Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le projet de loi C-4 : Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés et la Loi sur la sûreté du transport maritime (titre abrégé : « Loi visant à empêcher les passeurs d’utiliser abusivement le système d’immigration canadien ») a été déposé à la Chambre des communes le 16 juin 2011 par le ministre de la Sécurité publique, l’honorable Vic Toews. D’abord déposé en octobre 2010 avec le numéro C-49 durant la 3e session de la 40e législature, il est mort au Feuilleton le 26 mars 2011 par suite de la dissolution de la 40e législature. Il est très semblable à son prédécesseur.
Le projet de loi modifie la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR)1 et la Loi sur la sûreté du transport maritime (LSTM)2. En particulier, il :
La migration irrégulière, qui se produit lorsqu’une personne entre ou réside dans un pays sans avoir obtenu l’autorisation légale de l’État hôte, est un aspect de la question des migrations internationales qui fait l’objet d’un débat intense4 parce qu’elle « pose un réel dilemme aux États en plus d’exposer les migrants eux-mêmes à l’insécurité et à la vulnérabilité5 ».
Certains cas récents de ressortissants étrangers arrivant par bateau en grand nombre et désireux d’obtenir l’asile au Canada ont beaucoup retenu l’attention, notamment ceux de l’Ocean Lady en octobre 2009 et du Sun Sea en août 20106.
Ces événements font ressortir le fait que de plus en plus de personnes sont disposées à verser d’importantes sommes d’argent à des passeurs en échange de leur aide pour entrer au Canada.
L’objectif principal du projet de loi est de prévenir l’arrivée massive au Canada de migrants irréguliers, en particulier en cas d’organisation d’entrée illégale.
Le projet de loi C-4 doit être examiné à la lumière des engagements internationaux du Canada. Le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer des Nations Unies de même que sa convention d’origine – la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée – encadrent juridiquement la lutte contre ces activités. Les efforts du Canada pour prévenir et combattre le passage illégal de migrants sont guidés par la Convention et son Protocole, à la rédaction desquels il a collaboré et qu’il a ratifiés en 2002. Le trafic de migrants est un crime reconnu internationalement depuis 2004, année où ces textes sont entrés en vigueur.
En droit international, le « trafic illicite de migrants » désigne « le fait d’assurer – afin d’en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel – l’entrée illégale dans un État Partie d’une personne qui n’est ni un ressortissant ni un résident permanent de cet État7 ». Il importe de souligner que même si les termes « traite de personnes » et « passage de clandestins » ont été utilisés de façon interchangeable au moment des arrivées en question, il s’agit d’infractions très différentes. Dans la plupart des cas, le « passage de clandestins » est une transaction de gré à gré intervenant généralement entre le passeur et les immigrants illégaux et prenant fin à l’arrivée8. Les personnes qui font l’objet de « traite », en revanche, ne sont pas présumées consentantes, se voient souvent forcées de travailler pour le trafiquant et sont considérées comme des « victimes » ou des « survivants9 ».
À titre de signataire de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés de 1951 et de son protocole, le Canada ne peut pas renvoyer des réfugiés dans un pays où ils risquent d’être persécutés en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social ou de leurs opinions politiques. Ces personnes sont considérées comme des réfugiés au sens de la Convention.
Le Canada est également signataire de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants. Par conséquent, il accorde aussi l’asile aux « personnes à protéger » qui risquent – à titre individuel – d’être tuées, d’être torturées ou de subir des peines ou des traitements cruels et inusités si elles sont renvoyées dans leur pays d’origine ou de résidence habituelle.
La Charte canadienne des droits et libertés 10 fait aussi partie intégrante du régime des demandeurs d’asile. En 1985, la Cour suprême a statué, dans l’affaire Singh c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration 11, que la Charte protège les demandeurs d’asile; cette décision a joué un rôle important dans l’adoption des normes d’équité procédurale applicables à ces affaires12.
Même si la Convention relative au statut des réfugiés interdit d’appliquer des sanctions pénales, du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers, aux réfugiés qui arrivent directement du territoire où leur vie ou leur liberté était menacée (art. 31), « il n’existe aucune obligation explicite semblable en ce qui concerne l’admission de possibles demandeurs d’asile qui se trouvent à l’extérieur du territoire d’un État partie13 ».
Le gouvernement du Canada craint depuis longtemps que l’absence de contrôle frontalier mine l’appui de la population à l’ensemble des programmes relatifs à l’immigration et aux réfugiés14. À l’heure actuelle, le Canada décourage l’arrivée irrégulière de demandeurs par des moyens comme :
En raison de l’avalanche de demandes d’asile qu’occasionnent les arrivées massives, il est difficile de déterminer si les arrivants, passeurs compris, présentent un risque pour le Canada sur le plan de la criminalité ou de la sécurité nationale ou s’ils sont des réfugiés ou des personnes à protéger. Le Canada n’est pas le seul pays à devoir concilier le respect de ses obligations internationales à l’égard des demandeurs d’asile et l’exercice de sa prérogative en matière de contrôle des frontières et de mesures de sécurité. La plupart des pays sont confrontés au même dilemme, comme le souligne un rapport préparé pour la Commission mondiale sur les migrations internationales :
[…] le droit des États de contrôler leurs frontières est partie intégrante de la notion de souveraineté, mais le respect des droits de la personne est aussi une prérogative importante des États. Ces deux principes sont parfois difficiles à concilier et c’est là l’un des principaux dilemmes que pose aux décideurs la création des politiques concernant la migration clandestine16.
Le projet de loi reflète la tension entre ces deux objectifs politiques.
Le projet de loi C-4 compte 37 articles. Cette section traite des quatre aspects suivants :
la nouvelle catégorie d’« étranger désigné », qui s’applique lorsqu’un groupe qui entre au Canada est désigné comme « arrivée irrégulière » par le ministre de la Sécurité publique17;
On trouve ci-après un examen de certains aspects du projet de loi et non pas de chacun de ses articles.
Le projet de loi crée la catégorie d’« étranger désigné » dans le cadre de la LIPR en vue principalement de décourager le recours aux passeurs pour entrer au Canada. Ce régime s’applique aux membres d’un groupe que le Ministre désigne comme « arrivée irrégulière ». Il sera possible à l’« étranger désigné » de revendiquer le statut de réfugié ou de demander à être reconnu comme « personne à protéger ».
Cependant, les « étrangers désignés » seront assujettis à la détention obligatoire, à des conditions de mise en liberté et à des restrictions à l’égard des demandes de résidence permanente, de permis de séjour temporaire et d’entrée pour raisons d’ordre humanitaire pendant au moins cinq ans après leur désignation, même si leur demande d’asile est jugée crédible et qu’ils sont déclarés réfugiés au sens de la Convention ou personnes à protéger.
Le projet de loi n’accorde pas aux « étrangers désignés » le droit d’en appeler à la Section d’appel des réfugiés. Contrairement à ce qui est prévu dans la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés de 1951, il ne leur sera pas délivré de titres de voyage tant qu’ils n’auront pas obtenu la résidence permanente.
La présente section aborde les points suivants :
L’article 5 ajoute à la LIPR deux nouveaux articles, dont le nouvel article 20.1 concernant la désignation d’« arrivée irrégulière ».
Le nouveau paragraphe 20.1(1) confère au Ministre le pouvoir discrétionnaire d’ordonner, « compte tenu de l’intérêt public18 », que l’arrivée au Canada d’un groupe de personnes soit désignée comme une « arrivée irrégulière » en fonction de l’un ou l’autre des deux critères suivants (nouveaux al. 20.1(1)a) et b)) :
Le nouveau paragraphe 20.1(3) prévoit qu’un arrêté du Ministre désignant l’arrivée au Canada d’un groupe de personnes comme une « arrivée irrégulière » n’est pas un texte réglementaire au sens de la Loi sur les textes réglementaires23. Ces désignations doivent toutefois être publiées dans la Gazette du Canada24.
Le Ministre ne peut déléguer le pouvoir de désigner un groupe comme « arrivée irrégulière » (nouveau par. 6(3) de la LIPR).
Un ressortissant étranger qui fait partie d’un groupe dont l’arrivée au Canada est désignée par le Ministre comme une « arrivée irrégulière » devient automatiquement un « étranger désigné », sauf s’il détient les documents exigés pour entrer au Canada et que, à la suite d’un contrôle, l’agent est convaincu qu’il n’est pas interdit de territoire (nouveau par. 20.1(2)).
Le paragraphe 34(1) du projet de loi prévoit qu’une désignation d’« arrivée irrégulière » peut être faite avec effet rétroactif au 31 mars 2009.
Le paragraphe 34(2) explicite le paragraphe 34(1) en précisant qu’une personne qui devient un « étranger désigné » par suite d’une désignation rétroactive en vertu du paragraphe 34(1) sera assujettie à l’application intégrale du projet de loi. Le paragraphe 34(3) énonce une exception, qui soustrait la personne à l’application du nouvel alinéa 55(3.1)b)25. Ainsi, toute personne qui devient rétroactivement un « étranger désigné » et qui n’est pas détenue au moment de la désignation ne sera pas automatiquement détenue.
Le paragraphe 10(2) du projet de loi modifie l’article 55 de la LIPR par l’adjonction du nouveau paragraphe 55(3.1). Aux termes de cette disposition, une fois que le Ministre a désigné l’arrivée au Canada d’un groupe comme une « arrivée irrégulière » et que, faute de documents en règle, les membres de ce groupe deviennent en conséquence des « étrangers désignés », l’agent doit, selon le cas :
Le pouvoir d’arrestation sans mandat existe déjà dans différents contextes prévus par la LIPR, et les tribunaux en ont examiné la constitutionnalité dans ces différents contextes. Par exemple, en vertu du paragraphe 55(2) de la LIPR, les agents peuvent procéder à des arrestations s’ils ont « des motifs raisonnables et probables de croire que les suspects font partie de plusieurs catégories de personnes non admissibles […] et qu’ils ne se présenteront pas à une enquête ou à une audience ou encore qu’ils présentent un danger pour la sécurité publique26 ».
En 2007, la Cour suprême du Canada a fait, dans le contexte des certificats de sécurité délivrés à l’égard d’un résident permanent, des observations générales au sujet de l’arrestation sans mandat, de l’arrestation fondée sur un arrêté du Ministre ou de la détention automatique sous le régime de l’ancien article 82 de la LIPR. S’exprimant pour l’ensemble de la Cour, la juge en chef McLachlin a dit que : « la primauté du droit n’interdit pas catégoriquement la détention automatique ni la détention fondée sur une décision de l’exécutif »; cependant, les dispositions de la Charte27 concernant d’autres aspects de l’arrestation et de la détention s’appliquent toujours28.
Le projet de loi précise la durée de détention des « étrangers désignés ». L’article 11 modifie l’article 56 de la LIPR en changeant la numérotation de l’article, qui devient le le paragraphe 56(1) et en y ajoutant le paragraphe 56(2).
Le paragraphe 56(2) prévoit la détention d’un « étranger désigné » jusqu’à ce que l’un ou l’autre des événements suivants se produise :
Il est question ci-après de ces dispositions et du régime de contrôle des motifs de mise en détention des « étrangers désignés ».
L’article 12 du projet de loi crée un régime distinct pour le contrôle des motifs de mise en détention des « étrangers désignés » en ajoutant l’article 57.1 à la LIPR. Le nouveau régime diffère des régimes de contrôle déjà prévus dans cette loi pour les résidents permanents, les ressortissants étrangers et les personnes visées par un certificat de sécurité.
Le régime que prévoit actuellement l’article 57 de la LIPR et qui s’applique aux résidents permanents ou aux étrangers comporte :
La Section de l’immigration peut contrôler les motifs justifiant le maintien en détention avant l’expiration du délai de contrôle suivant si de nouveaux éléments de preuve sont produits et que toutes les parties en conviennent.
Le régime que prévoit actuellement l’article 82 de la LIPR et qui s’applique aux personnes visées par un certificat de sécurité signé par les ministres compétents32 comporte :
L’expression « au moins une fois » employée à l’article 82 de la LIPR signifie que le juge peut contrôler les motifs justifiant le maintien en détention avant l’expiration du délai de six mois.
L’article 12 du projet de loi ajoute une procédure de contrôle des motifs de détention qui s’applique uniquement aux « étrangers désignés » et non aux résidents permanents et aux étrangers (par. 57(1) de la LIPR). Cette procédure comporte les étapes suivantes :
Le tableau 1 présente un résumé comparatif des trois régimes :
Contrôles obligatoires des motifs justifiant le maintien en détention |
Régime applicable aux résidents permanents et aux étrangers (art. 57 de la LIPR) |
Régime applicable aux personnes visées par un certificat de sécurité (art. 82 de la LIPR) |
Régime applicable aux « étrangers désignés » (nouvel art. 57.1 de la LIPR créé par le projet de loi C-4) |
---|---|---|---|
Premier contrôle | Dans les 48 heures suivant le début de la détention (par. 57(1)) |
Dans les 48 heures suivant le début de la détention (par. 82(1)) |
Douze mois après le début de la détention et pas avant (nouveau par. 57.1(1)) |
Deuxième contrôle | Dans les sept jours suivant le premier contrôle (par. 57(2)) |
Au cours des six mois suivant le premier contrôle (par. 82(2) ou (3)) |
Six mois après le premier contrôle et pas avant (nouveau par. 57.1(2)) |
Contrôles subséquents | Au moins tous les 30 jours après le deuxième contrôle (par. 57(2)) |
Au moins une fois tous les six mois après le tout dernier contrôle (par. 82(2) ou (3)) |
À l’expiration du délai de six mois après le tout dernier contrôle et pas avant (nouveau par. 57.1(2)) |
Les délais d’attente obligatoires précédant le premier contrôle ainsi que les contrôles subséquents des motifs justifiant le maintien en détention que prévoit le projet de loi relativement aux « étrangers désignés » pourraient soulever des préoccupations liées à la Charte. Ils s’écartent considérablement des délais établis dans les régimes de contrôle des motifs de détention que prévoit actuellement la LIPR à l’égard d’autres personnes.
L’article 9 de la Charte renferme une garantie contre la « détention arbitraire » qui comprend le droit à un contrôle de la légalité de la détention fait avec promptitude conformément à l’alinéa 10c) de la Charte. La Cour suprême du Canada a examiné les contraintes de temps reliées aux contrôles des motifs de détention d’étrangers qui sont visés par un certificat de sécurité délivré en vertu de la LIPR33 :
Les étrangers ont, au même titre que les autres, le droit de faire contrôler la légalité de leur détention, que ce soit par habeas corpus ou par un mécanisme d’origine législative […] Bien que le gouvernement souscrive à ce principe, il fait valoir que la période de 120 jours prévue au par. 84(2) permet un examen suffisamment rapide, se fondant à cet égard, comme les juridictions inférieures, sur le fait que les étrangers peuvent à tout moment demander leur libération pour quitter le Canada.
L’absence de contrôle de la détention des étrangers avant que ne se soient écoulés 120 jours après la confirmation judiciaire du caractère raisonnable du certificat porte atteinte à la protection contre la détention arbitraire garantie par l’art. 9 de la Charte, une garantie qui comprend le droit de faire contrôler promptement la légalité de la détention énoncé à l’al. 10c) de la Charte. Les résidents permanents désignés dans un certificat ont droit à un contrôle automatique dans les 48 heures. L’art. 57 de la LIPR fixe le même délai pour le contrôle de la détention des étrangers et des résidents permanents. De plus, le Code criminel exige qu’une personne mise en état d’arrestation avec ou sans mandat comparaisse devant un juge dans un délai de 24 heures ou le plus tôt possible : art. 503(1). Ces dispositions révèlent à quel point la privation de liberté est considérée comme grave et peuvent servir de guide quant aux délais acceptables pour le contrôle de cette privation34.
Les droits prévus par la Charte sont assujettis à des limites qui sont raisonnables et dont la justification peut se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique (art. 1). Dans l’affaire Charkaoui mentionnée ci-dessus, la Cour suprême a jugé en définitive que l’absence de contrôle prompt de la détention violait l’article 9 et l’alinéa 10c) de la Charte et qu’elle ne pouvait être justifiée au sens de l’article premier35. La Cour a cependant indiqué dans cette affaire que, en présence d’une menace pour la sécurité nationale, une certaine souplesse peut être nécessaire concernant la durée de détention d’une personne en vertu de la LIPR, mais elle a cependant précisé que « cela ne saurait justifier l’absence totale de possibilité de faire contrôler promptement la détention36 ».
Par ailleurs, dans l’affaire Charkaoui, la Cour suprême a examiné les périodes de détention prolongées sous le régime de la LIPR et les responsabilités juridiques qui en découlent. S’exprimant pour l’ensemble de la Cour, la juge en chef a indiqué :
Ces principes m’amènent à conclure que la justice fondamentale visée à l’art. 7 et le droit à la protection contre tous traitements cruels ou inusités garanti par l’art. 12 exigent que la détention d’une personne ou son assujettissement à de sévères conditions de mise en liberté pendant une longue période, en vertu du droit de l’immigration, soient assortis d’un processus valable de contrôle continu qui tienne compte du contexte et des circonstances propres à chaque cas. Cette personne doit avoir la possibilité réelle de contester son maintien en détention ou ses conditions de mise en liberté37.
Dans le projet de loi, la mise en liberté avant le contrôle initial (après 12 mois de détention) peut être accordée si la demande d’asile ou de protection a été réglée ou si le Ministre l’ordonne par arrêté en se fondant sur des circonstances exceptionnelles.
L’article 58 de la LIPR contient une liste des facteurs que la Section de l’immigration doit prendre en considération avant d’ordonner la mise en liberté d’un résident permanent ou d’un étranger. Le projet de loi modifie cette liste.
La Section de l’immigration n’accordera pas la mise en liberté si elle est convaincue que l’un des facteurs suivants s’applique au résident permanent, à l’étranger ou à l’« étranger désigné » (s’il y a lieu) :
Le paragraphe 13(2) du projet de loi modifie l’article 58 de la LIPR en y ajoutant le paragraphe 58(4), qui dispose que lorsqu’elle ordonne la mise en liberté d’un « étranger désigné », la Section de l’immigration impose les conditions prévues par règlement. L’article 61 de la LIPR modifié par le projet de loi prévoit que les types de conditions sont établis par règlement38.
L’imposition de conditions obligatoires aux « étrangers désignés » diffère du régime applicable aux résidents permanents et aux étrangers mis en liberté. L’article 56 de la LIPR actuelle (qui devient le paragraphe 56(1) en vertu du projet de loi) confère à l’agent le pouvoir discrétionnaire de mettre en liberté le résident permanent ou l’étranger avant le premier contrôle de la détention par la Section de l’immigration et d’assortir la mise en liberté des conditions qu’il estime nécessaires39.
Si l’« étranger désigné » omet de se conformer aux conditions de mise en liberté, l’agent peut, à sa discrétion, refuser d’examiner certaines de ses demandes en matière d’immigration. Plus précisément, les nouveaux paragraphes 11(1.3), 20.2(3), 24(7) et 25(1.03) disposent que l’agent peut refuser d’examiner une demande de résidence permanente ou de permis de séjour temporaire ou une demande pour motifs d’ordre humanitaire :
L’article 16 du projet de loi ajoute à la LIPR l’article 98.1 qui oblige l’« étranger désigné » à qui la protection est conférée à se rapporter à un agent conformément aux règlements.
Aux termes de cet article, l’« étranger désigné » doit répondre véridiquement à toutes les questions de l’agent et lui donner tous les renseignements et documents qu’il demande (nouveau par. 98.1(2)).
Le nouvel article 98.2 dispose que les règlements régissent l’application de l’article 98.1.
Les articles 4, 5, 7 et 8 du projet de loi prévoient un certain nombre de nouvelles restrictions à la capacité d’un « étranger désigné » de présenter une demande de résidence permanente ou de permis de séjour temporaire ou une demande pour motifs d’ordre humanitaire. Il ressort du tableau 2 qu’il est interdit à l’« étranger désigné » de présenter de telles demandes dans les cinq ans suivant sa désignation et que le traitement de ces demandes sera suspendu quand elles émanent d’un étranger qui devient « étranger désigné » après les avoir présentées.
En pratique, ces périodes d’attente ont pour effet que l’« étranger désigné » peut obtenir le statut de réfugié ou celui de personne à protéger, mais ne peut demander la résidence permanente avant cinq ans. Il en résulte aussi qu’il ne lui est pas possible de parrainer des membres de sa famille qui désirent venir au Canada puisqu’il doit acquérir la résidence permanente pour ce faire40.
Par contraste, les ressortissants étrangers qui obtiennent le statut de réfugié ou de personne à protéger doivent demander la résidence permanente dans les 180 jours41, après quoi ils peuvent devenir résidents permanents et parrainer des membres de leur famille.
Demande de résidence permanente ou de permis de séjour temporaire ou demande pour motifs d’ordre humanitairea | Période d’attente avant de pouvoir présenter une demande |
Période pendant laquelle le traitement d’une demande est suspendu |
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L’« étranger désigné » a demandé le statut de réfugié, mais non celui de personne à protéger | Cinq ans à compter de la date du règlement final de la demande |
Cinq ans à compter de la date du règlement final de la demande |
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RP : PST : MOH : |
nouveaux al. 11(1.1)a) et 20.2(1)a) nouvel al. 24(5)a) nouvel al. 25(1.01)a) |
RP : PST : MOH : |
nouveaux al. 11(1.2)a) et 20.2(2)a) nouvel al. 24(6)a) nouvel al. 25(1.02)a) |
|
L’« étranger désigné » a demandé le statut de personne à protéger | Cinq ans à compter de la date du règlement final de la demande |
Cinq ans à compter de la date du règlement final de la demande |
||
RP : PST : MOH : |
nouveaux al. 11(1.1)b) et 20.2(1)b) nouvel al. 24(5)b) nouvel al. 25(1.01)b) |
RP : PST : MOH : |
nouveaux al. 11(1.2)b) et 20.2(2)b) nouvel al. 24(6)b) nouvel al. 25(1.02)b) |
|
Tous les autres cas | Cinq ans à compter de la date de désignation |
Cinq ans à compter de la date de désignation |
||
RP : PST : MOH : |
nouveaux al. 11(1.1)c) et 20.2(1)c) nouvel al. 24(5)c) nouvel al. 25(1.01)c) |
RP : PST : MOH : |
nouveaux al. 11(1.2)c) et 20.2(2)c) nouvel al. 24(6)c) nouvel al. 25(1.02)c) |
|
a. RP = résidence permanente, PST = permis de séjour temporaire, MOH = motifs d’ordre humanitaire. |
L’article 6 du projet de loi modifie l’article 21 de la LIPR pour que si le Ministre demande en vertu de l’actuel paragraphe 108(2) de la LIPR de retirer l’asile accordé à un étranger parce qu’il décide de retourner dans son pays d’origine, que la situation dans son pays d’origine a changé, etc., l’étranger ne puisse pas devenir résident permanent tant que la demande du Ministre n’a pas été réglée.
Le projet de loi modifie l’article 110 de la LIPR, qui décrit dans le détail les types de décisions de la Section de la protection des réfugiés qui peuvent faire l’objet d’un appel devant la Section d’appel des réfugiés42. Cette modification s’applique à toutes les personnes qui ont le droit d’appeler de certaines décisions de la Section de la protection des réfugiés, et non seulement aux « étrangers désignés ».
Le paragraphe 110(1) de la LIPR modifié par le projet de loi permet de porter en appel – relativement à une question de droit, de fait ou mixte – la décision de la Section de la protection des réfugiés accordant ou rejetant une demande d’asile. Le paragraphe 110(2) modifié par le projet de loi crée de nouvelles restrictions relativement aux appels devant la Section d’appel des réfugiés comme il ressort du tableau suivant.
Type de décisiona | La LIPR permet-elle d’en appeler devant la SAR? |
Le projet de loi C-4 permet-il d’en appeler devant la SAR? |
---|---|---|
Décision de la SPR d’accueillir ou de rejeter une demande d’asile | Oui, en vertu du par. 110(1) de la LIPR | Oui, en vertu du par. 110(1) de la LIPR |
Décision de la SPR d’accueillir ou de rejeter la demande d’asile d’un « étranger désigné » | Sans objet, car la catégorie « étranger désigné » est créée par le projet de loi C-4 | Non, en vertu de l’al. 110(2)a) de la LIPR |
Prononcé de désistement ou de retrait de l’asile | Non, en vertu du par. 110(2) de la LIPR | Non, en vertu du nouvel al. 110(2)b) de la LIPR |
Décision de la SPR de rejeter une demande de retrait de l’asile faite par le Ministre | Oui, en vertu du par. 110(1) de la LIPR | Non, en vertu de l’al. 110(2)c) de la LIPR |
Décision de la SPR d’accueillir une demande de retrait de l’asile faite par le Ministre | Ce type de décision n’étant pas mentionné à l’art. 110 de la LIPR, il ne peut faire l’objet d’un appel devant la SAR |
Non, en vertu de l’al. 110(2)c) de la LIPR |
Décision de la SPR de rejeter une demande du Ministre visant à annuler l’accueil d’une demande d’asile | Oui, en vertu du par. 110(1) de la LIPR | Non, en vertu de l’al. 110(2)d) de la LIPR |
Décision de la SPR d’approuver une demande du Ministre visant à annuler l’accueil d’une demande d’asile | Ce type de décision n’étant pas mentionné à l’art. 110 de la LIPR, il ne peut faire l’objet d’un appel devant la SAR |
Non, en vertu de l’al. 110(2)d) de la LIPR |
a. LIPR = Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, SAR = Section d’appel des réfugiés, SPR = Section de la protection des réfugiés. |
Il importe de noter que même dans les cas où il ne peut être appelé d’une décision de la Section de la protection des réfugiés devant la Section d’appel des réfugiés, une personne ou le Ministre peut (une fois épuisés tous les recours en appel prévus par la LIPR) présenter à la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire à l’égard d’une décision prise aux termes de l’article 72 de la LIPR.
L’article 9 du projet de loi ajoute à la LIPR le nouvel article 31.1, selon lequel un « étranger désigné » n’est réputé « résider régulièrement » au Canada que si sa demande d’asile ou de protection est accueillie et si, dans les cinq ans suivant la décision, il devient résident permanent ou si un permis de résidence temporaire lui est délivré. Il s’ensuit que les « étrangers désignés » ne pourront se prévaloir de l’article 28 de la Convention sur les réfugiés, lequel oblige les États contractants comme le Canada à délivrer des titres de voyage aux réfugiés qui « résident régulièrement » sur leur territoire. Autrement dit, les « étrangers désignés » ne pourront pas voyager à l’extérieur du Canada pendant au moins cinq ans.
Le paragraphe 10(1) du projet de loi modifie le paragraphe 55(3) de la LIPR, lequel régit la détention des résidents permanents ou des étrangers à leur entrée au Canada.
Aux termes de l’actuel paragraphe 55(3) de la LIPR, un agent peut détenir un résident permanent ou un étranger à son entrée au Canada dans l’un ou l’autre des cas suivants :
Le paragraphe 10(1) du projet de loi modifie l’alinéa 55(3)b) de la LIPR en ajoutant qu’un agent peut aussi détenir un résident permanent ou un étranger au motif de soupçon d’interdiction de territoire pour « grande criminalité, criminalité ou criminalité organisée ».
Le projet de loi modifie et élargit la définition d’« organisation d’entrée illégale » au sens de la LIPR et impose des peines minimales obligatoires aux personnes reconnues coupables d’organisation d’entrée illégale au Canada. Il ajoute aussi plusieurs facteurs aggravants dont le tribunal devra tenir compte au moment de déterminer les peines à infliger au titre des infractions de « trafic de personnes » et de « débarquement de personnes en mer ».
L’article 117 de la LIPR porte sur l’organisation de l’entrée illégale de personnes au Canada. Il interdit d’organiser l’entrée au Canada de personnes non munies des documents requis ou de les inciter, de les aider ou de les encourager à entrer au Canada, et il prévoit les peines à infliger en pareil cas. Il dispose également qu’aucune poursuite ne peut être engagée sans le consentement du procureur général du Canada pour une des infractions qu’il énonce.
Le projet de loi modifie la définition d’« organisation d’entrée illégale » de la façon suivante :
Article 117 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés | Article 117 modifié par le projet de loi C-4 |
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(1) Commet une infraction quiconque sciemment organise l’entrée au Canada d’une ou plusieurs personnes non munies des documents – passeport, visa ou autre – requis par la présente loi ou incite, aide ou encourage une telle personne à entrer au Canada [italique ajouté]. | (1) Il est interdit à quiconque d’organiser l’entrée au Canada d’une ou de plusieurs personnes ou de les inciter, aider ou encourager à y entrer en sachant que leur entrée est ou serait en contravention avec la présente loi ou en ne se souciant pas de ce fait [italique ajouté]. |
Les tribunaux se sont montrés critiques à l’égard de la portée de la définition d’« organisation d’entrée illégale » qui figure actuellement à l’article 117 de la LIPR. Par exemple, la juge Anne M. Molloy de la Cour supérieure de justice de l’Ontario en a dit ce qui suit au moment d’acquitter des personnes accusées en vertu de cet article :
La Couronne a fait valoir qu’étant donné la façon dont je viens d’interpréter la législation et d’appliquer la loi, il sera pratiquement impossible d’obtenir la condamnation des personnes qui en font entrer illégalement d’autres au Canada. Je sais pertinemment que ce sera difficile, surtout quand les personnes qu’on aura fait entrer ne seront pas appréhendées ou quand l’accusation sera celle de complot et que le crime reproché n’aura pas encore été vraiment commis. Je ne comprends pas pourquoi l’art. 117 de la LIPR interdit d’organiser l’entrée illégale à la frontière de personnes seulement lorsqu’elles ne sont pas munies des documents requis, et non pour quelque raison que ce soit. Toutefois, si, à cause du libellé de la loi, il est difficile de poursuivre les contrevenants (ce qui est le cas) et si le méfait est grave (ce qui est également le cas), la solution consiste à modifier la loi, et non à exiger des tribunaux qu’ils l’interprètent comme si elle prévoyait le contraire de ce que dispose manifestement son libellé actuel43.
La modification apportée par le projet de loi à la définition d’« organisation d’entrée illégale » tient compte de certaines de ces critiques.
Les paragraphes 117(2) et (3) de la LIPR décrivent les peines maximales prévues pour le fait de faire entrer illégalement moins de 10 personnes (par. 117(2)) et plus de 10 personnes (par. 117(3)) au Canada.
Le projet de loi modifie l’article 117 de la LIPRen y ajoutant les nouveaux paragraphes 117(3.1) et 117(3.2). Ces deux dispositions prévoient une peine minimale obligatoire à l’endroit de la personne reconnue coupable d’avoir fait entrer illégalement moins de 50 personnes (par. 117(3.1)) ou plus de 50 personnes (par. 117(3.2)) si :
(i) l’auteur, en commettant l’infraction, a entraîné la mort d’une personne visée par l’infraction ou des blessures à celle-ci ou a mis en danger sa vie ou sa sécurité;
(ii) l’infraction a été commise au profit ou sous la direction d’une organisation criminelle ou d’un groupe terroriste ou en association avec l’un ou l’autre ou en vue de tirer un profit.
Dans chaque cas, les peines diffèrent selon que l’une ou l’autre ou les deux conditions s’appliquent.
L’article 121 de la LIPR énonce les circonstances aggravantes dont le tribunal doit tenir compte au moment de déterminer les peines. L’article 19 du projet de loi modifie l’article 121 pour y ajouter le fait d’avoir mis en danger la vie ou la sécurité d’autrui en faisant le trafic de personnes ou en débarquant des personnes en mer (art. 118 et 119 de la LIPR).
L’article 20 du projet de loi, en ajoutant l’article 121.1, intègre à la LIPR les définitions d’« organisation criminelle » et de « groupe terroriste » qui figurent au Code criminel. La loi actuelle ne définit « organisation criminelle » que par rapport à l’infraction de débarquement de personnes en mer (par. 121(2)) et ne définit pas « groupe terroriste ».
Voici le libellé du paragraphe 467.1(1) du Code criminel :
« organisation criminelle » Groupe, quel qu’en soit le mode d’organisation,
a) composé d’au moins trois personnes se trouvant au Canada ou à l’étranger;
b) dont un des objets principaux ou une des activités principales est de commettre ou de faciliter une ou plusieurs infractions graves qui, si elles étaient commises, pourraient lui procurer – ou procurer à une personne qui en fait partie –, directement ou indirectement, un avantage matériel, notamment financier.
La définition ne vise pas le groupe de personnes qui se forme spontanément et au hasard en vue de commettre sur-le-champ une infraction isolée.
La définition de « groupe terroriste » du paragraphe 83.01(1) du Code criminel est plus complexe. Elle vise actuellement 42 entités (personnes morales ou physiques) désignées par le gouverneur en conseil44. Aux termes du Code, par ailleurs, est terroriste un groupe qui se livre à une « activité terroriste45 » ou la facilite, c’est-à‑dire un acte d’intimidation qui intentionnellement cause des blessures graves ou la mort par l’usage de la violence, cause des dommages matériels ou paralyse des services essentiels au nom d’un objectif politique, religieux ou idéologique (à ne pas confondre avec les revendications, les protestations, les manifestations d’un désaccord ou les arrêts de travail qui n’ont pas pour but de causer des lésions corporelles).
L’article 16 de la LSTM confère au ministre des Transports le pouvoir discrétionnaire d’enjoindre à tout bâtiment de ne pas entrer au Canada, de quitter le Canada ou de gagner une autre partie des eaux canadiennes par la route et de la manière qu’il prescrit. Le Ministre peut délivrer une injonction à un bâtiment s’il a des motifs raisonnables de croire que ledit bâtiment constitue une menace pour la sécurité des personnes ou des choses, notamment des biens, des bâtiments ou des installations maritimes46.
L’article 27 du projet de loi modifie l’article 17 de la LSTM – lequel énonce les peines applicables aux exploitants de bâtiments qui dérogent aux injonctions ministérielles – et alourdit considérablement les amendes maximales dont sont passibles les personnes physiques ou morales ainsi que la durée maximale de l’emprisonnement dont sont passibles les personnes physiques.
De plus, l’article 27 du projet de loi établit une nouvelle distinction entre une première infraction et les récidives et prescrit des peines plus lourdes pour la seconde infraction à une injonction ministérielle et les suivantes.
Type d’exploitant de bâtiment | Peines maximales actuelles selon l’art. 17 de la Loi sur la sûreté du transport maritime | Peines maximales selon l’art. 17 de la Loi sur la sûreté du transport maritime modifié par le projet de loi C-4 |
---|---|---|
Personne physique, première infraction | Amende maximale de 10 000 $, emprisonnement maximal d’un an, ou les deux | Amende maximale de 200 000 $, emprisonnement maximal d’un an, ou les deux |
Personne physique, récidives | Sans objet : la distinction entre première infraction et récidives est créée par le projet de loi | Amende maximale de 500 000 $, emprisonnement maximal de 2 ans, ou les deux |
Personne morale, première infraction | Amende maximale de 200 000 $ | Amende maximale de 500 000 $ |
Personne morale, récidives | Sans objet : la distinction entre première infraction et récidives est créée par le projet de loi | Amende maximale de 1 000 000 $ |
En plus d’augmenter, on l’a vu, les amendes et les peines maximales applicables à l’exploitant d’un bâtiment, le projet de loi crée une infraction et établit un nouveau régime de peines à l’égard du bâtiment qui contrevient à une injonction ministérielle. Ainsi, le nouveau paragraphe 17(2) de la LSTMdispose qu’une telle infraction est passible d’une amende maximale de 100 000 $ la première fois et de 200 000 $ en cas de récidive.
L’article 29 du projet de loi modifie la version anglaise de l’article 26 de la LSTM pour que l’infraction consistant pour une personne ou un bâtiment à contrevenir à une injonction ministérielle soit comptée comme une infraction distincte chacun des jours où elle est commise ou continue d’être commise. À l’heure actuelle, le libellé anglais de l’article 26 vise les personnes (physiques ou morales), mais non les bâtiments.
Le projet de loi modifie aussi à maints égards la procédure prévue dans la LSTM de manière qu’il soit possible de poursuivre les bâtiments pour cette nouvelle infraction. L’article 31 du projet de loi modifie l’article 29 de la LSTM en créant, à l’égard des bâtiments qui contreviennent à la LSTM, le moyen de défense consistant, pour l’exploitant du bâtiment, à « avoir pris toutes les mesures nécessaires pour éviter » de perpétrer l’infraction, défense que le même article met déjà à la disposition des personnes physiques ou morales. L’article 30 du projet de loi modifie l’article 28 de la LSTM pour donner des détails sur les éléments de preuve qui établissent qu’un bâtiment a commis une infraction à cette loi.
Enfin, l’article 32 du projet de loi modifie le paragraphe 31(1) de la LSTM pour qu’il soit possible de mettre un bâtiment à l’amende. Le paragraphe 31(1) modifié dispose qu’en cas de défaut de paiement à la date fixée d’une amende pour une infraction à la LSTM commise par un bâtiment, la déclaration de culpabilité du défaillant peut être enregistrée à la juridiction supérieure de la province où le procès a eu lieu. La LSTM comporte déjà cette disposition à l’endroit des personnes physiques et morales.
L’article 25 du projet de loi, qui modifie l’article 5 de la LSTM en y ajoutant le nouveau paragraphe 5(3), doit être lu dans le contexte de l’article 221 du Règlement sur la sûreté du transport maritime, qui oblige le capitaine d’un bâtiment à transmettre les renseignements préalables à l’arrivée du bâtiment au moins 96 heures avant d’entrer dans les eaux canadiennes47. Le Règlement énumère les renseignements à transmettre avant l’entrée du bâtiment dans les eaux canadiennes48.
L’article 25 du projet de loi augmente les peines auxquelles expose le défaut de transmettre les renseignements requis avant l’entrée d’un bâtiment dans les eaux canadiennes. Les peines prévues au nouveau paragraphe 5(3) de la LSTM sont une amende maximale de 75 000 $, un emprisonnement maximal d’un an ou les deux.
Le paragraphe 28(2) du projet de loi modifie l’article 25 de la LSTM en y ajoutant le nouveau paragraphe 25(5).
Aux termes de l’actuel alinéa 25(3)a) de la LSTM, il est interdit de faire sciemment une déclaration fausse ou trompeuse ou de fournir sciemment un renseignement faux ou trompeur à un inspecteur ou à une autre personne chargée de l’application de cette loi.
Le projet de loi prévoit l’application de peines sensiblement plus lourdes aux personnes physiques ou morales qui fournissent des renseignements faux ou trompeurs. Pour les personnes physiques, les peines maximales prescrites au nouveau paragraphe 25(5) sont, pour la première infraction, une amende de 200 000 $, un emprisonnement d’un an ou les deux et, en cas de récidive, une amende de 500 000 $, un emprisonnement de deux ans ou les deux. Pour les personnes morales, l’amende maximale est de 500 000 $ pour la première infraction et de 1 000 000 $ en cas de récidive.
L’article 26 du projet de loi ajoute à la LSTM le nouvel article 5.1 qui autorise le gouverneur à régir par règlement la communication par le Ministre de renseignements à des ministères ou organismes fédéraux (ou à leurs agents) (nouveau par. 5.1(1) de la LSTM). Le ministre des Transports peut donc divulguer des renseignements au sujet des bâtiments « qui, de l’avis du ministre, peuvent constituer une menace pour la sûreté ou la sécurité du Canada ou des Canadiens » (nouveau par. 5.1(2) de la LSTM).
L’article 23 du projet de loi fixe à 10 ans le délai de prescription des poursuites par voie de procédure sommaire à l’égard des infractions visées à l’article 117 (organisation d’entrée illégale), aux articles 126 et 127 (incitation à faire de fausses représentations et fausses représentations) et à l’article 131 relativement à l’article 117 (aide à l’organisation d’entrée illégale). Les poursuites par voie de procédure sommaire à l’égard des autres infractions à la LIPR se prescrivent par cinq ans à compter de la date du fait reproché.
Beaucoup des dispositions du projet de loi C-4 entrent en vigueur au moment de la sanction royale. Ce sont les articles 1 à 17, 24 et 33 à 36.
Les articles 18 à 23 et 25 à 32 entreront en vigueur à des dates fixées par décret.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
** Julia Nicol de la Division des affaires juridiques et législatives a collaboré à la rédaction du présent résumé législatif. Il s’agit d’une version révisée du Résumé législatif du projet de loi C-49 : Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés et la Loi sur la sûreté du transport maritime du 8 novembre 2010 rédigé par Daphne Keevil Harrold et Danielle Lussier, anciennement de la Bibliothèque du Parlement. [ Retour au texte ]
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