Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et d’autres lois en conséquence (titre abrégé : « Loi renforçant la citoyenneté canadienne ») a été déposé à la Chambre des communes par la ministre de l’Environnement au nom du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration le 6 février 2014. Il modifie en profondeur les dispositions législatives en matière de citoyenneté canadienne relatives aux conditions d’admissibilité, à la sécurité et à la fraude, et à l’examen des demandes et à la révision des décisions.
L’actuelle Loi sur la citoyenneté1 est entrée en vigueur en 1977. Il y a eu plusieurs tentatives destinées à la modifier de façon importante, mais aucune n’a abouti. Cependant, certaines des dispositions proposées par le passé se retrouvent aujourd’hui dans le projet de loi. D’autres perfectionnent des modifications apportées au cours des six dernières années. Par ailleurs, plusieurs changements contenus dans le projet de loi visent à harmoniser la Loi sur la citoyenneté avec la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés2 (LIPR), qui, à son entrée en vigueur en 2002, a mené à la refonte totale de la législation en matière d’immigration.
Deux grandes lois constituent la base de la législation canadienne en matière de citoyenneté : la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947 et la Loi sur la citoyenneté de 1977.
La Loi sur la citoyenneté canadienne (LCC) a créé la qualité de « citoyen canadien », distincte de celle de « sujet britannique ». Elle précisait également que les citoyens canadiens de naissance et citoyens naturalisés3 « avaient droit à des privilèges identiques et étaient assujettis aux mêmes responsabilités et obligations4 ».
La LCC établissait les critères suivants pour la naturalisation :
La citoyenneté canadienne pouvait être perdue pour divers motifs, notamment si un citoyen obtenait une autre nationalité ou s’il servait dans les forces armées d’un pays en guerre contre le Canada et – dans le cas des Canadiens naturalisés seulement – si un citoyen résidait à l’extérieur du Canada pendant plus de six ans à des fins ne faisant pas l’objet d’une exemption. La citoyenneté d’un Canadien naturalisé pouvait également être révoquée pour les motifs suivants :
La LCC a été remplacée en 1977 par la Loi sur la citoyenneté (LC), laquelle insistait sur l’« accès amélioré et [l’]égalité de traitement5 ». Les conditions à remplir pour obtenir la naturalisation ont été modifiées pour que la citoyenneté soit plus accessible, notamment grâce :
La LC de 1977 autorisait également la double citoyenneté et prévoyait un seul motif de révocation, à savoir l’obtention de la citoyenneté par la fraude, de fausses déclarations ou la dissimulation de circonstances importantes (situation résumée ci après par « fraude »).
Depuis 1977, de nombreuses tentatives ont été faites pour modifier la LC, mais aucune refonte ne s’est rendue à la sanction royale. Cependant, deux modifications d’importance ont été apportées au cours des dix dernières années.
Le projet de loi C-37 a aussi ajouté la « règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération » pour ce qui est des enfants nés ou adoptés à l’étranger. Cette modification visait à faire en sorte que les citoyens aient un lien réel avec le Canada et que la citoyenneté canadienne ne puisse être transférée à l’infini aux générations vivant à l’étranger8.
Comme il est mentionné plus haut, certains des aspects de la réforme de la LC proposés dans le projet de loi C-24 ont déjà été présentés, notamment l’exigence de résidence pour la naturalisation, le processus décisionnel pour l’octroi de la citoyenneté et certaines interdictions concernant l’octroi de la citoyenneté.
Le gouvernement a essayé à plusieurs reprises de modifier la LC pour que l’exigence de résidence en vue de la naturalisation soit clairement définie comme étant la présence effective au Canada. Un projet de loi déposé par l’actuel gouvernement aurait fait passer les « trois années de résidence » exigées à « 1 095 journées de présence effective » au Canada dans les quatre années précédant immédiatement la demande de citoyenneté9. D’autres projets de loi avaient proposé l’exigence d’une présence effective de 1 095 jours dans les six années précédant la demande de citoyenneté10.
Le projet de loi C-24 limite la participation des juges de la citoyenneté à l’examen des demandes puis l’élimine progressivement. Les juges de la citoyenneté auraient pour responsabilité de présider les cérémonies et de faire prêter le serment de citoyenneté. Un projet de loi antérieur avait même proposé d’éliminer complètement le poste de juge11.
Le projet de loi modifie de façon importante la liste de situations prévues par la LC dans lesquelles la citoyenneté pourrait être refusée. Déjà, d’autres projets de loi avaient interdit l’octroi de la citoyenneté à des demandeurs qui avaient commis à l’étranger des infractions qui auraient été considérées au Canada comme des actes criminels12.
Dans un certain nombre de domaines, le projet de loi contient des dispositions qui reprennent la politique et les pratiques en vigueur en matière d’immigration. Par exemple, la LIPR dispose que seuls des représentants autorisés peuvent percevoir des droits en échange d’une aide pour présenter une demande d’immigration; le projet de loi établit un cadre analogue pour les consultants qui viennent en aide aux demandeurs de citoyenneté. Le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés prévoit que seules les demandes complètes, selon la définition donnée, seront acceptées pour examen, et que les autres seront renvoyées aux demandeurs; le projet de loi comporte une exigence analogue en matière de citoyenneté.
Le projet de loi C-24 élargit le pouvoir du gouvernement de communiquer des renseignements sur des questions d’immigration pour inclure les données sur la citoyenneté. Enfin, il est à l’image de la loi en matière d’immigration en prévoyant que les délits et les condamnations à l’étranger ont des répercussions au Canada.
La LC se divise en huit parties qui toutes, sauf la dernière, sont modifiées par le projet de loi C-24, lequel ajoute aussi une autre partie à la LC. Le présent résumé législatif suit la structure de cette loi et signale les modifications les plus importantes.
La partie I de la LC, « Le droit à la citoyenneté », établit qui – par naissance, par attribution, par adoption ou par d’autres mécanismes prévus par la LC – a qualité de citoyen canadien. Le projet de loi apporte des modifications importantes à cette partie quant aux « Canadiens dépossédés de leur citoyenneté » et resserre les exigences concernant l’obtention de la citoyenneté par attribution.
Le projet de loi C-37 avait introduit une nouvelle règle limitant à la première géné-ration la transmission de la citoyenneté aux enfants nés ou adoptés à l’étranger (par. 3(3) de la LC) : la « règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération ».
Les enfants naturels ou adoptés d’un parent canadien travaillant à l’étranger dans les Forces armées canadiennes ou la fonction publique fédérale ou provinciale font exception à cette règle, sauf si le parent a été engagé sur place (par. 3(5) de la LC) (situation résumée ci après par « en service à l’étranger »).
Dans la LC actuelle, une exception est également consentie aux enfants de deuxième génération ou de génération subséquente nés à l’étranger et qui, à la date d’entrée en vigueur de la règle, selon le libellé de la disposition, « ont qualité » de citoyens. Ces personnes n’ont pas perdu leur citoyenneté en raison de l’adoption, par la voie du projet de loi C-37, de la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération (par. 3(4) de la LC).
Le projet de loi C-24 précise que l’exception à la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération énoncée au paragraphe 3(4) de la LC s’applique « à la personne qui, à la date d’entrée en vigueur [de la règle], avait qualité de citoyen » [ITALIQUE AJOUTÉ PAR LES AUTEURES] (par. 2(10) du projet de loi). Le libellé actuel utilise le temps présent, c’est-à-dire « a qualité de citoyen ».
Selon certains, l’usage du présent signifiait que la règle ne s’appliquait pas à ceux qui, au moment de l’entrée en vigueur du projet C 37 et en raison de celle-ci, étaient devenus citoyens par filiation du fait que leurs parents étaient devenus citoyens canadiens par filiation, rétroactivement à leur naissance, aux termes du projet de loi C-37. La Cour fédérale n’a pas accepté cette interprétation lorsqu’elle a statué sur la question en 201213. Elle a plutôt retenu celle du gouvernement, selon qui la citoyenneté ne pouvait être transférée aux enfants de la seconde génération ou des générations subséquentes nés à l’étranger lorsque la première génération née à l’étranger avait acquis la citoyenneté aux termes du projet de loi C-37.
Le projet de loi C-24 apporte des modifications semblables au libellé de la règle apparaissant au paragraphe 3(3) de la LC. À l’alinéa 3(3)a) de la LC, « avait qualité » remplace « a qualité » et « avaient cette qualité » remplace « ont cette qualité » pour qu’il soit clair qu’une personne née à l’étranger n’est pas citoyen par filiation si, au moment de sa naissance, seulement un de ses parents était citoyen et que ce parent était lui-même citoyen par filiation ou que les deux parents étaient citoyens par filiation (par. 2(7) du projet de loi).
Le projet de loi modifie le début du libellé de la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération du paragraphe 3(3) de la LC pour énumérer les dispositions précises du paragraphe 3(1) au titre desquelles il est possible d’obtenir la citoyenneté par filiation. L’actuel paragraphe 3(3) mentionne de façon générale toutes les conditions qui, aux termes du paragraphe 3(1), donnent à une personne le droit à la citoyenneté canadienne.
La modification précise à qui s’applique la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération. La règle ne s’applique pas aux personnes qui ont obtenu la citoyenneté par filiation en vertu de l’actuel alinéa 3(1)e) (puisque cette disposition n’est plus visée par le paragraphe 3(3) modifié). Selon cette disposition, les personnes qui au 14 février 1977 (la LC actuelle est entrée en vigueur le 15 février 1977) avaient le droit de devenir citoyens canadiens parce que nées à l’étranger d’un parent canadien (mais dont la naissance n’avait pas été enregistrée) devenaient automatiquement des citoyens. Puisque le paragraphe 3(4) modifié énonce que la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération ne s’applique pas à une personne qui avait qualité de citoyen au moment de l’entrée en vigueur de la règle, cette dernière ne s’applique pas à ceux qui ont obtenu la citoyenneté par filiation aux termes de l’alinéa 3(1)e).
Lorsque la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération a été édictée par le projet de loi C-37, l’une des exceptions visait les personnes nées à l’étranger de parents en service à l’étranger (par. 3(5) de la LC). Ces enfants pouvaient obtenir la citoyenneté canadienne par filiation même s’ils constituaient la deuxième génération ou plus née à l’étranger. Cependant, ils étaient considérés comme la première génération née à l’étranger et ne pouvaient donc pas transmettre la citoyenneté par filiation s’ils donnaient naissance à un enfant à l’étranger.
Le projet de loi C-24 règle la question en ajoutant à la LC l’alinéa 3(5)b), selon lequel la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération ne s’applique pas à quiconque est né d’un parent dont, au moment de sa naissance, l’un des parents ou les deux étaient en service à l’étranger.
En 2007, le projet de loi C-14 a instauré une démarche simplifiée pour que les enfants adoptés puissent devenir citoyens canadiens sans avoir à passer par le processus d’immigration. Par conséquent, les enfants adoptés à l’étranger par des citoyens canadiens étaient traités comme les enfants biologiques nés à l’étranger de citoyens canadiens.
Lorsque le projet de loi C-37 est entré en vigueur, une fois ces modifications mises en œuvre, il a modifié les dispositions sur l’adoption pour qu’elles cadrent avec les nouvelles dispositions concernant la citoyenneté par filiation. Entre autres, ce projet de loi a fait que la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération s’applique aux enfants adoptés à l’étranger par des citoyens canadiens de la même façon qu’aux enfants nés à l’étranger de citoyens canadiens.
Cependant, les modifications prévues par le projet de loi C-37 pour ce qui est de l’adoption manquaient de clarté : la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération au paragraphe 3(3) de la LC mentionnait les « parents » au moment de l’adoption, sans préciser s’il s’agissait des parents biologiques ou adoptifs. Le même manque de clarté existait dans l’exception à la règle pour les enfants de Canadiens en service à l’étranger prévue au paragraphe 3(5).
Le projet de loi C-24 apporte la clarification voulue en ajoutant à la LC le nouveau paragraphe 5.1(4), selon lequel la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération s’applique à une personne adoptée à l’étranger par un parent canadien de la même façon qu’elle s’applique à une personne née à l’étranger d’un parent canadien. Le nouveau paragraphe 5.1(5) prévoit une exception à cette règle pour l’enfant adopté à l’étranger par un citoyen canadien qui était en service à l’étranger au moment de l’adoption. Des précisions au paragraphe 5.1(5) ainsi qu’au paragraphe 3(5) modifié couvrent toutes les variantes pour que la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération ne s’applique pas lorsqu’un grand-parent était en service à l’étranger lorsque le parent de l’enfant est né ou a été adopté à l’étranger, que l’enfant ou son parent, ou les deux, aient été adoptés.
L’élargissement rétroactif de l’exception à la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération de manière à inclure les petits-enfants de personnes en service à l’étranger (voir la rubrique 2.1.1.1.3 du présent résumé législatif) fera que plus de personnes obtiendront la qualité de citoyen par l’effet de la loi. Toutefois, certaines sont peut-être déjà citoyens canadiens parce qu’elles se sont soumises au processus d’immigration et ont obtenu la citoyenneté par attribution sous le régime de la LC actuelle ou d’une version antérieure. Le projet de loi C-24 ajoute à la LC le nouveau paragraphe 3(5.1), en vertu duquel ces personnes sont réputées n’avoir jamais obtenu la citoyenneté par attribution (par. 2(13) du projet de loi). Elles sont plutôt considérées comme des citoyens par filiation et ne peuvent donc transmettre la citoyenneté à leurs enfants nés à l’étranger. L’article 5 du projet de loi crée aussi l’article 5.2 de la LC, qui a le même effet, mais dans le contexte de l’adoption.
Le paragraphe 2(13) du projet de loi crée, au paragraphe 3(5.2) de la LC, une exception au paragraphe 3(5.1) de cette même loi. Cette exception s’applique à la personne qui a perdu sa citoyenneté parce qu’elle n’a pas pris les mesures voulues pour la conserver conformément aux dispositions sur la conservation de la citoyenneté pour les personnes nées à l’étranger, ce qu’exigeait la LC avant l’entrée en vigueur du projet de loi C-3714.
Comme il a été mentionné précédemment, le Parlement s’est occupé pour la première fois de la question des « Canadiens dépossédés de leur citoyenneté » au moyen du projet de loi C-37, entré en vigueur le 17 avril 2009. Le projet de loi C-24 propose maintenant un certain nombre de modifications à cet égard, modifications réputées être entrées en vigueur à la même date.
Les modifications apportées par le projet de loi C-37 ont permis de redonner la citoyenneté aux citoyens qui l’avaient perdue pour une raison autre que l’une des trois raisons suivantes :
Ces modifications permettaient également de combler des périodes de temps dans le cas de personnes qui, ayant obtenu la citoyenneté autrement que par attribution, avaient cessé d’avoir qualité de citoyen pour une raison autre que les raisons susmentionnées, avant de retrouver leur citoyenneté plus tard sous le régime de la LC actuelle ou d’une version antérieure (al. 3(1)i) et 3(1)j) de la LC).
De plus, les modifications accordaient la citoyenneté – rétroactivement à la naissance – aux personnes nées à l’étranger d’un parent canadien avant le 15 février 1977, mais qui n’étaient pas devenues citoyens par filiation (al. 3(1)g) et 3(1)h)). La citoyenneté par filiation de personnes nées à l’étranger d’un parent canadien après le 14 février 1977 était déjà reconnue par la LC (al. 3(1)b)).
Les modifications apportées par le projet de loi C-37 ont touché plus d’une génération. Ainsi, à l’entrée en vigueur du projet de loi, certains groupes de « Canadiens dépossédés de leur citoyenneté » ont pu la retrouver (ou voir combler les périodes pendant lesquelles ils ne l’avaient pas). En outre, leurs enfants nés à l’étranger à un moment où ces parents n’étaient pas reconnus comme citoyens ont eux aussi acquis la qualité de citoyen, et ce, rétroactivement à leur naissance, puisque la loi reconnaissait dorénavant la citoyenneté de leurs parents au moment de la naissance de ces enfants à l’étranger. (Il ne faut pas oublier que la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération s’applique ici aussi).
Cependant, certaines personnes nées à l’étranger de « Canadiens dépossédés de leur citoyenneté » n’ont pas obtenu la citoyenneté par filiation dans le cadre du projet de loi C-37. En effet, si un tel parent était décédé au moment de l’entrée en vigueur du projet de loi, sa citoyenneté n’était pas rétablie rétroactivement pour couvrir le moment de la naissance de l’enfant et celui-ci ne pouvait obtenir la citoyenneté par filiation.
Le nouvel article 3(1.1) corrige cette situation en précisant qu’une personne devient citoyen par filiation si la seule raison pour laquelle elle n’a pas la citoyenneté en vertu de l’une ou l’autre des dispositions de la LC à ce sujet est que, au moment de l’entrée en vigueur du projet de loi C-37, le parent qui lui aurait donné qualité de citoyen était décédé et donc incapable de faire reconnaître sa citoyenneté à la naissance de son enfant. Aux termes du paragraphe 46(4) du projet de loi C-24, le nouvel article 3(1.1) est réputé être entré en vigueur en même temps que le projet de loi C-37.
Pour ce qui est de la règle limitant la transmission de la citoyenneté canadienne à la première génération introduite par le projet de loi C-37, il importe de savoir si la personne a qualité de citoyen canadien par attribution (c.-à-d. de Canadien naturalisé) ou par filiation. La règle ne s’applique qu’aux personnes ayant acquis la citoyenneté par filiation. Par conséquent, une personne née à l’étranger puis ayant immigré au Canada et obtenu la citoyenneté canadienne est traitée comme toute personne née au Canada. Elle peut transmettre sa citoyenneté à ses enfants nés à l’étranger. En revanche, une personne devenue citoyen canadien par filiation (c. à d. née à l’étranger d’un parent qui était citoyen canadien au moment de sa naissance) ne peut transmettre sa citoyenneté à son enfant né à l’étranger.
Lorsque le projet de loi C-37 a introduit la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération, il a ajouté à la LC le paragraphe 3(6), selon lequel tout « Canadien dépossédé de sa citoyenneté » mais qui l’a retrouvée par attribution avant l’entrée en vigueur du projet de loi « est réputé […] n’avoir jamais obtenu la citoyenneté par attribution ». Ainsi, quiconque était citoyen par filiation avant de perdre sa citoyenneté et de la retrouver par attribution ne peut transmettre sa citoyenneté à ses enfants nés à l’étranger en faisant valoir qu’il est citoyen par attribution plutôt que par filiation.
Cependant, le paragraphe 3(6) ne s’appliquait pas uniformément à toutes les personnes dans la même situation, quelles que soient les circonstances ayant mené à leur situation commune. Plus précisément, il ne s’appliquait pas à la personne :
Toute personne répondant à cette description aurait eu la citoyenneté par filiation si ses parents n’avaient pas perdu leur citoyenneté canadienne. Ainsi, en vertu du nouveau paragraphe 3(6.1), cette personne est réputée ne jamais avoir obtenu la citoyenneté canadienne par attribution et ne peut donc transmettre sa citoyenneté par filiation à ses enfants nés à l’étranger. Le paragraphe 3(6.1) est réputé être entré en vigueur en même temps que le projet de loi C-37.
En plus de rétablir la citoyenneté de bon nombre de « Canadiens dépossédés de la citoyenneté », le projet de loi C-37 prévoyait le rétablissement rétroactif de la citoyenneté de ces personnes au moment où elles l’avaient perdue. Cependant, les nouveaux articles ne tenaient pas compte du scénario ci dessous, raison pour laquelle le projet de loi C-24 ajoute à la LC l’alinéa 3(7)h) afin que, si toutes les circonstances suivantes sont réunies, la citoyenneté soit rétroactive à la naissance :
Même si le projet de loi C-37 a rétabli la citoyenneté canadienne de bon nombre de personnes qui l’avaient perdue pour des raisons considérées aujourd’hui comme désuètes ou injustes, il a négligé plusieurs groupes de personnes surnommées « Canadiens dépossédés de leur citoyenneté15 ». Le projet de loi C-24 représente une deuxième tentative de corriger la situation.
Comme il a été mentionné plus tôt, la qualité de citoyen canadien, telle qu’elle est connue aujourd’hui, remonte au 1er janvier 1947, date d’entrée en vigueur de la LCC (qui a précédé l’actuelle LC). Auparavant, les personnes nées au Canada ou naturalisées au Canada étaient des « sujets britanniques ». Il faut également tenir compte ici du fait que Terre-Neuve et Labrador n’a fait partie du Canada qu’à partir du 1er avril 1949. Par conséquent, les sujets britanniques qui y étaient nés ou y avaient été naturalisés sont devenus citoyens canadiens ce jour là.
Le projet de loi C-24 accorde la citoyenneté aux personnes qui sont nées avant l’entrée en vigueur de la LCC et qui appartiennent à l’une des catégories suivantes (appelées « nouvelles catégories de citoyenneté ») :
Le projet de loi C-24 accorde également la citoyenneté aux personnes qui sont nées avant l’entrée de Terre-Neuve et Labrador dans le Canada le 1er avril 1949 et qui appartiennent à l’une des catégories suivantes, analogues aux catégories ci dessus, mais dans le contexte de cette province :
Le paragraphe 2(17) du projet de loi C-24 ajoute les alinéas 3(7)i) à 3(7)m) à la LC, pour que la citoyenneté pour certaines nouvelles catégories de personnes soit rétroactive à :
Grâce aux modifications qu’il apporte au paragraphe 3(8) de la LC, le libellé du projet de loi C-24 ressemble à celui du projet de loi C-37 en ce qu’il vient préciser que la rétroactivité de la citoyenneté n’a pas pour effet de conférer des droits, des pouvoirs ou des privilèges – ni d’imposer des obligations, des devoirs ou des responsabilités – sous le régime de toute loi fédérale autre que la LC ou de toute autre règle de droit. En outre, le projet de loi ajoute des précisions voulant que l’effet limité de la rétro¬activité de la citoyenneté s’applique également à toute autre personne qui pourrait avoir ces droits, pouvoirs, privilèges, obligations, devoirs et responsabilités résultant de l’obtention de la citoyenneté par la première personne (par. 2(18) du projet de loi).
Le projet de loi C-24 ajoute les paragraphes 3(1.2) à 3(1.4) à la LC pour qu’une personne née à l’extérieur du Canada et de Terre-Neuve et Labrador et qui autrement aurait droit à la citoyenneté par filiation conformément à l’une des nouvelles catégories de citoyenneté n’en soit pas privée pour la seule raison que le parent qui lui aurait transmis la citoyenneté est décédé avant de pouvoir lui-même devenir citoyen au moment de l’entrée en vigueur de la LCC le 1er janvier 1947, de l’entrée au Canada de Terre-Neuve et Labrador le 1er avril 1949 ou de l’adoption du projet de loi C-24, selon le cas.
Le paragraphe 2(6) du projet de loi C-24 ajoute à la LC les paragraphes 3(2.1) à 3(2.4) afin d’établir qu’une personne n’a ni qualité de citoyen ni qualité de citoyen par filiation selon l’une des nouvelles catégories de citoyenneté :
Le projet de loi C-24 modifie le paragraphe 3(3) de la LC pour que la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération s’applique également aux nouvelles catégories de citoyenneté (par. 2(8)). En d’autres termes, les modifications ont pour conséquence que la citoyenneté par filiation pour les nouvelles catégories ne peut être accordée qu’à la première génération née à l’étranger.
Toutefois, une disposition transitoire (par. 2(11) du projet de loi, nouveau par. 3(4.1) de la LC) garantit à ceux qui étaient déjà citoyens au moment de l’élargissement de la règle décrite ci dessus limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération qu’ils ne perdront pas leur citoyenneté. En outre, la règle s’applique à ceux qui n’étaient pas encore citoyens par filiation, mais qui l’auraient été grâce aux nouvelles catégories de citoyenneté, puisque cette citoyenneté est rétroactive.
Aux termes du nouveau paragraphe 3(6.2) de la LC, une personne qui a obtenu la citoyenneté par attribution18, mais qui autrement aurait qualité de citoyen selon l’une des nouvelles catégories de citoyenneté – ou l’aurait par filiation parce que son parent devient citoyen selon une des nouvelles catégories – est réputée n’avoir jamais été citoyen par attribution (par. 2(15) du projet de loi). Comme l’explique la rubrique 2.1.2.1.2 du présent résumé législatif, cette personne ne peut donc transmettre sa citoyenneté par filiation après la première génération née à l’étranger en faisant valoir qu’elle devrait être considérée comme naturalisée plutôt que comme citoyen canadien par filiation. Cependant, le projet de loi énumère les paragraphes de la LC pour l’application desquels une personne se trouvant dans la situation décrite ci dessus est réputée avoir qualité de citoyen par attribution (par. 2(19) du projet de loi). Ces articles portent sur la répudiation et la révocation de la citoyenneté.
Aux termes du nouveau paragraphe 3(6.3) de la LC, si une personne a qualité de citoyen selon deux des nouvelles catégories de citoyenneté, elle est réputée avoir qualité de citoyen uniquement selon la catégorie qui a trait à la citoyenneté par filiation. Par exemple, quelqu’un peut avoir la qualité de citoyen selon deux des nouvelles catégories de citoyenneté s’il a été naturalisé citoyen canadien avant le 1er janvier 1947 et s’il est né à l’étranger d’un parent devenu citoyen selon l’une des nouvelles catégories de citoyenneté. Cette personne est réputée être citoyen par filiation seulement, de sorte qu’elle ne peut transmettre sa citoyenneté par filiation à ses enfants nés à l’étranger.
Le projet de loi C-24 modifie l’article 5.1 de la LC pour préciser la façon dont s’appliquent les nouvelles catégories de citoyenneté dans le contexte de l’adoption. Aux termes du paragraphe 46(2) du projet de loi, les modifications à l’article 5.1 entrent en vigueur à la même date que les articles établissant les nouvelles catégories de citoyenneté.
Le paragraphe 4(2) du projet de loi modifie le paragraphe 5.1(1) de la LC pour accorder le droit à la citoyenneté à la personne adoptée alors qu’elle était un enfant mineur :
Ce droit est assujetti aux conditions relatives à l’adoption modifiées par le projet de loi19.
Le projet de loi modifie le paragraphe 5.1(2) de la LC pour accorder le droit à la citoyenneté à une personne adoptée dans la situation décrite ci dessus, mais qui avait au moins 18 ans au moment de l’adoption et qui répondait aux conditions relatives à ce type d’adoption (par. 4(5) et 4(6) du projet de loi).
2.1.2.2.7.1 Application de la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération dans le contexte de l’adoption et des nouvelles catégories de citoyenneté (par. 4(10) et 4(11))Le projet de loi C-24 élargit la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération dans le contexte de l’adoption (par. 5.1(4) de la LC) pour qu’elle s’applique aux nouvelles catégories de citoyenneté (par. 4(10) du projet de loi). En d’autres termes, une personne adoptée à l’étranger par un citoyen canadien n’a pas le droit de devenir citoyen canadien aux termes de l’article 5.1 si, au moment de l’adoption, un des parents adoptifs était citoyen canadien par filiation selon l’une des catégories de citoyenneté existantes ou nouvelles, ou si les deux parents adoptifs étaient citoyens par filiation selon l’une ou l’autre de ces catégories.
Comme la citoyenneté canadienne n’existait pas officiellement avant l’entrée en vigueur de la LCC le 1er janvier 1947 (ou ne pouvait être accordée avant le 1er avril 1949 aux personnes habitant Terre-Neuve et Labrador), le projet de loi ajoute à la LC les alinéas 5.1(4)a.1) et 5.1(4)a.2), qui visent l’application de la règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération dans le contexte d’une adoption au Canada avant le 1er janvier 1947 ou à Terre-Neuve et Labrador avant le 1er avril 1949. Dans les deux cas, l’application de la règle dépend du fait qu’un parent – ou les deux – ait été citoyen par filiation le 1er janvier 1947 ou le 1er avril 1949, selon le cas, et non du moment de l’adoption.
Enfin, le projet de loi modifie la LC en y ajoutant le paragraphe 5.1(6) concernant le cas de la personne qui a été adoptée avant le 1er avril 1949 et dont l’un des parents adoptifs était citoyen par filiation (ou l’est devenu le 1er janvier 1947) et dont l’autre n’était pas encore citoyen, mais l’est devenu – autrement que par filiation – le 1er avril 1949 du fait de l’entrée de Terre-Neuve et Labrador dans le Canada (par. 4(11) du projet de loi). La règle limitant la transmission de la citoyenneté à la première génération ne s’applique pas à un tel cas.
Le projet de loi C-24 modifie de manière importante l’article 5 de la LC en modifiant les exigences actuelles pour l’obtention de la naturalisation et en en ajoutant de nouvelles. Il prévoit également un processus accéléré d’obtention de la citoyenneté pour les résidents permanents au service des Forces armées canadiennes.
Le projet de loi modifie les exigences en matière de résidence relatives à l’obtention de la citoyenneté par attribution ou naturalisation pour insister sur les liens avec le Canada. Le terme « résidence » est défini comme une période de présence effective au Canada et se calcule en jours. Le nouveau sous-alinéa 5(1)c)(i) de la LC précise que le nombre total de jours de présence effective au Canada doit être de 1 460 au cours des six années précédant la demande et le nouveau sous-alinéa 5(1)c)(ii) prévoit que le résident permanent doit avoir été effectivement présent au Canada au moins 183 jours par année civile au cours de quatre des six années précédant sa demande de citoyenneté.
Si le temps passé au Canada à tout autre titre que celui de résident permanent ne compte plus dans la période de résidence, le temps passé à l’étranger avec un époux ou un conjoint de fait canadien travaillant au service des Forces armées canadiennes ou de la fonction publique fédérale ou provinciale ou le temps passé à l’étranger à titre de résident permanent au service des Forces armées canadiennes ou de la fonction publique fédérale ou provinciale entre dans le calcul de la période de présence effective (nouveaux par. 5(1.01) et 5(1.02) de la LC). Le nouvel article 21 de la LC précise que les périodes où la personne a été sous le coup d’une ordonnance de probation, a bénéficié d’une libération conditionnelle ou a été détenue dans un pénitencier n’entrent pas dans la durée de présence effective au Canada pour demander la citoyenneté (art. 17 du projet de loi).
Un résident permanent qui fait une demande de naturalisation doit se conformer à une nouvelle exigence : il doit indiquer s’il a des obligations prévues par la Loi de l’impôt sur le revenu et, le cas échéant, présenter une déclaration de revenus pour quatre des six années précédant sa demande de citoyenneté (nouveau sous-alinéa 5(1)c)(iii) de la LC).
Le projet de loi ajoute également, pour les résidents permanents souhaitant obtenir la citoyenneté canadienne, l’obligation d’avoir l’intention de résider au Canada après avoir obtenu cette citoyenneté (nouvel al. 5(1)c.1) de la LC), une disposition prévue dans la LCC de 1947. Les résidents permanents à l’étranger peuvent répondre à ce critère si leur époux, conjoint de fait ou parent est au service du Canada à l’étranger ou s’ils le sont eux-mêmes, selon les définitions des nouveaux paragraphes 5(1.01) et 5(1.02) de la LC. Selon le nouveau paragraphe 5(1.1), l’intention du résident permanent doit être continue à partir de la date de sa demande jusqu’à ce qu’il prête le serment de citoyenneté.
Même si, actuellement, les résidents permanents doivent avoir une connaissance suffisante de l’anglais ou du français (al. 5(1)d) de la LC) et « une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté » (al. 5(1)e))20, la politique en vigueur exempte les personnes de 55 ans et plus des tests de connaissance dans ces domaines. Le projet de loi assujettit à ces exigences les résidents permanents ayant entre 55 et 64 ans (nouveaux al. 5(1)d) et 5(1)e)) et les mineurs de 14 ans et plus (nouveaux al. 5(2)c) et 5(2)d)). Il peut y avoir exemption pour des motifs d’ordre humanitaire (nouvel al. 5(3)a)).
Le projet de loi modifie également la LC en précisant que le demandeur doit démontrer sa connaissance du Canada dans la langue officielle de son choix, vraisemblablement sans l’aide d’un interprète (nouveaux al. 5(1)e) et 5(2)d))21.
Enfin, le projet de loi dispose qu’un résident permanent doit avoir satisfait à toutes les conditions rattachées à son statut de résident permanent pour pouvoir obtenir la naturalisation (nouvel al. 5(1)c))22.
Pour être membre des Forces armées canadiennes, il faut être citoyen canadien. Cependant, en cas de besoin particulier, les résidents permanents peuvent s’engager23. Selon le projet de loi C-24, les résidents permanents qui ont obtenu une libération honorable des Forces armées canadiennes et demandent la citoyenneté font l’objet d’exigences particulières en matière de résidence. Par exemple, le nouveau paragraphe 5(1.2) de la LC (par. 3(3) du projet de loi) dit que les exigences en matière de résidence de l’alinéa 5(1)c) de la LC ne s’appliquent pas si le résident permanent a passé trois années dans les Forces armées. Cette disposition entrera en vigueur au moment où le projet de loi recevra la sanction royale.
Le paragraphe 3(4) du projet de loi entrera en vigueur ultérieurement par décret. Il remplacera la disposition créée par le paragraphe 3(3) du projet de loi de manière à ajouter l’obligation d’avoir satisfait à toutes les conditions rattachées au statut de résident permanent et d’avoir rempli toutes les exigences applicables aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu. Selon le paragraphe 3(4), les membres des Forces armées canadiennes qui sont résidents permanents doivent, en plus, avoir accumulé trois années de service au cours des six années précédant immédiatement leur demande de citoyenneté.
Le nouveau paragraphe 5(4) de la LC précise que c’est le Ministre, et non le gouverneur en conseil, qui a le pouvoir discrétionnaire d’accorder la citoyenneté afin de remédier à une situation particulière et inhabituelle de détresse ou de récompenser des services exceptionnels rendus au Canada.
La partie II de la LC porte sur la répudiation – soit la perte volontaire de citoyenneté – et la révocation – soit la perte de la citoyenneté par application de dispositions précises de la LC. Le projet de loi apporte des modifications importantes pour élargir les motifs de révocation et introduire de nouvelles procédures qui accroissent les responsabilités du Ministre en la matière par rapport à ce que prévoit la LC actuelle.
La répudiation est la renonciation délibérée à sa citoyenneté. La LC actuelle interdit la répudiation par des personnes faisant l’objet d’une déclaration du gouverneur en conseil en vertu de l’article 20 de la LC sur des questions de sécurité nationale ou de crime organisé (al. 9b)) ou ayant fait de fausses déclarations (al. 10(1)b)).
Le projet de loi ajoute les paragraphes 9(2.1) et 9(2.2) à la LC pour préciser qu’une demande de répudiation sera suspendue ou ne pourra être faite si une action est intentée contre un citoyen canadien dans le cadre des nouvelles procédures de révocation.
L’article 8 du projet de loi établit un nouveau régime de révocation qui expose les nouveaux motifs, les nouvelles procédures et les nouvelles conséquences de la révocation.
Le seul motif de révocation prévu par l’actuel article 10 de la LC est la fraude, qu’il s’agisse de demandes de citoyenneté ou de demandes de résidence permanente. La procédure actuelle fait intervenir le Ministre, le gouverneur en conseil et, si la révocation est contestée, la Cour fédérale (art. 18). Si, à l’issue de ces procédures, la fraude est établie, la personne cesse d’avoir la qualité de citoyen canadien (al. 10(1)a)) et devient résident permanent, sauf si la demande de résidence permanente a elle-même été frauduleuse.
Les nouveaux paragraphes 10(1) et 10.1(1) de la LC établissent de nouvelles procédures de révocation de la citoyenneté pour cause de fraude, qui ne font plus intervenir le gouverneur en conseil. Si le Ministre est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l’acquisition, la conservation ou la répudiation de la citoyenneté d’une personne ou sa réintégration dans celle-ci est intervenue par fraude, il peut révoquer la citoyenneté. Le nouveau paragraphe 10(3) dit qu’après avoir reçu l’avis du Ministre, la personne visée a la possibilité de présenter des observations écrites. Seront établis par règlement les facteurs pour lesquels le Ministre doit tenir une audience aux termes du nouveau paragraphe 10(4) (voir le par. 24(5) du projet de loi, nouvel alinéa 27(1)j.2)). Le Ministre doit rendre sa décision finale par écrit (nouveau par. 10(5) de la LC).
Selon le projet de loi, il appartiendra à la Cour fédérale de prendre les décisions en matière de révocation pour cause de fraude relative à des questions de sécurité. Le nouveau paragraphe 10.1(1) établit que, lorsque le Ministre a des motifs raisonnables de croire que la fraude est intervenue relativement à une situation entrant dans les causes limitées d’inadmissibilité citées aux articles 34 (sécurité, espionnage et terrorisme), 35 (atteinte aux droits humains ou internationaux et crimes de guerre) ou 37 (criminalité organisée) de la LIPR, il doit demander à la Cour fédérale une déclaration en vue de la révocation. Selon le nouvel article 10.5, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile devient partie à l’action intentée s’il souhaite que la Cour prononce une interdiction de territoire contre l’intéressé. Le processus est ainsi rationalisé : un seul jugement est rendu pour les deux déclarations (nouveau par. 10.5(6) de la LC) et donne immédiatement effet à la mesure de renvoi.
Le projet de loi C-24 crée de nouveaux motifs de révocation concernant les personnes qui sont visées par des condamnations relatives à la sécurité ou qui ont été membres de forces armées en conflit armé contre le Canada.
Le nouveau motif de révocation pour des condamnations relatives à la sécurité est soumis à un processus administratif. Aux termes du nouveau paragraphe 10(2) de la LC, le Ministre peut révoquer la citoyenneté d’une personne reconnue coupable des infractions suivantes commises avant ou après l’entrée en vigueur de l’article :
Le nouveau motif de révocation relatif au fait de prendre les armes contre le Canada est assujetti au processus de révocation par les tribunaux. Lorsque le Ministre a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a été membre de forces armées ou d’un groupe armé organisé dans un conflit armé contre le Canada, il doit demander à la Cour fédérale de déclarer que tel était effectivement le cas (nouveau par. 10.1(2)). Cette déclaration a pour effet de révoquer la citoyenneté (nouveau par. 10.1(3)).
S’il y a révocation aux termes des nouveaux motifs prévus aux nouveaux para-graphes 10(2) et 10.1(2) de la LC, la personne devient un ressortissant étranger27 et non un résident permanent (nouvel art. 10.3). La procédure de révocation ne doit pas rendre la personne apatride (nouveau par. 10.4(1)), et quiconque prétend qu’il le deviendrait doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il n’est pas citoyen du pays dont le Ministre a des motifs raisonnables de croire qu’il est citoyen.
Aux termes de la LC actuelle, une personne que le gouverneur en conseil déclare être une menace pour la sécurité ou qui est sous le coup d’une mesure de renvoi ne peut être réintégrée dans la citoyenneté pendant deux ans (al. 11(1)b) et 11(1)c)). Le nouvel alinéa 11(1)b) de la LC empêche ceux qui ont perdu leur citoyenneté pour les nouveaux motifs élargis de révocation de redevenir citoyens et prolonge l’effet de la déclaration du gouverneur en conseil à 10 ans (nouveau par. 20(3) de la LC).
Autrement, les principaux changements à la réintégration dans la citoyenneté reflètent les nouvelles exigences relatives à l’attribution de la citoyenneté. Selon le paragraphe 9(2) du projet de loi, la personne qui demande à être réintégrée dans la citoyenneté canadienne doit avoir rempli toutes les conditions rattachées à son statut de résident permanent, avoir été effectivement présente au Canada pendant au moins 365 jours au cours des deux années précédant la demande et avoir satisfait à toutes les exigences de la Loi de l’impôt sur le revenu au cours de la période. Enfin, elle doit avoir l’intention, si elle obtient la citoyenneté, de continuer à résider au Canada ou à résider à l’étranger dans le cadre des exemptions précisées pour cause d’emploi (nouveaux al. 11(1)d) et 11(1)e) de la LC).
Pour les résidents permanents au service des Forces armées canadiennes, les exigences en matière de résidence pour la réintégration dans la citoyenneté prévues au paragraphe 9(3) du projet de loi sont remplies si les six mois de service sont accumulés dans l’année précédant immédiatement le dépôt de la demande. Cette disposition entrera en vigueur lorsque le projet de loi recevra la sanction royale.
Le paragraphe 9(4) du projet de loi, qui entrera en vigueur par décret à une date ultérieure, remplacera les paragraphes créés par le paragraphe 9(3) et ajoutera l’exigence voulant que la personne ait rempli toutes les conditions relatives à la résidence permanente et à la présentation de déclarations de revenus. Les résidents permanents au service des Forces armées canadiennes devront également avoir accumulé six mois de service au cours des deux années précédant immédiatement leur demande de réintégration.
Le projet de loi modifie le titre de la partie IV de la LC, « Certificat de citoyenneté », qui devient « Preuve de citoyenneté », et introduit l’utilisation de systèmes électroniques.
Le nouveau paragraphe 12(1) de la LC établit qu’une personne peut demander au Ministre de décider si elle a qualité de citoyen. Cette décision peut être prise à l’aide d’un système électronique. Ce paragraphe prévoit également que, sous réserve des règlements, le Ministre délivrera à la personne concernée un certificat de citoyenneté (nouvel al. 12(1)a)) ou lui fournira un autre moyen de prouver sa qualité de citoyen (nouvel al. 12(1)b)). Lorsque la citoyenneté a été acquise par attribution, par adoption ou par réintégration, le Ministre délivrera à la personne concernée un certificat de citoyenneté ou lui fournira un autre moyen de prouver sa qualité de citoyen (nouveaux al. 12(2)a) et 12(2)b)).
Jusqu’à maintenant, le certificat de citoyenneté et la carte de citoyenneté format de poche (dont la production a cessé)28 ont été les principaux documents utilisés pour prouver la citoyenneté canadienne. Cette disposition laisse entrevoir que d’autres types de preuve de citoyenneté seront dorénavant privilégiés.
Plusieurs modifications dans la partie V ont pour effet l’harmoniser la LC avec les procédures du droit en matière d’immigration. De plus, elles limitent le rôle des juges de la citoyenneté dans le cadre de l’examen des demandes et modifient de façon importante les interdictions relatives à l’attribution de la citoyenneté et au serment de citoyenneté.
Selon l’article 11 du projet de loi, seules les demandes complètes seront acceptées pour examen (nouvel art. 13 de la LC). La procédure d’examen d’une demande peut être suspendue en attendant les résultats d’enquêtes concernant des questions d’admissibilité, les déclarations du gouverneur en conseil relativement à la sécurité nationale ou les interdictions relatives aux actes criminels (nouvel art. 13.1 de la LC). Enfin, le Ministre peut estimer qu’une demande est abandonnée si un demandeur ne fournit pas les renseignements supplémentaires demandés (nouvel al. 13.2(1)a)) ou ne se présente pas pour prêter serment sans excuse légitime (nouvel al. 13.2(1)b))29.
L’article 13 du projet de loi ajoute l’article 15 à la LC et l’obligation de répondre véridiquement à toutes les questions concernant la demande (cet article est très semblable à l’art. 16 de la LIPR). Cette obligation est énoncée juste avant les dispositions prévoyant l’examen des demandes sous l’angle d’éventuelles menaces pour la sécurité du pays (au sens qu’en donne la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité) qui donnent lieu à une déclaration du gouverneur en conseil en vertu du nouvel article 20 de la LC (voir la rubrique 2.5.3 du présent résumé législatif).
L’actuel article 20 de la LC précise que, après avoir suivi la procédure prescrite, le gouverneur en conseil peut déclarer qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’un demandeur se livrera à des activités constituant une menace pour la sécurité du Canada ou que cette personne est impliquée dans des activités criminelles prévues et organisées. Le projet de loi modifie l’article 20 pour élargir la portée de cette déclaration de manière à inclure des activités auxquelles la personne visée « s’est livrée, se livre ou pourrait se livrer ».
La déclaration du gouverneur en conseil a pour effet d’empêcher l’octroi de la citoyenneté aux termes des articles 5 ou 11 (réintégration), la prestation d’un serment de citoyenneté et la délivrance d’un certificat de répudiation. Le nouveau paragraphe 20(3) de la LC fait passer la durée de la déclaration de 2 à 10 ans.
Sous réserve de certaines exceptions, le nouvel article 21.1 de la LC dispose que quiconque représente ou conseille sciemment une personne moyennant rétribution (ou offre de le faire) relativement à une demande ou à une instance prévue par la LC commet une infraction. Cet article est très similaire à l’article 91 de la LIPR.
La LC prévoit actuellement un certain nombre de situations entraînant interdiction d’obtenir la citoyenneté ou de prêter serment. L’article 19 du projet de loi modifie ces interdictions.
Pour ce qui est de la fraude, l’article 19 :
De plus, la période pendant laquelle une personne ne peut obtenir la citoyenneté si sa citoyenneté est révoquée pour fraude passe de 5 à 10 ans (nouvel al. 22(1)f) de la LC).
Le projet de loi prévoit aussi, dans les cas suivants d’infractions commises à l’étranger, de nouvelles interdictions relatives à l’attribution de la citoyenneté et à la possibilité de prêter le serment de citoyenneté :
Enfin, le projet de loi ajoute de nouvelles interdictions, liées à la sécurité et ayant un effet permanent, relativement à l’attribution de la citoyenneté ou à la possibilité de prêter le serment de citoyenneté :
Enfin, nul ne peut prêter le serment de citoyenneté s’il ne satisfait plus ou n’a jamais satisfait aux exigences de la LC pour l’attribution de la citoyenneté (nouveau par. 22(6) de la LC).
L’article 12 du projet de loi remplace par une nouvelle version l’article 14 de la LC afin de restreindre le rôle des juges de la citoyenneté relativement à l’examen des demandes de citoyenneté. Le Ministre renverra une demande à un juge de la citoyenneté uniquement s’il n’est pas convaincu que les critères de résidence ont été remplis.
Actuellement, lorsqu’un juge est dans l’incapacité d’approuver une demande de citoyenneté par attribution, de répudiation ou de réintégration, il doit établir s’il doit ou non recommander au Ministre d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour des raisons humanitaires ou pour remédier à une situation particulière de détresse (actuel par. 15(1) de la LC). Le projet de loi supprime le pouvoir de formuler cette recom¬mandation. Le rôle du juge de la citoyenneté relativement à l’examen des demandes disparaîtra complètement conformément à la disposition de temporarisation de l’article 27 du projet de loi (voir la rubrique 2.7.3 du présent résumé législatif).
Selon l’article 20 du projet de loi, la demande d’autorisation de contrôle judiciaire de toute décision concernant la LC doit être signifiée à la Cour fédérale. Le para-graphe 12(3) du projet de loi supprime le droit à un contrôle judiciaire prévu au paragraphe 14(5) de la LC, et ce droit est également éliminé de la Loi sur les Cours fédérales (l’art. 41 du projet de loi abroge l’art. 21 de cette loi). Enfin, on ne peut interjeter appel à la Cour d’appel fédérale que si la Cour fédérale « certifie que l’affaire soulève une question grave de portée générale » (nouvel al. 22.2d)).
Selon l’article 22 du projet de loi, le Ministre peut exiger que le demandeur fournisse des renseignements supplémentaires pertinents soit en personne, devant lui ou devant un juge de la citoyenneté, soit « par le moyen de télécommunication […] qu’il fixe » (nouvel art. 23.1 de la LC).
Le projet de loi habilite le gouverneur en conseil à prendre des règlements sur la collecte, la conservation, l’utilisation, la destruction et la communication de renseignements (nouvel al. 27(1)k.1) de la LC). Les nouveaux alinéas 27(1)k.2) à 27(1)k.4) de la LC prévoient la divulgation de renseignements à des fins de sécurité nationale ou de conduite des affaires internationales, pour vérifier l’identité d’une personne dans le cadre de l’application d’une loi fédérale ou d’une loi étrangère, et pour la coopération entre le gouvernement du Canada et celui d’une province.
Comme il a été mentionné plus tôt, le projet de loi modifie le rôle des juges de la citoyenneté relativement à l’examen des demandes (art. 12 du projet de loi remplaçant l’art. 14 de la LC). Cependant, le nouveau paragraphe 28.1(1) de la LC indique que l’article 14 de cette loi expirera cinq ans après l’entrée en vigueur du nouveau paragraphe 22.1(3), selon lequel le Ministre peut demander à la Cour fédérale d’effectuer le contrôle judiciaire d’une décision prise par un juge de la citoyenneté (art. 20 du projet de loi). Avant l’expiration de chaque période de cinq ans, le Ministre peut prolonger l’application de l’article 14 de la LC pendant cinq autres années (nouveau par. 28.1(2)).
L’article 28 crée le nouvel article 29 de la LC, qui définit les « documents de citoyenneté » pour refléter le contenu des nouveaux alinéas 12(1)b) et 12(2)b), qui prévoient les moyens de prouver sa citoyenneté par d’autres moyens que le certificat de citoyenneté ou de naturalisation.
Les infractions relatives aux documents de citoyenneté demeurent essentiellement les mêmes, mais les sanctions sont plus sévères. Par exemple, selon la LC actuelle, commet une infraction punissable sur une déclaration de culpabilité par procédure sommaire quiconque utilise le certificat d’une autre personne (al. 29(2)b)), permet sciemment que son certificat soit utilisé par une autre personne (al. 29(2)c)), ou fait le trafic de certificats ou en a en sa possession à cette intention (al. 29(2)d)). La peine maximale pour de telles infractions est une amende de 1 000 $, un an d’emprisonnement ou les deux. Pour des infractions semblables, le nouveau paragraphe 29(2) prévoit que le contrevenant est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans. La peine d’emprisonnement maximale passe de 3 à 14 ans pour quiconque délivre, fournit ou modifie un document de citoyenneté ou en fait le trafic.
L’article 29 du projet de loi ajoute à la LC le nouveau paragraphe 29.1, qui établit de nouvelles infractions et peines – notamment des amendes substantielles (maximum de 20 000 $ sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et maximum de 100 000 $ sur déclaration de culpabilité par mise en accusation), des peines d’empri¬sonnement (maximum de six mois sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et maximum de deux ans sur déclaration de culpabilité par mise en accusation), ou encore les deux – pour les personnes qui fournissent des conseils en contravention du nouveau paragraphe 21.1(1).
Pour ceux qui encouragent quelqu’un à faire des présentations erronées ou qui font sciemment de fausses déclarations, le nouvel article 29.2 prévoit des amendes substantielles (maximum de 50 000 $ sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et maximum de 100 000 $ sur déclaration de culpabilité par mise en accusation), des peines d’emprisonnement (maximum de deux ans sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et maximum de cinq ans sur déclaration de culpabilité par mise en accusation), ou les deux.
L’article 30 du projet de loi fait passer la période de prescription de 3 à 10 ans (art. 31 de la LC).
Le projet de loi prévoit que certaines dispositions seront réputées, au moment de la sanction royale, être entrées en vigueur rétroactivement, que certaines entreront en vigueur au moment de la sanction royale et que d’autres entreront en vigueur à une date fixée par décret.
Les articles du projet de loi réputés entrés en vigueur le 17 avril 2009 portent essentiellement sur les « Canadiens dépossédés de leur citoyenneté ».
Les dispositions suivantes entrent en vigueur à la date de la sanction royale :
Le paragraphe 46(1) prévoit que les dispositions suivantes entreront en vigueur à la date fixée par décret :
Conformément au paragraphe 46(2), la plupart des dispositions du projet de loi entreront en vigueur à une date fixée par décret qui suivra l’entrée en vigueur de celles énoncées au paragraphe 46(1). Cela signifie que les modifications prévues dans les dispositions visées au paragraphe 46(1) – dont certaines, par exemple, établissent le cadre des nouvelles procédures d’examen des demandes et des règles concernant le contrôle judiciaire – entreront en vigueur avant que les modifications ultérieures prévues au paragraphe 46(2) – comme les nouvelles exigences relatives à la naturalisation et la révocation – soient mises en œuvre.
Conformément au paragraphe 46(3), les deux dispositions suivantes du projet de loi entreront en vigueur à la date fixée par décret :
Depuis une vingtaine d’années, la citoyenneté fait l’objet de nombreux débats tant au Parlement qu’ailleurs. Par conséquent, nombre d’énoncés de principe, de débats historiques, de témoignages entendus par des comités parlementaires et de rapports de comité laissent entrevoir les questions que peuvent soulever les dispositions actuelles. Par ailleurs, bien des pays, notamment ceux dont le cadre législatif est analogue à celui du Canada, sont en voie de modifier leur législation en matière de citoyenneté pour tenir compte de phénomènes modernes tels que le terrorisme et le tourisme obstétrique. Ces débats à l’échelle internationale sont aussi très utiles pour l’étude du projet de loi C-24.
Comme les tribunaux ont interprété de façon différente la notion de « résidence » dans la LC de 1977, les intervenants ont bien accueilli les précisions apportées par le projet de loi au moyen des modifications précisant que la résidence signifie la présence effective au Canada. Toutefois, certains avaient déjà signalé – et l’ont fait à nouveau dans le contexte du projet de loi C-24 – que cette exigence pourrait empêcher des gens d’affaires qui ont fait leurs preuves de devenir citoyens canadiens parce qu’ils passent régulièrement de longues périodes à l’étranger30.
Deux solutions ont été proposées. La première est que la disposition en cause reprenne les exemptions aux obligations de présence effective pour conserver la résidence permanente sous le régime de la LIPR31. Ces exemptions diffèrent de celles proposées dans le projet de loi en ce qu’elles incluent les personnes qui accompagnent un conjoint ou un parent citoyen canadien et celles qui travaillent pour une entreprise canadienne à l’étranger. La LIPR prévoit également la possibilité d’établir par règlement d’autres façons de se conformer à la loi32.
La seconde solution consisterait à maintenir le pouvoir discrétionnaire que comporte la disposition actuelle, mais en exigeant des droits plus importants des demandeurs qui choisissent l’application d’une définition discrétionnaire de la résidence, comme des liens importants avec le Canada33.
Pour d’autres, le fait d’exiger des périodes de présence effective pour obtenir la naturalisation ne constitue pas un désavantage. Selon le rapport d’un comité parle-mentaire, une telle exigence ne sonnerait pas le glas de l’immigration économique, bien qu’elle puisse retarder l’acquisition de la citoyenneté pour certains immigrants. Pour les membres de ce comité, cela semblait être un compromis acceptable, puisque le rapport concluait que « la résidence n’est pas une démarche mathé-matique. C’est une expérience, une expérience canadienne, pour laquelle il ne saurait y avoir de substitut34 ».
Certains intervenants s’inquiètent également que les Canadiens naturalisés soient de nouveau tenus de démontrer leur intention de résider au Canada, une obligation qu’ils considèrent comme déraisonnable et injuste pour ces nouveaux Canadiens, étant donné que les personnes nées ici n’ont pas à s’y plier. Par ailleurs, ils font valoir que la possibilité d’utiliser ce critère pour révoquer la citoyenneté au motif de fausses présentations si un Canadien naturalisé devait s’installer à l’étranger crée un climat d’incertitude pour les Canadiens naturalisés et pourrait limiter leurs choix35.
Le Comité sénatorial permanent des Affaires sociales, sciences et technologie a émis une observation à la suite de son étude du projet de loi, mais celle-ci n’est pas juridiquement contraignante. Le Comité a suggéré que le ministre devrait envisager de créer une mesure de réduction ou d’exemption des frais à l’intention des résidents permanents à faible revenu qui présentent une demande de citoyenneté. La Loi sur la citoyenneté actuelle ne prévoit de dispense pour des raisons humanitaires pour les adultes qu’aux conditions d’éligibilité, tels que les tests de langue et de connaissances. La dispense pour des raisons d’ordre humanitaire pour le mineur comprend les conditions d’éligibilité, tels que les tests de langue et de connaissances, mais aussi la période de résidence et l’âge; le mineur, tout comme la personne incapable de saisir la portée de l’intention de résider ou du serment de citoyenneté en raison d’une déficience mentale, peut être aussi dispensé de ces obligations. Le ministre a également le pouvoir discrétionnaire d’octroyer la citoyenneté pour remédier à une situation particulière et inhabituelle de détresse. L’augmentation importante des frais pour soumettre une demande de citoyenneté a eu lieu en janvier 2014 à la suite de la modification du Règlement sur la citoyenneté.
Le projet de loi présente de nouveaux motifs de révocation de la citoyenneté et modifie le processus connexe. Ces deux modifications ont attiré l’attention.
La disposition du projet de loi prévoyant la révocation de la citoyenneté pour des questions de sécurité nationale pousse les législateurs canadiens plus profondément dans le débat international en cours. Plusieurs pays pairs ont envisagé ou adopté récemment des réformes législatives similaires. Au Royaume Uni, par exemple, des réformes adoptées antérieurement pour réagir au terrorisme prévoyaient la révocation de la citoyenneté des ressortissants ayant la double nationalité si cela était dans l’intérêt public.
Certaines des préoccupations soulevées au Royaume Uni pourraient également l’être au Canada. Plus précisément, les politiciens britanniques se sont inquiétés d’une éventuelle « exportation » du problème, soit le renvoi des personnes dont la citoyenneté avait été révoquée dans des pays peut-être moins disposés ou aptes à mener des poursuites36. Ils se sont également dits inquiets du fait que les citoyens ayant la double nationalité ne seraient pas traités également étant donné l’inter-diction de l’apatridie par révocation.
Au Canada, un comité parlementaire s’est penché, dans un rapport de 2005, sur la révocation de la citoyenneté au motif d’infractions, et a rejeté cette approche, faisant valoir que « toute conduite ultérieure devrait relever de la compétence du système canadien de justice pénale37 ». On a soulevé le même argument relativement au projet de loi : certains observateurs se sont opposés à la révocation de la citoyenneté comme forme de châtiment38, tandis que d’autres ont estimé que le Canada ne devrait pas envoyer à l’étranger ses « citoyens à problèmes39 ».
D’autres se sont prononcés en faveur de la disposition sur la révocation, estimant qu’elle établit le type de crimes qui constituent une atteinte fondamentale à la loyauté envers le pays, soit la trahison, le terrorisme et la participation à un conflit armé contre le Canada – pour lesquels, selon ces observateurs, la révocation de la citoyenneté est une sanction appropriée40.
Pour ce qui est du processus de révocation de la citoyenneté, le rapport du comité parlementaire de 2005 laisse entendre que « ce processus semble trop politique du fait que la décision finale en matière de révocation appartient au gouverneur en conseil41 ». Les membres du comité étaient d’avis qu’une procédure entièrement judiciaire aurait été préférable.
Le projet de loi propose, dans certains cas, une procédure judiciaire qui peut aller jusqu’à la déportation, s’il y a lieu, pour ceux dont la citoyenneté a été révoquée. Toutefois, dans d’autres cas, considérés comme ordinaires par le Ministère, c’est au Ministre plutôt qu’au gouverneur en conseil que revient la décision finale de révoquer la citoyenneté. Des avocats se sont dits inquiets d’une atteinte au droit à une procédure équitable42, tandis que le gouvernement laisse entendre que cette démarche simplifiée sera moins onéreuse et plus efficace43.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
Dans ce contexte, « obtenir la citoyenneté par attribution » signifie par attribution en vertu de la LCou de la législation antérieure, par acquisition en vertu de la LC ou par reprise en vertu de la législation antérieure (art. 2(19) du projet de loi, nouveau par. 3(9) de la LC).
[ Retour au texte ](1) Pour être admissible à l’enrôlement dans les Forces canadiennes à titre d’officier ou de militaire du rang, une personne doit satisfaire aux conditions suivantes :[ Retour au texte ]
- être citoyen canadiecn; toutefois, le chef d’état-major de la défense ou l’officier désigné par lui peut autoriser l’enrôlement d’un citoyen d’un autre pays, s’il est persuadé qu’un besoin particulier existe et que l’intérêt national n’en souffrira pas [...]
Voici quelques exemples de motifs valables pour ne pas s’être présenté à un examen ou à une entrevue :[ Retour au texte ]
- être dans l’obligation de prendre soin d’un parent mourant;
- être incapable de se présenter en raison de contraintes de santé découlant d’une maladie ou d’un accident;
- être dans l’attente de documents demandés.
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