Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
La Loi sur l’efficacité énergétique (LEE), édictée en 1992, régit les normes d’efficacité énergétique de nombreux « matériels consommateurs d’énergie » importés et expédiés d’une province à une autre. La LEE prescrit également l’étiquetage de ces matériels et la cueillette de données sur l’efficacité énergétique.
Selon la LEE, une étiquette d’efficacité énergétique doit être apposée sur certains matériels consommateurs d’énergie, comme les sécheuses, les laveuses, les laveuses-sécheuses, les lave-vaisselle, les cuisinières électriques, les congélateurs, les réfrigérateurs et réfrigérateurs-congélateurs et les climatiseurs individuels, avant leur vente.
Le projet de loi S-3 a été déposé et adopté en première lecture au Sénat le 29 janvier 2009. Il est identique au projet de loi S-4, qui a été déposé au cours de la deuxième session de la 39e législature et qui est mort au Feuilleton à la fin de cette législature; il n’a pas été présenté de nouveau au cours de la première session de la 40e législature.
Le projet de loi modifie la LEE pour accorder le pouvoir de fixer, par règlement, des normes d’efficacité énergétique pour toute catégorie de matériels dont l’utilisation influe sur la consommation d’énergie, et de renforcer les exigences en matière d’étiquetage pour les produits de consommation et commerciaux. Selon la LEE actuelle, le gouvernement doit réglementer chaque matériel individuellement; les modifications que propose le projet de loi prévoient la capacité de réglementer des « catégories de matériels », ce qui permettrait au gouvernement de prendre un seul règlement pour tous les matériels qui consomment de l’énergie ou dont l’utilisation influe sur la consommation d’énergie. Il s’agit d’un élargissement du pouvoir de réglementation original de la LEE.
Parmi les mesures d’efficacité énergétique du projet de loi, il faut signaler les normes de réglementation de la consommation d’énergie des matériels en mode veille. Au moment de l’édiction de la LEE en 1992, on ne reconnaissait généralement pas le « mode veille » comme un mode de grande consommation d’énergie, et la LEE n’en tenait pas compte. Le projet de loi propose de prendre en compte les changements survenus dans les matériels et les normes d’efficacité énergétique depuis ce temps.
Le projet de loi S-3 contient essentiellement les mêmes dispositions que la partie II du projet de loi C‑30 : Loi modifiant la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), la Loi sur l’efficacité énergétique et la Loi sur les normes de consommation de carburant des véhicules automobiles (Loi canadienne sur la qualité de l’air), présenté à la première session de la 39e législature. Ce projet de loi avait été amendé et adopté par un comité législatif et en était à l’étape du rapport et de la deuxième lecture à la Chambre des communes lorsqu’il est mort au Feuilleton en raison de la prorogation du Parlement le 14 septembre 2007.
Selon un communiqué du gouvernement, le projet de loi permettra au gouvernement de « prescrire des normes non seulement pour les produits qui utilisent de l’énergie, mais aussi pour les produits qui, comme les thermostats, influent sur la consommation d’énergie »(1). D’autres modifications à la LEE exigeront du ministre des Ressources naturelles qu’il présente tous les trois ans au Parlement un rapport d’étape sur l’efficacité énergétique qui compare « la rigueur et l’exhaustivité des normes établies par le Canada avec celles d’autres États d’Amérique du Nord »(2).
Le projet de loi crée un préambule à la LEE, énonçant que « le gouvernement du Canada est résolu à assurer l’amélioration constante de l’efficacité énergétique dans tous les secteurs de l’économie canadienne ».
L’article 1 ajoute le nouvel article 2.1 aux définitions de la LEE. Il vise à préciser le sens à donner au terme « catégorie » employé dans la LEE. Une « catégorie » de matériels consommateurs d’énergie peut être définie selon des caractéristiques communes de consommation d’énergie des matériels, l’usage auxquels ils sont destinés ou les circonstances dans lesquelles ils sont normalement utilisés.
Dans l’actuelle LEE, l’alinéa 4(1)b) interdit au fournisseur d’expédier « de la province de fabrication dans une autre province, pour le vendre ou le louer », du matériel de consommation d’énergie non conforme à certaines exigences. L’article 2 modifie cette disposition en remplaçant la phrase citée par la suivante : « d’une province à une autre, aux fins de vente ou de location ». De plus, l’alinéa 4(1)b) de la version anglaise de la LEE actuelle, qui exige qu’une étiquette « in the prescribed form and manner » soit apposée sur les matériels ou leurs emballages, est modifié pour exiger l’apposition d’une étiquette « in accordance with the regulations ».
L’article 3 modifie l’article 5 de la LEE, qui dispose que le fournisseur qui expédie ou importe du matériel consommateur d’énergie doit déposer des renseignements. Selon l’actuel paragraphe 5(1), le fournisseur doit « déposer » auprès du Ministre « un rapport qui contient les renseignements réglementaires concernant l’efficacité énergétique du matériel consommateur d’énergie ». Le projet de loi modifie le libellé afin d’exiger du fournisseur qu’il « communique » au Ministre les renseignements, et ajoute l’obligation de communiquer les renseignements concernant l’efficacité énergétique, l’expédition ou l’importation de matériels.
Des modifications de forme semblables (« déposer un rapport » devient « communiquer les renseignements réglementaires ») sont proposées pour les alinéas 5(2)a) et 5(2)b), qui prévoient des exceptions aux renseignements dont il est question au paragraphe 5(1). En outre, l’article 3 exempte le fournisseur, dans certains cas, de l’obligation de communiquer des renseignements concernant l’efficacité énergétique du matériel consommateur d’énergie, mais non de l’obligation de communiquer des renseignements concernant l’expédition ou l’importation de ce matériel. Il dispose qu’il n’est pas nécessaire de communiquer les renseignements si le Ministre est convaincu qu’ils ont déjà été communiqués ou que le matériel consommateur d’énergie a les mêmes caractéristiques d’efficacité énergétique qu’un matériel consommateur d’énergie comparable « pour lequel les renseignements ont déjà été communiqués ». La LEE actuelle est ainsi libellée : « ayant déjà fait, de la part du fournisseur ou d’un autre fournisseur, l’objet d’un rapport » (nous soulignons).
L’article 4 apporte plusieurs modifications de forme au libellé des articles portant sur les dossiers et documents que le fournisseur doit tenir. Selon l’actuel article 7, le fournisseur doit tenir des documents et dossiers qui « permettent » au Ministre de vérifier l’exactitude et l’intégralité des renseignements qu’ils contiennent. Selon le projet de loi, le fournisseur doit tenir des documents et dossiers « suffisants pour permettre » au Ministre de faire la vérification.
L’article 5 remplace l’alinéa 20(1)a) de la LEE, qui énonce les pouvoirs réglementaires. Actuellement, le gouverneur en conseil peut, par règlement, désigner comme matériel consommateur d’énergie tout objet conçu pour fonctionner à l’électricité, au pétrole, au gaz naturel ou au moyen de toute autre forme ou source d’énergie ou pour servir de porte ou fenêtre. L’article 5 élargit le pouvoir réglementaire pour englober toute catégorie de produits fabriqués. Il supprime aussi la mention aux portes et fenêtres et la remplace par « ou qui régit la consommation d’énergie ou influe sur celle-ci ». Ces modifications élargissent l’éventail de matériels que la LEE peut réglementer.
L’alinéa 20(1)b) de la version anglaise de la LEE est modifié par suppression du mot « prescribed » précédant le terme « classes of energy-using products » afin de l’harmoniser au libellé français.
L’article 5 simplifie également le libellé, tout en élargissant le pouvoir réglementaire du gouverneur en conseil, en modifiant l’alinéa 20(1)c). À l’heure actuelle, cet alinéa permet la prise de règlements fixant les modalités d’étiquetage de tout matériel consommateur d’énergie ou de toute catégorie de matériels consommateurs d’énergie, ou de leur emballage, relativement à leur efficacité énergétique. L’article 5 énonce simplement qu’un règlement peut « régir l’étiquetage de tout matériel consommateur d’énergie ou de toute catégorie de matériels consommateurs d’énergie, ou de leur emballage ». La mention restrictive « relativement à leur efficacité énergétique » est supprimée.
L’article 6 ajoute un nouveau paragraphe qui exige du Ministre qu’il compare, tous les trois ans, les normes d’efficacité énergétique canadiennes à celles des États-Unis et du Mexique. Cette exigence s’ajoute à l’obligation qu’impose l’article 36 de la LEE au Ministre d’établir un rapport annuel et de le faire déposer devant le Parlement. Cette comparaison a pour objet de démontrer dans quelle mesure les normes canadiennes sont aussi rigoureuses que celles d’autres États.
L’article 7 remplace entièrement l’article 37 actuel. Dans les quatre ans suivant l’entrée en vigueur de l’article 37, le Ministre démontre dans le rapport visé précédemment dans quelle mesure des normes d’efficacité énergétique ont été fixées sous le régime de la LEE « pour les matériels consommateurs d’énergie dont l’utilisation a un effet important sur la consommation d’énergie au Canada ».
L’article 8 énonce que la LEE entrera en vigueur à la date fixée par décret.
Selon les renseignements du gouvernement, les modifications que propose le projet de loi font partie de la stratégie globale du gouvernement concernant les changements climatiques : un précis d’information du gouvernement dit que l’amélioration de l’efficacité énergétique peut contribuer à limiter les coûts énergétiques et à réduire « directement les émissions de gaz à effet de serre en faisant en sorte que des produits comme les fournaises brûlent moins de combustible »(3).
Cette stratégie a vu le jour en octobre 2006 lorsque le gouvernement a publié un avis d’intention de réglementer les émissions atmosphériques(4). Certaines dispositions de l’avis renferment l’engagement d’apporter des modifications au règlement sur l’efficacité énergétique en vertu de la LEE. Ces modifications visent à élargir la portée de la LEE afin qu’elle puisse inclure d’autres produits et applications et « offrir une base plus solide aux dispositions liées à la mise en œuvre de la LEE et à l’étiquetage »(5).
L’avis d’intention a été suivi, en avril 2007, du Cadre réglementaire sur les émissions atmosphériques(6) qui indique que des travaux ont commencé sur une éventuelle série de modifications au Règlement sur l’efficacité énergétique. Le Cadre établit aussi un projet d’échéancier pour la prépublication des modifications. Le Règlement fixera des normes nouvelles ou supplémentaires pour des matériels et biens industriels et de consommation, dont les suivants :
La proposition visant à fixer des normes en matière d’alimentation de veille est digne de mention.
De nombreux appareils électriques – des téléviseurs aux lecteurs DVD et des chaînes stéréophoniques aux fours à micro-ondes – ne peuvent être éteints complètement que s’ils sont débranchés. Toutefois, il n’est pas souhaitable de les débrancher puisque la mémoire de ces appareils ou la programmation qui y a été entrée peuvent être effacées. Par conséquent, lorsqu’ils sont branchés et en mode veille, ces produits consomment continuellement de l’électricité.
Cette « charge fictive » peut s’avérer importante. Ainsi, un téléviseur éconergétique peut consommer un watt d’électricité ou moins en mode veille. Un téléviseur ordinaire plus ancien consomme en moyenne 12 watts(7). Cela peut sembler bien peu lorsqu’on pense à un seul appareil, mais si on multiplie le tout par le nombre d’appareils électriques qui se trouvent dans les foyers canadiens, alors la consommation d’électricité de ces appareils soi-disant éteints est amplifiée :
L’Office de l’efficacité énergétique de Ressources naturelles Canada estime que si tous ces produits consommaient une quantité d’énergie minimale en mode veille, le ménage canadien type économiserait au moins 35 dollars par an sur les coûts d’électricité et que, dans tout le pays, on économiserait une quantité d’électricité équivalant à la consommation de plus de 300 000 ménages.(8)
Le projet de loi n’a pas beaucoup attiré l’attention des médias, et les réactions rapportées sont plutôt modérées.
L’industrie a accueilli la réglementation proposée avec un haussement d’épaules. Une porte-parole de Sony Canada a affirmé que cela aura peu d’effet sur les appareils électroniques grand public de l’entreprise. Selon ce qu’a écrit Candace Haymen dans un courriel, « tous les téléviseurs Sony consomment moins d’un watt d’électricité en mode veille, et Sony développe constamment de nouvelles technologies pour améliorer l’efficacité énergétique de ses produits ».
La réaction des groupes environnementalistes était aussi réservée. Selon Julia Langer, du Fonds mondial pour la nature, le Canada accuse beaucoup de retard en matière d’efficacité énergétique comparativement à la majorité des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques. Elle affirme que le gouvernement doit imposer à l’industrie des restrictions plus sévères plutôt que des « mesures administratives », s’il est déterminé à économiser l’énergie. « Ce n’est pas mauvais, c’est seulement que nous sommes impatients d’avoir de vrais règlements qui interdiront les produits non éconergétiques », a-t-elle déclaré.(9)
La nature globale du pouvoir de réglementation prévu au projet de loi a également attiré notre attention. Le projet de loi modifierait la LEE pour permettre de réglementer les matériels qui consomment de l’énergie ou dont l’utilisation influe sur celle-ci (nous soulignons). Cela pourrait un jour mener à la prise de règlements limitant la consommation d’eau des électroménagers et des appareils sanitaires comme les lave-vaisselle, les pommes de douche et les toilettes en rendant les appareils sanitaires à débit réduit obligatoires, puisque leur utilisation influe sur la consommation d’énergie(10).
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
Le présent résumé législatif reprend, à quelques détails près, le résumé législatif, préparé par l’auteure et par Lynn C. Myers, anciennement de la Bibliothèque du Parlement, d’une version antérieure du projet de loi.
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