Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le projet de loi C-5 : Loi modifiant la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes, a été déposé à la Chambre des communes le 28 janvier 2009. Le projet de loi C-5 est identique au projet de loi portant le même numéro déposé au cours de la première session de la 40e législature et mort au Feuilleton à la prorogation du Parlement le 4 décembre 2008, qui lui-même visait à rétablir le projet de loi C-63, mort au Feuilleton à la fin de la deuxième session de la 39e législature le 7 septembre 2008.
Le projet de loi C‑5 remplace presque toutes les dispositions prévues par les six articles de la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes(1) et aborde un certain nombre de questions traitées actuellement dans le cadre du Règlement de 1995 sur le pétrole et le gaz des terres indiennes(2).
La Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes et le Règlement de 1995 sur le pétrole et le gaz des terres indiennes constituent le cadre législatif de la gestion du pétrole et du gaz des terres indiennes. Depuis son adoption en 1974, la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes (LPGTI) n’a guère été modifiée.
C’est par l’entremise du Conseil de cogestion de Pétrole et gaz des Indiens du Canada que le Conseil des ressources indiennes et Pétrole et gaz des Indiens du Canada collaborent pour faciliter l’exploitation des ressources pétrolières et gazières des terres des Premières nations.
C’est en 1987 que le gouvernement du Canada a créé Pétrole et gaz des Indiens du Canada (PGIC), un organisme relevant du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Avant la création de cet organisme, la responsabilité des ressources pétrolières et gazières des réserves incombait à la Division des ressources minérales des Indiens, au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien(3). PGIC a le double mandat « d’exécuter les obligations fiduciaires et légales de la Couronne concernant la gestion des ressources pétrolières et gazières situées sur les terres des Premières nations » et de « faciliter les initiatives des Premières nations désireuses d’assumer la gestion et la maîtrise de leurs propres ressources pétrolières et gazières »(4). L’un des objectifs de PGIC est de « travailler en partenariat avec le Conseil de cogestion de PGIC afin de trouver des moyens permettant aux Premières nations de gérer et maîtriser totalement leurs ressources pétrolières et gazières ».
Le Conseil des ressources indiennes (CRI) a été créé en 1987 par les chefs des Premières nations productrices de pétrole et de gaz. L’affiliation est réservée aux Premières nations dont les terres produisent ou peuvent produire du pétrole et du gaz(5). Les trois volets du mandat du CRI sont les suivants(6)
- Aider les Premières nations à mieux gérer et contrôler leurs ressources pétrolières et gazières.
- Appuyer les mesures prises par les Premières nations qui s’efforcent d’accéder à l’autonomie économique et veiller à ce que les obligations fiduciaires du gouvernement et les traités conclus avec les Premières nations soient respectés.
- Coordonner la promotion des initiatives réalisées de concert avec les gouvernements provinciaux et fédéral, avec le secteur privé et avec d’autres organismes associés à l’exploitation du pétrole et du gaz naturel pour améliorer les retombées économiques découlant de la mise en valeur des ressources des Premières nations.
- Encourager le perfectionnement et l’emploi d’Autochtones dans les activités d’exploitation des ressources pétrolières et gazières.
- Transformer PGIC en une institution des Premières nations travaillant en partenariat avec le Conseil de cogestion de PGIC, c’est‑à‑dire favoriser la création d’un centre d’affaires pour l’exploitation du pétrole et du gaz et d’une institution autochtone durable en matière d’exploitation des ressources pétrolières et gazières.(7)
Le Conseil de cogestion de PGIC, créé en 1996, est composé de neuf membres, dont six sont désignés par le CRI et trois par le gouvernement du Canada. Le protocole d’entente qui en est l’origine « prévoyait une perspective à trois temps : cogestion, délégation et contrôle intégral, mais il en est resté, en fait, à la première étape »(8).
Selon PGIC, le cadre législatif et la réglementation de l’exploitation du pétrole et du gaz dans les réserves doivent être modernisés, notamment pour traduire les perspectives provinciales, adaptées à la transformation du secteur et de la technologie(9). Le PGIC estime en particulier que la LPGTI et le règlement afférent doivent être modernisés pour « éliminer le décalage réglementaire actuel. Le fait de mettre sur le même plan les activités pétrolières et gazières à l’intérieur et à l’extérieur des réserves réduira certains obstacles au développement économique et permettra au gouvernement fédéral de mieux remplir ses obligations en matière de gestion des ressources pétrolières et gazières des terres des Premières nations. »(10)
Le processus de modification de la LPGTI a été amorcé par le Conseil de cogestion de PGIC en 1999. En 2002, PGIC a organisé des séances d’information avec les Premières nations de l’Alberta et de la Saskatchewan dont les terres sont dotées de ressources pétrolières et gazières, et le CRI et PGIC ont collaboré pour rédiger des versions provisoires de 2002 à 2003. Compte tenu de « priorités législatives conflictuelles », le travail a été suspendu en 2003(11). Il a repris en 2006 et s’est terminé en avril 2008(12).
Le projet de loi C‑5 comprend quatre dispositions : l’article premier remplace les articles 2 à 5 de la version actuelle de la LPGTI; l’article 2 ajoute le paragraphe 6(1.1); l’article 3 ajoute les articles 7 à 29; et l’article 4 énonce les conditions d’entrée en vigueur. Il n’y a pas de préambule.
Voici un bref aperçu de certaines dispositions du projet de loi.
Le nouveau paragraphe 2(1) ajoute un certain nombre de définitions à la LPGTI, dont certaines ont trait aux aspects plus techniques du projet de loi. Le nouveau paragraphe 2(2) permet au conseil d’une Première nation de déléguer à quiconque l’exercice de ses pouvoirs aux termes du projet de loi ou celui du droit qu’il a d’être consulté ou avisé aux termes de celui‑ci. Cette aptitude à déléguer est plus large que la « Délégation de pouvoirs » prévue à l’article 3 du Règlement de 1995 sur le pétrole et le gaz des terres indiennes.
Le nouveau paragraphe 3(1) prévoit que, sauf dans certains cas, les licences, permis, baux ou autres actes accordés sous le régime de toute autre loi fédérale à des fins d’exploration ou d’exploitation du pétrole ou du gaz situé sur les terres d’une première nation sont assujettis à l’application du projet de loi comme s’ils étaient des contrats. Le nouveau paragraphe 3(2) prévoit la possibilité de soustraire, par règlement, à l’application du projet de loi les terres d’une Première nation où se trouverait du bitume brut susceptible de faire l’objet d’une extraction minière(13).
Le nouvel article 4 confirme que tout le pétrole ou le gaz extraits des terres d’une Première nation font l’objet d’une redevance payable à Sa Majesté du chef du Canada, en fiducie pour la Première nation, conformément au règlement. Le montant de la redevance peut être réduit ou augmenté en vertu d’une entente spéciale conclue par le Ministre avec l’approbation du conseil de la Première nation intéressée (nouveau par. 4(2)).
Le nouvel article 4.1 prévoit la possibilité de prendre des règlements à l’égard de toutes sortes de questions concernant l’exploration et l’exploitation du pétrole et du gaz sur les terres des Premières nations, notamment au sujet :
En particulier, le nouvel alinéa 4.1v) du projet de loi prévoit la possibilité de prendre un règlement exigeant d’un exploitant (défini comme personne qui exerce des activités d’exploration ou d’exploitation du pétrole ou du gaz situé sur les terres d’une première nation) qu’il emploie des personnes qui habitent sur des réserves qui comprennent des terres de la première nation sur lesquelles est effectuée l’exploration ou l’exploitation. Cette exigence n’est pas absolue : elle s’impose « dans la mesure où il est possible et raisonnablement efficace, sécuritaire et rentable de le faire ».
Les nouveaux paragraphes 4.1(2), 4.2(1) et 4.2(2) ont trait au rapport entre la réglementation et les provinces. Par exemple, le nouveau paragraphe 4.1(2) prévoit que les règlements peuvent varier d’une province à l’autre, et le nouveau paragraphe 4.2(1) permet l’incorporation par renvoi de lois provinciales dans certaines circonstances. Le nouveau paragraphe 4.2(2) permet l’incorporation de lois provinciales pour « conférer à tout fonctionnaire ou organisme provincial les attributions que le gouverneur en conseil juge nécessaires et qui doivent être exercées au nom de l’administration fédérale ».
Le nouvel article 4.3 prévoit que les dispositions des règlements pris en vertu du projet de loi prévalent, sauf disposition contraire de ceux-ci, sur les dispositions incompatibles de tout règlement administratif ou texte législatif pris par une première nation en vertu de toute autre loi fédérale.
Les nouveaux articles 5 et 5.1 énoncent les pouvoirs du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien relativement au projet de loi. Par exemple, le nouvel article 5 prévoit que le Ministre peut ordonner la suspension de l’exploration ou de l’exploitation du pétrole ou du gaz situé sur les terres d’une Première nation ou ordonner à tout titulaire de contrat ou exploitant de prendre des mesures correctives dans certaines circonstances (nouvel al. 5(1)a)), de même qu’il peut ordonner la reprise de ces activités (nouvel al. 5(1)b)).
Le paragraphe 6(1) de la version actuelle de la LPGTI prévoit que, pour l’application de la loi, le Ministre doit consulter « en permanence les représentants des bandes indiennes les plus directement touchées ». Le nouveau paragraphe 6(1.1) prévoit que le gouverneur en conseil peut, par règlement,
Le paragraphe 6(2) de la version actuelle de la LPGTI prévoit que « la présente loi n’a pas pour effet d’abroger les droits du peuple indien ou de l’empêcher de négocier l’obtention d’avantages pour le pétrole et le gaz dans les régions où les revendications de terres n’ont pas été réglées ».
Les nouveaux articles 8 et 9 prévoient la désignation (nouveau par. 8(1)) et les pouvoirs (nouveau par. 9(3)) des inspecteurs et leur aptitude à procéder à des inspections sur les terres des Premières nations (nouveau par. 9(1)) et à l’extérieur (nouveau par. 9(2)) dans certaines circonstances. Les nouveaux articles 10 à 12 ont trait aux vérifications et aux examens. Ces dispositions prévoient entre autres
Le nouveau paragraphe 14(1) permet au Ministre de désigner tout fonctionnaire comme agent d’application des articles 487 (dénonciation pour mandat de perquisition), 487.11 (cas où le mandat n’est pas nécessaire) et 489 (saisie de choses non spécifiées) du Code criminel (nouveau par. 14(2)).
Le nouvel article 15 prévoit que le Ministre peut déléguer certains pouvoirs à tout fonctionnaire du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Le nouvel article 16 interdit l’exploration ou l’exploitation de ressources pétrolières et gazières situées sur les terres d’une Première nation sauf dans la mesure autorisée par le projet de loi.
Le nouveau paragraphe 17(1) prévoit que quiconque contrevient à une disposition du projet de loi ou des règlements afférents (exception faite des dispositions se rapportant au paiement des redevances ou autres sommes) ou ne se conforme pas à tout ordre du Ministre commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 100 000 $. Selon la version actuelle de la LPGTI,cette amende ne peut être supérieure à 5 000 $ (al. 3e)). Quiconque transmet des renseignements en sachant qu’ils sont faux ou trompeurs ou, sciemment, représente faussement ou omet de déclarer un fait important commet également une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 100 000 $ (nouveau par. 17(2)).
Quiconque est reconnu coupable d’avoir enfreint les interdictions relatives à l’exploration ou l’exploitation de ressources pétrolières ou gazières situées sur les terres d’une Première nation peut être contraint de verser des dommages‑intérêts pour indemniser la Première nation de toute perte de pétrole ou de gaz ou de toute réduction de la valeur des terres de la première nation résultant de l’infraction (nouveau par. 20(1)).
En plus d’établir que les infractions prévues sont punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité, le projet de loi prévoit la possibilité que, par règlement, l’infraction à certaines dispositions puisse être considérée comme une violation (al. 21(1)a)). La pénalité prévue pour ce genre de violation doit être fixée par règlement et ne peut être supérieure à 10 000 $ (nouvel al. 21(1)(b)). Une infraction considérée comme une violation peut faire d’objet d’une procédure en violation ou d’une procédure pénale (nouveau par. 21(4)).
Si une infraction est considérée comme une violation et que le Ministre a des motifs raisonnables de croire qu’il s’agit d’une violation, il peut dresser un procès‑verbal qu’il fait signifier à l’intéressé (nouveau par. 22(1)). Toute personne qui reçoit un avis de violation peut payer la pénalité (nouveau par. 23(1)) ou présenter des observations au Ministre (nouveau par. 23(2)). Si une personne adresse des observations au Ministre, celui‑ci décide, selon la prépondérance des probabilités (et non selon la norme pénale de la preuve au‑delà de tout doute raisonnable), de la responsabilité de l’intéressé (nouveau par. 23(2)). Cette décision peut faire l’objet d’un appel devant la Cour fédérale (nouveau par. 24(1)).
Le nouvel article 28.1 exige que le Ministre fasse déposer au Parlement un rapport sur l’application de la LPGTI au moins tous les deux ans.
Le nouvel article 29 prévoit que le nouvel article 5.1 de la LPGTI (lequel établit le délai d’une action en vue du recouvrement de toute somme due) s’applique à toute somme due et intérêts courus en vertu du projet de loi à la date d’entrée en vigueur du nouvel article 29, indépendamment du fait que leur recouvrement soit déjà prescrit en vertu des lois fédérales ou provinciales.
L’article 4 du projet de loi prévoit que le projet de loi entrera en vigueur à la date fixée par décret.
Lorsque le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord de la Chambre des communes et le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones ont étudié le projet de loi C-5, des parlementaires ont dit craindre qu’en autorisant l’incorporation par renvoi de certaines lois provinciales, le projet de loi nuise à la relation de fiduciaire de la Couronne avec les collectivités des Premières nations qui ont des ressources pétrolières et gazières sur leurs terres. Pour cette raison, une motion d’amendement a été présentée à l’étape du rapport à la Chambre des communes, mais elle n’a pas été retenue parce qu’on a déterminé qu’elle exigerait une recommandation royale(15). La motion d’amendement du projet de loi visait à ajouter le paragraphe suivant après le nouveau paragraphe 4.2(7) :
« (8) En ce qui a trait à un acte ou une omission qui se déroulerait dans l’exercice du pouvoir ou l’exécution d’un devoir par un représentant ou un corps provincial en vertu de lois de la province incorporées par règlement, les obligations fiduciaires ou fiduciales applicables du ministre envers les premières nations doivent continuer comme si le ministre avait exercé un pouvoir similaire ou effectué un devoir similaire. »
Un amendement semblable a été proposé par le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones pendant son étude du projet de loi article par article. Toutefois, comme personne n’a appuyé la motion, le Comité a adopté le projet de loi sans amendement.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
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