Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le projet de loi C-8 : Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur, la Loi sur les marques de commerce et d’autres lois en conséquence1 (titre abrégé : « Loi visant à combattre la contrefaçon de produits ») a été présenté et lu une première fois à la Chambre des communes le 28 octobre 2013. Le projet de loi C-8 avait préalablement été présenté lors de la 1re session de la 41e législature en tant que projet de loi C-56, qui est mort au Feuilleton lorsque le Parlement a été prorogé le 13 septembre 2013. Le projet de loi C-56 avait alors franchi l’étape de la deuxième lecture et avait été renvoyé au Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes (le Comité). La Chambre des communes a mis fin à ses travaux le 18 juin 2013, avant que le Comité ait commencé l’étude du projet de loi. Conformément à un ordre de la Chambre des communes du 21 octobre 2013 permettant au gouvernement de rétablir dans la nouvelle session des projets de loi à l’étape où ils se trouvaient à la fermeture de la session, le projet de loi C-8 a été réputé lu une deuxième fois et renvoyé au Comité au moment de sa présentation.
Le Comité a procédé à l’examen du projet de loi au cours des mois de novembre et de décembre 2013 et a présenté son rapport à la Chambre des communes le 5 décembre 2013. Les amendements que ce rapport a apportés au projet de loi sont abordés à la partie 2, « Description et analyse », du présent résumé législatif2. La Chambre des communes a adopté le rapport du Comité le 31 janvier 2014 et les débats entourant la troisième lecture du projet de loi ont commencé le même jour.
Comme l’indique son titre abrégé, le projet de loi vise à combattre la contrefaçon, et ce, en modifiant la Loi sur le droit d’auteur (LDA)3 et la Loi sur les marques de commerce (LMC)4 afin de renforcer la mise en œuvre des droits qu’elles protègent. Les modifications apportées par le projet de loi mettent en place de nouvelles mesures frontalières et créent de nouveaux recours civils et criminels. Le projet de loi, d’après son sommaire, vise plus particulièrement à :
Le projet de loi modifie aussi la LMC pour, notamment, élargir ce qui constitue une marque de commerce enregistrable et conférer au registraire des marques de commerce le pouvoir de corriger les erreurs figurant au registre. Enfin, le sommaire du projet de loi assure qu’il rationalise et modernise le processus de demande d’enregistrement de marques de commerce et d’opposition à celles-ci.
Le projet de loi C-8 s’inscrit dans un contexte où la LDA a récemment été réformée en profondeur. Le 29 juin 2012, en effet, le projet de loi C-11 : Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur6 a reçu la sanction royale. Ce projet de loi a modifié la LDA en y ajoutant de nouveaux droits et de nouvelles exceptions, et la plupart de ses dispositions sont entrées en vigueur le 7 novembre 20127.
Un des objectifs fondamentaux du projet de loi C-11 était de permettre la ratification et la mise en œuvre de deux traités de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) relatifs au droit d’auteur à l’ère numérique, que le Canada a signés en 1997, mais qu’il n’a pas encore ratifiés. Il s’agit du Traité de l’OMPI sur le droit d’auteur8 et du Traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes9, entrés en vigueur en 2002 et connus ensemble sous le nom de « traités Internet de l’OMPI ». Le 12 juin 2013, le ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles, l’honorable James Moore, a déposé les deux traités Internet de l’OMPI à la Chambre des communes, en précisant que chaque traité comprend une note explicative10. Le dépôt des traités à la Chambre des communes ne signifie pas pour autant que le processus de leur ratification est terminé, plusieurs étapes restant à franchir avant d’atteindre ce résultat11.
Comme le projet de loi C-11 n’a pas abordé la contrefaçon, les modifications apportées à la LDA par le projet de loi C-8 constituent un nouvel élément de la réforme de cette loi.
Le gouvernement affirme qu’il tient depuis longtemps à combattre la contrefaçon, en raison des préjudices importants causés à diverses parties par les produits contrefaits12. Selon le gouvernement, les produits contrefaits fabriqués avec des matériaux inférieurs et sans contrôle de la qualité peuvent poser des risques pour la santé et la sécurité, en plus de miner la confiance des consommateurs dans le marché. Il ajoute que ces produits contrefaits perturbent les marchés canadiens, font perdre des recettes fiscales au gouvernement et augmentent les coûts des entreprises canadiennes légitimes. Les pertes de revenus qui en résultent pour les titulaires de droits mèneraient également à des retards dans la création de nouveaux produits ou de services innovateurs13.
Le gouvernement affirme également, en se référant aux rapports de deux comités de la Chambre des communes qui confirmeraient la menace croissante posée par ces produits14, qu’il y a lieu de croire à une progression du commerce mondial de produits contrefaits. La valeur au détail des produits contrefaits saisis par la Gendarmerie royale du Canada serait passée de 7,6 millions de dollars en 2005 à 38 millions de dollars en 201215.
Le gouvernement ajoute que la lutte contre la contrefaçon est devenue une priorité pour les principaux partenaires commerciaux du Canada et d’autres pays du G8, dont plusieurs ont pris des mesures pour renforcer leur régime de protection de la propriété intellectuelle. Par conséquent, le gouvernement dit vouloir renforcer son propre régime de protection de la propriété intellectuelle afin d’harmoniser les mesures canadiennes avec les normes internationales16. Cette mesure s’imposerait d’autant plus que le Canada continue de négocier de nouveaux accords et d’établir des liens commerciaux avec de nouveaux marchés partout dans le monde17.
L’Accord commercial anti-contrefaçon (ACAC)18 a été signé au nom du Canada par le ministre du Commerce international et ministre de la porte d’entrée de l’Asie Pacifique le 1er octobre 2011, après plusieurs années de négociations. L’Australie, les États Unis, le Japon, le Maroc, la Nouvelle Zélande, la République de Corée et Singapour l’ont signé au même moment19. L’ACAC était ouvert à la signature par les participants à sa négociation et par tout autre membre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) au sujet duquel les participants pouvaient s’entendre par consensus entre le 1er mai 2011 et le 1er mai 201320.
Le 26 janvier 2012, 22 États membres de l’Union européenne (UE) ont ajouté leur signature à l’ACAC21. Toutefois, l’ACAC a soulevé une vive opposition dans toute l’Europe et plusieurs milliers de protestataires ont manifesté dans les rues parce que, disait-on, il serait une forme d’invasion de la vie privée et d’entrave à la liberté d’expression. Le 4 juillet 2012, suivant ainsi l’avis de cinq de ses commissions, le Parlement européen a rejeté l’ACAC par 478 voix contre 39 et 165 abstentions22. Cette décision implique que ni l’UE, qui avait participé aux négociations, ni aucun de ses États membres ne pourra adhérer à l’ACAC en le ratifiant.
L’ACAC prévoit que son entrée en vigueur suivra le dépôt du sixième instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation23. À ce jour, il n’est pas entré en vigueur, car seul le Japon l’a ratifié. Le Canada n’a pas manifesté explicitement son intention de ratifier l’ACAC en déposant le projet de loi C-8 (voir la partie « Commentaire » du présent résumé législatif). Cependant, interrogés à ce sujet lors de leur comparution devant le Comité, le ministre de l’Industrie, l’honorable James Moore, et son sous-ministre ont affirmé que bien que le projet de loi vise les pressions exercées à l’échelle nationale, il permettra au Canada de s’aligner sur l’ACAC24.
Selon le gouvernement canadien, l’ACAC a pour objectif d’établir des normes internationales « pour faire respecter les droits de propriété intellectuelle, afin de permettre une lutte plus efficace contre le problème croissant que pose la contrefaçon et le piratage25 ». Le gouvernement signale aussi que l’ACAC porte sur trois domaines :
Le 18 octobre 2013, après quatre ans de négociations, le Canada et l’UE ont annoncé qu’ils avaient conclu un accord de principe sur un Accord économique et commercial global (AECG). Un résumé technique des résultats finaux de la négociation de l’AECG entre le Canada et l’UE a été déposé à la Chambre des communes le 29 octobre 201327.
Selon le résumé technique, l’AECG reflète la législation canadienne en droit d’auteur telle que mise à jour par la Loi sur la modernisation du droit d’auteur en 2012, qui a fait en sorte que le droit canadien se conforme aux traités Internet de l’OMPI28.
Le gouvernement canadien note également dans son résumé technique qu’il n’a pris aucun engagement précis en ce qui concerne les marques de commerce, les dessins et les modèles, mais que l’AECG contient un engagement général à « consentir tous les efforts possibles pour se conformer aux normes et accords internationaux, afin de favoriser la mise en place de procédures plus efficaces » en cette matière29. Finalement, le résumé technique précise que l’AECG contient des dispositions sur les recours civils et les mesures frontalières qui sont conformes à la législation canadienne en vigueur et au projet de loi C-56, le prédécesseur du projet de loi C-830.
Dans une fiche thématique portant sur les droits de propriété intellectuelle dans l’AECG publiée par la Commission européenne (CE), cette dernière précise qu’un des objectifs de l’AECG est de renforcer la protection de la propriété intellectuelle au Canada : « l’UE veut élever le niveau de protection et d’application des droits de propriété intellectuelle à l’égard de ses produits au Canada à un niveau comparable à celui de l’UE31 ». En ce qui concerne les préoccupations portant sur le lien entre l’AECG et l’ACAC, la fiche thématique note que le texte faisant présentement l’objet de négociations reflète le fait que l’ACAC a été rejeté par le Parlement européen32.
Le projet de loi C-8 compte 63 articles. La description qui suit met l’accent sur certains aspects du projet de loi plutôt que de passer en revue toutes ses dispositions. Les articles 2 à 6 modifient la Loi sur le droit d’auteur, les articles 7 à 56 modifient la Loi sur les marques de commerce, l’article 57 est une disposition transitoire, les articles 58 à 62 apportent des modifications corrélatives à différentes lois, et l’article 63 prévoit l’entrée en vigueur des dispositions du projet de loi.
Actuellement, le ministre responsable de l’application de la LDA est le ministre de l’Industrie, sauf en ce qui concerne les articles 44.1 à 44.3, dont le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile est responsable.
Les articles 44.1 à 44.3 de la LDA renvoient à la Loi sur les douanes et concernent les modalités relatives à une ordonnance du tribunal portant sur l’importation d’œuvres. Le projet de loi modifie la définition de « ministre » qui se trouve à l’article 2 de la LDA pour faire en sorte que le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile soit désormais responsable des nouveaux articles 44 à 44.12, qui sont ajoutés par l’article 5 du projet de loi, dont il est question plus loin.
L’article 3 du projet de loi modifie l’article 27 de la LDA en y ajoutant les nouveaux paragraphes 27(2.11) et 27(2.12). Le paragraphe 27(2.11) ajoute, aux violations du droit d’auteur déjà prévues à l’article 27, l’exportation et la tentative d’exportation de l’exemplaire d’une œuvre, d’une fixation d’une prestation, d’un enregistrement sonore ou d’une fixation d’un signal de communication alors que la personne qui exporte ou tente d’exporter l’exemplaire sait ou devrait savoir que celui ci a été produit sans le consentement du titulaire du droit d’auteur dans le pays où il a été produit. L’exportation ou la tentative d’exportation interdite est faite en vue d’un des actes visés aux alinéas 27(2)a) à 27(2)c), c’est-à-dire :
L’alinéa 27(2)e) de la LDA prévoit actuellement une interdiction semblable à celle proposée par le nouveau paragraphe 27(2.11), mais en ce qui concerne l’importation. Dans le même ordre d’idées, le nouveau paragraphe 27(2.12) reprend le contenu du paragraphe 27(2.1) de la LDA en précisant que le nouveau paragraphe 27(2.11) ne s’applique pas à l’exemplaire produit au titre d’une exception ou restriction prévue par la LDA ni à celui produit à l’étranger qui, s’il avait été produit au Canada, l’aurait été au titre d’une telle exception ou restriction.
L’article 4 du projet de loi modifie l’article 42 de la LDA, qui précise ce qui constitue une infraction criminelle.
Le paragraphe 4(2) du projet de loi ajoute le nouvel alinéa 42(1)e), c’est-à-dire l’infraction consistant à avoir en sa possession un exemplaire contrefait d’une œuvre ou d’un autre objet protégé par le droit d’auteur, pour le vendre, le louer, le mettre en circulation dans un but commercial ou l’exposer commercialement en public. Le paragraphe 4(2) ajoute aussi à l’infraction consistant à importer au Canada pour la vente ou la location un exemplaire contrefait, décrite à l’actuel alinéa 42(1)e) (qui devient le nouvel alinéa 42(1)f)), la nouvelle infraction consistant à exporter ou à tenter d’exporter, pour la vente ou la location, un exemplaire contrefait d’une œuvre ou d’un autre objet protégé par le droit d’auteur (nouvel al. 42(1)g)).
Le paragraphe 4(7) du projet de loi remplace l’actuel paragraphe 42(5) de la LDA, selon lequel des poursuites criminelles ne peuvent être engagées en vertu de l’article 42 relativement à l’importation de livres ou à l’importation parallèle de livres mentionnée à l’article 27.1. Le nouveau paragraphe 42(5) prévoit plutôt que :
[p]our l’application du présent article, n’est pas considéré comme un exemplaire contrefait l’exemplaire d’une œuvre ou d’un autre objet du droit d’auteur produit avec le consentement du titulaire du droit d’auteur dans le pays de production.
L’article 5 du projet de loi remplace les articles 44 et 44.1 à la dernière section de la partie IV de la LDA (section qui s’intitulera désormais « Importation et exportation » plutôt que « Importation ») par les nouveaux articles 44 à 44.12.
La modification apportée à la définition de « ministre » par l’article 2 du projet de loi et la précision apportée par l’article 5 font que le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile est responsable de ces nouveaux articles de la LDA. Le nouvel article 44 ajoute notamment la définition d’« agent des douanes » à cette loi, en renvoyant au paragraphe 2(1) de la Loi sur les douanes, qui lui définit « agent » ou « agent des douanes » comme étant :
[t]oute personne affectée à l’exécution ou au contrôle d’application de la [Loi sur les douanes], du Tarif des douanes ou de la Loi sur les mesures spéciales d’importation; la présente définition s’applique aux membres de la Gendarmerie royale du Canada.
Le nouveau paragraphe 44.01(1) interdit d’importation et d’exportation les exemplaires d’une œuvre ou d’un autre objet protégé par le droit d’auteur si :
Cependant, le nouveau paragraphe 44.01(2) précise que ces interdictions ne s’appliquent :
Le nouvel article 44.02 prévoit que le titulaire du droit d’auteur sur une œuvre ou un autre objet protégé par le droit d’auteur peut présenter au Ministre une demande d’aide en vue de faciliter l’exercice de ses recours au titre de la LDA à l’égard des exemplaires importés ou exportés en contravention du nouvel article 44.01. Cette demande d’aide se fait selon les modalités que le Ministre précise. En outre, ce dernier peut exiger, comme condition d’acceptation d’une demande d’aide, que le titulaire du droit d’auteur fournisse une sûreté afin de garantir l’exécution de ses obligations.
Les nouveaux articles 44.03 à 44.07 contiennent des mesures relatives aux exemplaires retenus et ont trait à la communication de renseignements qui peut s’établir entre un agent des douanes et un titulaire de droit d’auteur. Ces dispositions du projet de loi renvoient à l’article 101 de la Loi sur les douanes, qui prévoit que :
[l]’agent peut retenir les marchandises importées ou en instance d’exportation jusqu’à ce qu’il constate qu’il a été procédé à leur égard conformément à la présente loi ou à toute autre loi fédérale prohibant, contrôlant ou réglementant les importations ou les exportations, ainsi qu’à leurs règlements d’application.
Le nouvel article 44.03 prévoit que l’agent des douanes qui retient des exemplaires d’une œuvre ou de tout autre objet protégé par le droit d’auteur en vertu de l’article 101 de la Loi sur les douanes peut, à sa discrétion et en vue d’obtenir des renseignements sur l’éventuelle interdiction (au titre du nouvel art. 44.01) de leur importation ou de leur exportation, fournir au titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre ou l’autre objet des échantillons des exemplaires et tout renseignement à leur sujet. L’agent des douanes en question peut fournir ce renseignement s’il croit, pour des motifs raisonnables, que le renseignement ne peut, même indirectement, identifier quiconque.
Le nouveau paragraphe 44.04(1) dispose que l’agent des douanes qui a des motifs raisonnables de soupçonner que des exemplaires d’une œuvre ou d’un autre objet protégé par le droit d’auteur qu’il retient en vertu de l’article 101 de la Loi sur les douanes sont interdits d’importation ou d’exportation au titre du nouvel article 44.01 peut, à sa discrétion, fournir au titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre ou l’autre objet, si celui-ci a présenté une demande d’aide acceptée par le Ministre à l’égard de cette œuvre ou de cet autre objet, des échantillons des exemplaires ainsi que des renseignements au sujet des exemplaires qui pourraient lui être utiles pour l’exercice de ses recours au titre de la LDA.
Imposant des balises à cette rétention, et sous réserve du paragraphe 44.04(3), le nouveau paragraphe 44.04(2) prévoit que l’agent des douanes ne peut, dans le cadre de l’application de l’article 44.01, retenir les exemplaires pendant plus de dix jours ouvrables après la date où, pour la première fois, des échantillons ou renseignements sont envoyés au titulaire du droit d’auteur ou sont mis à sa disposition en application du paragraphe 44.04(1). Cette disposition précise que s’il s’agit d’exemplaires périssables, l’agent des douanes ne peut les retenir pendant plus de cinq jours après cette date. À la demande du titulaire, présentée avant la fin de la rétention des exemplaires dans le cadre de l’application de cet article, l’agent des douanes peut, compte tenu des circonstances, retenir les exemplaires non périssables pour une seule période supplémentaire d’au plus dix jours ouvrables.
Le nouveau paragraphe 44.04(3) prévoit que si, avant la fin de la rétention des exemplaires dans le cadre de l’application de l’article 44.01, le titulaire du droit d’auteur communique au Ministre une copie de l’acte introductif d’instance déposé devant un tribunal dans le cadre d’un recours formé au titre de la LDA à l’égard de ces exemplaires, l’agent des douanes retient ceux-ci jusqu’à ce que le Ministre soit informé par écrit, selon le cas :
Le nouveau paragraphe 44.04(4) précise que la survenance de l’un des faits visés au paragraphe 44.04(3) n’empêche pas l’agent des douanes de continuer à retenir les exemplaires en vertu de la Loi sur les douanes dans un but étranger au recours.
Quant au nouveau paragraphe 44.05(1), il prévoit que la personne qui reçoit des échantillons ou des renseignements fournis au titre de l’article 44.03 ne peut utiliser ces renseignements et ceux obtenus au moyen des échantillons qu’en vue de fournir à l’agent des douanes des renseignements au sujet de l’éventuelle interdiction d’importation ou d’exportation des exemplaires au titre de l’article 44.01.
Dans le même ordre d’idées, le nouveau paragraphe 44.05(2) prévoit que la personne qui reçoit des échantillons ou des renseignements fournis au titre du paragraphe 44.04(1) ne peut utiliser ces renseignements et ceux obtenus au moyen des échantillons qu’en vue d’exercer ses recours au titre de la LDA.
Pendant son examen du projet de loi, le Comité a amendé le nouvel article 44.05 pour y ajouter un troisième paragraphe, qui précise que le paragraphe 44.05(2) « n’interdit pas la communication de renseignements au sujet des exemplaires qui est faite confidentiellement afin de parvenir à un règlement à l’amiable ». Selon un fonctionnaire d’Industrie Canada, cette précision était nécessaire compte tenu de l’absence d’une mention explicite à cet égard dans le projet de loi33.
En effet, plusieurs représentants du milieu juridique qui défendent les intérêts de titulaires de droits auraient exprimé au gouvernement leurs inquiétudes quant à cette absence, parce qu’ils ont souvent recours au règlement à l’amiable pour dédouaner des marchandises à la frontière34. Le fonctionnaire d’Industrie Canada a expliqué que :
Selon les témoignages entendus par le comité, il arrive parfois qu’on ouvre un conteneur rempli de produits qui sont contrefaits ou qui sont soupçonnés de l’être, mais qui proviennent de différents titulaires de droits. Nous voulions donc tenir compte de tels cas en précisant qu’un mécanisme simplifié de règlement à l’amiable serait prévu à cette fin35.
Ce processus accéléré pourrait s’appliquer dans les cas où un titulaire de droits communique avec un fournisseur qui n’a commis aucun geste répréhensible ou encore qui renonce à contester le geste qu’on lui reproche devant un tribunal. Dans de tels cas, les autorités publiques remettraient les marchandises en question au titulaire de droits aux fins d’entreposage et de destruction. Une mise en demeure serait utilisée lors de ce processus, selon une pratique bien établie36.
Le nouvel article 44.06 permet à l’agent des douanes de donner – à sa discrétion – au titulaire du droit d’auteur, au propriétaire, à l’importateur, à l’exportateur ou au consignataire des exemplaires retenus la possibilité d’inspecter les échantillons ou les renseignements fournis en vertu du paragraphe 44.04(1).
Le nouvel article 44.07 impose au titulaire du droit d’auteur qui a reçu des échantillons ou des renseignements au titre du paragraphe 44.04(1) l’obligation de payer à « Sa Majesté du chef du Canada » – c’est-à-dire au gouvernement – les frais d’entreposage, de manutention et, le cas échéant, de destruction des exemplaires retenus, et prévoit les modalités relatives à cette obligation.
Le nouvel article 44.08 accorde une immunité à « Sa Majesté » et à l’agent des douanes en ce qui concerne les dommages ou les pertes liés à l’application ou au contrôle d’application des articles 44.01 à 44.04 et 44.06 qui découlent, selon le cas :
Les nouveaux articles 44.09 et 44.1 concernent les pouvoirs du tribunal relativement aux exemplaires retenus. Le nouvel article 44.09 prévoit les pouvoirs donnés au tribunal quant aux modalités du recours mentionné au paragraphe 44.04(3).
D’une part, le nouveau paragraphe 44.1(1) prévoit la possibilité pour le tribunal d’accorder, en cas de désistement ou de rejet du recours mentionné au paragraphe 44.04(3), des dommages-intérêts à l’encontre du titulaire du droit d’auteur qui a exercé le recours et en faveur du propriétaire, de l’importateur, de l’exportateur ou du consignataire des exemplaires visés qui est une partie au recours. Ces dommages intérêts sont accordés pour les frais engagés ou pour les pertes ou le préjudice subis en raison de la rétention des exemplaires.
D’autre part, le nouveau paragraphe 44.1(2) précise que les dommages-intérêts accordés – en cas de violation d’un droit d’auteur aux termes du paragraphe 34(1) de la LDA – au titulaire du droit d’auteur qui a exercé le recours mentionné au paragraphe 44.04(3) comprennent notamment les frais d’entreposage, de manutention et, le cas échéant, de destruction qu’il a engagés en raison de la rétention des exemplaires37.
Le nouvel article 44.11 reprend l’article 44 de la LDA et le nouvel article 44.12 reprend l’article 44.1 et les modifient afin de refléter les modifications apportées par le projet de loi. L’article 6 du projet de loi remplace quant à lui l’article 44.1 par l’article 44.12 dans certains passages de la LDA pour prendre en compte les modifications apportées par l’article 5 du projet de loi.
L’article 7 du projet de loi modifie la liste de définitions à l’article 2 de la LMC, notamment en abrogeant les définitions de « marchandises », de « paquet » ou « colis » et de « signe distinctif », et en ajoutant celles de « marque de certification projetée », de « signe » et de « dédouanement ».
Le projet de loi remplace le mot « marchandises » – dont la définition actuelle est simplement : « [s]ont assimilées aux marchandises les publications imprimées » – par le mot « produits » dans les différentes définitions et dispositions où il apparaît dans la LMC.
L’abrogation de la définition de « signe distinctif » au paragraphe 7(2) doit être lue en même temps que l’ajout de la définition de « signe » au paragraphe 7(5) et que les modifications apportées en conséquence à d’autres définitions et à d’autres dispositions de la LMC pour prendre en compte cet ajout.
Pendant son examen du projet de loi, le Comité a amendé la nouvelle définition de « distinctive » proposée au paragraphe 7(3) afin de s’assurer que la définition existante soit conservée dans son essence et que la jurisprudence est préservée38. La définition amendée par le Comité prévoit que « distinctive » :
Se dit de la marque de commerce qui distingue véritablement les produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire de ceux d’autres personnes, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.
Selon un fonctionnaire d’Industrie Canada, cet amendement est relié aux témoignages de représentants de l’industrie du médicament générique39. Ceux-ci avaient soulevé le risque que la modification apportée à la définition de « distinctive » nuise à la jurisprudence actuelle sur les marques de commerce dans le secteur pharmaceutique, en étendant la protection de la LMC à des entreprises qui ne se qualifient pas actuellement40.
La définition de « signe » prévue au paragraphe 7(5) vise notamment :
les mots, les noms de personne, les dessins, les lettres, les chiffres, les couleurs, les éléments figuratifs, les formes tridimensionnelles, les hologrammes, les images en mouvement, les façons d’emballer les produits, les sons, les odeurs, les goûts et les textures ainsi que la position de tout signe.
Le paragraphe 7(3) remplace notamment le mot « marque » par l’expression « signe ou combinaison de signes » dans les définitions de « marque de certification », « marque de commerce » et « marque de commerce projetée ».
Le paragraphe 7(5) ajoute la nouvelle définition de « marque de certification projetée », qui s’entend d’un signe ou d’une combinaison de signes que l’on projette d’employer pour distinguer, ou de façon à distinguer, les produits ou services qui sont d’une norme définie par rapport à ceux qui ne le sont pas, en ce qui concerne :
L’article 9 remplace l’intertitre précédant l’article 7, qui se lit présentement « Concurrence déloyale et marques interdites », par « Concurrence déloyale et signes interdits », pour tenir compte des modifications apportées aux mots « marque » et « signe » dans la LMC.
L’article 7 du projet de loi abroge l’alinéa 7e) de la LMC. Cette disposition, qui s’inscrit dans la partie de cette loi portant sur les interdictions reliées à la concurrence déloyale et aux marques interdites, prévoit que nul ne peut « faire un autre acte ou adopter une autre méthode d’affaires contraire aux honnêtes usages industriels ou commerciaux ayant cours au Canada ». En 1976, dans l’arrêt MacDonald et al. c. Vapor Canada Ltd.41, la Cour suprême du Canada avait jugé inconstitutionnel l’alinéa 7e) parce qu’il concerne les pratiques contractuelles, qui relèvent du pouvoir en matière de propriété et de droits civils confié aux provinces par le paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867.
En 2005, dans l’arrêt Kirkbi AG c. Gestions Ritvik inc.42, la Cour suprême avait à se prononcer sur la constitutionnalité de l’alinéa 7b) de la LMC et avait conclu qu’il « est suffisamment intégré au régime de réglementation fédéral et diffère sensiblement de l’alinéa 7e) à cet égard » et donc qu’il respecte la compétence législative du gouvernement fédéral43. Dans cet arrêt, la Cour a également confirmé la position qu’elle avait prise dans l’arrêt MacDonald et al. c. Vapor Canada Ltd. à l’effet d’invalider l’alinéa 7e) « pour le motif qu’il n’avait rien à voir avec les échanges ou les marques de commerce, ou encore avec d’autres formes de propriété intellectuelle relevant de la compétence législative fédérale44 ».
L’article 15 du projet de loi modifie l’article 12 de la LMC, qui concerne les marques de commerce enregistrables45. L’actuel paragraphe 12(2) de la LMC est remplacé par le nouveau paragraphe 12(2), qui prévoit que :
[l]a marque de commerce n’est pas enregistrable si, à l’égard des produits ou services en liaison avec lesquels elle est employée, ou en liaison avec lesquels on projette de l’employer, ses caractéristiques résultent principalement d’une fonction utilitaire.
Le paragraphe 15(4) du projet de loi ajoute également le nouveau paragraphe 12(3), qui reprend en le modifiant l’actuel paragraphe 12(2), notamment en ajoutant qu’une marque de commerce qui ne serait pas enregistrable en raison des alinéas 12(1)a) ou 12(1)b) peut tout de même être enregistrée si elle est distinctive à la date de production d’une demande d’enregistrement la concernant, eu égard aux circonstances, notamment la durée de l’emploi qui en a été fait.
L’article 16 du projet de loi abroge l’article 13 de la LMC. Cette disposition concerne l’enregistrement d’un signe distinctif, notion qui est éliminée de la LMC par le projet de loi. Comme il a été mentionné précédemment, la définition de « signe distinctif » est abrogée par le paragraphe 7(2) du projet de loi et une nouvelle définition de « signe » est ajoutée au paragraphe 7(5). Cette nouvelle notion se retrouve désormais dans d’autres définitions et dispositions de la LMC.
L’article 20 du projet de loi ajoute à la LMC le nouvel article 18.1, qui prévoit que :
[l]’enregistrement d’une marque de commerce peut être radié par la Cour fédérale, sur demande de toute personne intéressée, si le tribunal décide que l’enregistrement est vraisemblablement de nature à restreindre d’une façon déraisonnable le développement d’un art ou d’une industrie.
Ce pouvoir accordé à la Cour fédérale se trouve présentement au paragraphe 13(3) de la LMC, en ce qui concerne l’enregistrement d’un signe distinctif. Comme il a été mentionné précédemment, l’article 13 de la LMC est abrogé par l’article 16 du projet de loi, et la définition de « signe distinctif », par le paragraphe 7(2) du projet de loi.
Pendant son examen, le Comité a rejeté l’article 21 de la version précédente du projet de loi, qui ajoutait un nouvel article 19.1 à la LMC portant sur des interdictions concernant les produits, les étiquettes et les emballages. Dans le même élan, le Comité a adopté un nouvel article 22, qui remplace l’actuel paragraphe 20(1) de la LMC par les nouveaux paragraphes 20(1), 20(1.1) et 20(1.2). Un fonctionnaire d’Industrie Canada a expliqué ainsi cette façon de procéder :
À l’heure actuelle, les marques de commerce déposées sont protégées contre d’autres marques identiques ou qui créent de la confusion, pour les biens qui sont inscrits à la liste du registre des marques de commerce ou qui créent de la confusion par rapport aux biens de la liste. En vertu de l’article 21 du projet de loi C-8, il s’agirait non seulement d’une contrefaçon au moment de la vente, comme c’est le cas actuellement, mais également plus tôt dans la chaîne d’approvisionnement, de sorte que l’importation ou la fabrication de tels produits en vue de la vente constituent également de la contrefaçon.
Toutefois, étant donné sa formulation, l’article limitait ces nouvelles causes d’action civile aux biens ou services explicitement inscrits au registre. Cette formulation a quelque peu semé la discorde quant à la différence entre la contrefaçon dans le but de vendre et la contrefaçon réalisée plus tôt dans la chaîne d’approvisionnement46.
Contrairement à l’article 21 de la version précédente du projet de loi, le nouvel article 22 étend explicitement la protection de la LMC à des produits ou services qui ne sont pas inscrits au registre des marques de commerce déposées.
Le nouveau paragraphe 20(1) crée une présomption en faveur du propriétaire d’une marque de commerce déposée à l’effet que son droit à l’emploi exclusif de cette marque est réputé être violé lorsqu’une personne qui n’est pas admise à l’employer selon la LMC :
Cette présomption s’applique également lorsqu’une personne, qui n’est pas admise à employer la marque de commerce déposée selon la LMC,
Dans ces deux derniers cas, la présomption s’applique lorsque deux conditions sont réunies. D’une part, la personne qui viole le droit du propriétaire d’une marque de commerce déposée sait ou devrait savoir que les étiquettes ou les emballages sont destinés à être associés à des produits ou services qui ne sont pas ceux du propriétaire de la marque de commerce. D’autre part, la vente, la distribution ou l’annonce des produits ou services en liaison avec les étiquettes ou les emballages constituerait une vente, une distribution ou une annonce en liaison avec une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion.
Dans la documentation fournie lors de la présentation de la première version du projet de loi, le gouvernement expliquait qu’une pratique s’est établie chez certains contrefacteurs, à savoir d’importer séparément les produits et les marques apparaissant sur les étiquettes, plutôt que d’importer des produits portant déjà des marques contrefaites47. Les étiquettes sont ensuite apposées sur les produits lorsqu’ils sont rendus au Canada.
Le nouveau paragraphe 20(1.1) ajoute une exception à la règle générale du premier paragraphe, en prévoyant que l’enregistrement d’une marque de commerce n’a pas pour effet d’empêcher une personne d’employer les éléments suivants de bonne foi et d’une manière qui n’est pas susceptible d’entraîner la diminution de la valeur de l’achalandage attaché à la marque de commerce :
Finalement, le nouveau paragraphe 20(1.2) prévoit une nouvelle exception à la violation du droit à l’emploi exclusif d’une marque de commerce déposée : « [l]’enregistrement d’une marque de commerce n’a pas pour effet d’empêcher une personne d’utiliser toute caractéristique utilitaire incorporée dans la marque ».
L’article 28 du projet de loi remplace les actuels articles 28 et 29 de la LMC par les nouveaux articles 28, 29 et 29.1. Les articles 26 à 29 actuels constituent la partie de la LMC portant sur le registre des marques de commerce. Ce registre, tenu sous la surveillance du registraire des marques de commerce nommé par le gouverneur en conseil en vertu de l’article 63, contient toutes les informations qu’exige la LMC concernant une marque de commerce enregistrée.
Le nouvel alinéa 29(1)a) précise notamment que le registre des marques de commerce est accessible au public selon les modalités que le registraire fixe. Le nouvel article 29.1 prévoit que malgré le paragraphe 29(1), qui énumère les éléments accessibles au public selon les modalités que le registraire fixe, le registraire peut détruire certaines demandes et certains documents six ans après qu’ils ont été rejetés, abandonnés, radiés ou invalidés.
L’article 31 du projet de loi ajoute à la LMC notamment un nouvel article 32 qui précise les circonstances dans lesquelles le requérant doit fournir au registraire toute preuve exigée par lui établissant que la marque de commerce est distinctive à la date de production de la demande d’enregistrement de la marque. Ces circonstances sont les suivantes :
Fait à noter, l’Office de la propriété intellectuelle du Canada accepte depuis le 28 mars 2012 l’enregistrement d’une marque de commerce qui consiste en un son48.
L’actuel article 33 de la LMC dispose que :
[c]haque syndicat ouvrier ou chaque association commerciale demandant l’enregistrement d’une marque de commerce peut être requise de fournir une preuve satisfaisante que son existence n’est pas contraire au droit du pays où son bureau principal est situé.
L’article 32 du projet de loi remplace cette disposition par le nouvel article 33, qui prévoit notamment que la date de production de la demande d’enregistrement d’une marque de commerce au Canada est la date à laquelle le registraire a reçu :
L’article 36 du projet de loi ajoute le nouvel article 39.1 à la LMC. Cette nouvelle disposition ajoute la notion de demande divisionnaire à cette partie de la LMC, qui porte sur les demandes d’enregistrement des marques de commerce. La demande divisionnaire constitue une demande distincte de la demande originale correspondante et peut elle-même être divisée. Le premier paragraphe du nouvel article 39.1 permet notamment au requérant d’une demande originale d’enregistrement d’une marque de commerce, après avoir produit cette demande, de la restreindre à l’un ou plusieurs des produits ou services visés et de produire une demande divisionnaire pour l’enregistrement de la même marque de commerce en liaison avec d’autres produits ou services qui étaient visés par la demande originale.
Les articles 406 à 414 du Code criminel prévoient actuellement des infractions concernant la « contrefaçon de marques de commerce et de désignations de fabrique ». Le projet de loi ne modifie pas ces dispositions, mais ajoute plutôt de nouvelles infractions à la LMC. En effet, l’article 42 du projet de loi crée une nouvelle partie intitulée « Infractions et peines » en ajoutant le nouvel article 51.01 à la LMC.
Pendant son examen du projet de loi, le Comité a amendé l’article 42 afin d’alléger le fardeau de preuve imposé à la poursuite pour les infractions qui y sont prévues. Avant d’être amendé, le projet de loi imposait à la poursuite l’obligation de prouver que l’accusé savait que la marque de commerce en question était déposée et qu’il savait que ses actions étaient contraires aux articles 19 et 20 de la LMC. Les articles 19 et 20 de la LMC concernent les droits conférés par l’enregistrement d’une marque de commerce.
Un fonctionnaire d’Industrie Canada a expliqué au Comité que le gouvernement s’est rangé aux arguments de certains témoins, qui ont fait valoir devant le Comité que le fardeau imposé à la poursuite ferait en sorte qu’il serait très difficile pour les titulaires de droits de faire appliquer la loi de façon efficace49. Selon lui,
De toute évidence, pour qu’une personne soit reconnue coupable d’une infraction relative à la contrefaçon, on doit démontrer qu’il y a eu une intention coupable, que cela a été fait sciemment. Les deux éléments qui sont conservés sont le fait de savoir que les produits portaient atteinte à une marque de commerce – qu’ils étaient contrefaits – et le fait de savoir que les titulaires de droits n’avaient pas donné leur consentement. Le troisième élément que l’amendement propose de retirer est le fait de savoir que la marque de commerce est déposée et que les actions étaient contraires aux articles 19 et 20 de la Loi sur les marques de commerce50.
Le nouveau paragraphe 51.01(1) décrit l’infraction consistant à vendre ou à offrir en vente – ou à distribuer à l’échelle commerciale – des produits en liaison avec une marque de commerce alors que cette vente ou distribution est ou serait contraire aux articles 19 ou 20 de la LMC et que la personne qui commet l’infraction sait, à la fois :
Le nouveau paragraphe 51.01(2) décrit l’infraction consistant à fabriquer, faire fabriquer, avoir en sa possession, importer, exporter ou tenter d’exporter des produits, en vue de leur vente – ou de leur distribution à l’échelle commerciale –, alors que cette vente ou distribution serait contraire aux articles 19 ou 20 de la LMC et que la personne qui commet l’infraction sait, à la fois :
Le nouveau paragraphe 51.01(3) décrit l’infraction consistant à vendre ou annoncer des services en liaison avec une marque de commerce alors que cette vente ou annonce est contraire aux articles 19 ou 20 de la LMC et que la personne qui commet l’infraction sait, à la fois :
Le nouveau paragraphe 51.01(4) décrit l’infraction consistant à fabriquer, faire fabriquer, avoir en sa possession, importer, exporter ou tenter d’exporter des étiquettes ou des emballages, quelle qu’en soit la forme, en vue de leur vente – ou de leur distribution à l’échelle commerciale – ou en vue de la vente, de la distribution à l’échelle commerciale ou de l’annonce de produits ou services en liaison avec ceux-ci, alors que cette vente, distribution ou annonce serait contraire aux articles 19 ou 20 de la LMC et que la personne qui commet l’infraction sait, à la fois :
Le nouveau paragraphe 51.01(5) décrit l’infraction consistant à vendre ou offrir en vente – ou distribuer à l’échelle commerciale – des étiquettes ou des emballages, quelle qu’en soit la forme, alors que la vente, la distribution ou l’annonce de produits ou services en liaison avec les étiquettes ou les emballages serait contraire aux articles 19 ou 20 de la LMC et que la personne qui commet l’infraction sait que toutes les circonstances énumérées sont présentes. Ces circonstances sont les mêmes que celles énumérées au nouveau paragraphe 51.01(4).
Pendant son examen, le Comité a ajouté un nouveau paragraphe 51.01(5.1) qui n’apparaissait pas dans la version précédente du projet de loi. Cette disposition précise que, dans les poursuites relatives aux infractions prévues aux paragraphes 51.01(1) à 51.01(5), la poursuite n’a pas à établir que l’accusé savait que la marque de commerce était enregistrée.
En ce qui concerne les paragraphes 51.01(1) à 51.01(5), le nouveau paragraphe 51.01(6) prévoit des peines correspondant à celles déjà prévues à l’article 42 de la LDA pour les infractions qui y sont énumérées. Ainsi, le paragraphe 51.01(6) prévoit que la peine pour l’auteur d’une infraction prévue aux paragraphes 51.01(1) à 51.01(5) est passible, sur déclaration de culpabilité :
Le nouveau paragraphe 51.01(7) précise que les poursuites par voie de déclaration de culpabilité par procédure sommaire qui portent sur une infraction prévue à l’article 51.01 se prescrivent par deux ans à compter de la date de la perpétration de cette infraction.
Le nouveau paragraphe 51.01(8) accorde au tribunal devant lequel sont intentées des poursuites pour une infraction prévue à l’article 51.01 le pouvoir, en cas de déclaration de culpabilité, d’ordonner qu’il soit disposé – notamment par destruction – des produits, étiquettes ou emballages ayant donné lieu à l’infraction, de l’équipement ayant servi à leur fabrication ou du matériel publicitaire relatif à ces produits.
Le nouveau paragraphe 51.01(9) précise qu’avant d’ordonner la disposition de l’équipement en vertu du paragraphe 51.01(8), le tribunal doit exiger qu’un préavis soit donné au propriétaire de l’équipement et à toute autre personne qui lui semble avoir un droit ou un intérêt sur l’équipement, sauf s’il estime que l’intérêt de la justice ne l’exige pas.
L’article 43 du projet de loi crée une nouvelle partie intitulée « Importation et exportation » en ajoutant les nouveaux articles 51.02 à 51.12 à la LMC.
Le nouvel article 51.02 donne les définitions d’« agent des douanes », de « jour ouvrable », de « marque de commerce déposée en cause » et de « ministre », désignant le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, qui s’appliquent aux nouveaux articles 51.03 à 51.12. Ces nouveaux articles reprennent, en l’appliquant à la LMC, l’esprit des nouveaux articles 44.01 à 44.12 ajoutés à la LDA par l’article 5 du projet de loi.
Le nouveau paragraphe 51.03(1) interdit l’importation et l’exportation des produits qui, sans le consentement du propriétaire d’une marque de commerce déposée à l’égard de tels produits, portent – ou dont l’étiquette ou l’emballage porte sans ce consentement – une marque de commerce qui est identique à la marque de commerce déposée ou impossible à distinguer de celle-ci dans ses aspects essentiels.
Le nouveau paragraphe 51.03(2) prévoit quant à lui que cette interdiction ne s’applique pas si l’une ou l’autre des conditions suivantes est satisfaite :
Le nouveau paragraphe 51.03(3) précise qu’une contravention à l’interdiction prévue au nouveau paragraphe 51.03(1) ne donne pas ouverture à un recours au titre de l’article 53.2, qui accorde au tribunal le pouvoir de rendre les ordonnances qu’il juge indiquées lorsqu’il est convaincu, sur demande de toute personne intéressée, qu’un acte a été accompli contrairement à la LMC.
Comme c’est le cas au nouvel article 44.02 en ce qui concerne un titulaire de droit d’auteur, le nouvel article 51.04 prévoit que le propriétaire d’une marque de commerce déposée peut présenter au Ministre une demande d’aide en vue de faciliter l’exercice de ses recours au titre de la LMC à l’égard des produits importés ou exportés en contravention du nouvel article 51.03. Cette demande d’aide se fait selon les modalités que le Ministre précise. En outre, ce dernier peut exiger, comme condition d’acceptation d’une demande d’aide, que le propriétaire de la marque de commerce fournisse une sûreté afin de garantir l’exécution de ses obligations.
Les nouveaux articles 51.05 à 51.09 contiennent des mesures relatives aux produits retenus et ont trait à la communication de renseignements qui peut s’établir entre un agent des douanes et un propriétaire de marque de commerce déposée.
Le nouvel article 51.05 prévoit que l’agent des douanes qui retient des produits en vertu de l’article 101 de la Loi sur les douanes peut, à sa discrétion et en vue d’obtenir des renseignements sur l’éventuelle interdiction (au titre du nouvel art. 51.03) de leur importation ou de leur exportation, fournir au propriétaire de la marque de commerce déposée en cause des échantillons des produits et tout renseignement à leur sujet. L’agent des douanes ne peut fournir ce renseignement que s’il croit, pour des motifs raisonnables, que le renseignement ne peut, même indirectement, identifier quiconque.
Le nouveau paragraphe 51.06(1) dispose que l’agent des douanes qui a des motifs raisonnables de soupçonner que des produits qu’il retient en vertu de l’article 101 de la Loi sur les douanes sont interdits d’importation ou d’exportation (au titre du nouvel art. 51.03) peut, à sa discrétion, fournir au propriétaire de la marque de commerce déposée en cause des échantillons des produits ainsi que des renseignements au sujet des produits qui pourraient lui être utiles pour l’exercice de ses recours au titre de la LMC. L’agent des douanes ne peut fournir les échantillons ou les renseignements en question que si le propriétaire de la marque de commerce déposée en cause a présenté une demande d’aide acceptée par le Ministre à l’égard de cette marque de commerce.
Le nouveau paragraphe 51.06(2) impose des balises à cette rétention, sous réserve du paragraphe 51.06(3), en prévoyant que l’agent des douanes ne peut, dans le cadre de l’application de l’article 51.03, retenir les produits pendant plus de dix jours ouvrables après la date où, pour la première fois, des échantillons ou renseignements sont envoyés au propriétaire de la marque de commerce déposée en cause ou sont mis à sa disposition en application du paragraphe 51.06(1). S’il s’agit de produits périssables, cette disposition précise que l’agent des douanes ne peut les retenir pendant plus de cinq jours après cette date. À la demande du propriétaire de la marque, présentée avant la fin de la rétention des produits dans le cadre de l’application de cet article, l’agent des douanes peut, compte tenu des circonstances, retenir les produits non périssables pour une seule période supplémentaire d’au plus dix jours ouvrables.
Le nouveau paragraphe 51.06(3) prévoit que si, avant la fin de la rétention des produits dans le cadre de l’application de l’article 51.03, le propriétaire de la marque de commerce déposée en cause communique au Ministre une copie de l’acte introductif d’instance déposé devant un tribunal dans le cadre d’un recours formé au titre de la LMC à l’égard de ces produits, l’agent des douanes retient ceux-ci jusqu’à ce que le Ministre soit informé par écrit, selon le cas :
Le nouveau paragraphe 51.06(4) précise que la survenance de l’un des faits visés au paragraphe 51.06(3) n’empêche pas l’agent des douanes de continuer à retenir les produits en vertu de la Loi sur les douanes dans un but étranger au recours.
Quant au nouveau paragraphe 51.07(1), il prévoit que la personne qui reçoit des échantillons ou des renseignements fournis au titre de l’article 51.05 ne peut utiliser ces renseignements et ceux obtenus au moyen des échantillons qu’en vue de fournir à l’agent des douanes des renseignements au sujet de l’éventuelle interdiction d’importation ou d’exportation des produits au titre de l’article 51.03.
Dans le même ordre d’idées, le nouveau paragraphe 51.07(2) prévoit que la personne qui reçoit des échantillons ou des renseignements fournis au titre du paragraphe 51.06(1) ne peut utiliser ces renseignements et ceux obtenus au moyen des échantillons qu’en vue d’exercer ses recours au titre de la LMC.
Pendant son étude du projet de loi, le Comité a amendé l’article 51.07 afin de lui ajouter un troisième paragraphe, qui précise que le paragraphe 51.07(2) « n’interdit pas la communication de renseignements au sujet des produits qui est faite confidentiellement afin de parvenir à un règlement à l’amiable ». Cet amendement reflète la modification apportée au nouvel article 44.05 en ce qui concerne la LDA et le raisonnement sous-jacent, dont il est question plus haut.
Le nouvel article 51.08 permet à l’agent des douanes de donner – à sa discrétion – au propriétaire de la marque déposée en cause, au propriétaire, à l’importateur, à l’exportateur ou au consignataire des produits retenus la possibilité d’inspecter les échantillons ou les renseignements fournis en vertu du paragraphe 51.06(1).
Le nouvel article 51.09 impose au propriétaire de la marque de commerce déposée en cause qui a reçu des échantillons ou des renseignements au titre du paragraphe 51.06(1) l’obligation de payer à « Sa Majesté du chef du Canada », c’est-à-dire au gouvernement, les frais d’entreposage, de manutention et, le cas échéant, de destruction des produits retenus, et prévoit les modalités relatives à cette obligation.
Le nouvel article 51.1 accorde une immunité à « Sa Majesté » et à l’agent des douanes en ce qui concerne les dommages ou les pertes liés à l’application ou au contrôle d’application des articles 51.03 à 51.06 et 51.08 qui découlent, selon le cas :
Les nouveaux articles 51.11 et 51.12 concernent les pouvoirs du tribunal relativement aux produits retenus. Le nouvel article 51.11 prévoit les pouvoirs donnés au tribunal quant aux modalités du recours mentionné au paragraphe 51.06(3).
Le nouvel article 51.12 prévoit la possibilité pour le tribunal d’accorder, en cas de désistement ou de rejet du recours mentionné au paragraphe 51.06(3), des dommages-intérêts à l’encontre du propriétaire de la marque de commerce déposée en cause qui a exercé le recours et en faveur du propriétaire, de l’importateur, de l’exportateur ou du consignataire des produits visés qui est une partie au recours, pour les frais engagés ou pour les pertes ou le préjudice subis en raison de la rétention des produits.
L’article 44 du projet de loi abroge la définition de « dédouanement » qui se trouve présentement à l’article 52 de la LMC et qui renvoie simplement à la Loi sur les douanes. Le paragraphe 7(6) du projet de loi ajoute une nouvelle définition de « dédouanement » qui renvoie de façon plus précise au paragraphe 2(1) de la Loi sur les douanes, paragraphe qui définit ce terme comme étant :
- l’autorisation d’enlever des marchandises d’un bureau de douane, d’un entrepôt d’attente, d’un entrepôt de stockage ou d’une boutique hors taxes en vue de leur usage au Canada;
- dans le cas des marchandises visées à l’alinéa 32(2)b), leur réception à l’établissement de l’importateur, du propriétaire ou du destinataire.
L’alinéa 32(2)b) de la Loi sur les douanes prévoit à son tour que :
Dans les circonstances prévues par règlement et sous réserve des conditions qui y sont fixées, le dédouanement peut s’effectuer avant la déclaration en détail prévue au paragraphe (1) dans les cas suivants :
[…]
b) la livraison des marchandises à l’établissement de l’importateur, du propriétaire ou du destinataire a été autorisée par un agent ou selon les modalités réglementaires et elles y ont été reçues.
Cependant, cette nouvelle définition crée une difficulté de concordance, en français, entre la LMC et la Loi sur les douanes, étant donné que le paragraphe 7(1) du projet de loi abroge la définition de « marchandises », raison pour laquelle l’article 53 du projet de loi remplace ce terme par « produits » dans le texte de la LMC. Plusieurs modifications de forme dans le projet de loi découlent de ce remplacement.
L’article 49 du projet de loi remplace l’actuel article 64 de la LMC, qui traite des modalités relatives à la publication des enregistrements par le registraire. Le nouveau paragraphe 64(1) prévoit que, sous réserve des règlements, les documents, renseignements ou droits fournis au registraire sous le régime de la LMC peuvent lui être fournis sous la forme électronique – ou en utilisant les moyens électroniques – que le registraire précise.
Le nouveau paragraphe 64(2) ajoute que, sous réserve des règlements, le registraire peut faire usage d’un moyen électronique pour créer, recueillir, recevoir, mettre en mémoire, transférer, diffuser, publier, certifier ou traiter de quelque autre façon des documents ou des renseignements.
Le nouveau paragraphe 64(3) précise que cette mention de moyens électroniques ou de la forme électronique vise aussi, respectivement, les moyens ou formes optiques ou magnétiques ainsi que les autres moyens ou formes semblables.
L’article 51 du projet de loi remplace la « disposition transitoire » présentement en vigueur à l’article 69 de la LMC par la nouvelle partie « Dispositions transitoires » comprenant les nouveaux articles 69 à 72. L’article 52 du projet de loi abroge l’article 69 de la LMC51.
Les articles 51 et 52 du projet de loi doivent se lire en fonction de l’article 63, qui prévoit l’entrée en vigueur des différentes dispositions du projet de loi (voir plus loin la section « 2.5 Entrée en vigueur » du présent résumé législatif). L’article 51 ne figure pas parmi les exceptions ou les cas particuliers mentionnés à l’article 63 du projet de loi, ce qui fait qu’il entrera en vigueur à une date fixée par décret, aux termes du paragraphe 63(1).
Quant à l’article 52, il entrera lui aussi en vigueur à une date fixée par décret, aux termes du paragraphe 63(3), mais cette date ne sera pas nécessairement la même que celle de l’entrée en vigueur de l’article 51. Cela signifie qu’au moment de son entrée en vigueur, et selon l’ordre d’entrée en vigueur des différentes dispositions du projet de loi déterminé par les dates prévues dans les décrets, l’article 52 du projet de loi abrogera l’article 69 de la LMC qui est en vigueur à ce moment.
L’article 57 du projet de loi donne au registraire des marques de commerce la possibilité d’apporter des modifications au registre des marques de commerce afin de tenir compte des modifications apportées à la LMC par le projet de loi.
Les articles 58 à 62 du projet de loi apportent des modifications corrélatives à la Loi sur l’accès à l’information, au Code criminel (le Code), à la Loi sur les douanes et à la Loi sur les marques olympiques et paralympiques.
L’article 59 du projet de loi modifie, à l’article 183 du Code, la définition du mot « infraction » qui s’applique à la partie VI du Code, sur les atteintes à la vie privée, en ajoutant à la liste d’infractions prévues des renvois aux nouveaux articles 42 de la LDA et 51.01 de la LMC. Cet ajout a pour effet de permettre aux policiers de demander une autorisation judiciaire pour intercepter des communications privées dans le cadre d’enquêtes visant ces infractions.
Le paragraphe 63(1) prévoit que, sous réserve des paragraphes 63(2) et 63(3), les dispositions du projet de loi entrent en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret, à l’exception des articles 1, 3 et 4, des paragraphes 7(1) et 7(4), des articles 10, 11 et 14, du paragraphe 15(2), des articles 19, 22, 25 et 26, du paragraphe 37(2), et des articles 42, 45, 46, 53, 54, 56, 59, 61 et 62. Cela signifie que les dispositions énumérées entrent en vigueur à la date où le projet de loi reçoit la sanction royale52.
Le paragraphe 63(2) prévoit que les articles 2, 5 et 6, le paragraphe 7(6) et les articles 43, 44 et 60 entrent en vigueur à la date fixée par décret. Enfin, le paragraphe 63(3) prévoit que les articles 52 et 58 entrent en vigueur à la date fixée par décret.
Le jour même de la présentation du prédécesseur du projet de loi C-8, le projet de loi C-56, à la Chambre des communes, le gouvernement des États-Unis publiait un rapport invitant ses partenaires commerciaux à s’assurer que l’Accord commercial anti contrefaçon pouvait entrer en vigueur aussi rapidement que possible. Le gouvernement des États-Unis y exhortait également le Canada à respecter ses obligations découlant de l’ACAC :
Les États-Unis continuent d’encourager le Canada à prévoir des peines dissuasives en cas d’atteinte aux droits de propriété intellectuelle et à honorer ses obligations aux termes de l’Accord commercial anti-contrefaçon (ACAC) en investissant ses fonctionnaires aux douanes de l’autorité voulue pour arrêter d’office le passage de produits contrefaits ou piratés sur son territoire53.
Pourtant, seul le Japon a ratifié l’Accord jusqu’à maintenant.
Michael Geist, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d’Internet à l’Université d’Ottawa, a souligné le fait qu’en l’espace de quelques jours suivant sa présentation à la Chambre des communes, le projet de loi a été critiqué autant par les partis d’opposition que par le public54, le gouvernement se faisant accuser de tenter de faire entrer l’ACAC dans la législation canadienne « par la porte arrière55 ». Selon M. Geist, les questions soulevées à l’égard du projet de loi sont de deux ordres : la substance du projet de loi et la mise en œuvre de l’ACAC56.
Premièrement, en ce qui concerne la substance du projet de loi, des préoccupations ont été exprimées à l’égard de la décision de conférer aux agents des douanes de nouveaux pouvoirs à l’abri de la supervision des tribunaux. M. Geist souligne que les agents des douanes ne sont pas des experts en matière de propriété intellectuelle : le projet de loi leur donne pourtant le pouvoir de déterminer si des exceptions à la Loi sur le droit d’auteur s’appliquent, alors que ce genre de détermination donne souvent du fil à retordre aux tribunaux par sa complexité57.
Deuxièmement, M. Geist considère que l’intention apparente de mettre en œuvre l’ACAC par le truchement du projet de loi est l’élément qui a suscité le plus de réactions négatives. À son avis, l’objectif principal du projet de loi serait de répondre aux pressions du gouvernement des États-Unis, malgré le fait que la plupart des partenaires commerciaux principaux du Canada n’ont pas ratifié cet accord, ou l’ont carrément rejeté comme dans le cas de l’UE58. Les États-Unis eux-mêmes n’ont d’ailleurs pas ratifié l’Accord.
D’un autre côté, selon certains intervenants59, les nouvelles dispositions frontalières seraient inspirées de la loi type élaborée par l’Organisation mondiale des douanes60. Leur adoption pourrait faire en sorte que la législation canadienne participe à une nouvelle norme internationale. Plusieurs intervenants ont d’ailleurs bien accueilli le projet de loi, particulièrement des bureaux d’avocats et des groupes représentant des entreprises touchées par la contrefaçon61. Par exemple, Brian P. Isaac et Philip Lapin, des avocats spécialisés en propriété intellectuelle, considèrent que :
le débat sur la Loi visant à combattre la contrefaçon de produits (« LCCP ») ne devrait pas être axé sur la conformité de cette loi proposée avec l’Accord anti-contrefaçon (« ACAC ») ou d’autres traités internationaux, mais plutôt sur le fait qu’elle comporte ou non des mesures efficaces pour régler le problème de la distribution de produits de marque contrefaits ou d’œuvres piratées protégées par le droit d’auteur (appelées collectivement « contrefaçons ») sur le marché noir au Canada62.
Tout en reconnaissant que les mesures frontalières nécessitent un ajustement, ils considèrent que, somme toute, le projet de loi devrait être adopté :
La LCCP est un projet de loi important qui devrait être adopté. Toutefois, elle est susceptible d’améliorations non négligeables, notamment en ce qui concerne les mesures à la frontière. Nous espérons que la présente session de la législature donnera lieu à un débat vigoureux, à des amendements judicieux et à l’adoption du projet de loi63.
L’avocat spécialisé en propriété intellectuelle et auteur Barry Sookman considère pour sa part que le projet de loi devrait recevoir un appui généralisé :
Comme le projet de loi vise indiscutablement à mettre un frein à la contrefaçon d’envergure commerciale et qu’il a pour objet de protéger la santé et la sécurité des consommateurs et d’autres personnes, on s’attendrait à ce qu’il reçoive un appui considérable64.
Le projet de loi contient des dispositions qui touchent divers aspects de la propriété intellectuelle et représente une réforme majeure du droit des marques de commerce. L’International Trademark Association (INTA) a publié un mémoire contenant ses recommandations concernant le projet de loi, particulièrement en matière de marques de commerce65. L’INTA y a souligné des éléments de réforme importants qui sont absents du projet de loi, notamment l’utilisation et l’adoption des marques officielles et une protection accrue des marques de commerce célèbres66. Dans son rapport portant sur le régime de propriété intellectuelle au Canada, le Comité a d’ailleurs recommandé de modifier les dispositions de la LMC ayant trait aux marques officielles67. Ces éléments feront peut-être partie de la prochaine réforme du droit des marques de commerce.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
En cas de violation d’un droit d’auteur, le titulaire du droit est admis, sous réserve des autres dispositions de la présente loi, à exercer tous les recours – en vue notamment d’une injonction, de dommages-intérêts, d’une reddition de compte ou d’une remise – que la loi accorde ou peut accorder pour la violation d’un droit.[ Retour au texte ]
Se dit de la marque de commerce qui distingue véritablement les produits ou services de son propriétaire de ceux d’autres personnes ou qui est en soi capable de le faire.[ Retour au texte ]
Ibid. [ Retour au texte ]
[u]ne demande d’enregistrement d’une marque de commerce qui a été produite avant l’entrée en vigueur du présent article ne peut être rejetée en raison de l’application du paragraphe 50(1).Le nouvel art. 69 de la LMC selon l’art. 51 du projet de loi se lit comme suit :
[l]a divulgation des documents sur lesquels s’appuient les inscriptions figurant dans le registre prévu à l’alinéa 26(1)b), dans sa version à la veille de l’entrée en vigueur du paragraphe 27(1) de la Loi visant à combattre la contrefaçon de produits, est régie par le paragraphe 50(6), dans sa version au 8 juin 1993.[ Retour au texte ]
Michael Geist, « Anti-counterfeiting bill spurs legitimate concerns », Ottawa Citizen, 12 mars 2013.
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