Le projet de loi C-23 : Loi modifiant le Code criminel (procédure pénale, langue de l’accusé, détermination de la peine et autres modifications) a été déposé par le ministre de la Justice et a franchi l’étape de la première lecture à la Chambre des communes le 22 juin 2006.
Le projet de loi apporte diverses modifications au Code criminel(1) (le Code), particulièrement d’ordre procédural. Les autres modifications concernent la langue de l’accusé, la détermination de la peine et certaines infractions criminelles.
Bien que certaines modifications ne fassent que clarifier les dispositions existantes du Code, d’autres comportent de véritables changements de fond, notamment :
Comme l’indique cette liste hétéroclite, les modifications visent une multitude de dispositions du Code étrangères les unes aux autres; elles sont néanmoins le résultat de consultations avec les provinces et territoires, par exemple dans le cadre de la Conférence pour l’harmonisation des lois au Canada.
En mai 2007, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre de communes a adopté des amendements, dont la plupart sont d’ordre technique ou clarifient le but de quelques dispositions du projet de loi. Observons qu’un amendement réduit l’amende maximale par défaut de 10 000 $ à 5 000 $. Un autre amendement exclut le Nouveau‑Brunswick de l’application d’une disposition permettant de renvoyer la tenue d’un procès dans une autre circonscription territoriale de la même province lorsque l’accusé ne peut raisonnablement subir son procès dans sa langue officielle dans la circonscription territoriale où l’infraction serait normalement jugée.
Le projet de loi a été adopté tel qu’amendé par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne lors du débat à la troisième lecture le 13 juin 2007. Le débat à la deuxième lecture a commencé au Sénat le 18 juin 2007.
Le projet de loi comporte 46 articles. Nous avons regroupé les différentes dispositions selon leur objet : la procédure, la langue de l’accusé, la détermination de la peine, les infractions et l’entrée en vigueur.
L’article 40 de la Loi sur la preuve au Canada(2) dispose que les lois provinciales relatives à la preuve de la signification d’un mandat, d’une sommation, d’une assignation ou d’un autre document s’appliquent aux procédures fédérales.
Dans la même ligne de pensée, le projet de loi érige en règle générale le fait que, en matière de droit criminel, la signification de tout document (art. 33) et la preuve de la signification (art. 1) puissent se faire en conformité avec le droit provincial(3). Plusieurs dispositions du Code sont abrogées pour tenir compte de cette règle générale(4).
En général, afin qu’un mandat puisse être exécuté dans une autre circonscription territoriale ou une autre province, on doit obtenir l’autorisation (un visa) d’un juge de cette circonscription ou de cette province. Dans le but d’accélérer cette procédure, le projet de loi permet aux organisations d’application de la loi d’utiliser tout moyen de télécommunication pour faire viser un mandat de perquisition(5) (par. 11(1)), un mandat général(6), un mandat relatif aux analyses génétiques(7), un mandat de localisation(8) ou un mandat relatif à un enregistreur de numéro de téléphone(9) (art. 12). Cette possibilité était déjà prévue pour le mandat d’arrestation(10).
De façon générale, une personne qui a effectué une perquisition doit porter les biens saisis devant un juge ou lui en faire rapport (11). Le juge doit alors rendre une ordonnance quant à la détention des biens(12).
Actuellement, une personne insatisfaite de l’ordonnance peut en appeler devant une cour d’appel de première instance compétente en matière sommaire(13) (p. ex. la Cour supérieure au Québec). Le projet de loi ajoute, selon la logique de la procédure pénale, que si l’ordonnance est rendue par un juge d’une « cour supérieure de juridiction criminelle »(14) (p. ex. la Cour supérieure au Québec), alors l’appel pourra être interjeté devant la cour d’appel de la province qui a juridiction en matière d’acte criminel(15). Il s’agit de la Cour d’appel ou, dans la province de l’Île-du-Prince-Édouard, de la Section d’appel de la Cour suprême.
En principe, toute personne peut, si elle possède des motifs raisonnables de croire qu’un individu a commis un acte criminel, déposer une dénonciation devant un juge(16). Généralement, les accusations sont déposées par un substitut du procureur général provincial, et dans certains cas, par un substitut du procureur général fédéral(17).
Lorsque la dénonciation est déposée par un simple citoyen (p. ex. la victime), une pré-enquête devra être tenue devant un juge (18). Ce dernier devra alors être convaincu que le procureur général a reçu copie de la dénonciation, qu’il a été avisé en temps utile de la pré-enquête et qu’il a eu l’occasion d’assister à l’audience, de procéder à des contre-interrogatoires, d’appeler des témoins et de présenter des éléments de preuve(19).
Ainsi, le citoyen devra, dans la plupart des cas, aviser le procureur général provincial. Le projet de loi précise toutefois que le citoyen devra également aviser le procureur général fédéral si ce dernier a compétence à l’égard de l’infraction alléguée, par exemple en matière de fraude(20).
Le juge présidant l’enquête préliminaire peut autoriser le prévenu à s’absenter pendant tout ou partie de l’enquête(21). Il devra alors aviser le prévenu que la preuve recueillie en son absence pourrait être admise au procès (art. 22 du projet de loi). Dans ce cas, le prévenu ne pourra se plaindre qu’il n’a pas eu l’occasion voulue de contre-interroger un témoin lors de l’enquête préliminaire (art. 34 du projet de loi). Remarquons toutefois que les renseignements inadmissibles admis par ailleurs à l’enquête préliminaire ne pourront toujours pas être reçus par le juge du procès(22).
En matière d’infraction poursuivie par voie sommaire, si le défendeur ne comparaît pas aux date, heure et lieu fixés pour son procès, le juge peut, d’une part, procéder en son absence à l’audition et à la décision des procédures (procéder ex parte) ou, d’autre part, délivrer un mandat d’arrestation(23). L’article 45 du projet de loi précise que ces options s’appliquent également à un codéfendeur qui ne comparaît pas.
En matière d’acte criminel, le juge peut clairement, à l’heure actuelle, procéder ex parte ou émettre un mandat d’arrestation à l’égard d’un coaccusé(24). La différence demeure que pour que le juge puisse procéder ex parte, le coaccusé doit s’être esquivé après le début de l’audition de sa cause(25).
De façon générale, pour la majorité des actes criminels, le prévenu a le choix entre trois modes de procès : juge seul sans enquête préliminaire; juge seul avec enquête préliminaire; juge avec jury avec enquête préliminaire(26). Il peut renoncer à la tenue d’une enquête préliminaire. Il pourra également modifier son choix original(27).
En vertu de l’article 577 du Code, le procureur général peut, personnellement et par écrit, déposer un acte d’accusation, malgré le fait que le prévenu n’ait pas eu la possibilité de demander la tenue d’une enquête préliminaire, que l’enquête préliminaire ait débuté et ne soit pas encore terminée ou qu’une enquête préliminaire ait été tenue et le prévenu ait été libéré(28). En déposant un acte d’accusation direct, le procureur général peut ainsi priver un accusé d’une enquête préliminaire.
Dans ces circonstances, le prévenu est réputé avoir choisi un procès devant un juge et un jury sans enquête préliminaire(29). Il peut alors plutôt choisir un procès devant un juge seul sans enquête préliminaire, mais, actuellement, le consentement écrit du poursuivant est requis(30). L’article 23 du projet de loi supprime l’exigence de ce consentement.
Il faut toutefois noter que, dans le cas d’un acte criminel punissable d’un emprisonnement de plus de cinq ans faisant l’objet d’un acte d’accusation direct, même si le prévenu choisit un procès devant un juge seul, le procureur général pourra imposer la tenue d’un procès par jury, et ce, sans enquête préliminaire (art. 24 du projet de loi).
L’article 31 du projet de loi prévoit que lorsque la Cour suprême du Canada ordonne un nouveau procès devant juge et jury, l’accusé pourra plutôt opter pour un juge seul. Le consentement du poursuivant est toutefois nécessaire.
Au cours de la sélection des jurés, le poursuivant et l’accusé disposent de deux types de récusation : les récusations péremptoires(31) et les récusations motivées(32). Contrairement à ces dernières, les récusations péremptoires n’ont pas à être justifiées et leur nombre dépend du type d’infraction qui fait l’objet du procès.
L’article 25 du projet de loi accorde au poursuivant et à l’accusé une récusation péremptoire pour chaque juré à remplacer. Par exemple, le juge remplace le juré numéro 12(33). Le poursuivant peut alors récuser péremptoirement le candidat remplaçant et l’accusé pourra récuser péremptoirement le candidat suivant. Le prochain candidat fera partie du jury (à moins d’être dispensé par le juge(34) ou de faire l’objet d’une récusation motivée).
Concernant les récusations motivées, ce sont actuellement les deux derniers jurés assermentés(35) (les vérificateurs) qui décident si le motif de récusation est fondé(36). L’article 26 du projet de loi introduit une nouvelle procédure dans ce cas. Si l’accusé en fait la demande, le juge pourra exiger l’exclusion des jurés (ceux faisant déjà partie du jury et les candidats jurés) de la salle d’audience, à l’exception des deux vérificateurs (nouveau par. 640(2.1) du Code). Les vérificateurs ne feront pas partie du jury, mais seront plutôt deux candidats jurés ou deux personnes présentes que le juge aura nommées à cette fin (nouveau par. 640(2.2) du Code). Le juge pourra rendre une telle ordonnance s’il est d’avis que cette mesure est nécessaire pour préserver l’impartialité du jury (nouveau par. 640(2.1) du Code).
Actuellement, le procureur général peut, si certaines conditions sont satisfaites, interjeter appel devant la cour d’appel de la province d’une déclaration de culpabilité par procédure sommaire ou de la peine qui a été infligée(37). Jouant le rôle de poursuivant en matière pénale, il est beaucoup plus probable que le procureur général veuille appeler d’un verdict d’acquittement. L’article 28 du projet de loi remplace donc déclaration de culpabilité par verdict d’acquittement au paragraphe 676(1.1) du Code.
La cour d’appel ou l’un de ses juges peut, dans l’intérêt de la justice, suspendre l’exécution de certaines ordonnances pendant l’appel, par exemple le paiement de l’amende ou les conditions d’une ordonnance de probation visant un individu(38). L’article 29 du projet de loi permet aussi de suspendre les conditions facultatives d’une ordonnance de probation visant une organisation (nouvel al. 683(5)e) du Code) de même que l’ordonnance d’emprisonnement avec sursis (nouvel al. 683(5)f) du Code).
Par contre, avant de suspendre l’ordonnance de probation ou l’emprisonnement avec sursis, la cour d’appel ou l’un de ses juges peut exiger que le délinquant respecte certaines conditions pendant la suspension, en remettant une promesse ou un engagement (nouveau par. 683(5.1) du Code)(39). Pensons, par exemple, à la condition de rester dans une certaine administration territoriale ou de s’abstenir de communiquer avec toute personne identifiée.
Par ailleurs, lorsque la cour d’appel décide si elle modifie ou non la peine, elle devra prendre en considération les conditions afférentes à la promesse ou à l’engagement et la période pour laquelle elles ont été imposées (nouveau par. 683(7) du Code). Par exemple, une ordonnance de probation de deux ans est suspendue pendant l’appel et remplacée par une promesse avec conditions. Dans ce cas, même si la cour d’appel confirme la peine initiale (la probation de deux ans), elle peut écourter la période de probation en tenant compte de la promesse avec conditions.
À l’heure actuelle, la cour d’appel peut rejeter sommairement – c’est-à-dire sans assigner de personnes à l’audition ou sans les y faire comparaître pour l’intimé – un appel futile ou vexatoire(40). L’article 30 du projet de loi permet également à un juge de la cour d’appel de procéder ainsi lorsqu’un avis d’appel aurait dû être déposé devant un autre tribunal, par exemple devant la cour d’appel de première instance compétente en matière sommaire.
Sur demande de l’accusé, un juge ordonnera que l’accusé subisse son enquête préliminaire et son procès devant un juge seul ou un juge et un jury qui parlent la langue officielle du Canada qui est celle de l’accusé(41). Si l’accusé ne parle ni l’anglais ni le français, un juge ordonnera que l’accusé subisse son enquête préliminaire et son procès devant un juge seul ou un juge et un jury qui parlent la langue officielle du Canada qui permettra à l’accusé de témoigner le plus facilement(42). Par ailleurs, le tribunal a l’obligation de fournir des services d’interprétation à l’accusé, à son avocat et aux témoins(43).
Actuellement, lors de la comparution, le juge doit aviser l’accusé de son droit de subir un procès dans la langue officielle de son choix, mais cette exigence ne s’applique que si l’accusé n’est pas représenté par un avocat(44). Le paragraphe 18(1) du projet de loi supprime cette dernière condition. Ainsi, le juge devra aviser l’accusé de son droit dans tous les cas.
L’accusé a aussi le droit de subir son enquête préliminaire et son procès devant un juge seul ou un juge et un jury qui parlent l’anglais et le français, mais seulement si les circonstances le justifient(45). Le projet de loi précise qu’une enquête préliminaire et un procès bilingues seront justifiés s’il s’agit de coaccusés qui comprennent différentes langues officielles (par. 18(2) du projet de loi instaurant le nouveau par. 530(6) au Code).
Si une enquête préliminaire et un procès bilingues sont tenus, le tribunal pourra déterminer dans quelle mesure chacune des langues officielles sera utilisée (art. 21 du projet de loi instaurant le nouvel art. 530.2 au Code). L’ordonnance du tribunal devra respecter, dans la mesure du possible, le droit de l’accusé de subir son procès dans la langue officielle qui est la sienne.
Lorsque l’accusé demande de subir son procès dans la langue officielle de son choix, l’article 19 du projet de loi précise que le ministère public a l’obligation de faire traduire dans la langue officielle de l’accusé (ou dans la langue officielle qui lui permettra de témoigner le plus facilement) les documents contenant les chefs d’accusation, soit la dénonciation et l’acte d’accusation. Le ministère public devra lui en remettre copie dans les meilleurs délais. Par contre, le libellé du document original l’emportera en cas de divergence avec la traduction.
Lors de l’enquête préliminaire ou du procès, il faut noter que les témoins peuvent utiliser l’une ou l’autre des langues officielles (46). Le paragraphe 20(2) du projet de loi permet au poursuivant, sur autorisation du juge si les circonstances le justifient, d’interroger et de contre-interroger un témoin dans la langue officielle de ce dernier, et ce, même si cette langue n’est pas celle de l’accusé.
Prenons l’exemple d’un accusé francophone, d’un témoin anglophone et d’un poursuivant bilingue. L’accusé a obtenu le droit de subir son procès en français. Le témoin témoigne en anglais. Le poursuivant pourra contre-interroger (ou interroger) ce témoin en anglais. Le but de cet amendment est de rendre le processus plus efficace, car le poursuivant peut s’adresser directement au témoin sans avoir recours aux services d’un interprète.
L’article 531 du Code permet de renvoyer la tenue d’un procès dans une autre circonscription territoriale de la même province lorsque l’accusé ne peut raisonnablement subir son procès dans sa langue officielle dans la circonscription territoriale où l’infraction serait normalement jugée. L’article 21 du projet de loi exclut le Nouveau‑Brunswick de l’application de cette disposition. Ainsi, au Nouveau‑Brunswick, le procès d’un accusé qui veut subir son procès dans sa langue officielle devra se tenir dans la circonscription territoriale où l’infraction serait normalement jugée (c.‑à‑d. bien souvent à l’endroit où l’infraction a été commise). La tenue du procès ne pourra pas être renvoyée dans une autre circonscription territoriale.
L’infraction de leurre(47), entrée en vigueur en 2002, consiste à communiquer au moyen d’un ordinateur avec une personne mineure dans le but de faciliter la perpétration de certaines infractions désignées, comme la possession de pornographie juvénile (48) ou l’incitation à des contacts sexuels(49).
Actuellement, lorsqu’une personne est déclarée coupable d’une infraction de pornographie juvénile, le tribunal peut, en plus de toute autre peine, ordonner la confiscation d’un bien – autre qu’un bien immeuble – qui a été utilisé pour commettre l’infraction (50). L’article 4 du projet de loi étend l’application de cette ordonnance à l’infraction de leurre. Ainsi, le poursuivant, sur preuve prépondérante, pourra faire confisquer l’ordinateur d’une personne déclarée coupable de leurre d’enfant.
Cet ajout est utile, car ce ne sont pas toutes les personnes reconnues coupables de leurre d’enfant qui ont aussi été reconnues coupables d'une infraction de pornographie juvénile.
Notons qu’une procédure est prévue au Code pour protéger la propriété d'un tiers de bonne foi(51).
L’article 7 du projet de loi précise que les peines minimales prévues pour les infractions en matière d’alcool au volant(52) s’appliquent également aux infractions de conduite avec les facultés affaiblies causant la mort(53) ou des lésions corporelles(54).
Ces peines minimales sont les suivantes :
Pour certaines infractions, le tribunal qui inflige une peine a l’obligation(56) ou la discrétion(57) d’interdire au contrevenant de conduire un véhicule à moteur, un bateau, un aéronef ou du matériel ferroviaire pour une période qu’il fixe. Dans certains cas, le Code prévoit des périodes minimales(58). Ces ordonnances s’ajoutent à toutes autres peines que le tribunal infligera. La période d’interdiction de conduire suivra ainsi toute période d’emprisonnement.
Le paragraphe 8(3) du projet de loi prévoit que le tribunal peut ordonner des périodes d’interdiction de conduire qui seront consécutives.
Prenons comme exemple une personne reconnue coupable de deux infractions relatives à la conduite d’un véhicule à moteur : la négligence criminelle causant des lésions corporelles(59) et la négligence criminelle causant la mort(60). Dans ce cas, le tribunal, en plus d’une peine d’emprisonnement, pourrait(61) interdire au contrevenant de conduire un véhicule à moteur pour, par exemple, une période totale de 25 ans, soit :
Remarquons néanmoins que le tribunal a l’obligation d’éviter l’excès de nature ou de durée dans l’infliction de peines consécutives (62).
Pendant la période d’interdiction, le contrevenant peut tout de même conduire si le véhicule qu’il conduit est muni d’un antidémarreur avec éthylomètre, que le contrevenant est inscrit à un programme provincial d’utilisation d’un tel antidémarreur(63) et que, en vertu du projet de loi, il respecte les conditions du programme (par. 8(1) du projet de loi modifiant le
par. 259(1.1) du Code).
Actuellement, afin que le contrevenant puisse bénéficier de cette permission spéciale, il faut que le tribunal la lui accorde expressément dans son ordonnance(64). Le projet de loi prévoit que le contrevenant peut se prévaloir de cette possibilité sans en faire la demande au tribunal (par. 8(1) du projet de loi modifiant le par. 259(1.1) du Code). Celui-ci pourra toutefois s’y opposer en rendant une ordonnance à cet effet.
Le Code prévoit une période initiale minimale – que le tribunal peut augmenter – durant laquelle le contrevenant ne peut bénéficier du programme d’antidémarreur avec éthylomètre(65). Cette période est de trois mois dans le cas d’une première infraction(66). Le projet de loi précise que cette période initiale minimale débute lors de l’imposition de la peine – et non lors de la prise d’effet de l’ordonnance d’interdiction de conduire, c’est-à-dire à la fin de la période d’emprisonnement, le cas échéant (par. 8(1) du projet de loi modifiant le par. 259(1.2) du Code).
Ainsi, dans l’hypothèse où le contrevenant se voit imposer une peine d’emprisonnement de plus de trois mois pour une première infraction, il semble qu’il pourra bénéficier du programme d’antidémarreur avec éthylomètre (et conduire un véhicule à moteur dans ces circonstances) dès la fin de sa peine d’emprisonnement.
Par ailleurs, le paragraphe 8(4) du projet de loi précise que le fait de conduire pendant qu’une ordonnance d’interdiction s’applique n’est pas une infraction si le contrevenant participe au programme d’antidémarreur avec éthylomètre et en respecte les conditions.
Afin de prendre en compte la situation particulière du délinquant et de s’attaquer à la cause de la commission de l’infraction, l’article 35 du projet de loi permet expressément au tribunal de reporter le prononcé de la peine si certaines conditions sont réunies :
Lorsque le tribunal rend une ordonnance de probation, il doit en remettre une copie au délinquant(68) et lui fournir certaines explications à propos, notamment, de la façon de modifier l’ordonnance(69), des conséquences de la commission d’une infraction pendant la durée de la probation(70) ou du défaut de se conformer aux conditions de l’ordonnance(71).
Le projet de loi ajoute l’obligation pour le tribunal d’expliquer au délinquant les conditions obligatoires et facultatives qu’il doit respecter dans le cadre de sa probation (art. 37 du projet de loi modifiant l’al. 732.1(5)b) du Code). Le tribunal devra aussi prendre les mesures pour s’assurer que le délinquant comprend bien les conditions, par exemple la condition de prendre soin des personnes à sa charge et de subvenir à leurs besoins(72).
Cependant, si le tribunal n’observe pas toutes ces obligations, l’ordonnance de probation demeurera valide (nouveau par. 732.1(6) du Code).
Le Code prévoit un calcul pour déterminer la période d’emprisonnement qui sera infligée si le délinquant ne paie pas complètement l’amende (ou n’accomplit pas entièrement les travaux communautaires) qui a été imposée par le tribunal(73). L’article 38 du projet de loi conserve le même calcul en précisant que, dans le cas d’une infraction pour laquelle aucune peine n’est prévue, la période maximale d’emprisonnement qui peut être imposée est de cinq ans pour un acte criminel(74) et six mois pour une infraction punissable par procédure sommaire(75).
Le calcul prévu ne s’appliquera toutefois pas si une loi fédérale établit d’autres modalités de calcul ou une peine d’emprisonnement minimale ou maximale en cas de défaut de paiement de l’amende(76).
Remarquons, par ailleurs, que le tribunal tiendra généralement compte de la capacité de payer du délinquant avant de fixer le montant de l’amende(77).
Le tribunal qui impose une amende doit remettre au délinquant une copie de l’ordonnance(78) et lui fournir certaines explications concernant, notamment, les programmes de travaux communautaires(79) et les conséquences du défaut de payer l’amende(80). Il doit également s’assurer que le délinquant comprend comment faire modifier les modalités du paiement, l’échéance du paiement et les autres conditions facultatives que le tribunal a imposées(81).
L’article 39 du projet de loi réitère ces obligations en ajoutant que le fait pour le tribunal de ne pas les respecter toutes ne portera pas atteinte à la validité de l’ordonnance imposant l’amende (nouveau par. 734.2(2) du Code).
À l’heure actuelle, si aucune disposition de loi ne prévoit de peine spécifique pour une infraction punissable par procédure sommaire, le défendeur est passible d’une amende maximale de 2 000 $ et d’un emprisonnement maximal de six mois, ou de l’une de ces peines(82).
L’article 44 du projet de loi augmente cette amende maximale à 5 000 $. La période d’emprisonnement maximale par défaut demeure inchangée. Le défendeur sera donc passible d’une amende maximale de 5 000 $ et d’un emprisonnement maximal de six mois, ou de l’une de ces peines.
Lorsque le tribunal décide de rendre une ordonnance d’emprisonnement avec sursis, il doit remettre une copie de l’ordonnance au délinquant(83) et lui fournir des explications concernant la procédure à suivre pour faire modifier les conditions facultatives(84), en plus de s’assurer qu’il comprend les conséquences d’un éventuel manquement à l’ordonnance(85).
Le projet de loi reprend ces obligations en précisant que le tribunal doit fournir des explications concernant les conditions obligatoires de l’ordonnance (art. 40 du projet de loi modifiant le par. 742.3(3) du Code) et que, comme dans le cas de la probation et de l’amende, l’ordonnance demeurera valide même si le tribunal n’observe pas toutes ces obligations (nouveau par. 742.3(4) du Code).
Actuellement, un agent de la paix (dans le cadre de la remise en liberté sous condition(86)) ou un juge (dans le cadre de la remise en liberté(87) ou du maintien en détention(88) à l’étape de l’enquête sur le cautionnement) peuvent ordonner à l’accusé de ne pas communiquer avec certaines personnes visées(89). Une telle ordonnance ne peut donc pas être rendue une fois que l’accusé a été reconnu coupable et doit purger une peine d’emprisonnement.
C’est cette lacune que comble l’article 42 du projet de loi. Reconnaissant que les murs d’une prison ne peuvent empêcher les menaces, l’intimidation et les complots, le tribunal pourra dorénavant ordonner au délinquant de s’abstenir de communiquer avec certaines personnes pendant sa période de détention (nouveau par. 743.21(1) du Code).
De plus, l’article 42 du projet de loi prévoit que la non-observation de cette ordonnance constitue une infraction mixte punissable de deux ans (dans le cas d’un acte criminel) ou de 18 mois d’emprisonnement (dans le cas d’une infraction punissable par procédure sommaire) (nouveau par. 743.21(2) du Code).
Remarquons que la peine d’emprisonnement maximale dans le cas d’une infraction punissable par procédure sommaire (18 mois) est plus élevée que celle prévue pour la contravention d’une condition de non-communication imposée par un agent de la paix(90) ou un juge à l’étape de l’enquête sur le cautionnement (six mois)(91). En revanche, dans ces deux derniers cas, le défendeur peut également devoir payer une amende pouvant aller jusqu’à 2 000 $(92) (10 000 $ en vertu de l’art. 44 du projet de loi).
Si l’infraction est plutôt considérée par le ministère public comme un acte criminel, alors, dans tous les cas, la peine d’emprisonnement maximale est de deux ans(93).
Par ailleurs, l’accusé pourra, dans tous les cas, éviter une condamnation en faisant la preuve d’une excuse légitime qui justifie son défaut de respecter la condition de non-communication(94).
Actuellement, pour qu’une personne puisse être reconnue coupable de l’infraction de donner quelque renseignement sur le bookmaking, la vente d’une mise collective, les paris ou gageures, elle doit utiliser la radio, le télégraphe, le téléphone, la poste ou les messageries(95).
Afin de tenir compte des avancées technologiques présentes et à venir, le projet de loi élimine l’énumération de ces moyens de télécommunication (art. 5). Ainsi, l’utilisation de tout moyen de télécommunication pourra donner lieu à des accusations en vertu de cette infraction.
Dans la même ligne de pensée, l’article 6 du projet de loi remplace « téléphone » par tout « moyen de télécommunication » afin d’étendre la légalité des paris mutuels sur les courses de chevaux, peu importe le moyen de télécommunication utilisé pour transmettre son pari à un hippodrome ou à une salle de paris réglementés(96).
À l’heure actuelle, l’infraction de possession d’outils de cambriolage est un acte criminel punissable d’un emprisonnement maximal de dix ans(97).
L’article 9 du projet de loi en fait une infraction mixte. Ainsi, le poursuivant aura le choix de la considérer comme un acte criminel (la peine maximale demeure dans ce cas dix ans d’emprisonnement) ou de poursuivre le défendeur par voie sommaire (dans ce cas, la peine par défaut s’applique, soit une amende maximale de 2 000 $ – ou 10 000 $ en vertu de l’art. 44 du projet de loi – et d’un emprisonnement maximal de six mois, ou de l’une de ces peines).
Ainsi, le procureur de la Couronne dispose d’une plus grande souplesse. Par exemple, s’il choisit de poursuivre par procédure sommaire, une enquête préliminaire ne sera pas nécessaire. Par contre, si le moment où il choisit d’intenter la poursuite est au-delà du délai de prescription prévu par les règles régissant les poursuites sommaires(98), il pourra tout de même poursuivre l’accusé sous le régime des règles applicables aux actes criminels.
Les articles du projet de loi énumérés à l’article 46 du projet de loi entreront en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret. Les autres articles entreront en vigueur le jour de la sanction royale(99).
Jusqu’à maintenant, le projet de loi – peut-être à cause de sa nature très technique – ne semble pas avoir suscité de réaction du public, des médias ou des groupes d’intérêt.
Quant au pouvoir de ces cours d’appel en matière d’ordonnance de détention, de confiscation ou de remise des biens, voir les affaires R. c. Hickey, (2004) 181 C.C.C. (3d) 399 (C.A. N.B.), et R. c. MacLeod, (2005) 194 C.C.C. (3d) 257 (C.B.R.M.).
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