Résumé législatif du projet de loi C-11 : Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (accès des personnes ayant des déficiences perceptuelles aux œuvres ou autres objets du droit d’auteur protégés)

Résumé Législatif
Résumé législatif du projet de loi C-11 : Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (accès des personnes ayant des déficiences perceptuelles aux œuvres ou autres objets du droit d’auteur protégés)
Dara Lithwick, Division des affaires juridiques et sociales
Publication no 42-1-C11-F
PDF 314, (13 Pages) PDF
2016-05-06

1 Contexte

Le projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (accès des personnes ayant des déficiences perceptuelles aux œuvres ou autres objets du droit d’auteur protégés), a été présenté à la Chambre des communes le 24 mars 2016 par le ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique, l’honorable Navdeep Bains1.

Ce projet de loi est presque identique au projet de loi C-65, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (accès des personnes ayant des déficiences perceptuelles aux œuvres ou autres objets du droit d’auteur protégés), qui a été présenté et lu pour la première fois le 8 juin 2015, durant la 2e session de la 41e législature2. Le projet de loi est toutefois mort au Feuilleton lors du déclenchement des élections générales, en août 2015. Le projet de loi C-65 différait du projet de loi C-11 en un seul élément : un titre abrégé figurait à l’article premier du projet de loi C-65.

Le projet de loi C-11 modifie les articles de la Loi sur le droit d’auteur (LDA)3 qui prévoient des exceptions à la législation sur le droit d’auteur pour les personnes ayant une déficience perceptuelle (art. 32, 32.01 et 32.02). Il modifie également l’article de la LDA qui accorde à ces personnes une exception à l’égard des dispositions qui s’appliquent aux mesures techniques de protection (MTP – aussi appelées « verrous numériques » ou « serrures numériques ») (art. 41.16).

Les modifications apportées par le projet de loi sont conçues pour permettre au Canada de ratifier le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées (Traité de Marrakech) de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI)4 en assurant la conformité de la législation canadienne sur le droit d’auteur avec les exigences énoncées dans le traité.

1.1  Traité de Marrakech de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle

Le Traité de Marrakech, adopté à Marrakech (Maroc) le 27 juin 2013, comporte un ensemble d’exceptions obligatoires sur le droit d’auteur adoptées à l’intention des personnes ayant des déficiences perceptuelles (aveugles, déficients visuels et personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés). Le Traité est administré par l’OMPI, un organisme autofinancé des Nations Unies qui est l’instance mondiale pour les politiques en matière de propriété intellectuelle5. Pour que le traité entre en vigueur, 20 parties admissibles doivent le ratifier ou y adhérer (le traité est ouvert aux 188 États membres de l’OMPI6 et à l’Union européenne). Au moment de la rédaction du présent résumé législatif, 16 États avaient ratifié le Traité ou y adhéraient7.

Le Traité comporte 22 articles en plus d’un préambule. L’article premier précise qu’aucune disposition du Traité n’emporte dérogation aux obligations qu’ont les Parties contractantes en vertu de tout autre traité.

L’article 2 contient les définitions utilisées dans le Traité8, alors que l’article 3 précise qui sont les « personnes bénéficiaires » au sens du Traité : les personnes aveugles, les personnes atteintes d’une déficience visuelle, d’une déficience de perception ou de difficultés de lecture, ou qui sont incapables de tenir ou de manipuler un livre ou de fixer les yeux ou de les faire bouger au point de permettre en principe la lecture.

L’article 4 énonce les limitations et exceptions que doivent inclure les Parties contractantes dans leur législation sur le droit d’auteur pour que des œuvres en format accessible soient plus facilement mises à la disposition des personnes bénéficiaires. Selon le paragraphe 4 de l’article 4 :

Les Parties contractantes peuvent limiter les limitations ou exceptions prévues par le présent article aux œuvres qui ne peuvent pas être obtenues dans le format accessible considéré dans le commerce à des conditions raisonnables pour les personnes bénéficiaires sur le marché. Toute Partie contractante qui fait usage de cette faculté le déclare dans une notification déposée auprès du Directeur général de l’OMPI au moment de la ratification ou de l’acceptation du présent traité ou de l’adhésion à ce dernier ou à tout autre moment9.

D’ailleurs, lorsque l’Australie a ratifié le Traité en décembre 2015, elle a prévu la déclaration suivante dans son instrument de ratification :

Conformément au paragraphe 4 de l’article 4, les limitations et exceptions s’appliquant aux entités autorisées telles que définies à l’article (2c), prévues dans la loi australienne de droit d’auteur conformément au paragraphe 1 de l’article 4, sont limitées, pour l’Australie, aux œuvres qui ne peuvent pas être obtenues dans le commerce dans le format accessible considéré à des conditions raisonnables pour les personnes bénéficiaires10.

L’article 5 définit les paramètres qui s’appliquent à l’échange transfrontière d’exemplaires en format accessible, alors que l’article 6 précise dans quels cas il est possible d’importer des exemplaires en format accessible des œuvres. L’article 9 établit un point d’accès à l’information par l’intermédiaire du Bureau international de l’OMPI pour faciliter les échanges transfrontières d’exemplaires en format accessible.

L’article 7 précise que les dispositions législatives sur le droit d’auteur empêchant la neutralisation des MTP ne devraient pas empêcher les personnes ayant des déficiences perceptuelles de pouvoir jouir des dispositions du Traité.

L’article 8 prévoit des dispositions sur le respect de la vie privée des personnes bénéficiaires, et précise que les Parties contractantes doivent, dans la mise en œuvre des limitations et exceptions prévues dans le Traité, « s’efforcer de protéger la vie privée des personnes bénéficiaires sur un pied d’égalité avec toute autre personne ».

L’article 10 énonce les principes généraux de mise en œuvre du traité.

L’article 11 précise que les Parties contractantes, lorsqu’elles adoptent les mesures nécessaires pour appliquer le Traité, doivent continuer de respecter le test en trois étapes prévu dans plusieurs traités internationaux sur la propriété intellectuelle, qui impose aux signataires des traités des contraintes en ce qui concerne les éventuelles limitations des droits exclusifs ou les exceptions à ces droits en vertu des lois nationales sur le droit d’auteur. Les limitations des droits exclusifs et les exceptions à ces droits doivent se restreindre à « certains cas spéciaux » (première étape) et ne doivent pas « porter atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre » (deuxième étape) ni « causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du titulaire du droit » (troisième étape)11. D’autre part, l’article 12 précise que le Traité n’empêche pas les Parties contractantes de prévoir d’autres limitations et exceptions en matière de droit d’auteur au profit des personnes ayant une déficience perceptuelle.

Les articles 13 à 22 portent sur les éléments administratifs et logistiques, dont les conditions pour devenir partie au Traité, l’entrée en vigueur (trois mois après que 20 parties admissibles ont déposé leur instrument de ratification ou d’adhésion conformément à l’art. 18) et les langues du Traité.

1.2  Réforme du droit d’auteur et personnes ayant une déficience perceptuelle au Canada

En 2012, le gouvernement fédéral a adopté une mesure législative instituant une réforme importante du droit d’auteur, la Loi sur la modernisation du droit d’auteur (LMDA)12. Comme l’énonce le sommaire de cette loi, les modifications visaient à :

  1. mettre à jour les droits et les mesures de protection dont bénéficient les titulaires du droit d’auteur, en conformité avec les normes internationales, afin de mieux tenir compte des défis et des possibilités créés par Internet;
  2. clarifier la responsabilité des fournisseurs de services Internet et ériger en violation du droit d’auteur le fait de faciliter la commission de telles violations en ligne;
  3. permettre aux entreprises, aux enseignants et aux bibliothèques de faire un plus grand usage de matériel protégé par le droit d’auteur sous forme numérique;
  4. permettre aux enseignants et aux élèves de faire un plus grand usage de matériel protégé par le droit d’auteur;
  5. permettre aux consommateurs de faire certains usages de matériel protégé par le droit d’auteur;
  6. conférer aux photographes des droits égaux à ceux conférés aux autres créateurs;
  7. éliminer la spécificité technologique des dispositions de la [Loi sur le droit d’auteur];
  8. prévoir un examen quinquennal de la [Loi sur le droit d’auteur] par les parlementaires.

La LMDA a ajouté pour les personnes ayant une déficience perceptuelle des exceptions, dont certaines font maintenant l’objet d’autres modifications afin que puisse être ratifié le Traité de Marrakech. La LMDA a instauré une exception pour les organismes sans but lucratif agissant dans l’intérêt des personnes ayant une déficience de lecture des imprimés (ce libellé est plus circonscrit que celui du Traité de Marrakech) afin qu’ils puissent reproduire une œuvre sur un support destiné à ces personnes et envoyer la reproduction à des organismes similaires dans d’autres pays, à condition que l’auteur de l’œuvre adaptée soit un citoyen canadien ou un ressortissant du pays de destination (art. 32.01 de la LDA). L’injonction est le seul recours qui peut être exercé contre un organisme sans but lucratif qui commettrait une erreur de bonne foi sur la nationalité de l’auteur.

De plus, la LMDA ajoutait des dispositions interdisant le contournement des MTP (art. 41 et suivants de la LDA), mais leur adjoignait un certain nombre d’exceptions. L’une d’elles permet notamment à une personne ayant une déficience perceptuelle, ou à un particulier (ou encore à un organisme sans but lucratif) agissant au nom de cette personne, de contourner une MTP « dans le seul but » de rendre perceptible l’œuvre ou autre objet du droit d’auteur à la personne ayant la déficience perceptuelle (art. 41.16 de la LDA).

Dans le cadre de l’étude du projet de loi C-32 – un projet de loi antérieur au projet de loi C-11 – qui a eu lieu au cours de la 40e législature, l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) a remis en question l’applicabilité des exceptions ajoutées pour les personnes ayant une déficience perceptuelle, particulièrement celles concernant l’exportation et le contournement des MTP13.

2  Description et analyse

La section qui suit résume certaines dispositions du projet de loi C-11, qui sont présentées en suivant la structure de la LDA. Le projet de loi comporte quatre articles, qui modifient les articles 32, 32.01, 32.02 et 41.16 de la LDA.

2.1  Reproduction d’œuvres pour les personnes ayant une déficience perceptuelle (art. 1 du projet de loi; art. 32 de la LDA)

L’article premier du projet de loi apporte un certain nombre de modifications à l’article 32 de la LDA, qui régit la reproduction d’œuvres et d’autres objets du droit d’auteur sur d’autres supports pouvant servir aux personnes ayant une déficience perceptuelle. Il semble que cet article ait pour but de mettre en œuvre l’article 4 du Traité de Marrakech, lequel établit les limitations et les exceptions que les Parties contractantes doivent incorporer dans leur législation sur le droit d’auteur pour mettre plus facilement des œuvres en format accessible à la disposition des personnes ayant une déficience perceptuelle.

Le paragraphe 1(1) du projet de loi modifie le libellé français du passage introductif du paragraphe 32(1) de la LDA afin qu’il corresponde de plus près au libellé anglais (en remplaçant « de se livrer à l’une des activités suivantes » par « d’accomplir l’un des actes suivants »).

Le paragraphe 1(2) du projet de loi remplace l’alinéa 32(1)a) de la LDA par les nouveaux alinéas 32(1)a), 32(1)a.1) et 32(1)a.2), afin d’autoriser la reproduction et la fixation d’une œuvre littéraire, dramatique (sauf cinématographique), musicale ou artistique, d’une prestation ou de l’enregistrement sonore de telles œuvres sur un support pouvant servir aux personnes ayant une déficience perceptuelle. L’alinéa 32(1)a) actuel n’autorise que la production d’un exemplaire ou d’un enre-gistrement sonore de ces œuvres – il ne prévoit pas la reproduction et la fixation et ne fait pas non plus mention de la prestation d’une œuvre.

Le paragraphe 1(3) du projet de loi ajoute le nouvel alinéa 32(1)b.1) à la LDA afin de préciser que ne constitue pas une violation du droit d’auteur le fait de fournir, à toute personne ayant une déficience perceptuelle, une œuvre ou tout autre objet du droit d’auteur mentionnés aux alinéas 32(1)a) et 32(1)b) – ou le fait de lui donner accès à une telle œuvre ou à un tel objet – sur un support pouvant servir aux personnes ayant une déficience perceptuelle. Le nouvel alinéa précise également que ne constitue pas non plus une violation du droit d’auteur l’accomplissement de tout autre acte nécessaire pour ce faire.

Le paragraphe 1(4) du projet de loi modifie le libellé français de l’alinéa 32(1)c) afin qu’il corresponde de plus près au libellé anglais (en remplaçant « ou l’exécution en public d’une telle œuvre fixée » par « soit en direct soit » pour rendre : « perform in public a literary or dramatic work, other than a cinematographic work, in sign language, either live or in a format specially designed for persons with a perceptual disability » [ITALIQUE AJOUTÉ PAR L’AUTEURE]).

Le paragraphe 1(5) remplace le paragraphe 32(2) de la LDA (qui ne permet pas la production d’un livre imprimé en gros caractères) et le paragraphe 32(3) (qui limite l’exception applicable à la reproduction sur d’autres supports à des situations où l’œuvre ou autre objet du droit d’auteur n’est pas déjà accessible sur le marché sur le support nécessaire) par le nouveau paragraphe 32(2), qui est une version légèrement modifiée du paragraphe 32(3) actuel. En conservant, dans le nouveau paragraphe 32(2), la limitation relative à ce qui est déjà accessible sur le marché, le gouvernement semble suivre la disposition du paragraphe 4 du Traité de Marrakech selon laquelle, dans les cas où une Partie contractante limite les limitations ou exceptions prévues par l’article 4 aux œuvres qui ne peuvent être obtenues dans le commerce, la Partie contractante doit le déclarer dans « une notification déposée auprès du Directeur général de l’OMPI au moment de la ratification ou de l’acceptation du présent traité ou de l’adhésion à ce dernier ou à tout autre moment ».

2.2  Régime d’exportation des œuvres créées pour les personnes ayant une déficience perceptuelle (art. 2 du projet de loi; art. 32.01 de la LDA)

L’article 2 du projet de loi modifie l’article 32.01 de la LDA, qui établit le régime d’exportation s’appliquant à la reproduction des œuvres et autres objets du droit d’auteur créés pour les personnes ayant une déficience perceptuelle. Il semble que l’objet de cet article soit de mettre en œuvre l’article 5 du Traité de Marrakech, qui définit les paramètres de l’échange transfrontière d’exemplaires en format accessible des œuvres et autres objets du droit d’auteur.

Le paragraphe 2(1) remplace les paragraphes 32.01(1) à 32.01(4) de la LDA. Selon le nouveau paragraphe 32.01(1), ne constitue pas une violation du droit d’auteur pour des organismes sans but lucratif agissant dans l’intérêt des personnes ayant une déficience de lecture des imprimés le fait de reproduire une œuvre littéraire, dramatique (sauf cinématographique), musicale ou artistique, de fixer la prestation d’une telle œuvre ou de reproduire un enregistrement sonore d’une telle œuvre, sur un support pouvant servir à ces personnes. Ces organismes sans but lucratif peuvent également fournir à des organismes sans but lucratif étrangers (agissant dans l’intérêt des personnes ayant une déficience de lecture des imprimés) ou à des personnes dans un pays étranger ayant une déficience de lecture des imprimés l’accès à des œuvres ou autres objets du droit d’auteur susmentionnés ou à leurs exemplaires.

Le nouveau paragraphe 32.01(2) précise cependant que les organismes sans but lucratif ne peuvent donner accès à ces œuvres ou autres objets du droit d’auteur à des organismes ou à des particuliers dans des pays où il est déjà possible de se les procurer sur le support pouvant servir aux personnes ayant une déficience perceptuelle, à un prix et dans un délai raisonnables, et où il est possible de les trouver moyennant des efforts raisonnables.

Le nouveau paragraphe 32.01(3) précise que l’injonction constitue le seul recours que le titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre ou l’autre objet du droit d’auteur faisant l’objet de la reproduction peut exercer contre un organisme sans but lucratif qui invoque l’exception prévue à l’article 32.01, dans le cas où le pays étranger où est envoyée la reproduction est partie au Traité de Marrakech et où l’organisme commet une violation du droit d’auteur uniquement parce qu’il est possible de se procurer l’œuvre ou l’autre objet du droit d’auteur sur un support perceptible dans ce pays.

Le nouveau paragraphe 32.01(3.1) précise que, dans le cas où le pays étranger où l’œuvre reproduite est envoyée n’est pas partie au Traité de Marrakech, l’injonction est le seul recours que le titulaire du droit d’auteur sur l’œuvre ou l’autre objet du droit d’auteur reproduit peut exercer contre un organisme sans but lucratif qui invoque l’exception prévue à l’article 32.01 si les conditions énoncées dans le nouveau paragraphe 32.01(3) sont respectées et que l’organisme sans but lucratif peut établir qu’il avait des motifs raisonnables de croire qu’il n’était pas possible de se procurer l’œuvre ou l’autre objet du droit d’auteur dans ce pays.

Le nouveau paragraphe 32.01(4) précise que l’organisme sans but lucratif qui invoque l’exception prévue au paragraphe 32.01(1) verse les redevances réglementaires au titulaire du droit d’auteur conformément aux règlements.

Le paragraphe 2(2) du projet de loi modifie le paragraphe 32.01(6) de la LDA, qui traite de l’obligation qu’a l’organisme sans but lucratif de faire rapport sur ses activités dans le cadre du présent article, par l’ajout de « sans but lucratif » après « organisme » afin de refléter l’exception prévue au paragraphe 32.01(1).

Le paragraphe 32.01(7) précise les règlements que peut prendre le gouverneur en conseil concernant l’envoi à l’étranger de la reproduction d’une œuvre ou d’un autre objet du droit d’auteur sur un support pouvant servir aux personnes ayant une déficience perceptuelle. Le paragraphe 2(3) du projet de loi modifie le libellé de l’alinéa 32.01(7)a) de façon à ce qu’il reflète les modifications apportées ailleurs dans cet article, mais en conserve le fond : il permet la prise de règlements exigeant que les organismes sans but lucratif canadiens qui envoient à l’étranger des reproductions des œuvres ou autres objets du droit d’auteur sur un support pouvant servir aux personnes ayant une déficience perceptuelle concluent un contrat avec les organismes sans but lucratif destinataires.

Le paragraphe 2(4) du projet de loi modifie l’alinéa 32.01(7)d) afin que ce dernier dispose que le gouverneur en conseil peut prendre des règlements concernant le versement de redevances à une société de gestion dans le cas où le titulaire du droit d’auteur sur une œuvre ou sur un autre objet du droit d’auteur est introuvable. Le libellé actuel de l’alinéa 32.01(7)d) ne fait mention que des « œuvres » ou des « catégories d’œuvres » sans parler des « autres objets du droit d’auteur » (lesquels peuvent inclure les prestations et les enregistrements sonores).

Le paragraphe 2(5) du projet de loi ajoute la définition de « pays partie au Traité de Marrakech » au paragraphe 32.01(8) de la LDA, et ajoute le mot « artistique » à la définition de « déficience de lecture des imprimés » : « Déficience qui empêche la lecture d’une œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique sur le support original ou la rend difficile ».

2.3  Organisme sans but lucratif (art. 3 du projet de loi; art. 32.02 de la LDA)

L’article 3 du projet de loi ajoute le nouvel article 32.02 à la LDA. Cet article précise que, pour l’application des articles 32 et 32.01 de la LDA, un organisme sans but lucratif « s’entend notamment d’un ministère, d’un organisme ou d’un autre secteur de tout ordre de gouvernement – y compris une administration municipale ou locale –, lorsqu’il agit sans but lucratif ».

2.4  Contournement des mesures techniques de protection (art. 4 du projet de loi; art. 41.16 de la LDA)

Les articles 41 à 41.22 de la LDA (ajoutés en 2012) renferment des dispositions interdisant le contournement des MTP, qui sont des technologies, des dispositifs ou des composants qui contrôlent efficacement l’accès à une œuvre ou la possibilité de copier une œuvre. Les articles 41.11 à 41.18 de la LDA prévoient plusieurs exceptions à l’interdiction de contourner les MTP. L’article 41.16 en particulier prévoit une exception permettant le contournement d’une MTP « dans le seul but de rendre perceptible l’œuvre, la prestation fixée au moyen d’un enregistrement sonore ou l’enregistrement sonore protégé par la mesure » aux personnes ayant une déficience perceptuelle.

L’article 4 du projet de loi ajoute à ce motif unique les deux suivants, de façon à ce que le paragraphe 41.16(1) de la LDA autorise aussi, dans l’intérêt des personnes ayant une déficience perceptuelle, le contournement d’une MTP :

  • pour permettre à une personne ou à un organisme sans but lucratif de bénéficier de l’exception prévue à l’article 32 de la LDA (qui régit la reproduction des œuvres et autres objets du droit d’auteur sur d’autres supports pouvant servir aux personnes ayant une déficience perceptuelle);
  • pour permettre à un organisme sans but lucratif de bénéficier de l’exception prévue à l’article 32.01 de la LDA (qui établit le régime d’exportation relatif aux reproductions d’œuvres et autres objets du droit d’auteur créés pour les personnes ayant une déficience perceptuelle).

L’article 4 modifie également le paragraphe 41.16(2), selon lequel les interdictions visant la distribution et la mise en marché de dispositifs, tels que les logiciels, pouvant servir à contourner des MTP ne s’appliquent pas à la fourniture de services aux personnes ou aux organismes sans but lucratif visés au paragraphe 41.16(1) ni aux personnes qui fabriquent, importent ou fournissent une technologie dans le seul but de permettre aux personnes ou aux organismes sans but lucratif visés au paragraphe 41.16(1) de contourner une MTP.

3  Commentaire

Le 24 mars 2016, date à laquelle le projet de loi C-11 a été présenté et a franchi l’étape de la première lecture à la Chambre des communes, l’INCA a publié un communiqué dans lequel il exprime son appui aux efforts de ratification du Traité de Marrakech. Dans ce communiqué, John Rafferty, président et chef de la direction de l’INCA, déclare : « La présentation du projet de loi C-11 annoncée aujourd’hui constitue un pas important dans l’intérêt des personnes que nous servons14 ». L’INCA est le principal producteur de documents en médias accessibles au Canada.


Notes

*  Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur.Retour au texte ]

  1. Projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (accès des personnes ayant des déficiences perceptuelles aux œuvres ou autres objets du droit d’auteur protégés), 1re session, 42e législature. [ Retour au texte ]
  2. Projet de loi C-65, Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur (accès des personnes ayant des déficiences perceptuelles aux œuvres ou autres objets du droit d’auteur protégés), 2e session, 41e législature. [ Retour au texte ]
  3. Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42. [ Retour au texte ]
  4. Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées (Traité de Marrakech), 27 juin 2013. [ Retour au texte ]
  5. OMPI, « Qu’est-ce que l’OMPI? », Au sein de l’OMPI. [ Retour au texte ]
  6. OMPI, États membres. [ Retour au texte ]
  7. OMPI, « Parties contractantes : Traité de Marrakech (Ce traité n’est pas encore entré en vigueur) », Traités administrés par l’OMPI, consulté le 2 mai 2016. [ Retour au texte ]
  8. Selon l’art. 2 du Traité de Marrakech, celui-ci s’applique aux « œuvres » :
    littéraires et artistiques au sens de l’article 2.1) de la Convention de Berne Convention […] sous la forme de texte, de notations ou d’illustrations y relatives, qu’elles soient publiées ou mises d’une autre manière à la disposition du public sur quelque support que ce soit.
    La Convention de Berne fixe les normes minimales de protection des auteurs d’œuvres littéraires, dramatiques, musicales et artistiques. Elle définit aussi la portée et la durée de la protection : voir OMPI, Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, 1886, dans sa forme modifiée (Convention de Berne). Le Canada a adhéré à la Convention de Berne le 10 avril 1928 et à la révision de 1971, le 28 septembre 1998. [ Retour au texte ]
  9. OMPI, Traité de Marrakech, art. 4, par. 4. [ Retour au texte ]
  10. OMPI, « Ratification par l’Australie », Notification Marrakech nº 12 : Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées, 10 décembre 2015. [ Retour au texte ]
  11. Le test en trois étapes a été ajouté pour la première fois sous la forme du par. 9(2) de la Convention de Berne en 1967. Des variantes du test en trois étapes sont énoncées à l’art. 13 de l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce de l’Organisation mondiale du commerce; à l’art. 10 du Traité de l’OMPI sur le droit d’auteur, et à l’art. 16 du Traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes. [ Retour au texte ]
  12. Loi sur la modernisation du droit d’auteur, L.C. 2012, ch. 20. [ Retour au texte ]
  13. Chambre des communes, Comité législatif sur le projet de loi C-32, Témoignages, 3e session, 40e législature, 24 mars 2011, 1215 (Mme Cathy Moore, directrice nationale, Relations avec les consommateurs et le gouvernement, Institut national canadien pour les aveugles [INCA]). Voir également INCA, Mémoire sur le projet de loi C-32 : Loi modifiant la Loi sur le droit d’auteur et la Bibliothèque de l’Institut national canadien pour les aveugles (INCA) présenté au Comité législatif chargé du projet de loi C-32 pdf (210 ko, 6 pages), 18 mars 2011. [ Retour au texte ]
  14. INCA, CNIB applauds Government of Canada’s push to ratify Marrakesh Treaty, communiqué, 24 mars 2016 [TRADUCTION]. [ Retour au texte ]

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