Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le 7 octobre 2014, l’honorable Steven Blaney, ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, a déposé à la Chambre des communes le projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur les armes à feu et le Code criminel et apportant des modifications connexe et corrélative à d’autres lois (titre abrégé : « Loi visant la délivrance simple et sécuritaire des permis d’armes à feu »).
En 1995, le Parlement a adopté la Loi sur les armes à feu 1 (LAF), dont la majorité des dispositions sont entrées en vigueur en décembre 1998. La LAF et ses règlements régissent la possession, le transport, la cession et l’entreposage des armes à feu. Elle complète également la partie III, « Armes à feu et autres armes », du Code criminel 2 (le Code), qui énumère et définit les catégories d’armes à feu et les infractions relatives aux armes à feu liées à la possession illégale ou à l’usage abusif.
En 2000, la Cour suprême du Canada a examiné la question de la constitutionnalité des dispositions de la LAF relatives à la délivrance de permis et à l’enregistrement. Dans son Renvoi relatif à la Loi sur les armes à feu (Can.) confirmant la constitutionnalité de la LAF, la Cour a conclu que celle-ci « vise à améliorer la sécurité publique en régissant l’accès aux armes à feu, au moyen d’interdictions et de sanctions 3 ». Bref, le régime vise à prévenir et à réduire l’usage abusif des armes à feu 4.
Le projet de loi C-42 modifie la LAF et le Code. De manière générale, il :
Les armes à feu se divisent en trois catégories : armes à feu prohibées, armes à feu à autorisation restreinte et armes à feu qui ne sont ni prohibées ni à autorisation restreinte, communément appelées « armes à feu sans restriction ». La catégorie des armes à feu prohibées comprend les armes automatiques, les petites armes de poing faciles à dissimuler et les armes à canon tronçonné. Quant à la catégorie des armes à feu à autorisation restreinte, elle regroupe les armes de poing qui ne sont pas des armes à feu prohibées et les armes à feu semi-automatiques. Le terme « arme à feu sans restriction » n’est pas défini dans le Code, mais est utilisé pour décrire les carabines et fusils de chasse ordinaires qui ne sont pas modifiés 5.
Une arme à feu est classée en comparant son type et ses caractéristiques avec les critères énoncés dans le Code et les règlements correspondants. Le classement est validé par un réseau de vérificateurs d’armes à feu autorisés dont la coordination est assurée par le Programme canadien des armes à feu de la Gendarmerie royale du Canada. Dans certains cas, une arme à feu sera d’abord classée en fonction des renseignements fournis par le fabricant ou l’importateur, avant l’importation. Cependant, à l’inspection, il pourrait être déterminé que les renseignements fournis initialement étaient inexacts ou que la conception de l’arme à feu a changé depuis la dernière livraison, ce qui entraîne alors un changement de catégorie 6.
L’article 84 du Code définit ainsi les deux premières catégories, les armes à feu prohibées et les armes à feu à autorisation restreinte :
L’article 18 du projet de loi ajoute la définition d’arme à feu sans restriction à l’article 84 du Code. Le terme est défini ainsi :
Comme pour les armes à feu à autorisation restreinte et les armes à feu prohibées, la nouvelle définition du terme « arme à feu sans restriction » prévoit que les armes à feu peuvent être désignées comme telles par règlement pris par le gouverneur en conseil (c.-à-d. le Cabinet).
Le paragraphe 117.15(1) du Code confère au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre des règlements relativement à toute mesure d’ordre réglementaire pouvant être prévue par la partie III du Code, comme l’ajout d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte à celles déjà énumérées dans les définitions des termes « arme à feu prohibée » et « arme à feu à autorisation restreinte » à l’article 84. Cependant, le paragraphe 117.15(2) du Code limite ce pouvoir :
Le gouverneur en conseil ne peut désigner par règlement comme arme à feu prohibée, arme à feu à autorisation restreinte, arme prohibée, arme à autorisation restreinte, dispositif prohibé ou munitions prohibées toute chose qui, à son avis, peut raisonnablement être utilisée au Canada pour la chasse ou le sport.
Le projet de loi autorise le gouverneur en conseil à passer outre les définitions de catégories d’armes à feu à l’article 84 du Code en prenant des règlements qui créent des exceptions. En d’autres mots, des armes à feu qui correspondraient autrement à la définition d’arme à feu prohibée ou à celle d’arme à feu à autorisation restreinte pourraient être réputées être des armes à feu sans restriction (nouveau par. 117.15(3) du Code). Dans le même ordre d’idées, le gouverneur en conseil pourrait estimer que des armes à feu qui seraient autrement des armes à feu prohibées sont des armes à feu à autorisation restreinte (nouveau par. 117.15(4) du Code). Le projet de loi ne modifie pas le paragraphe 117.15(2) du Code, qui limite les pouvoirs du gouverneur en conseil. Par conséquent, ce dernier ne pourrait pas reclasser les carabines et fusils de chasse ordinaires dans la catégorie des armes à feu à autorisation restreinte ou des armes à feu prohibées.
Le projet de loi apporte des modifications de forme à plusieurs dispositions du Code portant sur les infractions relatives à la possession, au trafic, à l’importation et à l’exportation, à la perte, à la découverte, au vol et à la destruction d’une arme à feu, ainsi qu’à la saisie sans mandat d’une telle arme. Ces modifications visent à remplacer le terme « arme à feu 7 » par l’énumération des trois catégories dans lesquelles les armes à feu seraient classées selon le Code, soit les armes à feu prohibées, les armes à feu à autorisation restreinte et les armes à feu sans restriction. Ces modifications ne semblent pas changer l’objet des dispositions 8.
Les ordonnances interdisant la possession d’armes à feu, d’armes et d’autres articles, dont les munitions et les substances explosives, sont obligatoires lorsqu’une personne est déclarée coupable ou absoute (art. 730 du Code) relativement à :
L’interdiction s’applique à perpétuité dans le cas des armes à feu prohibées, des armes à feu à autorisation restreinte, des armes prohibées, des dispositifs prohibés et des munitions prohibées. Dans le cas des autres armes à feu, des armes à autorisation restreinte, des arbalètes, des munitions et des substances explosives, une interdiction de dix ans s’applique lors d’une première infraction, tandis que l’interdiction à perpétuité s’applique à toute récidive.
À l’heure actuelle, l’ordonnance d’interdiction obligatoire prévue à l’article 109 s’applique notamment lorsqu’une personne est déclarée coupable ou absoute d’un acte criminel perpétré avec usage, tentative ou menace de violence contre autrui et passible d’une peine maximale d’emprisonnement égale ou supérieure à 10 ans (al. 109(1)a) du Code). Le projet de loi rend obligatoire l’ordonnance d’interdiction, quelle que soit la peine possible, lorsque le contrevenant utilise, menace ou tente d’utiliser la violence contre son partenaire intime, actuel ou ancien, son enfant, son père ou sa mère ou toute personne qui réside avec lui ou avec l’une ou l’autre de ces personnes (nouvel al. 109(1)a.1) du Code). Le terme « partenaire intime » s’entend notamment d’un époux, d’un conjoint de fait et d’un partenaire amoureux (nouvel art. 110.1 du Code).
La disposition de l’article 110 du Code portant sur l’ordonnance d’interdiction discrétionnaire s’applique lorsqu’une personne est déclarée coupable ou absoute dans les cas suivants :
Selon l’article 110, le tribunal a le pouvoir discrétionnaire d’interdire la possession d’armes à feu, d’armes et autres articles comme les munitions et les substances explosives lorsqu’il estime qu’une telle ordonnance est souhaitable pour la sécurité du contrevenant ou pour celle d’autrui. Contrairement à l’ordonnance d’interdiction obligatoire prévue à l’article 109, l’ordonnance d’interdiction discrétionnaire prévue à l’article 110 n’est pas une ordonnance générale applicable à tous les types d’armes à feu, d’armes, d’arbalètes, de munitions ou de substances explosives; elle peut interdire à une personne de posséder l’un ou la totalité des articles précisés.
L’ordonnance d’interdiction discrétionnaire ne peut excéder une période de dix ans, commençant à la date de la déclaration de culpabilité ou de l’absolution du contrevenant ou à la date de sa libération. Le projet de loi prolonge la période maximale de l’ordonnance d’interdiction discrétionnaire prévue à l’article 110 lorsque, au moment de la perpétration de l’infraction, il y a eu usage, tentative ou menace de violence contre le partenaire intime, actuel ou ancien, du contrevenant, l’enfant, le père ou la mère du contrevenant ou de ce partenaire intime, ou toute personne qui réside avec le contrevenant ou l’une des personnes mentionnées précédemment. Le projet de loi dispose que, dans de telles circonstances, l’ordonnance d’interdiction peut s’appliquer à perpétuité ou pour une période plus courte (nouveau par. 110(2.1) du Code). Comme dans le cas de l’article 109, aux fins de l’article 110, « partenaire intime » s’entend d’un époux, d’un conjoint de fait et d’un partenaire amoureux (nouvel art. 10.1 du Code).
Les conditions de délivrance de permis prévues sous le régime de la LAF dépendent de la classification de l’arme à feu, et le permis d’armes à feu sert à établir la classe pour laquelle il est valide (c.-à-d. arme à feu prohibée, arme à feu à autorisation restreinte ou arme à feu qui n’est ni prohibée ni à autorisation restreinte). Il faut détenir un permis d’armes à feu valide pour posséder ou acquérir une arme à feu et acheter des munitions en toute légalité. En règle générale, le permis délivré à une personne âgée d’au moins 18 ans expire après cinq ans et doit être renouvelé.
L’article 7 de la LAF prévoit la formation en matière de sécurité et les examens nécessaires pour obtenir le permis, ainsi que les circonstances permettant à une personne d’être exemptée de telles exigences. En règle générale, les personnes qui demandent un permis de possession et d’acquisition, le seul permis disponible pour les nouveaux demandeurs, doivent avoir réussi le Cours canadien de sécurité dans le maniement des armes à feu.
Le paragraphe 7(1) s’applique à tout demandeur de permis d’armes à feu sans restriction. À l’heure actuelle, pour obtenir un tel permis, le demandeur doit satisfaire à l’une des conditions suivantes :
Le paragraphe 7(2) s’applique à tout demandeur de permis d’armes à feu à autorisation restreinte ou d’armes à feu prohibées. Pour obtenir un tel permis, il doit actuellement satisfaire à l’une des conditions suivantes :
Le projet de loi modifie les alinéas 7(1)b) et 7(2)b) qui permettent actuellement à une personne d’obtenir un permis si elle a réussi l’examen requis sans avoir réussi le cours de formation au maniement sécuritaire. Selon le projet de loi, une telle possibilité ne sera offerte qu’aux demandeurs ayant réussi l’examen avant la date d’entrée en vigueur des nouvelles dispositions. Autrement dit, les nouveaux demandeurs n’auront plus la possibilité d’obtenir un permis sans avoir réussi le cours sur le maniement sécuritaire des armes à feu; ils devront dorénavant réussir ce cours.
L’autre type de permis d’armes à feu, le permis de possession simple, ne permet pas d’acquérir des armes à feu. Le permis est délivré, conformément aux articles 6 à 8 du Règlement sur les permis d’armes à feu 10, aux personnes qui satisfont aux exigences de l’alinéa 7(4)c) de la LAF, c’est-à-dire qu’elles possédaient légalement une arme à feu au moment de l’entrée en vigueur de la LAF et qu’elles n’ont pas l’intention d’acquérir d’autres armes à feu.
Les exigences liées au permis de possession simple sont moins sévères que celles liées au permis de possession et d’acquisition, puisque le titulaire n’est pas tenu de réussir le cours de formation au maniement sécuritaire et l’examen prévus aux paragraphes 7(1) et 7(2) de la LAF. Selon l’Annotated Firearms Act and Related Legislation :
les permis de possession simple auraient apparemment été créés parce que les personnes qui possédaient légalement une arme à feu depuis très longtemps et qui ne voulaient pas en acquérir d’autres avaient démontré qu’elles étaient des propriétaires responsables utilisant de manière sécuritaire la seule arme à feu que le permis de possession simple leur permettrait de posséder 11.
L’article 4 du projet de loi abroge l’alinéa 7(4)c) de la LAF, qui exempte la personne de réussir la formation au maniement sécuritaire et l’examen pour obtenir un permis de possession simple. Il ne sera donc plus possible d’obtenir un permis de possession simple.
Ce même article modifie par ailleurs les paragraphes 7(1) (admissibilité au permis d’armes à feu sans restriction) et 7(2) (admissibilité au permis d’armes à feu prohibées et au permis d’armes à feu à autorisation restreinte), permettant ainsi de convertir les permis actuels de possession simple en permis de possession et d’acquisition. Le projet de loi ajoute le libellé suivant aux situations permettant à une personne d’obtenir un permis : « à la date de référence, le particulier était visé à l’alinéa 7(4)c) dans sa version antérieure à cette date et était titulaire d’un permis ». Ces modifications permettront donc à une personne d’obtenir un permis aux termes des paragraphes 7(1) ou 7(2) de la LAF si, au moment de l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, elle était titulaire d’un permis, possédait au moins une arme à feu au moment de l’entrée en vigueur de la LAF (1998) et n’avait pas besoin de permis pour acquérir d’autres armes à feu.
L’article 19 de la LAF établit dans quelles circonstances le contrôleur des armes à feu peut autoriser le transport d’armes à feu prohibées et d’armes à feu à autorisation restreinte entre deux ou plusieurs lieux précis, comme suit :
L’article 6 du projet de loi modifie l’article 19 afin de prévoir l’autorisation de transport automatique lors du renouvellement du permis. Le titulaire d’un permis de possession d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte est dorénavant autorisé à les transporter « dans sa province de résidence » aux fins suivantes :
Le propriétaire d’une arme à feu prohibée ou d’une arme à feu à autorisation restreinte vivant dans une province ou un territoire où il n’y a pas de port de sortie devra donc demander une autorisation de transport conformément à l’actuel paragraphe 19(1) de la LAF pour la transporter vers un port de sortie ou à partir d’un port d’entrée d’une province autre que « sa province de résidence 13 ». Ni la LAF ni le projet de loi ne définissent les termes « port de sortie » et « port d’entrée ».
À l’heure actuelle, les autorisations de transport délivrées par le contrôleur des armes à feu « peuvent » prendre la forme d’une condition d’un permis (par. 61(3) de la LAF) 14. L’article 13 du projet de loi modifie l’article 61 afin de prévoir que les autorisations de transport visées aux nouveaux paragraphes 19(1.1), 19(2.1) et 19(2.2) « prennent » (par opposition à « peuvent prendre ») la forme d’une condition d’un permis (nouveau par. 61(3.1) de la LAF).
Le contrôleur des armes à feu a le pouvoir discrétionnaire d’établir l’admissibilité du demandeur de permis d’armes à feu. Il décide également de délivrer, de renouveler ou de révoquer un permis et une autorisation de transport, de port et de cession d’une arme à feu. De plus, lorsqu’il délivre un tel permis ou une autorisation de port ou de transport, il peut les assortir des conditions qu’il estime souhaitables dans les circonstances et en vue de la sécurité de leur titulaire ou d’autrui (par. 58(1) de la LAF). Dans le projet de loi, le pouvoir discrétionnaire du contrôleur des armes à feu d’imposer des conditions est assujetti aux limites imposées par les règlements (nouveau par. 58(1.1) de la LAF).
Selon le paragraphe 64(1) de la LAF, les permis délivrés aux particuliers âgés d’au moins 18 ans sont valides pour la période mentionnée, qui ne peut dépasser cinq ans après le premier anniversaire de naissance du titulaire suivant la date de délivrance. Sous réserve de quelques exceptions 15, la possession d’une arme à feu sans permis (et certificat d’enregistrement dans le cas d’une arme à feu prohibée ou d’une arme à feu à autorisation restreinte) constitue une infraction au paragraphe 91(1) du Code. Le projet de loi crée une période de grâce en prolongeant de six mois la validité d’un permis relatif à une arme à feu dans le cas où il n’a pas été renouvelé avant sa date d’expiration (nouveau par. 64(1.1) de la LAF).
Les permis prolongés en raison de la nouvelle période de grâce sont assujettis à certaines limites :
Le nouvel article 42.2 de la LAF oblige les entreprises qui importent une arme à feu prohibée ou une arme à feu à autorisation restreinte à remplir le formulaire réglementaire et à le présenter au directeur de l’enregistrement des armes à feu avant l’importation et à un agent des douanes avant l’importation ou au moment de celle-ci. Le directeur et l’agent des douanes peuvent échanger tout formulaire ou renseignement reçus dans le cadre du processus (art. 10 du projet de loi). Selon le nouvel alinéa 83(1)d.1) de la LAF, les renseignements communiqués au directeur conformément à l’article 42.2 sont consignés dans le Registre canadien des armes à feu (art. 15 du projet de loi).
Le projet de loi apporte une modification connexe au paragraphe 107(5) de la Loi sur les douanes 16 afin d’autoriser des fonctionnaires fédéraux ou provinciaux à fournir un renseignement douanier à d’autres fonctionnaires fédéraux ou provinciaux uniquement pour l’application ou l’exécution de la LAF (nouvel al. 107(5)k.1) de la Loi sur les douanes).
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
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