders du gouvernement au Sénat et à la Chambre des communes (et non pas seulement par le leader du gouvernement à la Chambre des communes). Dans un autre amendement, il prescrit la composition du comité qui fournira la liste des candidats au poste de directeur parlementaire du budget. Le comité, dont la composition était laissée jusque-là à la discrétion du bibliothécaire parlementaire, comprendra les leaders du gouvernement et ceux de l’Opposition au Sénat et à la Chambre des communes, de même que le bibliothécaire parlementaire. Les amendements apportés par le Comité sénatorial au processus de nomination du directeur parlementaire du budget ont été rejetés par la Chambre.
Aux termes du nouvel article 79.2 de la LPC,le directeur parlementaire du budget fournit des analyses concernant le budget et, par suite d’un amendement du Comité législatif de la Chambre, les prévisions budgétaires, et ce, non seulement au Sénat et à la Chambre des communes, mais aussi, sur demande, aux trois comités suivants ou à leurs équivalents : le Comité sénatorial permanent des finances nationales, le Comité permanent des finances de la Chambre des communes et le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes. En outre, conformément à un amendement du Comité législatif de la Chambre, le directeur effectue pour tout comité parlementaire à qui a été confié le mandat d’examiner les prévisions budgétaires et qui en fait la demande des recherches et des analyses concernant ces prévisions. Le directeur fournit également sur demande aux députés et aux sénateurs des estimations de coût des mesures contenues dans les projets de loi d’initiative parlementaire ou, de façon plus large, toute mesure envisagée relevant de la compétence du Parlement et, dans le cas de ces dernières, aussi à tout comité du Sénat, de la Chambre ou mixte qui en fait la demande. Parmi les amendements apportés par le Comité sénatorial aux dispositions du projet de loi relatives au directeur parlementaire du budget figure la suppression d’un alinéa portant expressément sur l’évaluation du coût financier des projets de loi d’initiative parlementaire (al. 79.2d)) au motif que cette tâche est déjà couverte par l’évaluation du coût financier de toute mesure proposée relevant des domaines de compétence du Parlement prévue (al. 79.2e)). Cet amendement a été accepté par la Chambre.
Aux termes du nouvel article 79.3 de la LPC, le directeur parlementaire du budget peut obtenir des ministères fédéraux les données économiques et financières dont il a besoin, à l’exception des informations protégées aux termes de la Loi sur l’accès à l’information ou contenues dans un document confidentiel du Cabinet. L’article 79.4 porte que les renseignements ainsi obtenus doivent pour la plupart demeurer confidentiels. L’article 79.5 habilite le directeur parlementaire du budget à embaucher les spécialistes dont il estime avoir besoin, l’exercice de ce pouvoir étant assujetti à l’autorité du Président du Sénat, du Président de la Chambre des communes et du Bibliothécaire parlementaire.
L’article 121 du projet de loi C-2 proclame la Loi sur le directeur des poursuites pénales (LDPP), qui compte 16 articles. Plusieurs amendements apportés à la LDPP par le Comité législatif ont été adoptés intégralement par la Chambre. D’autres amendements ont été proposés par le Comité sénatorial, mais ils ont été rejetés par la Chambre.
Les provinces ont le pouvoir d’intenter des poursuites à l’égard de la plupart des infractions au Code criminel; elles le conserveront, tandis que le directeur des poursuites pénales aura le pouvoir général d’intenter des poursuites à l’égard de dérogations aux lois fédérales autres que le Code(43). Parmi ces lois figure la Loi sur la gestion des finances publiques, qui prévoit des infractions de fraude commises à l’égard de Sa Majesté par des agents et employés du gouvernement (art. 261) ou de sociétés d’État (art. 269). Le directeur exerce aussi les attributions fédérales qui lui sont conférées par la Loi sur l’extradition et la Loi sur l’entraide juridique en matière criminelle (par. 3(9) de la LDPP). De plus, il peut conclure des ententes ou des accords avec le gouvernement d’une province afin de pouvoir exercer ses responsabilités (par. 3(7) de la LDPP).
Le directeur exerce ses attributions sous l’autorité et pour le compte du procureur général tout en ayant le rang et le statut d’administrateur général d’un ministère et il est considéré comme le sous procureur général dans le cadre de l’exercice de ses attributions (art. 3 de la LDPP), qui sont les suivantes : sauf celles qui sont prises en charge par le procureur général, intervenir relativement à des questions d’intérêt public qui pourraient avoir une incidence sur la conduite des poursuites ou des enquêtes, sauf les affaires à l’égard desquelles le procureur général a décidé d’intervenir, donner des lignes directrices aux procureurs de l’État relativement à la conduite des poursuites en général, conseiller les organismes chargés de l’application de la loi ou les organismes d’enquête, communiquer avec les médias et le public relativement à toute question reliée à des poursuites fédérales, exercer des pouvoirs fédéraux relatifs aux poursuites privées et exercer toutes autres attributions que lui assigne le procureur général. Les attributions supplémentaires conférées au directeur doivent être publiées dans la Gazette du Canada (par. 3(6) de la LDPP). Les lignes directrices générales données aux procureurs de l’État ne sont pas considérées des règlements au sens de la Loi sur les textes réglementaires, ce qui signifie qu’il n’est pas obligatoire de les enregistrer, de les publier ou de les rendre accessibles en vertu de cette loi (par. 3(5) de la LDPP).
Pour ce qui est des fonctions du directeur, le Comité législatif de la Chambre a supprimé l’alinéa selon lequel le directeur doit « mener […] les recours et autres procédures dans lesquels l’État a qualité d’intimé ». Cet alinéa a été enlevé parce que la définition de « poursuite » comprend déjà le recours et les autres procédures.
Le directeur est nommé par le gouverneur en conseil (le Cabinet) sur recommandation du procureur général (par. 3(1) de la LDPP). Il incombe à ce dernier de constituer un comité de sélection comptant un représentant de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, un représentant de chacun des partis reconnus à la Chambre des communes, le sous ministre de la Justice, le sous ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et une personne de son choix (art. 4 de la LDPP ). L’article 4 de la LDPP a été amendé par le Comité sénatorial pour modifier la composition du comité de sélection du directeur des poursuites pénales par l’ajout d’un représentant de chacun des partis reconnus au Sénat. Cet amendement a été rejeté par la Chambre. Suivant la version originale de l’article 4, le procureur général devait soumettre au comité de sélection une liste d’au plus dix candidats membres du barreau d’une province depuis au moins dix ans. Le comité de sélection devait alors dresser une liste restreinte de trois candidats parmi lesquels le procureur général en aurait choisit un. Suivant l’amendement soumis par le Comité sénatorial, au lieu que le procureur général soumette les noms de dix candidats au comité de sélection, c’est le comité de sélection qui détermine quels seront les candidats, les évalue et soumet trois noms au procureur général. Cet amendement a été rejeté par la Chambre. Il importe de signaler que le procureur général aurait quand même participé indirectement à la sélection initiale des candidats, puisque le comité de sélection compte deux sous-ministres et une personne de son choix. Le nom du candidat retenu est soumis à l'approbation l’examen d’un comité parlementaire désigné ou établi pour la circonstance. Après l'approbation du comité parlementaire, le procureur général doit recommander la nomination du candidat choisi ou, à défaut de l'approbation du comité, soumettre au comité une des deux autres candidatures recommandées.
Le directeur est nommé à titre inamovible pour un mandat de sept ans, mais il demeure en fonction jusqu’à ce qu’il soit remplacé (art. 5 de la LDPP). Il peut faire l’objet d’une révocation motivée par le gouverneur en conseil appuyé par une résolution de la Chambre des communes à cet effet. Le Comité sénatorial a amendé l’article 5 pour que la révocation motivée du directeur doive être appuyée également par une résolution du Sénat et pas seulement une résolution de la Chambre des communes, mais cet amendement a lui aussi été rejeté par la Chambre. Le directeur exerce sa charge à temps plein, ce qui veut dire qu’il ne peut occuper aucun autre emploi ou charge rétribuée. Sa rémunération et ses indemnités sont fixées par le gouverneur en conseil et, une fois fixées, ne peuvent pas être réduites.
À l’étape du rapport à la Chambre des communes, le gouvernement a tenté, mais en vain, d’annuler les amendements du Comité selon lesquels, d’une part, le procureur général « doit » (et non « peut ») nommer un directeur dont la candidature a été approuvée par le comité parlementaire et, d’autre part, le directeur ne peut être révoqué que moyennant l’appui de la Chambre des communes. Selon le gouvernement, le directeur, puisqu’il appartiendrait à l’organe exécutif du gouvernement, devrait être tenu de rendre compte principalement au procureur général et au gouverneur en conseil plutôt qu’au Parlement.
Le procureur général recommande au Cabinet, en consultation avec le directeur, le sous ministre de la Justice et un représentant de la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, la nomination d’un ou de plusieurs adjoints au directeur qui, comme ce dernier, doivent être membres du barreau d’une province depuis au moins dix ans (art. 6). L’adjoint peut exercer toutes les attributions du directeur, sous la supervision de ce dernier, en vertu de toute loi fédérale, et est considéré un substitut légitime du procureur général. En cas d’incapacité du directeur, l’adjoint peut le remplacer pour une période d’au plus 12 mois; une prolongation est toutefois possible avec l’approbation du gouverneur en conseil.
Le Bureau du directeur est composé de procureurs de l’État et d’autres employés nommés en conformité avec la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, mais le directeur peut aussi retenir les services (à contrat) d’autres procureurs et d’experts ou de spécialistes (art. 7 et 8). Tous les procureurs doivent être membres du barreau d’une province.
Le directeur peut, dans les limites qu’il fixe, déléguer des pouvoirs aux procureurs de son bureau, aux procureurs engagés à contrat et aux autres employés salariés, sauf le pouvoir de délégation lui même (art. 9). Toute personne agissant en vertu de l’autorisation du directeur est mandataire de ce dernier et n’est pas tenue de faire la preuve de cette délégation. En outre, le directeur, ses adjoints et les procureurs peuvent être des mandataires désignés du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile en vue de faire une demande d’autorisation pour intercepter des communications en vertu de l’article 185 du Code criminel.
Le gouvernement estime que le nouveau modèle de Bureau de directeur des poursuites pénales s’inspire des meilleures caractéristiques des bureaux semblables que l’on retrouve dans certaines provinces et d’autres pays(44). Ainsi, même si le procureur général peut formuler des commentaires ou annuler la décision du directeur au moyen de directives au sujet d’une poursuite en particulier ou des poursuites en général, les directives doivent être consignées par écrit et publiées dans la Gazette du Canada (art. 10). De plus, les directives générales ne peuvent être rendues qu’après consultation du directeur. Le procureur général ou le directeur peuvent retarder la publication d’une directive dans l’intérêt de l’administration de la justice, mais ils ne peuvent la reporter au delà du terme de la poursuite ou de celui de toute poursuite connexe (art. 11). Il est entendu que les directives ne sont pas des règlements au sens de la Loi sur les textes réglementaires, ce qui signifie qu’il n’est pas obligatoire de les enregistrer, de les publier ou de les rendre accessibles en vertu de cette loi (art. 12).
Quand une poursuite ou intervention soulève d'importantes questions d’intérêt général, le directeur en informe le procureur général (art. 13 de la LDPP). Celui-ci peut alors intervenir lorsqu'une poursuite soulève des questions d'intérêt public, en première instance ou en appel, après en avoir avisé le directeur (art. 14 de la LDPP)(45). Une telle intervention suppose que le directeur continue de mener la poursuite, mais que le procureur général peut figurer comme partie à la procédure et présenter des arguments en cour. Par ailleurs, le procureur général peut prendre en charge une poursuite, s’il consulte au préalable le directeur (art. 15 de la LDPP). Il doit alors aviser le directeur, par écrit, de son intention, et cet avis doit être publié dans la Gazette du Canada. La publication peut être reportée aux fins de l’administration de la justice. Si le procureur général prend en charge une poursuite, le directeur doit lui remettre le dossier et lui fournir tout autre renseignement nécessaire, dans les délais prescrits.
Le directeur doit chaque année, au plus tard le 30 juin, faire rapport des activités de son bureau pour l’exercice précédent, sauf en ce qui concerne les procédures visées par la LEC (art. 16). Le rapport est remis au procureur général, qui le dépose devant chacune des deux chambres du Parlement dans les 15 jours de séance qui suivent.
Les articles 122 à 128 du projet de loi énoncent les dispositions transitoires touchant le fonctionnement du Bureau du directeur des poursuites pénales. L’actuel sous procureur général adjoint (droit criminel) agira comme directeur des poursuites pénales en attendant qu’une personne soit nommée à ce poste et il peut nommer deux personnes comme adjoints en attendant que l’adjoint du directeur soit nommé en vertu de la nouvelle LDPP. Le Comité législatif de la Chambre a supprimé la limite d’un an à laquelle était assujetti l’intérim assuré par le directeur intérimaire, et ce, au cas où la nomination du nouveau directeur exigerait une période plus longue. En cas de décès ou d’empêchement du directeur intérimaire, un des adjoints intérimaires peut prendre sa place. Les employés qui occupent un poste au Service fédéral des poursuites seront considérés comme occupant un poste au Bureau du directeur des poursuites pénales et leur situation d’emploi ne changera pas. D’autres fonctionnaires peuvent être mutés à ce bureau, s’il est souhaitable de le faire et si le Conseil du Trésor le recommande. Les procureurs dont les services sont déjà retenus par contrat le resteront au même titre en vertu de la LDPP. Quand celle-ci entrera en vigueur, la portion du budget du Service fédéral des poursuites qui n’est pas encore engagée sera transférée au Bureau du directeur. Enfin, les poursuites en cours auxquelles est partie le procureur général seront reprises par le directeur sans autre formalité, tandis que le commissaire aux élections fédérales pourra continuer de mener les poursuites en cours en vertu de la LEC.
Les articles 129 à 140 prévoient des modifications corrélatives à d’autres lois. En premier lieu, le Bureau du directeur est assujetti aux dispositions de la Loi sur l’accès à l’information (art. 129). De plus, plusieurs modifications sont apportées à la LEC, puisque les poursuites relatives à son application relèveront dorénavant du directeur des poursuites pénales (art. 130 à 136). Si le commissaire aux élections fédérales estime qu’il y a eu infraction, il peut saisir le directeur de la question et celui ci décidera s’il doit ou non intenter une poursuite. Quand une personne respecte les conditions d’une entente conclue avec le commissaire en vue de respecter la LEC, le directeur ne peut pas intenter une poursuite, mais il doit recevoir des copies de la transaction et de tout avis de défaut d’exécution. De plus, la LEC est modifiée de façon à permettre au directeur général des élections de consulter le directeur des poursuites pénales avant de faire rapport et à permettre à ce dernier d’examiner, aux fins d’une poursuite, les documents reliés aux élections qui autrement ne lui seraient peut être pas communiqués.
La Loi sur le ministère de la Justice est modifiée pour préciser que le sous ministre de la Justice, habituellement considéré le sous procureur général, n’a pas ce dernier titre en ce qui concerne les attributions qu’exerce le directeur des poursuites pénales (art. 137). Les annexes de la Loi sur la gestion des finances publiques sont modifiées afin d’indiquer que le ministre de la Justice préside le Bureau du directeur des poursuites pénales et que le Bureau fait partie de l’administration publique centrale pour l’application des diverses dispositions de cette loi (art. 138 et 139). La dernière modification corrélative assujettit le Bureau du directeur des poursuites pénales aux dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels (art. 140).
Le principal objectif de la LDPP proposée est de faire en sorte que les poursuites intentées en vertu des lois fédérales soient indépendantes du procureur général du Canada et du processus politique(46). Toutefois, les médias ont attaqué la LDPP, disant qu’elle ne confère pas au directeur l’indépendance que le gouvernement affirme lui donner : le directeur agit « sous l’autorité et pour le compte du procureur général », il est choisi parmi les candidats proposés par le procureur général et ce dernier peut intervenir dans les questions d’intérêt public(47). Ces affirmations sont justes, mais il reste que la LDPP prévoit un processus de nomination relativement ouvert et transparent et que toute intervention ou participation du procureur général dans les poursuites nécessite un avis écrit.
Les provinces ayant compétence pour la plupart des infractions au Code criminel(48), certains observateurs prédisent l’impuissance du Bureau du directeur des poursuites pénales pour ce qui est de superviser les poursuites dans les cas de fraude. Pourtant, le projet de loi accroît en fait la compétence du directeur à l’égard de ce type d’infraction. Le directeur se chargera dorénavant non seulement des infractions existantes en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, mais aussi de nouvelles infractions. Plus précisément, un agent ou un employé qui commet une fraude de plus de 5 000 $ au détriment du gouvernement ou d’une société d’État sera passible d’une peine d’emprisonnement d’au plus 14 ans(49). Si le montant de la fraude est de 5 000 $ ou moins, la peine maximale d’emprisonnement sera de cinq ans. Ces infractions sont, par leur nature et les peines fixées, assimilables à celles prévues à l’article 380 du Code criminel. Le gouvernement a précisé qu’il effectuera, par l’intermédiaire du Bureau du directeur des poursuites pénales et en collaboration avec d’autres administrations, un examen des leçons apprises et des pratiques exemplaires de poursuites à l’égard de fraudes perpétrées au sein d’administrations gouvernementales(50).
Selon certains, la nouvelle LDPP aggrave une américanisation injustifiée du système canadien, car au Canada, la conduite des procureurs ou des membres de la GRC ne suscite aucune réelle inquiétude(51). Il se peut que l’on surestime les éventuels problèmes liés à l’indépendance de la poursuite et que la création d’un Bureau du directeur des poursuites pénales ne garantisse pas l’impartialité et la responsabilisation, et il existe peut-être d’autres mécanismes pour assurer l’indépendance et la bonne conduite de la poursuite(52).
Le projet de loi C-2 élargit le champ d’application de la Loi sur l’accès à l’information (LAI)(53) pour l’étendre à un certain nombre de hauts fonctionnaires du Parlement(54), de sociétés d’État et de fondations créées en vertu d’une loi fédérale. Les organismes suivants sont ajoutés à l’annexe I de la LAI :
Le Comité législatif de la Chambre a amendé le projet de loi pour élargir la définition d’« institution fédérale » à toute société d’État mère et à toutes ses filiales au sens de l’article 83 de la Loi sur la gestion des finances publiques. Cet amendement a pour effet d’accroître considérablement la portée de la LAI. Le nouveau paragraphe 3.01(2) précise que la Fondation canadienne des relations raciales et l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public sont des sociétés d’État mères pour l’application de la LAI (art. 142). En outre, le nouvel article 165, inséré dans le projet de loi à l’étape du rapport à la Chambre des communes, ajoutait la Commission canadienne du blé, qui n’est pas une société d’État, aux institutions visées par l’annexe I de la LAI. L’article 165 a été supprimé par le Comité sénatorial, mais cet amendement a été rejeté par la Chambre. Le projet de loi prévoit aussi que d’autres organismes pourront être incorporés à la LAI. En vertu de l’article 77 de la LAI, modifié par le paragraphe 163(2) du projet de loi, le Cabinet sera habilité à prendre des règlements qui fixent les critères à appliquer pour ajouter des organismes à l’annexe I.
Aux termes de la LAI, tout citoyen peut demander de l’information détenue par le gouvernement fédéral et, à moins que l’information en question ne fasse l’objet de certaines exceptions précises et limitées, la LAI oblige le gouvernement à la communiquer au demandeur dans des délais prescrits. Le projet de loi ajoute de nouvelles exceptions et exclusions reliées à l’ajout de hauts fonctionnaires du Parlement, de sociétés d’État et de fondations à la liste des organisations fédérales figurant dans la LAI.
Les nouvelles dispositions protègent certains types de renseignements recueillis ou produits par les hauts fonctionnaires du Parlement. L’article 144 du projet de loi ajoute à la LAI un nouvel article 16.1 portant que les responsables de certaines institutions fédérales – le vérificateur général du Canada, le commissaire à l’information, le commissaire à la protection de la vie privée et le commissaire aux langues officielles et le commissaire au lobbying – sont tenus de refuser de communiquer des renseignements obtenus ou créés dans le cadre d’une enquête, d’un examen ou d’une vérification. Cependant, à la suite des amendements du Comité législatif de la Chambre, le paragraphe 16.1(3) obligeait le commissaire à l’information et le commissaire à la protection de la vie privée à communiquer les documents qui contiennent des renseignements créés par eux ou pour leur compte dans le cadre d’une de leurs enquêtes ou vérifications, une fois que celle-ci sera terminée. L’inclusion du commissaire au lobbying à l’article 16.1 a été rejetée par la Chambre.
Aux termes du nouvel article 16.3, le directeur général des élections peut de refuser de communiquer tout renseignement relié à une révision, une enquête ou à un examen fait sous l’autorité de la Loi électorale du Canada, (LEC), sauf si le renseignement doit être rendu public en vertu de cette loi. L’amendement apporté par le Comité sénatorial à l’article 16.3 pour donner au directeur général des élections un pouvoir discrétionnaire à ce sujet au lieu de le forcer à le faire a été accepté par la Chambre. L’article 541 de la LEC exige que le directeur général des élections mette à la disposition du public tous les rapports financiers déposés auprès d’Élections Canada par les différentes entités d’une organisation politique : les partis (art. 424 et 429); les candidats (art. 451 et 455); les associations de circonscription (art. 403.35); les candidats à l’investiture (art. 478.23 et 478.3); les candidats à la direction (art. 435.3 et 435.35).
On peut obtenir différents types de renseignements contenus dans ces rapports, notamment les données du vérificateur, le nom des donateurs, le montant des contributions versées (s’il dépasse le seuil de 200 $) et les dépenses électorales ou de campagne engagées par chaque entité. En outre, le public a accès aux renseignements suivants : les instructions données par le directeur général des élections sous le régime de la LEC; les décisions qu’il a rendues sur des questions qui se posent dans l’application de la LEC; toute la correspondance avec des fonctionnaires électoraux ou d’autres personnes relativement à une élection.
Le Comité législatif de la Chambre a supprimé certaines des nouvelles exclusions qui avaient été proposées dans le projet de loi, notamment celle qui aurait protégé les renseignements dont la communication risquait d’entraver les négociations contractuelles d’une institution fédérale et une autre qui aurait obligé le responsable du Centre national des arts à refuser de communiquer des documents qui auraient divulgué la teneur d’un contrat conclu avec un artiste ou l’identité d’un donateur. Cette dernière a été rétablie à l’article 20.4 (art. 148 du projet de loi) par le Comité sénatorial, et le changement a été accepté par la Chambre. Le Comité sénatorial a aussi ajouté une nouvelle exclusion (art. 20.3 de la LAI, art. 148 du projet de loi) pour obliger le responsable de la Fondation du Canada pour l’appui technologique au développement durable à refuser de communiquer des documents contenant des informations qui se rapportent à des demandes d’aide financière, ou à des travaux ou des bénéficiaires admissibles. Cette exclusion a été rejetée par la Chambre.
Une société d’État maintenant visée par la LAI en vertu de la version modifiée du projet de loi est l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada. Le Comité législatif de la Chambre a ajouté au projet de loi une nouvelle exclusion qui porte sur certains documents de l’Office. Le nouvel article 20.2, incorporé à l’article 148 du projet de loi, oblige le responsable de l’Office à refuser de communiquer un document qui contient des conseils ou des renseignements « en matière d’investissement que l’Office a obtenus à titre confidentiel d’un tiers, si l’Office les a traités de façon constante comme étant de nature confidentielle ».
Les intérêts économiques de certaines sociétés d’État, à savoir la Société canadienne des postes, Exportation et développement Canada, l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public et VIA Rail Canada et la Fondation du Canada pour l’appui technologique au développement durable, sont protégés par une nouvelle disposition, l’article 18.1 de la LAI (art. 147 du projet de loi). (L’inclusion de la Fondation du Canada pour l’appui technologique au développement durable à l’article 18.1 a été rejetée par la Chambre.) Cette disposition permet au responsable de la société en question de refuser de communiquer des documents contenant des secrets industriels ou des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques qui appartiennent à la société et que celle-ci traite constamment comme étant de nature confidentielle. Le responsable ne peut cependant pas se prévaloir de cette disposition pour refuser de communiquer des renseignements se rapportant à l’administration des sociétés d’État concernées ou à des activités de la Société canadienne des postes entièrement financées sur des crédits votés par le Parlement.
Le nouvel article 22.1 de la LAI (voir l’art. 150 du projet de loi) permettra aux responsables d’institutions fédérales de refuser de communiquer tout document de moins de 15 ans contenant le rapport préliminaire d’une vérification interne d’une institution fédérale ou des documents de travail connexes, sauf si aucun rapport définitif n’a été remis dans les deux ans suivant le début de la vérification.
Le Comité sénatorial a ajouté au projet de loi l’article 150.1 insérant dans la LAI une nouvelle disposition, l’article 26.1, pour instituer une dérogation qui aurait permis au responsable d’une institution fédérale de communiquer des documents qui auraient par ailleurs été exemptés s’il avait estimé qu’il était dans l’intérêt public de le faire, à moins que l’information en cause n’ait concerné la sécurité nationale. L’amendement a été rejeté par la Chambre.
L’article 159 du projet de loi crée deux nouvelles exclusions qui font échapper certains documents à l’application de la LAI. Le nouvel article 68.1 exclut les informations qui relèvent de la Société Radio-Canada et qui se rapportent à des activités de journalisme, de création ou de programmation, mais pas les renseignements qui concernent son administration. L’article 68.2 exclut de la portée de la LAI tous les renseignements qui relèvent d’Énergie atomique du Canada, sauf ceux qui concernent son administration ou le fonctionnement d’une installation nucléaire assujettie à la réglementation de la Commission canadienne de sûreté nucléaire. L’article 159 a été amendé par le Comité sénatorial pour ajouter de nouvelles dispositions, les articles 68.3 à 68.8, à la LAI. Ces nouveaux articles auraient soustrait à l’application de la LAI les documents que possédaient les cinq fondations et les bureaux des cinq hauts fonctionnaires du Parlement nouvellement assujettis à LAI avant l’entrée en vigueur de l’article 166 du projet de loi. Cette disposition aurait soustrait à l’application de la LAI tout document détenu par ces entités avant leur ajout à la LAI par le projet de loi. Cette façon inhabituelle d’envisager l’application de la LAI à de nouvelles entités a été rejetée par la Chambre.
Une autre exclusion nouvelle se trouve à l’article 172.01, inséré par le Comité sénatorial pour ajouter la LEC à l’annexe II de la LAI, ainsi que la mention de l’article 540 en regard du titre de la LEC. Cette disposition a pour effet d’exclure de la LAI certains documents électoraux dont la communication est limitée par l’article 540. Cet amendement a été accepté par la Chambre.
Le nouvel article 172.1 ajouté par le Comité législatif de la Chambre, qui permet de réévaluer l’opportunité d’inclure la Commission canadienne du blé à l’annexe 1 de la LAI, a été rejeté par le Comité sénatorial. La Chambre n’a pas accepté cet amendement.
L’article 143 du projet de loi ajoute à la LAI une nouvelle disposition, le paragraphe 4(2.1), qui oblige les institutions à assister les demandeurs sans égard à leur identité. Ainsi, le responsable d’une institution fédérale doit, peu importe l’identité du demandeur, faire « tous les efforts raisonnables […] pour lui prêter toute l’assistance indiquée », pour donner suite à sa demande de façon précise et complète et lui communiquer le document sur le support demandé. Le Comité sénatorial a amendé cet article pour exiger que les ministères fournissent les documents aux demandeurs en temps utile. Cet amendement a été accepté par la Chambre. L’article 151 du projet de loi modifie l’article 31 de la LAI pour clarifier le délai de dépôt des plaintes devant le commissaire à l’information.
Le Comité législatif de la Chambre a ajouté l’article 162 au projet de loi pour créer l’article 72.1 de la LAI, qui oblige les responsables des ministères ou départements d’État fédéraux à publier chaque année un rapport sur toutes les dépenses engagées relativement à leur bureau et payées sur le Trésor.
Les articles 181 à 193 du projet de loi modifient la Loi sur la protection des renseignements personnels, ajoutant à son annexe certaines des institutions fédérales ajoutées à l’annexe I de la LAI, à savoir les commissariats à l’information et à la protection de la vie privée, toutes les sociétés d’État et les cinq fondations nommées plus tôt, et y apportent des modifications corrélatives. L’article 188 exclut de l’application de la Loi sur la protection des renseignements personnels les renseignements personnels que la Société Radio-Canada recueille, utilise ou communique à des fins journalistiques, artistiques ou littéraires.
Lorsque le projet de loi a été rendu public, le gouvernement a fait savoir qu’il espérait que les propositions législatives du commissaire à l’information (la « Loi sur la transparence gouvernementale »)(57) et son propre document de travail(58) seraient étudiés par le Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique de la Chambre des communes. La LAI a fait l’objet de nombreux examens depuis une vingtaine d’années, ce qui a donné lieu à bon nombre de projets de réforme(59). Parmi les nombreux amendements que le Comité législatif de la Chambre a apportés aux dispositions touchant la LAI, le plus important est l’élargissement du champ d’application de la LAI à toutes les sociétés d’État. Il reste toutefois de nombreuses questions litigieuses concernant l’accès à l’information.
Les directeurs du scrutin sont responsables de l’administration de l’élection dans leur circonscription électorale. Ils sont nommés par le gouverneur en conseil, mais le directeur général des élections, entre autres, a recommandé que l’on modifie la Loi électorale du Canada (LEC) de manière à ce qu’ils soient nommés par lui(60).
Le directeur général des élections est habilité par le projet de loi C-2 à nommer les directeurs du scrutin, et ce, pour un mandat de dix ans (par. 174(1) du projet de loi). Le projet de loi autorise aussi le directeur général des élections à préciser les qualifications requises pour le poste de directeur du scrutin, à établir un processus de nomination fondé sur le mérite et à destituer au besoin un directeur du scrutin.
Le directeur général des élections devra remettre un rapport au Président de la Chambre des communes chaque fois qu’il précisera les qualifications des directeurs du scrutin ou qu’il établira une procédure de nomination ou de destitution ou qu’il y aura apporté des modifications importantes (art. 177 du projet de loi portant ajout de l’art. 535.2 à la LEC). Le processus de nomination doit être externe, ce terme étant défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. Autrement dit, le directeur général des élections doit tenir un concours ouvert au public.
Le poste de directeur du scrutin peut devenir vacant avant l’expiration du mandat de dix ans si le titulaire décède, démissionne ou cesse de résider dans la circonscription, ou s’il est révoqué pour un des motifs énumérés au paragraphe 24(7) de la LEC (par. 174(3) du projet de loi). Ce paragraphe autorise la révocation d’un directeur du scrutin dans les conditions suivantes :
Le directeur général des élections peut reconduire le mandat d’un directeur du scrutin après avoir consulté les chefs de tous les partis reconnus à la Chambre des communes (nouveau par. 24(1.4) de la LEC).
Le projet de loi C-2 apporte d’importantes modifications à la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (LPFDAR), notamment l’amélioration des mesures de protection des fonctionnaires qui divulguent des actes répréhensibles et l’établissement d’un tribunal indépendant de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles. Le texte initial présenté à la Chambre des communes contenait une disposition portant versement d’une récompense spéciale d’au plus 1 000 $ aux fonctionnaires et aux autres personnes qui dévoilent des actes répréhensibles, mais celle-ci a été supprimée par le Comité législatif de la Chambre.
Le projet de loi est la dernière en date d’une série de mesures prises au sujet de la divulgation d’actes répréhensibles dans la fonction publique et de la protection des fonctionnaires qui révèlent ces actes. Ces questions ont fait l’objet de groupes de travail, de politiques, de codes, de rapports, d’études et de projets de loi, aussi bien d’initiative gouvernementale que d’initiative parlementaire, depuis au moins 1996(61). Plus récemment, le Rapport que la vérificatrice générale du Canada a rendu public en novembre 2003(62) a souligné le besoin de mieux protéger les personnes qui cherchent à révéler les actes répréhensibles commis dans la fonction publique fédérale. Il y a eu ensuite le dépôt du projet de loi C-25, une version antérieure de la LPFDAR, et les rapports de la Commission Gomery. Selon le premier rapport de la Commission, un fonctionnaire a bien perdu son poste pour avoir tenté de dénoncer des pratiques douteuses et des cas possibles de mauvaise gestion des fonds publics(63).
À l’article 194 du projet de loi, le Comité sénatorial a modifié plusieurs définitions figurant au paragraphe 2(1) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles (LPFDAR). La définition amendée de « divulgation protégée » comprend les divulgations faites par un fonctionnaire lorsque la loi le lui permet, et quand elle l’y oblige comme c’est déjà le cas. Cet amendement élargit les circonstances dans lesquelles ces divulgations sont autorisées et couvertes par la LPFDAR. L’amendement de la définition de « secteur public » confirme l’exclusion des Forces canadiennes, mais a pour effet d’inclure le Centre de la sécurité des télécommunications et le Service canadien du renseignement de sécurité. Les amendements des définitions ont été rejetés par la Chambre.
L’article 196 du projet de loi modifie l’alinéa 3a) de la LPFDAR afin de retirer au gouvernement la faculté de soustraire les sociétés d’État à son application. Il le fait en supprimant les mots « ou en retrancher » de l’alinéa en question, qui dit maintenant : « ajouter à l’annexe 1 le nom de toute société d’État ou de tout organisme public ».
L’article 200 du projet de loi remplace le paragraphe 13(1) de la LPFDAR afin de permettre à tout fonctionnaire de s’adresser directement au commissaire à l’intégrité du secteur public pour lui faire part d’actes répréhensibles. À l’heure actuelle, un fonctionnaire n’est autorisé à s’adresser directement au commissaire pour divulguer des actes répréhensibles que s’il a des motifs raisonnables de croire qu’il vaut mieux ne pas faire la divulgation directement à son supérieur hiérarchique ou à l’agent supérieur désigné en premier lieu, ou s’il s’est déjà adressé à ces personnes et considère qu’il n’a pas été donné suite à son action comme il se doit.
Le Comité sénatorial a amendé l’article 194 du projet de loi pour ajouter deux nouveaux alinéas à la définition de « représailles » figurant au paragraphe 2(1) de la LPFDAR. La définition, qui porte actuellement sur les mesures relatives aux conditions de travail, s’en trouve élargie pour inclure toute autre mesure pouvant directement ou indirectement nuire au fonctionnaire et toute menace à cet égard. En outre, l’article 201 du projet de loi a été amendé pour créer une nouvelle disposition, l’article 19.01, qui institue une présomption réfutable suivant laquelle toute sanction disciplinaire ou toute mesure administrative prise à l’endroit d’un fonctionnaire qui a fait une divulgation protégée est considérée comme constituant des représailles. Tous ces amendements ont été rejetés par la Chambre.
L’article 201 du projet de loi remplace les articles 19 à 21.9 de la LPFDAR par de nouvelles dispositions et confère au commissaire à l’intégrité du secteur public le pouvoir d’entendre les plaintes, de mener des enquêtes et de tenter d’obtenir par conciliation une entente entre les parties. En l’absence d’entente, le commissaire peut renvoyer l’affaire à un nouveau tribunal indépendant de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles.
À l’heure actuelle, la LPFDAR permet aux fonctionnaires qui s’estiment victimes de mesures de représailles de s’adresser au tribunal administratif concerné, à savoir la Commission des relations de travail dans la fonction publique ou le Conseil canadien des relations industrielles. Aux termes des modifications proposées dans le projet de loi, c’est le commissaire (ou la personne désignée par lui), et non les tribunaux administratifs, qui peut faire enquête sur les allégations de mesures de représailles et, si l’allégation est fondée, négocier une entente avec toutes les parties concernées (y compris la personne habilitée à prendre des mesures disciplinaires).
Le commissaire à l’intégrité du secteur public ne peut toutefois pas imposer un règlement. Il est un haut fonctionnaire du Parlement et, à ce titre, il est indépendant du gouvernement et assume des fonctions en matière d’examen et de responsabilisation. En général, les hauts fonctionnaires du Parlement ont le pouvoir de faire des observations, des suggestions et des recommandations, mais non celui de faire exécuter des ordonnances, responsabilité qui est habituellement laissée aux tribunaux ou au système judiciaire. Ainsi, un règlement approuvé par le commissaire pourra être rendu exécutoire par ordonnance de la Cour fédérale à la demande du commissaire ou d’une partie au règlement en question.
L’article 201 du projet de loi ajoute à la LPFDAR le nouveau paragraphe 20.7(1), qui constitue un tribunal indépendant de la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles. Ce tribunal pourra décider si un fonctionnaire a effectivement été victime de représailles, ordonner des mesures correctives et voir à ce que des sanctions soient imposées aux personnes qui auront pris des mesures de représailles.
Ce nouveau tribunal administratif quasi judiciaire est doté d’importants pouvoirs analogues à ceux d’autres tribunaux bien établis tels que le Tribunal canadien des droits de la personne ou le Tribunal de la concurrence.
Comme le précise le nouvel article 21 de la LPFDAR proposé dans le projet de loi, le tribunal suivra les principes de justice naturelle et ses décisions pourront donc faire l’objet d’un contrôle judiciaire. Concrètement, cela veut dire qu’il pourra être fait appel de ses décisions par la voie du système de contrôle judiciaire, ce qui pourrait augmenter la durée et le coût de la résolution des plaintes de représailles.
L’article 203 du projet de loi remplace les articles 24 et 25 de la LPFDAR et ajoute un nouvel article 25.1. Le nouvel article 24 porte sur le droit qu’a le commissaire de refuser de donner suite à une divulgation ou de refuser de commencer ou de poursuivre une enquête. L’article 25 porte sur les pouvoirs de délégation du commissaire. L’article 25.1 confère au commissaire le pouvoir de mettre des services de consultation juridique gratuits à la disposition des fonctionnaires qui envisagent de divulguer des actes répréhensibles, d’agir comme témoin ou de présenter une plainte de représailles. Le même article autorise le commissaire à offrir des services de consultation juridique gratuits à une personne autre qu’un fonctionnaire qui envisagerait de lui communiquer des informations sur des actes répréhensibles commis par des fonctionnaires. Les frais payés en vertu de ces dispositions ne peuvent normalement dépasser 1 500 $, sauf circonstances exceptionnelles, auquel cas ils peuvent atteindre un plafond de 3 000 $. Le Comité sénatorial a porté de 1 500 $ à 25 000 $ et de 3 000 $ à une somme laissée à la discrétion du commissaire à l’intégrité du secteur public les montants maximaux pouvant être accordés à des fonctionnaires au titre de services de consultation juridique aux termes de l’article 25.1. Ces augmentations ont été rejetées par la Chambre.
Les articles 209, 210 et 211 du projet de loi modifient les articles 37 et 38 de la LPFDAR pour préciser les exigences en matière de rapports. Ils disposent que :
Le commissaire peut déléguer au sous-commissaire certaines de ses attributions et certains de ses pouvoirs (art. 212 du projet de loi). Cette disposition a été amendée par le Comité législatif de la Chambre pour préciser que le commissaire ne peut pas déléguer les pouvoirs et obligations qui lui sont conférés aux termes de l’article 38 de la LPFDAR.
L’article 215 du projet de loi étend la protection à tous ceux – non seulement les fonctionnaires – qui divulguent des actes répréhensibles commis dans l’administration publique en interdisant :
L’article 215 du projet de loi ajoute à la LPFDAR le nouvel article 42.3, qui prévoit des peines précises pour les infractions à cette loi, notamment des peines plus lourdes à l’endroit de quiconque entrave délibérément une enquête sur un acte répréhensible. Quiconque commet ces infractions est passible d’une amende d’au plus 10 000 $ ou d’une peine d’emprisonnement d’au plus deux ans, ou des deux. La constitutionnalité de cette disposition pourrait être contestée, puisque les relations entre employeurs et employés relèvent normalement du droit des biens et du droit civil, et sont donc de la compétence des provinces (Loi constitutionnelle de 1867, par. 92(13)).
L’article 219 du projet de loi ajoute à la LPFDAR l’article 51.1 régissant les mesures temporaires nécessaires pour assurer le bon fonctionnement des services.
Le Comité législatif a supprimé l'ancien article 220 du projet de loi, qui aurait modifié la LPFDAR par l’ajout d’une disposition portant versement de récompenses. Aux termes de cet article, les fonctionnaires qui dévoilent un acte répréhensible auraient eu droit à une récompense spéciale d’au plus 1 000 $(64).
L’article 221 du projet de loi remplace l’article 55 de la LPFDAR par une nouvelle disposition visant à protéger contre toute communication aux termes de la Loi sur l’accès à l’information les renseignements créés en vue de faire une divulgation ou au cours d’une enquête associée à une divulgation. On cherche ainsi à protéger les renseignements délicats relatifs aux divulgations détenus par le commissaire à l’intégrité du secteur public au même titre que les renseignements que possèdent les autres hauts fonctionnaires du Parlement qui mènent des enquêtes. Cette disposition a été amendée par la Chambre des communes à l’étape du rapport pour préciser que l’interdiction de communication est levée si la personne qui a fourni les renseignements contenus dans le document concerné consent à sa communication. Elle a été amendée aussi par le Comité sénatorial pour élargir la catégorie des documents qui ne doivent pas être communiqués par le commissaire à l’intégrité du secteur public aux termes de l’article 16.4 de la LAI de manière à mieux protéger l’identité des fonctionnaires qui font une divulgation ou qui témoignent dans le cours d’une enquête menée aux termes de la LPFDAR. Un autre amendement du même article limite l’exemption relative aux documents liés à des divulgations ou des enquêtes en vertu de la LPFDAR aux cas où l’information pourrait révéler l’identité d’un divulgateur ou d’un témoin et à ceux où l’enquête n’est pas terminée. Ces amendements ont été rejetés par la Chambre.
Les articles 223 et 224 du projet de loi ont été amendés par le Comité sénatorial de manière à protéger certains renseignements aux termes de la législation fédérale sur la protection des renseignements personnels, mais ces amendements aussi ont été rejetés par la Chambre. L’article 223 a été amendé pour limiter l’exemption aux termes du nouvel alinéa 9(3)e) (qui vise les renseignements relatifs aux divulgations ou aux enquêtes menées en vertu de la LPFDAR) de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques aux cas où les renseignements risqueraient de révéler l’identité d’un divulgateur ou d’un témoin. Ainsi, les documents en question n’auront pas à être communiqués à une personne faisant une demande d’accès à des renseignements personnels. L’article 224 a été amendé pour remplacer l’article 22.2 de la Loi sur la protection des renseignements personnels par une nouvelle disposition visant à protéger l’identité des divulgateurs en vertu de la LPFDAR. Aux termes de la nouvelle disposition, le commissaire à l’intégrité du service public ne peut pas divulguer sans le consentement de la personne concernée des renseignements personnels liés à une enquête réalisée en vertu de la LPFDAR et demandés aux termes du paragraphe 12(1) de la Loi sur la protection des renseignements personnels si la communication de ces renseignements risque d’identifier un divulgateur ou un témoin.
Ces articles du projet de loi C-2 créent une commission des nominations publiques, confient à l’Agence du revenu du Canada le pouvoir d’effectuer ses propres vérifications internes, portent de trois à quatre ans la durée du mandat des administrateurs des sociétés d’État et modifient légèrement les règles applicables à la Commission de la capitale nationale. D’autres articles de la partie 4 du projet de loi touchent des aspects administratifs des lois régissant les sociétés d’État, par exemple le remplacement de « Chairman » par « Chairperson » dans la version anglaise.
L’article 227 modifie la Loi sur les traitements pour permettre au gouverneur en conseil de constituer une commission des nominations publiques, composée d’au plus cinq membres, dont le président, nommés pour un mandat de cinq ans renouvelable. Le mandat a été porté de cinq à sept ans par le Comité sénatorial, mais cet amendement a été rejeté par la Chambre. Cette disposition a été amendée par le Comité législatif de la Chambre pour inclure des précisions sur le rôle de la commission des nominations publiques, qui comprend notamment les fonctions suivantes :
Un autre amendement apporté à l’étape de l’étude en comité est l’obligation faite au premier ministre de consulter tous les chefs de partis reconnus à la Chambre des communes avant de nommer une personne à la commission des nominations publiques.
L’article 237 donne à l’Agence du revenu du Canada la compétence voulue pour effectuer ses vérifications internes, au lieu de laisser cette responsabilité au Conseil du Trésor (à qui l’art. 258 attribue la compétence dans ce domaine pour les autres secteurs de l’administration publique fédérale).
L’article 267 modifie la Loi sur la gestion des finances publiques de façon à ce que les membres des conseils d’administration des sociétés d’État soient nommés pour un mandat d’au plus quatre ans.
L’article 285 porte de 13 à 15 le nombre des membres, ou commissaires, de la Commission de la capitale nationale. Aux termes de l’article 286, la Commission peut autoriser un simple commissaire à remplir les fonctions de président ou de premier dirigeant de façon intérimaire pour une période maximale de 60 jours, à moins d’une prorogation approuvée par le gouverneur en conseil. Actuellement, la disposition de la Loi sur la capitale nationale que remplace l’article 288 ne prévoit pas de durée maximale.
L’article 297 impose une restriction à l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public en disposant que ses dirigeants et employés et ceux des personnes morales de son groupe ne peuvent être membres du comité de vérification.
Certaines des dispositions relatives aux nominations et aux lignes directrices limitent à quatre ans la durée maximale du mandat que peuvent exercer les présidents, administrateurs et membres des conseils d’administration des sociétés d’État nommées(65). D'autres remplacent le terme « Chairman » par « Chairperson » dans la version anglaise et les termes « président » ou « vice-président », selon le cas, par « premier dirigeant » (ou ajoutent tout simplement ce dernier terme) dans les lois habilitantes des sociétés d’État(66). D’autres encore maintiennent certaines sociétés d’État(67).
Les articles 257 à 275 du projet de loi C-2 modifient certaines dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP). Ils obligent les ministères à se doter de mesures satisfaisantes de vérification interne et à constituer des comités de vérification; à créer le poste d’administrateur des comptes; et à effectuer un examen de leurs programmes de subventions et de contributions. En outre, ils alourdissent les peines infligées pour fraude contre l’État.
Actuellement, la capacité de vérification interne des ministères est variable. L’article 258 du projet de loi, qui modifie le paragraphe 7(1) de la LGFP, intègre au mandat du Conseil du Trésor la responsabilité de la vérification interne dans l’administration publique fédérale. L’article 259 ajoute les articles 16.1 et 16.2 à la LGFP. En vertu de l’article 16.1, l’administrateur général d’un ministère doit veiller à ce que des mesures satisfaisantes de vérification interne soient prises dans son ministère. Aux termes de l’article 16.2, il doit constituer un comité de vérification pour son ministère. Ces articles transforment en obligations légales les dispositions équivalentes de la Politique sur la vérification interne du Conseil du Trésor(68).
L’article 268 du projet de loi interdit aux dirigeants et aux salariés d’une société d’État de faire partie du comité de vérification. Cette mesure vise à rendre le comité indépendant de la direction.
L’article 260 oblige les ministères à effectuer un examen quinquennal de leurs programmes de subventions et de contributions afin d’en vérifier l’utilité et l’efficacité. Cette mesure, qui était prescrite par la Politique sur les paiements de transfert du Conseil du Trésor(69), devient elle aussi une obligation légale.
En mai 2005, le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a recommandé en ces mots l’adoption de la formule d’administrateur des comptes : « Que les sous-ministres soient désignés agents comptables chargés de responsabilités semblables à celles qui incombent aux agents comptables en Grande-Bretagne. » Il a recommandé aussi qu’en cette qualité, les sous-ministres soient tenus de rendre des comptes au Comité des comptes publics. Le gouvernement du Canada résistait jusqu’ici aux demandes visant à modifier la responsabilité des sous-ministres, en avançant que seuls les ministres étaient tenus de rendre des comptes au Parlement(70). Il insistait plutôt pour que les sous-ministres comparaissent devant les comités parlementaires au nom de leur ministre pour donner des explications factuelles.
Le Comité sénatorial a amendé l’article 259 du projet de loi pour ajouter une nouvelle disposition, l’article 16.21, à la LGPF afin de conférer au gouverneur en conseil le pouvoir de nommer à un comité de vérification des personnes de l’extérieur de l’administration publique fédérale. Celles-ci seraient nommées à titre amovible pour un mandat d’au plus quatre ans, renouvelable une seule fois, et leur rémunération de même que leurs indemnités seraient fixées par le gouverneur en conseil. La Chambre n’a pas agréé l’amendement du Comité sénatorial et en a proposé un autre où c’est le Conseil du Trésor qui nomme les vérificateurs de l’extérieur et en détermine la rémunération et les indemnités.
L’article 259 du projet de loi ajoute aussi les articles 16.3 à 16.5 à la LGFP pour instituer le poste d’administrateur des comptes. Le titulaire de cette charge a rang d’administrateur général, ou l’équivalent. Dans le contexte des attributions du ministre compétent et de son obligation de rendre des comptes au Parlement, l’administrateur des comptes est comptable devant les comités compétents du Sénat et de la Chambre des communes :
L’administrateur des comptes est tenu de comparaître devant les comités compétents du Sénat et de la Chambre des communes pour répondre à des questions sur ces attributions.
En vertu de l’article 16.5 de la LGFP, s’il ne s’entend pas avec le ministre sur l’interprétation ou l’application d’une politique, directive ou norme établie par le Conseil du Trésor, l’administrateur des comptes doit demander l’avis écrit du secrétaire du Conseil du Trésor. Les questions qui demeurent non résolues sont tranchées par le Conseil du Trésor, qui rend sa décision par écrit et en envoie une copie au vérificateur général. Cette nouvelle procédure est très différente de celle qu’appliquent les administrateurs des comptes au Royaume Uni.
L’article 261 du projet de loi incorpore à la LGFP une nouvelle disposition portant qu’un employé responsable de fonds publics qui prive frauduleusement l’État de fonds, de titres, de biens ou de services commet un acte criminel(71). Cette nouvelle disposition a un libellé très semblable à celui de l’article du Code criminel qui porte sur la fraude (art. 380). Elle a pour effet d’augmenter la peine maximale infligée pour fraude contre l’État aux termes de la LGFP en imposant une amende égale à la valeur des fonds ou des biens mal acquis et au plus 14 ans d’emprisonnement, alors qu’actuellement le maximum est une amende de 5 000 $ et une peine d’emprisonnement de cinq ans.
L’article 269 établit une infraction semblable pour les administrateurs, dirigeants et employés des sociétés d’État. De plus, quiconque est déclaré coupable de fraude en vertu des nouvelles dispositions n’aura plus le droit d’occuper un emploi dans la société d’État lésée. Les articles 244, 262 et 295 du projet de loi modifient la LGFP pour faire en sorte que les dispositions sur la fraude visent plusieurs sociétés d’État qui étaient jusqu’ici soustraites à l’application de certains articles de cette loi; ce sont la Banque du Canada, l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada, le Conseil des Arts du Canada, la Société Radio-Canada, le Centre de recherches pour le développement international, la Société du Centre national des Arts(72), Téléfilm Canada, la Fondation canadienne des relations raciales et l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public.
Les articles 305 à 313 du projet de loi C-2 modifient la Loi sur le vérificateur général, la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et la Loi sur la gestion des finances publiques.
Les articles 301 à 305 du projet de loi C-2 confèrent au vérificateur général du Canada le pouvoir de soumettre à une vérification les bénéficiaires de fonds versés par le gouvernement fédéral(73).
En partie à cause des préoccupations soulevées par la vérificatrice générale, la Loi d’exécution du budget de 2005 a modifié la Loi sur le vérificateur général (LVG) pour autoriser le vérificateur général à examiner les états financiers des « sociétés bénéficiaires », plus communément appelées fondations(74), par exemple la Fondation canadienne pour l’innovation. L’article 301 du projet de loi abroge les définitions de « société sans but lucratif » et de « société bénéficiaire » et leur substitue les définitions d’« accord de financement » et de « bénéficiaire », énoncées à l’article 312.
Un « accord de financement » est un accord écrit aux termes duquel le bénéficiaire reçoit des fonds de l’État. La définition exclut les marchés de fournitures, les marchés de services et les marchés de travaux. Un « bénéficiaire » est une personne physique ou morale, une société de personnes ou un organisme non doté de la personnalité morale qui a reçu, au total, au moins un million de dollars au cours de cinq années consécutives. Sont exclus les sociétés d’État, les établissements publics, les gouvernements des États étrangers, les gouvernements provinciaux, les municipalités, les sociétés contrôlées par une municipalité ou par un gouvernement autre que le gouvernement fédéral et les organisations internationales. À l’étape de l’étude en comité, ce dernier a amendé l’article 312 du projet de loi pour exclure de la définition de « bénéficiaire » et, par conséquent, du mandat élargi du vérificateur général les conseils de bande au sens de la Loi sur les Indiens, leurs membres et leurs agents, ainsi que les entités autochtones parties à une entente d’autonomie gouvernementale mise en vigueur par une loi fédérale et leurs agents.
L’article 304 du projet de loi remplace le paragraphe 7.1(1) de la LVG en accordant au vérificateur général le pouvoir de faire enquête, auprès des bénéficiaires de fonds reçus du gouvernement canadien, sur l’utilisation de ces fonds. Dans la foulée des irrégularités commises dans le cadre du programme des commandites et des activités publicitaires, cette modification étend de façon importante la portée du mandat du vérificateur général du Canada. Ainsi, le vérificateur général pourra vérifier les états financiers des bénéficiaires de la plupart des subventions et contributions fédérales pour établir s’ils :
Toutefois, le projet de loi n’indique pas clairement si tous les bénéficiaires de fonds fédéraux sont censés respecter ces critères.
L’article 305 du projet de loi accorde l’immunité au vérificateur général et aux personnes qui agissent sous son autorité pour les activités reliées à l’exercice de leurs fonctions de vérification. Ils ne peuvent pas être contraints de témoigner dans des poursuites autres que celles intentées pour parjure et ils bénéficient de l’immunité en matière civile et pénale pour tous les actes accomplis de bonne foi. De plus, les paroles prononcées, les renseignements fournis ou les pièces produites de bonne foi par le vérificateur général ou les personnes agissant en son nom ne peuvent donner lieu à des poursuites pour diffamation, pas plus que les rapports du vérificateur général ni les comptes rendus qui en sont faits de bonne foi par la presse écrite ou audiovisuelle.
L’article 306 du projet de loi ajoute les trois nouveaux articles 22.1, 22.2 et 22.3 à la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux pour permettre la création de la fonction d'ombudsman de l’approvisionnement. Sa mission consistera à revoir les pratiques d’adjudication, à examiner les plaintes des fournisseurs au sujet des processus de proposition et d’administration des marchés publics, à administrer un programme de règlement extrajudiciaire des différends et à recommander au gouvernement des mesures d’efficacité et de transparence des affaires. Le gouverneur en conseil doit nommer un ombudsman de l’approvisionnement pour un mandat maximal de cinq ans. Ces dispositions ont été amendées par le Comité sénatorial pour nommer ce dirigeant, appelé vérificateur de l’approvisionnement dans le projet de loi original, ombudsman de l’approvisionnement. Le nouveau nom a été agréé par la Chambre. L’article 306 du projet de loi a été amendé par le Comité sénatorial pour donner un caractère obligatoire à la nomination de l’ombudsman de l’approvisionnement (par le gouverneur en conseil), amendement qui a été rejeté par la Chambre. L’ombudsman de l’approvisionnement présentera un rapport annuel sur ses activités et résultats au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, qui le déposera devant le Parlement.
Il s’agit là d’un dispositif clé de la politique des marchés publics du nouveau gouvernement, qui comportera aussi l’adoption d’un code de conduite destiné aux fonctionnaires et aux fournisseurs, ainsi que l’inscription dans les contrats de dispositions relatives à l’intégrité (voir la rubrique « Nouvelles dispositions pour renforcer l’intégrité » ci-après).
L’article 309 du projet de loi modifie légèrement la version française de l’article 40 de la LGFP (en substituant « contrat » à « marché »), qui devient ensuite le paragraphe 40(1), et ajoute le paragraphe 40(2), lequel prévoit l’insertion d’une nouvelle clause automatique : tout marché conclu par une personne avec sa Majesté en vue de la réalisation d’une recherche sur l’opinion publique est censé comporter une clause exigeant la fourniture d’un rapport écrit par la personne.
L’article 312 du projet de loi ajoute le nouvel article 42 à la LGFP. Celle-ci exigera dorénavant que les contrats comportent des dispositions relatives à l’intégrité exigeant que des mesures soient prises pour empêcher que la corruption, la collusion et le versement d’honoraires conditionnels (à toute personne assujettie à la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes) ne viennent entacher le processus de passation des marchés. Une autre disposition établira le droit d’accès du vérificateur général du Canada aux renseignements ou documents nécessaires au cours d’une enquête sur l’utilisation des fonds versés au titre d’accords de financement.
L’article 246 du projet de loi apporte une modification connexe au Code criminel pour empêcher quiconque s’est rendu coupable d’une fraude à l’endroit du gouvernement fédéral de tirer avantage d’un contrat avec ce dernier. Modifié par cet article du projet de loi, l’article 750 du Code dispose que la personne déclarée coupable de fraude sous le régime du Code ou des dispositions pertinentes(75) de la LGFP n’a pas qualité pour passer un contrat avec le gouvernement fédéral ou pour « occuper une fonction relevant de Sa Majesté »(76).
L’article 108 du projet de loi C-2 précise les modalités d’entrée en vigueur de la partie 1 de la Loi fédérale sur la responsabilité. Dans son libellé original, il disposait que les articles 63 et 64 entreront en vigueur à la date de la sanction royale; les articles 39 et 40, les paragraphes 44(1) et (2) et les articles 56 et 58, six mois après la sanction royale; et les articles 3 à 34, 65 à 82, 84 à 88 et 89 à 98, à la date ou aux dates fixées par décret. L’article 108 du a été amendé par le Comité sénatorial pour modifier l’entrée en vigueur de certaines dispositions du projet de loi : les articles 41 à 43, les paragraphes 44(3) et (4), les articles 45 à 55, 57 et 60 à 64 entreront en vigueur le 1er janvier de l’année suivant l’année où le projet de loi reçoit la sanction royale. Cette date a été rejetée par la Chambre, qui a proposé le 1er janvier 2007. Une nouvelle clarification s’appliquant aux articles 63 et 64 (dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu relatives aux contributions politiques) propose que ces dispositions soient réputées entrer en vigueur le 1er janvier 2007, mais qu’elles ne s’appliquent pas aux contributions faites avant cette date. Les nouvelles dates d’entrée en vigueur concernent les modifications apportées à la Loi électorale du Canada et des modifications corrélatives de la Loi de l’impôt sur le revenu, notamment les nouveaux plafonds des cotisations et l’interdiction des contributions provenant de personnes morales et de syndicats. L’article 2 du projet de loi (la nouvelle Loi sur les conflits d’intérêts) entrera lui aussi en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret. Toutefois, les dispositions édictées par cet article demeureront sans effet sur l’Office d’investissement du Régime de pensions du Canada tant que les lieutenants-gouverneurs en conseil d’au moins les deux tiers des provinces incluses(77) comptant au total au moins les deux tiers de la population de toutes les provinces incluses n’auront pas signifié le consentement de leur province. L’article 99 du projet de loi entrera en vigueur à la date d’entrée en vigueur de l’article 81 de la Loi sur le Parlement du Canada, édicté par l’article 28 du projet de loi. Les dispositions de cette partie du projet de loi qui ne sont pas énumérées à l’article 108 entreront en vigueur le jour de la sanction royale.
Les dispositions contenues dans la partie 2 du projet de loi entreront en vigueur le jour de la sanction royale.
L’article 228 du projet de loi précise les modalités d’entrée en vigueur de la partie 3. Il dispose que le paragraphe 141(2), les articles 143 à 149, 154 et 157 à 160, le paragraphe 163(1), les articles 164 à 179, le paragraphe 181(2) et les articles 183, 184 et 186 à 193 entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret. Un amendement ajoutant l’article 227 à la liste a été rejeté par la Chambre. Les articles 3.01 et 3.1 de la Loi sur l’accès à l’information, édictés par l’article 142 du projet de loi, et l’article 3.01 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, édicté par l’article 182 du projet de loi, entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret. Le nouveau paragraphe 228(2) a été ajouté par le Comité législatif de la Chambre pour préciser que la définition d’« institution fédérale » dans la Loi sur l’accès à l’information, édictée par le paragraphe 141(2) du projet de loi, et la définition de ce terme dans la Loi sur la protection des renseignements personnels, édictée par le paragraphe 181(2) du projet de loi, ne s’appliqueront pas à l’égard de l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada tant que les lieutenants-gouverneurs en conseil d’au moins les deux tiers des provinces incluses(78) comptant au total les deux tiers au moins de la population de toutes les provinces incluses n’auront pas signifié le consentement de leur province respective à l’application de ces définitions. Les dispositions de cette partie du projet de loi qui ne sont pas énumérées à l’article 228 entreront en vigueur le jour de la sanction royale.
L’article 300 du projet de loi précise les modalités d’entrée en vigueur de la partie 4 du projet de loi. Il dispose que les articles 239 à 242, 244, 246 à 253 et 261, les paragraphes 262(1) et 262(3) et les articles 263 à 266, 269, 283 à 289 et 295 entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret. Les dispositions de cette partie du projet de loi qui ne sont pas énumérées à l’article 300 entreront en vigueur le jour de la sanction royale.
L’article 314 du projet de loi précise les modalités d’entrée en vigueur de la partie 5. Il dispose que les articles 306 et 307 entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret. L’article 312 entrera en vigueur le jour de la sanction royale, mais les dispositions édictées par cet article demeureront sans effet sur l’Office d’investissement du Régime de pensions du Canada tant que les lieutenants-gouverneurs en conseil d’au moins les deux tiers des provinces incluses(79) comptant au total au moins les deux tiers de la population de toutes les provinces incluses n’auront pas signifié le consentement de leur province. Les dispositions de cette partie du projet de loi qui ne sont pas énumérées à l’article 314 entreront en vigueur le jour de la sanction royale.
La responsabilité et la reddition de comptes – questions dont l’importance a crû aux yeux de la population canadienne au cours des dernières années dans la foulée d’une série de controverses entourant la gestion et les coûts de programmes gouvernementaux – constituaient l’un des principaux thèmes de la campagne électorale de 2006. Le dépôt, en février 2004, du rapport de la vérificatrice générale de novembre 2003, qui a soulevé des questions sur le programme de commandites, et la publication, en novembre 2005 et en février 2006, des rapports de la Commission Gomery ont joué un rôle de premier plan pour ce qui est de définir les processus de reddition de comptes et de déterminer l’information nécessaire pour que ces processus soient au cœur des initiatives de réforme.
Pendant la campagne électorale, les cinq grands partis politiques ont pris des engagements relatifs à la responsabilité et à la reddition de comptes. Le Parti conservateur du Canada a présenté comme priorité, s’il était élu, sa Loi sur la responsabilité fédérale(80). Le premier ministre Harper dit avoir tenu cette promesse électorale avec la présentation, en avril 2006, d’un « plan [d’action] exhaustif »(81) qui comprenait le projet de loi C-2, des politiques, des mesures non législatives ainsi qu’un avant-projet de loi visant à modifier la Loi sur l’accès à l’information.
Bon nombre des éléments proposés dans le programme électoral figurent, du moins en partie, dans les dispositions du projet de loi C-2, mais plusieurs ne nécessitaient pas la prise de mesures législatives pour être mis en œuvre ou alors, pour d’autres raisons encore, ne se retrouvent pas dans le projet de loi. Le Parti s’était engagé, dans son programme électoral, à prendre des mesures législatives précises dont certaines n’ont pas été reprises dans le projet de loi. Ainsi, dans le domaine de l’accès à l’information, le document de campagne intitulé Loi sur la responsabilité fédérale prévoyait la mise en œuvre par le gouvernement d’une série de modifications proposées en 2005 par le commissaire à l’information, l’honorable John Reid. Le projet de loi a plutôt ajouté un certain nombre d’entités à celles déjà visées par la Loi sur l’accès à l’information, et il a apporté un certain nombre de modifications connexes de portée beaucoup plus limitée que celles qu’avait proposées le commissaire. Quand il a présenté le projet de loi, le gouvernement a annoncé qu’au lieu de déposer toute la série de mesures législatives proposées pendant la campagne, il voulait soumettre à l’étude d’un comité parlementaire un document de travail et l’avant-projet de loi du commissaire.
Avec les amendements adoptés par la Chambre des communes, le projet de loi a subi dans plusieurs domaines importants des modifications qui donnent suite aux inquiétudes exprimées par les témoins. Pas moins de 70 de ses dispositions ont fait l’objet d’amendements apportés aux étapes de l’étude en comité et du rapport. Les plus importants ont notamment étendu à toutes les sociétés d’État la portée de la Loi sur l’accès à l’information, supprimé la récompense de 1 000 $ qu’il avait été proposé de verser aux divulgateurs, supprimé l’exigence du scrutin secret au Sénat et à la Chambre des communes en ce qui concerne la nomination des hauts fonctionnaires du Parlement, protégé le privilège parlementaire d’autres façons encore au moyen d’une disposition de non-dérogation générale et exclu les conseils de bande, au sens de la Loi sur les Indiens, du mandat élargi du vérificateur général. Si nombre des dispositions du projet de loi continuent de susciter le désaccord chez les parlementaires et les observateurs, la plupart des changements apportés l’ont été dans des domaines où un consensus s’est dégagé au fil des audiences du Comité législatif de la Chambre.
Comme on s’y attendait, le projet de loi a suscité la controverse tout au long de son étude par le Comité sénatorial et par le Sénat. Les audiences du Comité sénatorial ont duré longtemps et celui-ci a apporté plus de 150 amendements au projet de loi. Les sénateurs éprouvaient des réserves sur tous les aspects du projet de loi, et leurs amendements, qui touchaient de nombreuses parties du texte législatif proposé, visaient notamment le financement des partis politiques, l’éthique, l’accès à l’information, la protection des divulgateurs et les nouveaux postes de dirigeants créés comme ceux de directeur parlementaire du budget et de directeur des poursuites pénales. Certains des amendements étaient des corrections de forme proposées par le gouvernement, d’autres touchaient des questions de fond.
Le Comité sénatorial a choisi de conserver le poste de conseiller sénatorial en éthique pour l’application du code d’éthique des sénateurs au lieu de confier l’application de ce code au nouveau commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique. Les amendements à ce sujet sont pratiquement les seuls, parmi ceux que la Chambre avait rejetés, sur lesquels le Sénat a insisté dans la réponse qu’il a donnée le 7 décembre au message de la Chambre. Le Sénat a insisté sur un autre amendement encore, ayant celui-là pour effet d’exclure le Sénat et la Chambre des communes de la définition de l’expression « entité du secteur public » dans la Loi sur les conflits d’intérêts.
Parmi les amendements proposés par le Sénat qui ne figurent pas dans la version définitive du projet de loi, mentionnons des amendements à la nouvelle Loi sur les conflits d’intérêts, notamment pour que celle-ci vise aussi les conflits d’intérêts apparents et les conflits d’intérêts potentiels, et des amendements aux dispositions relatives aux délais de prescription et aux exigences de déclaration.
Le Comité sénatorial avait apporté de nombreux amendements aux dispositions concernant la Loi sur l’accès à l’information, dont certains touchaient les exclusions prévues à l’égard des organismes que le projet de loi assujettit à cette loi, et il avait notamment ajouté une condition de communication fondée sur l’intérêt public. Par ailleurs, la disposition assujettissant la Commission canadienne du blé à la Loi sur l’accès à l’information, qui avait été insérée par la Chambre des communes à l’étape du rapport, avait été supprimée par le Comité sénatorial.
Plusieurs amendements ont été apportés aux dispositions relatives au financement des partis politiques, notamment pour préciser que les frais de participation au congrès d’un parti politique constituent une contribution à un parti politique. Un autre amendement porte de 1 000 $ à 2 000 $ le plafond annuel établi à l’article 405 de la Loi électorale du Canada relativement aux contributions versées : à un parti politique; à une association de parti enregistrée, à un candidat à l’investiture ou à un candidat d’un parti politique; à un candidat qui n’est pas le candidat d’un parti politique; et à un candidat à la direction d’un parti politique. L’entrée en vigueur de certaines de ces dispositions amendées, notamment celles qui concernent les nouveaux plafonds des contributions politiques, a été portée par le Comité sénatorial au 1er janvier de l’année suivant l’année où le projet de loi recevra la sanction royale.
Un grand nombre des amendements les plus importants proposés par le Comité sénatorial, dont ceux dont il est fait état dans cette conclusion, ont été rejetés par la Chambre des communes dans son message au Sénat du 21 novembre 2006. Sur réception de ce message, le Sénat a de nouveau renvoyé le projet de loi au Comité sénatorial, lequel a entendu plusieurs témoins avant de décider d’accepter la position de la Chambre sur la plupart des amendements que le Sénat avait cherché à apporter au projet de loi.
© Bibliothèque du Parlement