Le projet de loi C‑45 : Loi concernant le développement durable des pêches dans les eaux côtières et les eaux intérieures du Canada a été présenté à la Chambre des communes le 13 décembre 2006. Il abroge l’actuelle Loi sur les pêches (LP), qui n’a subi aucune révision importante depuis son entrée en vigueur en 1868(1), ce qui en fait l’une des plus vieilles lois encore en vigueur au pays. La LP concerne principalement la gestion et la surveillance adéquates des pêches, la préservation et la protection du poisson et de son habitat, ainsi que la prévention de la pollution.
Dans son Plan stratégique de 2005-2010, Pêches et Océans Canada (MPO) affirme que l’une de ses priorités pour les cinq prochaines années est « l’élaboration d’un nouveau modèle de gouvernance pour la gestion des pêches, y compris des propositions en vue de moderniser la Loi sur les pêches ». L’un des cinq objectifs de l’initiative de renouvellement des pêches du MPO (une partie du Plan stratégique) est la préservation et l’utilisation durable des ressources halieutiques(2). Plusieurs des changements qui doivent être apportés dans le cadre de l’initiative de renouvellement des pêches pourraient être facilités par le projet de loi C‑45.
Il y a eu au moins une autre tentative d’ordre législatif de modifier la LP. En octobre 1996, l’honorable Fred Mifflin, alors ministre de Pêches et Océans, a déposé le projet de loi C‑62, qui est mort au Feuilleton lorsque les élections générales de 1997 ont été déclenchées. Ce projet de loi a soulevé des critiques parce qu’il semblait promouvoir la « privatisation » des pêches en établissant des ententes de partenariat.
Avec le projet de loi C‑45, le gouvernement a l’intention de moderniser la gestion des pêches et d’inscrire dans la loi des principes comme la préservation et la protection du poisson et de son habitat, ainsi que la stabilité de l’accès aux ressources halieutiques. S’il édicte de nouvelles dispositions importantes, comme celles concernant la création de l’Office des pêches du Canada, le projet de loi conserve plusieurs des dispositions de l’actuelle LP.
Le projet de loi établit les fondements juridiques habilitant le gouvernement à conclure des accords de gestion des pêches avec les organisations qui représentent les titulaires de permis ou d’autres groupes afin d’élaborer des programmes et des plans de pêche axés sur la préservation, de gérer la capacité, les demandes de permis et le respect des règles, et de mettre en place des accords de financement. Le projet de loi actualise les fondements juridiques de la protection de l’habitat du poisson et accorde au Ministre de l’autorité de conclure des accords avec les provinces sur plusieurs questions visées par le projet de loi.
Le projet de loi, dont le titre abrégé est « Loi de 2007 sur les pêches » (art. 1), est composé de sept parties :
À l’instar de beaucoup de lois modernes, le projet de loi commence par un préambule. Ce préambule :
L’objet du projet de loi est « [d’]assurer le développement durable des pêches dans les eaux côtières et les eaux intérieures du Canada en favorisant la préservation et la protection du poisson et de son habitat ainsi que la gestion et la surveillance judicieuses des pêches ».
Plusieurs définitions de l’actuelle LP sont conservées dans le projet de loi, soit telle quelles, soit partiellement modifiées. Quelques définitions sont également ajoutées pour refléter les nouveaux éléments inclus dans le projet de loi. Le terme « titulaire » est maintenant défini de la façon suivante : « Personne, organisation ou bateau de pêche auquel est délivré un permis. Y est assimilé le propriétaire ou l’affréteur du bateau de pêche auquel est délivré un permis. » Il est à souligner que le terme « organisation » n’est pas défini.
La définition de « poisson » a été légèrement modifiée, mais elle englobe encore tous les animaux marins, y compris des mammifères tels que les phoques et les baleines(3).
Le projet de loi lie Sa Majesté du chef du Canada et des provinces, ce qui signifie que les gouvernements fédéral et provinciaux sont assujettis aux dispositions du projet de loi.
L’article 5 dispose que le projet de loi s’applique non seulement au Canada, mais également à la zone économique exclusive du Canada, ainsi qu’aux bateaux de pêche canadiens et aux citoyens canadiens se trouvant dans tout espace maritime non compris dans la mer territoriale ou les eaux intérieures d’un autre État. Cet article diffère de l’article correspondant du projet de loi C‑62, selon lequel la portée territoriale se serait étendue aux espèces sédentaires vivant sur la plateforme continentale du Canada.
Le projet de loi énonce sept principes auxquels doit adhérer quiconque est chargé de l’application des lois et des règlements. Ces principes s’appliquent à toute décision et à toute mesure administrative prises par quiconque en vertu de la loi proposée, y compris le Ministre, les fonctionnaires du MPO, le personnel des autres ministères fédéraux, comme Environnement Canada, ainsi que les ministres provinciaux responsables des pêches ainsi que leur personnel. Les personnes chargées de l’application de la loi proposée et de ses règlements doivent :
En ce qui concerne l’« approche préventive » (ou de précaution), l’alinéa 6b) dispose que « le ministre ainsi que toute personne chargée de l’application de la présente loi ou de ses règlements […] s’efforcent d’adopter une approche préventive si bien que, en cas de grande incertitude scientifique et de risque de dommages importants, le manque d’information scientifique adéquate ne serve pas de prétexte pour omettre de prendre des mesures de préservation ou de protection du poisson ou de son habitat qui soient efficaces et économiques et qu’ils considèrent comme proportionnelles à la gravité potentielle des risques, ou pour remettre à plus tard l’adoption de telles mesures ». Les termes « approche préventive » ou « principe préventif » ont été utilisés dans d’autres lois, par exemple la Loi sur les océans(4) et la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999)(5). Le préambule de la Loi sur les océans reconnaît que le « Canada encourage l’application du principe de la prévention relativement à la préservation, à la gestion et à l’exploitation des ressources marines afin de protéger ces ressources et de préserver l’environnement marin », et l’approche y est décrite simplement : « pécher par excès de prudence »(6). Dans son préambule, la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) reconnaît que le Canada « s’engage à adopter le principe de la prudence, si bien qu’en cas de risques de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement ».
Le Parlement a l’autorité législative exclusive pour ce qui est des lois relatives aux pêches côtières et intérieures, et ce, aux termes du paragraphe 91(12) de la Loi constitutionnelle de 1867; les assemblées provinciales ont l’autorité exclusive pour ce qui est des lois relatives à la propriété et aux droits civils sur leur territoire, et ce, selon le paragraphe 92(13) de cette même loi. Le pouvoir fédéral en matière de pêches est vaste, mais « l’interprétation de cette compétence doit respecter la compétence en matière de propriété et de droits civils que le par. 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867 confère aux provinces »(7). Afin d’atteindre certains objectifs, les gouvernements peuvent dépasser le traditionnel partage constitutionnel des compétences législatives au moyen d’accords entre le gouvernement fédéral et les provinces.
À l’heure actuelle, le gouvernement fédéral compte différents accords sur les pêches avec les provinces, notamment des accords intergouvernementaux et des délégations administratives. Par exemple, le gouvernement fédéral et la Colombie-Britannique partagent la responsabilité de réglementer l’aquaculture, dans le cadre du protocole d’entente sur le développement de l’industrie aquicole entre le Canada et la Colombie-Britannique, signé le 6 septembre 1988. D’une façon semblable, le gouvernement fédéral a délégué à des provinces comme l’Alberta, l’Ontario et le Québec les responsabilités administratives relatives aux pêches dans leur territoire(8). Le projet de loi offre un cadre législatif général pour ce qui concerne ce genre d’accord avec les provinces.
L’article 7 autorise le Ministre à conclure des accords « visant la réalisation de l’objet de la présente loi » avec les provinces. Comme nous l’avons précisé plus haut, l’objet du projet de loi, précisé à l’article 2, est d’assurer le développement durable des pêches côtières et intérieures du Canada par la préservation et d’autres moyens. Le Ministre peut donc conclure des accords avec les provinces dans un certain nombre de domaines visés par le projet de loi, notamment la gestion des pêches.
Le projet de loi prévoit que des règlements peuvent être pris pour établir les conditions dans lesquelles le Ministre peut conclure un accord ou le renouveler conformément à l’article 7. Les accords conclus en vertu de l’article 7 doivent être rendus publics par le Ministre et prendront fin après cinq ans, à moins que les parties les renouvellent. Les deux parties peuvent mettre fin à un accord sur préavis de trois mois.
Si un accord fédéral-provincial dit que des dispositions législatives provinciales sont équivalentes à un règlement fédéral portant sur le même sujet, le gouverneur en conseil peut, sur la recommandation du Ministre, déclarer que le règlement fédéral ne s’applique pas à cette province. Une telle déclaration peut toutefois être révoquée dans certaines circonstances (art. 9).
Le projet de loi dispose également que le Ministre doit présenter un rapport annuel au Parlement sur l’administration des articles 7 à 9 du projet de loi (art. 10).
Aux termes de l’article 23, le gouverneur en conseil peut déléguer certains pouvoirs du Ministre à un ministre provincial responsable des pêches. Les pouvoirs conférés au Ministre en vertu des dispositions suivantes du projet de loi et des règlements pris en vertu de ces dispositions peuvent être délégués à un ministre provincial :
Les articles 11 à 13 permettent au Ministre de fournir du financement ou d’autres formes d’aide financière pour des initiatives telles que les suivantes :
Le projet de loi donne au Ministre le pouvoir de constituer des comités consultatifs pour tout objet prévu par le projet de loi ou les règlements pris en application de celui-ci. Ces comités peuvent être des organes soit consultatifs et permanents, soit spéciaux et temporaires(9). L’article 14 inscrit dans la loi une pratique déjà existante. Des exemples de comités existants sont le Conseil pour la préservation des ressources halieutiques, sur la côte Est, et le Conseil pour la préservation des ressources halieutiques du Pacifique, sur la côte Ouest.
Actuellement, le Ministre peut collecter des renseignements uniquement en ce qui concerne la gestion des pêches. Le projet de loi élargit ce pouvoir pour que le Ministre puisse demander des informations additionnelles aux détenteurs de permis, notamment tous les renseignements qu’il juge utiles pour :
Les dispositions du projet de loi qui établissent les prix et les droits reprennent celles de la Loi sur les océans. Elles autorisent le Ministre à fixer les prix et les droits pour les services, pour l’utilisation d’une installation, pour les produits, pour les droits et les privilèges (p. ex. les permis), ou encore pour les procédés ou les autorisations réglementaires (p. ex. les autorisations pour la modification, la destruction ou la perturbation de l’habitat) énoncés dans le projet de loi. Ces dispositions sont assujetties à la Loi sur les frais d’utilisation(10).
En plus de l’application des principes énumérés à l’article 6, le projet de loi prévoit également les principes directeurs que le Ministre doit prendre en considération au cours de l’exercice de ses pouvoirs d’attribution de permis. Ces principes sont les suivants :
Le paragraphe 25(2) énumère également les principes facultatifs suivants que le Ministre peut également prendre en considération :
Plusieurs de ces principes ont été débattus en 2002 par le Groupe indépendant sur les critères d’accès. Le Groupe, chargé de fixer l’ordre de priorité des critères d’accès aux pêches nouvelles, a clairement dit que la préservation devait s’appliquer à toutes les décisions relatives à l’accès. Il a aussi reconnu l’importance de l’équité, de la proximité, de la dépendance historique et de la viabilité économique, éléments qui figurent tous dans le projet de loi.
Les dispositions touchant à la délivrance des permis constituent peut-être la partie du projet de loi qui apporte le plus de changements importants au système de gestion des pêches actuel. Le projet de loi, contrairement au paragraphe 7(1) de la LP, n’accorde pas au Ministre le pouvoir discrétionnaire absolu concernant la délivrance des permis. Le Ministre a plutôt la possibilité de prendre des règlements pour la demande et la délivrance des permis, y compris les critères d’admissibilité. Actuellement, la LP n’établit pas de distinction entre, d’une part, le rôle du Ministre lorsqu’il doit prendre des décisions concernant l’accès aux ressources halieutiques et l’établissement de politiques pour la délivrance des permis et, d’autre part, l’administration courante des permis. Le processus de délivrance des permis proposé dans le projet de loi assure une transparence et une responsabilité plus grandes et permet également de donner suite aux plaintes voulant que les décisions ministérielles concernant la délivrance de permis et les quotas puissent être influencées par des facteurs politiques.
Selon le MPO, le projet de loi pourrait faire de certaines politiques pour la délivrance de permis matière à règlement(11). Le Ministère a souvent utilisé ces politiques afin de fournir une orientation et des lignes directrices pour l’exercice du pouvoir discrétionnaire du Ministre concernant la délivrance des permis de pêche. Voici certains exemples de politiques de délivrance des permis actuelles :
Le paragraphe 30(1) du projet de loi met l’accent sur le fait que « le permis confère des privilèges et non un droit de propriété, et il est incessible ». Selon le nouveau système, les permis seront délivrés par des agents de permis nommés par le Ministre, conformément aux règlements. Ces agents pourront refuser un permis à un demandeur qui, même s’il répond aux autres critères :
Dans le cas d’un refus de délivrer un permis, le demandeur a le droit, prévu par la loi, de faire appel à l’Office des pêches du Canada créé par le projet de loi.
Selon l’article 33, les agents de permis peuvent assujettir la délivrance d’un permis à certaines conditions. Celles-ci doivent toutefois faire partie d’une catégorie établie par règlement. Les catégories les plus fréquentes sont le type de poisson qui peut être pêché, la zone de pêche, la période de pêche, la quantité de poissons qui peut être pêchée (quota), l’engin qui peut être utilisé et les rapports qui doivent être soumis. Le projet de loi dispose aussi que les titulaires de permis doivent se conformer à toutes les conditions de leur permis (par. 33(5)), tout manquement constituant une violation.
Le projet de loi répond à au moins deux difficultés de longue date de l’actuel système de gestion des pêches. Premièrement, il permet de réagir aux « accords de fiducie »(12) en refusant l’octroi d’un permis à un demandeur qui a conclu un accord dont le but est contraire aux règlements ou aux arrêtés d’urgence (al. 31(b)). De plus, un titulaire de permis qui conclut un tel accord après la délivrance de son permis pourrait contrevenir à la réglementation.
Deuxièmement, le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation a adopté, dans son Rapport no 75 – Désaveu de mars 2005, une résolution portant que le paragraphe 36(2) du Règlement de pêche de l’Ontario (RPO), pris en vertu de la LP, soit abrogé, au motif qu’il « empiète indûment sur les droits et libertés des personnes concernées et constitue un exercice inusité et surprenant des pouvoirs conférés par le Parlement ». Selon le Comité, cette disposition du RPOn’était pas autorisée par la LP. Le paragraphe 36(2) dit qu’il « est interdit au titulaire d’un permis de pêche commerciale d’enfreindre les conditions de son permis ». Le Comité avait déjà présenté, en mars 2000, un rapport (no 66) dans lequel il avait attiré l’attention de la Chambre des communes sur le paragraphe 36(2) du RPO. Le projet de loi, dans une nouvelle disposition sur l’observation des conditions de délivrance du permis (par. 33(5)), répond aux inquiétudes du Comité.
L’article 37, qui traite de la répartition des quantités ou des quotas, est conforme au paragraphe du préambule qui reconnaît l’importance d’un accès stable aux ressources halieutiques. Tout en conservant l’autorité de décider de l’accès et de la répartition des pêches côtières, le Ministre pourra répartir, pour une période pouvant aller jusqu’à 15 ans, la quantité de poissons attribuée à des flottilles ou à des groupes commerciaux, récréatifs ou autochtones. Les arrêtés de répartition devront être publiés, en plus d’être assujettis aux principes énoncés dans l’article 25. Par conséquent, le Ministre doit tenir compte du besoin de préserver et de protéger le poisson et son habitat, du respect par le pêcheur des dispositions du projet de loi et, enfin, de l’importance pour les pêcheurs de l’accès continu aux ressources halieutiques et de la stabilité de la répartition. Il importe de souligner que les parts sont exprimées comme des fractions du total autorisé des captures (TAC) et que bien que les parts réparties soient stables, le Ministre aura la possibilité de modifier le TAC pour la pêche.
Le projet de loi simplifie la gestion des pêches en accordant au Ministre le pouvoir de faire des « arrêtés de gestion des pêches ». Les arrêtés de gestion des pêches, en ce qui concerne toute espèce de poisson ou de plante marine dans une zone précise, précisent les périodes de fermeture ainsi que les limites de poids et de taille du poisson. Toutes les personnes auxquelles s’appliquent ces arrêtés doivent s’y conformer.
Cette approche directe fondée sur l’utilisation des arrêtés ministériels remplace les « ordonnances de modification » prévues dans la LP. Ces arrêtés pourraient rendre le processus de gestion des pêches plus apte à réagir aux exigences changeantes de la préservation. Le MPO espère ainsi pouvoir ramener les quelque 2 000 pages de règlements fédéraux sur les pêches à environ 300 pages.
Le projet de loi permet au Ministre de conclure différents types d’accords exécutoires avec des organisations représentant des titulaires de permis ou d’autres groupes. Ces accords peuvent toucher à des sujets comme la promotion de la protection et de la préservation du poisson ou encore la participation à la prise de décisions de gestion. Ces accords accroissent le rôle des utilisateurs des ressources et de leurs organisations dans la gestion des pêches côtières (intendance partagée) et peuvent préciser :
Les accords de financement comprennent, entre autres choses, l’assignation d’une quantité de poisson à une organisation afin de rembourser les frais de son rôle dans la gestion de pêches ainsi que les montants que les personnes concernées par l’accord doivent payer à cette organisation(14). En incluant les accords de financement dans les accords de gestion des pêches, le projet de loi répond aux questions soulevées dans au moins une affaire judiciaire. En effet, dans l’affaire Larocque c. le ministre des Pêches et Océans(15), la Cour d’appel fédérale a jugé que le ministre des Pêches et Océans n’a pas le pouvoir de financer les activités de recherche scientifique du MPO en délivrant des permis de pêche et de vente de crabes des neiges(16).
Les accords de gestion des pêches seront négociés entre le Ministre et les organisations qui sont considérées représentatives d’un groupe de personnes ou de titulaires de permis. Ces accords seront ensuite ratifiés par tous les pêcheurs auxquels ils s’appliquent, et non seulement par les membres de l’organisation qui a négocié l’accord en question. Leur respect deviendra une condition du permis. Les règlements pris en vertu de l’article 55 du projet de loi préciseront le processus de conclusion des accords de gestion des pêches, notamment leur ratification. Selon le projet de loi, le Ministre doit publier tout nouvel accord de gestion des pêches, pour que les autres flottes ainsi que les Canadiens en général puissent en prendre connaissance.
Le projet de loi fournit un cadre législatif qui explique le rôle des accords actuels comme les plans de gestion intégrée des pêches et les ententes de cogestion. Les pêches actuellement gérées par les provinces intérieures selon des modalités de délégation ne seront pas sujettes aux accords de gestion des pêches.
L’article 47 traite du plan annuel de pêche Nisga’a, tel qu’il est défini dans le chapitre sur les pêches de l’Accord définitif Nisga’a. Les Nisga’a habitent la région du Nord-Ouest du Pacifique de la Colombie-Britannique, le long de la rivière Nass. Cette rivière est la troisième de la province pour sa production de saumon. L’Accord définitif Nisga’a, paraphé en 1998, reconnaît le droit des Nisga’a à s’autogouverner. L’Accord prévoit également la répartition du saumon aux Nisga’a dans les pêches au saumon dans le Nord.
Les activités suivantes sont interdites par le projet de loi :
L’article 55 du projet de loi donne le pouvoir au gouverneur en conseil de prendre des règlements en ce qui concerne la partie 1, notamment en ce qui concerne :
La deuxième partie du projet de loi fournit des outils pour la protection de l’habitat du poisson contre les modifications dommageables d’ordre physique et chimique. Essentiellement, cette partie reprend les dispositions existantes de la LP et ne présente pas de modifications importantes par rapport à celle-ci. Sous le régime actuel de gestion des pêches, l’application des dispositions sur la protection de l’habitat et sur la prévention de la pollution est répartie entre le MPO et Environnement Canada. Pour l’essentiel, le projet de loi permet encore au gouvernement de gérer séparément la protection de l’habitat et la prévention de la pollution.
L’interdiction générale de modifier, de détruire ou de perturber l’habitat du poisson demeure la pierre angulaire du programme du MPO pour la protection de l’habitat du poisson. Aux termes de l’article 59 du projet de loi, il sera encore interdit de poursuivre un travail ou une activité dont le résultat est de modifier, détruire ou perturber l’habitat; dans l’actuelle LP, cette interdiction est prévue à l’article 35. Le projet de loi précise également que la modification ou la perturbation doit être dommageable pour qu’il y ait interdiction. De plus, l’interdiction continue de ne pas s’appliquer à quiconque agit conformément aux règlements ou aux conditions établies dans une autorisation délivrée par le Ministre. Le projet de loi simplifie le processus par lequel le Ministre peut prendre des mesures en cas de non-respect des conditions dont sont assorties les autorisations de modifier, détruire ou perturber l’habitat (c.‑à-d. rémunération, mesures d’atténuation et surveillance, par. 61(3)) et faire de ce défaut de respect une infraction (al. 66(1)b)).
Toute autorisation de modifier, de détruire ou de perturber l’habitat (al. 59(2)a)) continue de devoir faire l’objet d’une évaluation sous le régime de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale(17). Selon l’alinéa 59(2)b), la modification ou la perturbation dommageable ou encore la destruction de l’habitat sont permises lorsqu’un travail ou une activité sont faits conformément aux conditions prévues par règlement ou à toute autre autorisation délivrée sous le régime du projet de loi (p. ex. la pêche avec permis), et elles n’exigent donc pas d’évaluation environnementale.
Le projet de loi ne modifie pas sensiblement les dispositions actuelles de la LP – celles de l’article 36 – sur la prévention de la pollution. L’article 60 du projet de loi régit donc le rejet de substances nocives dans les eaux fréquentées par les poissons. L’article 56, qui contient les définitions propres à cette partie du projet de loi, donne toutefois une nouvelle définition de « substances nocives ».
L’obligation d’aviser (art. 62) a été élargie pour inclure le fait de modifier, détruire ou perturber l’habitat. L’article 63 du projet de loi établit la portée des règlements qui peuvent être pris par le Cabinet en ce qui concerne la préservation et la protection du poisson et de son habitat ainsi que la prévention de l’obstruction ou de la pollution des eaux fréquentées par les poissons. Cet article étend les compétences réglementaires actuelles pour la préservation et la protection du poisson et de son habitat. Les règlements peuvent être pris au sujet de catégories de travaux ou d’activités qui sont soumises aux conditions énumérées à l’alinéa 59(2)b).
Cette partie du projet de loi comprend aussi une disposition sur la responsabilité civile (art. 64) : certaines personnes, notamment celles qui surveillent le travail ou l’activité en question ou les substances nocives, sont responsables de certains coûts, tels que ceux liés aux mesures correctives. La perte de revenu peut également être réclamée par toute personne qui peut prouver que la perte en question est liée à la modification, à la destruction ou à la perturbation de l’habitat ou au rejet d’une substance nocive. De plus, le paragraphe 64(9) prolonge à cinq ans la période de prescription pour entreprendre des recours civils, et ce, afin de tenir compte du temps qui peut s’écouler avant la manifestation des effets cumulatifs de la modification, de la destruction ou de la perturbation de l’habitat ou de la pollution.
Enfin, comme l’exige la LP actuelle, le Ministre doit présenter au Parlement un rapport annuel sur l’application des dispositions du projet de loi relatives à la protection du poisson et de son habitat et la prévention de la pollution durant l’année (art. 68).
La partie 3 du projet de loi interdit d’exporter, d’importer ou de transporter des espèces aquatiques envahissantes. Elle traite également de la destruction de telles espèces. Les espèces aquatiques envahissantes sont des espèces ou des sous-espèces aquatiques introduites en dehors de leur habitat normal et dont l’établissement et la propagation menacent l’écosystème, les habitats ou les espèces en occasionnant des dommages environnementaux.
Ces dispositions ont été incluses dans le projet de loi en partie pour donner suite au rapport intitulé Les espèces aquatiques envahissantes : des invités surprise, publié en mai 2003 par le Comité permanent des pêches et des océans, qui a recommandé au gouvernement d’agir immédiatement pour lutter contre la menace que représentent les espèces étrangères pour les écosystèmes canadiens(18). Le Comité a également recommandé au MPO de refondre et de simplifier les règlements qui s’appliquent aux espèces envahissantes afin de produire un ensemble exhaustif de règlements, et en particulier de prendre un règlement pour interdire la vente et le commerce de carpes asiatiques vivantes au Canada.
Afin de préserver et de protéger le poisson et son habitat, l’article 71 permet au gouverneur en conseil de prendre des règlements relatifs aux espèces aquatiques envahissantes, y compris pour définir le terme « espèce aquatique envahissante ». Le gouverneur en conseil peut également réglementer le contrôle de telles espèces, notamment pour :
La quatrième partie du projet de loi est basée en grande partie sur les dispositions d’administration et de contrôle d’application prévues dans la LP actuelle. Les agents des pêches seront encore responsables de la majeure partie de l’administration et du contrôle d’application (art. 73 à 75 et 78). Les dispositions de contrôle d’application qui ne sont plus utilisées sont retirées, et d’autres dispositions sont ajoutées ou modernisées afin de refléter les pratiques actuelles. Par exemple, les agents de pêche et les inspecteurs de l’habitat sont protégés des poursuites pour violation de la loi lorsqu’ils agissent dans le cadre d’activités d’infiltration, par exemple lorsqu’ils achètent du poisson pris illégalement (art. 111). De plus, les dispositions relatives à l’inspection et à la perquisition ont été modernisées pour ajouter la mention d’ordinateurs et de données électroniques (p. ex. les al. 78(3)e) et h), ainsi que le par. 78(4)).
Le projet de loi contient également des dispositions concernant :
Les pouvoirs des inspecteurs sont modernisés afin de refléter ceux de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) et sont conformes aux nouvelles dispositions sur la protection de l’habitat énumérées dans la partie 2 (par. 78(2)).
Le projet de loi comprend des dispositions qui traitent des accords sur des mesures de rechange entre le procureur général et les personnes accusées d’avoir violé certaines dispositions du projet de loi. Ces dispositions permettent une solution de rechange moins onéreuse que les poursuites judiciaires (art. 130 à 143).
La cinquième partie du projet de loi concerne la constitution de l’Office des pêches du Canada (l’Office)**. L’Office a le pouvoir de traiter certains cas de violation relatifs à la pêche ainsi que les appels en ce qui concerne la délivrance des permis.
L’article 149 du projet de loi constitue l’Office, qui est composé d’un président, d’un vice-président et de divers autres membres exerçant leurs fonctions à temps partiel. Tous sont nommés par le gouverneur en conseil, sur la recommandation du Ministre (art. 150). Le président, qui est le premier dirigeant, supervise le travail de l’Office (par. 151(1)). Sauf révocation motivée par le gouverneur en conseil, les membres de l’Office sont nommés pour un mandat maximal mais renouvelable de cinq ans (art. 152). Seules les personnes compétentes dans le domaine des pêches du Canada ou dans la prise de décisions administratives peuvent être nommées à l’Office (art. 153). Les personnes ayant des intérêts dans les entreprises de pêche ou qui détiennent des parts ou des postes dans des organisations de pêche ne peuvent pas être nommées comme membre de l’Office ou ne peuvent continuer à y siéger. Un membre de l’Office qui reçoit par succession ou par testament le droit de participer aux activités d’une entreprise de pêche est tenu de se départir de ce droit à l’intérieur d’un délai de 90 jours (art. 154).
Le secrétaire ainsi que le personnel de l’Office sont nommés conformément à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. L’Office peut également engager des experts techniques pour l’aider ou le conseiller en ce qui concerne n’importe quel sujet (art. 158).
À la demande du Ministre, l’Office est tenu de fournir les informations sur les appels relatifs aux permis et sur les procédures concernant les violations (art. 160).
À la fin de chaque année financière, l’Office doit rédiger un rapport annuel que le Ministre présentera au Parlement. Ce rapport porte sur l’application de la partie 5 et de ses règlements (art. 161).
Toutes les parties visées par une procédure peuvent comparaître devant l’Office soit en personne ou par l’intermédiaire d’un représentant (art. 163). L’Office est habilité à citer des témoins à comparaître (par. 164(1)). Une citation ou une ordonnance de l’Office peut être homologuée par la Cour fédérale ou une juridiction supérieure de la province, auquel cas son exécution s’effectue selon les mêmes modalités qu’une citation ou une ordonnance de ce tribunal (par. 165(1)). Les décisions et les ordonnances de l’Office doivent être publiées (par. 166(1)).
Conformément à l’article 32, un demandeur qui s’est vu refuser un permis ou qui n’a pas reçu de permis dans un délai raisonnable peut en appeler à l’Office durant la période prescrite. Saisi d’un tel appel, l’Office peut soit le rejeter ou l’accueillir et demander à l’agent au traitement de permis de délivrer ledit permis.
L’Office est habilité à s’occuper des cas de violation liés aux pêches, une violation pouvant être classée comme grave ou mineure, selon les règlements pris en vertu de l’article 206. Les dispositions du projet de loi qui traitent des violations s’appliquent autant aux détenteurs de permis qu’aux autres personnes autorisées à pêcher sous le régime de ces permis.
Selon les articles 173 et 174, les violations graves et mineures portent sur :
Une violation grave peut également se produire lors qu’un détenteur de permis contrevient à une ordonnance de l’Office rendue en vertu du paragraphe 198(1) ou de l’article 199 ou si un chargé de dossier (tout employé du MPO désigné comme chargé de dossier par le Ministre) décide de traiter une violation mineure comme une violation grave. Le passage d’une violation mineure à une violation grave est possible si le détenteur de permis s’est rendu responsable d’au moins deux autres violations durant les cinq années précédentes ou si, selon le chargé de dossier et les circonstances prévues par règlement, la violation est suffisamment sérieuse pour ce qui est de ses effets ou effets potentiels sur les ressources halieutiques (art. 182).
Le gouverneur en conseil peut prendre des règlements prévoyant quelles contraventions des dispositions du projet de loi ou des règlements constituent des violations graves (sous-al. 206(1)c)(i)) ou mineures (sous-al. 206(1)d)(i)) pour certains permis ou certaines catégories de permis. Le gouverneur en conseil peut également prendre des règlements pour indiquer quelles catégories de contravention d’une ordonnance de gestion des pêches constituent des violations graves (sous-al. 206(1)c)(ii)) ou mineures (sous-al. 206(1)d)(ii)).
Selon l’article 175, une violation n’est pas une infraction. Le détenteur d’un permis peut être responsable d’une violation soit directement, soit du fait d’autrui, ainsi que le dispose l’article 176. Une personne qui établit avoir fait preuve de toute la diligence voulue afin de prévenir la violation n’est pas responsable de celle-ci. De la même façon, une personne n’est pas responsable d’une violation si elle établit qu’elle croyait honnêtement et raisonnablement en l’existence de faits qui, s’ils étaient vrais, l’innocenteraient (art. 178).
Une décision rendue par l’Office est définitive et lie les parties (art. 197).
Le processus concernant les violations graves et mineures débute par la signification d’un avis de violation à la partie visée. Toutefois, un avis de violation grave ou mineure ne peut être signifié plus de deux ans après la date à laquelle les agents de pêche ou les garde-pêche ont pris connaissance des faits constituant la violation (art. 177).
Un agent de pêche ou un garde-pêche ayant des motifs valables de croire qu’une violation mineure a été commise peut remplir un procès-verbal mentionnant la sanction pécuniaire et le signifier à la personne (art. 184).
Les violations mineures peuvent entraîner des pénalités financières maximales de 3 000 $. Les montants des sanctions pécuniaires pour violations mineures peuvent être fixés par règlement (al. 206(1)f)). Les titulaires de permis peuvent contester l’application de la sanction pécuniaire devant l’Office. Si le titulaire choisit de payer le montant sans contester la sanction pécuniaire, il ne devra en payer que la moitié (par. 185(1)).
Le processus concernant les violations graves débute lorsqu’un chargé de dossier qui a des motifs valables de croire qu’une violation grave a été commise remplit un procès-verbal, le fait signifier à la personne et en envoie une copie à l’Office (art. 181). Il incombe au chargé de dossier d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que la personne est responsable de la violation (art. 194).
L’Office peut imposer différentes sanctions, y compris des sanctions pécuniaires maximales de 30 000 $ (art. 198 et 199). Il peut aussi révoquer ou suspendre un permis ou encore interdire au contrevenant de demander un permis pour une période qu’il juge indiquée, modifier ou annuler les conditions liées aux permis existants, y compris les conditions concernant le nombre ou la quantité des captures, et établir des conditions qui devront être comprises dans les futurs permis, par exemple des conditions concernant les quotas de pêche ou les engins et les appareils de pêche qui peuvent être utilisés.
L’Office peut aussi obliger une personne à payer les coûts raisonnables engagés lors de la saisie, de la garde, de l’entretien ou de la disposition du poisson, des plantes aquatiques ou de toute autre chose saisie relativement à une violation. Il peut ordonner à une personne de prendre les mesures nécessaires afin de réparer ou de prévenir les dommages causés ou pouvant être causés au poisson, à son habitat ou aux pêches par suite de la violation. S’il est convaincu qu’une personne a tiré profit de la perpétration de la violation, il peut également ordonner qu’une sanction pécuniaire supplémentaire lui soit appliquée.
Le gouverneur en conseil peut prendre différents règlements pour l’application de la partie 5, notamment pour :
L’article 207 permet au gouverneur en conseil de prendre des règlements en ce qui concerne un certain nombre de sujets visés par le projet de loi. Le projet de loi prévoit également certains documents qui peuvent être incorporés par renvoi dans les règlements (art. 208 et 209). Ces documents peuvent être des documents de nature technique ou explicative (comme les normes et les spécifications) produits par le Ministre, une entité gouvernementale ou un organisme public, ou conjointement par le Ministre et un gouvernement ou un organisme public pour remplir certains objectifs. Les règlements incorporent donc ces documents sans avoir à en répéter les dispositions.
En plus de présenter un certain nombre de dispositions transitoires, le projet de loi modifie 21 lois fédérales(19), énonce des dispositions de coordination avec la Loi sur la marine marchande du Canada (2001) et le projet de loi C‑30 : Loi canadienne sur la qualité de l’air, et abroge les lois suivantes :
L’article 253 prévoit que le projet de loi, à l’exception des articles 246 et 247 (des dispositions de coordination), entre en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret.
L’actuelle LP, qui est le principal outil de gestion des pêches au Canada, est considérée désuète sous plusieurs rapports. De l’avis des agents du MPO, il s’agit d’une loi habilitante qui comporte un pouvoir substantiel, mais qui présente des faiblesses pour ce qui est des principes directeurs, de la supervision ou de la surveillance, des freins et contrepoids, ainsi que des renvois aux procédures. En plus de moderniser la structure et le langage de la loi, le projet de loi traite de la gouvernance, de la répartition des contingents, des permis, de la cogestion des pêches, des sanctions administratives et de la gestion de l’habitat.
Selon le MPO, il faut réviser la LP pour plusieurs raisons. La LPest caractérisée le pouvoir discrétionnaire qu’elle accorde au Ministre. Cela signifie que les décisions – par exemple qui a accès au poisson, où et avec quel matériel – sont laissées au Ministre. La LP n’impose pratiquement aucune limite aux actions du Ministre, ce qui risque d’exposer les décisions au jeu des intérêts politiques. Sous le régime de la LP, les efforts de pêches et la répartition des stocks sont donc moins prévisibles, et après plusieurs années, l’effet cumulatif des décisions ministérielles peut mener à un régime de pêches qui présente des carences sur le plan de la performance économique ou encore sur celui de la préservation. La loi proposée établit une distinction entre les décisions sur l’accès et l’adoption de politiques concernant la délivrance de permis, dont le Ministre demeurera responsable, et la gestion courante des permis.
Plusieurs des outils réglementaires élaborés sous le régime la LP sont considérés désuets et inefficaces. Comme le MPO se dirige toujours plus vers l’intendance partagée avec les utilisateurs des ressources, le projet de loi comporte des outils plus efficaces, comme le pouvoir de négocier des accords de gestion des pêches. Il transfère effectivement aux utilisateurs des ressources une partie du contrôle et des responsabilités en matière de gestion des pêches. L’industrie de la pêche devrait appuyer le fait que les pêcheurs auront davantage voix au chapitre dans la gestion des pêches et jouiront d’une plus grande sécurité de leurs quotas. Par contre, les organisations de pêche devront assumer plus de responsabilités pour ce qui est du travail et des coûts rattachés à la gestion de la pêche. S’il est fort probable que les pêcheurs accueilleront favorablement l’occasion de pouvoir participer davantage à la gestion de la pêche, il n’est pas aussi certain qu’ils seront heureux des coûts additionnels qui y sont liés.
Il ne faut pas oublier que la LP actuelle permet déjà au Ministre de conclure des accords. Toutefois, les dispositions du projet de loi concernant les accords de gestion des pêches devraient rendre les procédures plus transparentes, car le Ministre aura l’obligation d’avertir ceux qui pourraient être touchés par ces accords qu’il compte entreprendre des négociations. En outre, les accords devront être soumis à une procédure de ratification, puis être rendus publics.
Le projet de loi donne également au Ministre le pouvoir de conclure des accords avec les gestionnaires des pêches provinciaux ainsi que le pouvoir leur déléguer une partie de son autorité en matière de gestion. Les gestionnaires des pêches provinciaux se plaignent depuis longtemps des délais dans l’examen de leurs projets de règlement par le fédéral et ils devraient accueillir favorablement toute mesure axée sur une gestion plus indépendante de la répartition des ressources. D’aucuns pourraient cependant y voir une cession par le fédéral d’une partie de sa compétence en matière de pêches.
Le MPO affirme que plusieurs affaires judiciaires l’ont privé de sa capacité d’imposer des sanctions aux titulaires de permis qui violent, parfois gravement, les modalités de leur permis. Le projet de loi C‑45, tout comme l’aurait fait le projet de loi C‑62 il y a dix ans, crée un nouveau régime de sanctions administratives et d’appel concernant les permis qui fait intervenir un tribunal indépendant. Ce dernier sera sûrement apprécié des pêcheurs, puisqu’ils ont souvent critiqué l’appareil judiciaire pour sa lenteur et, souvent, son manque de compréhension de la gravité des différentes violations en matière de pêches.
Enfin, la loi proposée reflète le fait qu’on tend de plus en plus, à l’échelle de la planète, à adopter des stratégies de gestion des pêches qui mettent l’accent sur la gestion écosystémique, le développement durable et le principe de précaution. En incluant un préambule et des principes d’orientation qui devront être appliqués à la gestion des pêches tout comme à la préservation et à la protection du poisson et de son habitat, le projet de loi répond à ces préoccupations. Le préambule reconnaît également l’importance d’un accès stable aux ressources halieutiques pour la viabilité économique de l’industrie de la pêche.
Les organisations non gouvernementales écologistes, par contre, affirment que le projet de loi ne répond pas de façon convenable aux inquiétudes sur la préservation et la protection des ressources marines. Par exemple, la prise de décisions relatives à la gestion des pêches par le Ministre n’a qu’à « tenir compte » du besoin de protection et de préservation du poisson et de son habitat. Le Ministre n’est pas obligé d’agir lorsqu’il se rend compte qu’un habitat a besoin de protection. Les organisations écologistes craignent que les habitats des poissons continuent de subir les effets de pratiques de pêche destructrices, puisque le projet de loi soustrait le titulaire d’un permis de pêche à l’application de l’article interdisant de modifier, détruire ou perturber l’habitat et, par conséquent, à l’exigence d’une évaluation environnementale.
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