Dans ce résumé législatif, tout changement d’importance depuis la dernière publication est indiqué en caractères gras.
Le 28 novembre 2017, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, l’honorable Ralph Goodale, a présenté à la Chambre des communes le projet de loi C‑66, Loi établissant une procédure de radiation de certaines condamnations constituant des injustices historiques et apportant des modifications connexes à d’autres lois (titre abrégé : « Loi sur la radiation de condamnations constituant des injustices historiques ») 1. Le projet de loi a passé l’étape de la deuxième lecture le 8 décembre 2017 et a été renvoyé au Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes (le Comité de la Chambre des communes). Le projet de loi a fait l’objet d’un rapport sans amendement le 12 décembre 2017 et a été adopté en troisième lecture à la Chambre le 13 décembre 2017. Il a été déposé le lendemain en première lecture au Sénat, puis a passé l’étape de la deuxième lecture le 27 mars 2018. Il a été renvoyé le même jour pour étude au Comité sénatorial permanent des droits de la personne (le Comité sénatorial). Le Comité sénatorial a fait rapport du projet de loi sans amendement, mais y a ajouté des observations 2. Le projet de loi a reçu la sanction royale le 21 juin 2018.
Le projet de loi prévoit une procédure permettant la radiation, dans certaines circonstances, de condamnations à l’égard des infractions énumérées à son annexe qui visent la grossière indécence, la sodomie et les relations sexuelles anales.
Le projet de loi confère ainsi à la Commission des libérations conditionnelles du Canada (la Commission) le pouvoir d’ordonner ou de refuser, selon certains critères, la radiation de condamnations prononcées pour des infractions visées à l’annexe du projet de loi. Une ordonnance de radiation de la Commission fait en sorte qu’une personne visée par la condamnation est réputée n’avoir jamais été condamnée pour cette infraction.
En outre, le projet de loi oblige la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et d’autres ministères et organismes fédéraux à détruire ou à supprimer tout dossier judiciaire relatif aux condamnations qui font l’objet d’une ordonnance de radiation.
Enfin, le projet de loi confère au gouverneur en conseil le pouvoir d’ajouter certaines infractions à l’annexe, dans certaines circonstances, et de prévoir les critères qui doivent être remplis pour la délivrance d’une ordonnance de radiation.
Le projet de loi C‑66 a été déposé dans le contexte des excuses présentées au nom du gouvernement du Canada aux communautés lesbienne, gaie, bisexuelle, transgenre, queer et bispirituelle (LGBTQ2) 3, qui ont subi de nombreuses injustices historiques et des préjudices, en raison, notamment, de la discrimination et de l’oppression à leur égard. D’ailleurs, le rapport de l’organisme Egale Canada Human Rights Trust, intitulé Grossly Indecent : The Just Society Report – Confronting the Legacy of State Sponsored Discrimination Against Canada’s LGBTQI2S Communities 4, qui a éclairé le gouvernement dans l’élaboration des objectifs du projet de loi 5, indique que
le Canada n’a pas toujours agi comme il aurait dû en ce qui concerne la réglementation visant les homosexuels, les bisexuels, les transgenres et les intersexués, basée sur l’application de normes fondées sur le sexe et le genre, ainsi que sur une discrimination injuste appuyée par le droit criminel 6.
Le rapport ajoute que « le droit criminel a été et continue d’être au cœur de cette oppression 7 ». Effectivement, les communautés LGBTQ2 ont longtemps été la cible du droit criminel, en raison de l’adoption d’infractions qui les visaient expressément, telles que les infractions de grossière indécence, de sodomie et de relations sexuelles anales.
Le 28 novembre 2017, le même jour que le dépôt du projet de loi C‑66, le premier ministre Justin Trudeau a reconnu le « rôle qu’a joué le Canada dans l’oppression, la criminalisation et la violence systémique à l’endroit des communautés lesbienne, gaie, bisexuelle, transgenre, queer et bispirituelle 8 » et a présenté des excuses officielles devant la Chambre des communes aux personnes ayant subi un préjudice.
Il a indiqué qu’il « n’y a pas si longtemps, l’État a orchestré une culture de stigmatisation et de peur autour des communautés LGBTQ2 et a ainsi détruit des vies 9 ». Il a expliqué le rôle que l’État a joué en ce sens et a précisé en quoi consistait la « Purge », notamment, dans la fonction publique :
Des années 1950 au début des années 1990, le gouvernement a exercé son pouvoir de manière cruelle et injuste, en entreprenant une campagne d’oppression contre les membres avérés ou soupçonnés des communautés LGBTQ2. L’objectif consistait à identifier ces travailleurs à travers l’ensemble de la fonction publique, y compris ceux du service extérieur, les militaires et la GRC, puis à les persécuter. À l’époque, on pensait que les Canadiens qui n’étaient pas hétérosexuels représentaient automatiquement un risque élevé pour notre sécurité puisqu’ils pouvaient être soumis à du chantage par nos adversaires, en raison de ce qu’on appelait une « faiblesse de caractère ». Cette mentalité était sans fondement et empreinte de préjugés.
[…]
Lorsque le gouvernement croyait avoir accumulé assez de preuves, certains suspects étaient amenés dans des endroits secrets, la nuit, pour être interrogés. On leur posait des questions envahissantes au sujet de leurs relations et de leurs préférences sexuelles. Branchés à des polygraphes, ces fonctionnaires respectueux de la loi devaient révéler les détails les plus intimes de leur vie.
Des femmes et des hommes étaient mal traités par leurs supérieurs. On sondait leur vie sexuelle en leur posant des questions dégradantes. Certains subissaient des agressions sexuelles.
Ceux qui admettaient être gais étaient congédiés, démis de leurs fonctions ou intimidés jusqu’à ce qu’ils démissionnent. Ils perdaient leur dignité et leur carrière. Leurs rêves et leur vie s’effondraient 10.
C’est dans ce contexte que le projet de loi C‑66 a été déposé.
Le préambule du projet de loi C‑66 spécifie que l’injustice historique occasionnée par la criminalisation de certaines activités (pour l’instant, celles énoncées à l’annexe du projet de loi) est maintenant reconnue. Le préambule précise également que l’une des raisons pour lesquelles la criminalisation de certaines activités peut constituer une injustice historique est que celle ci serait incompatible, de nos jours, avec la Charte canadienne des droits et libertés.
Lors de l’étude du projet de loi par le Comité de la Chambre des communes, il a été mentionné que le préambule vise des activités considérées comme des injustices historiques, ce qui pourrait inclure, dans le futur, des activités qui ne sont pas liées à la communauté LGBTQ2 11. D’ailleurs, le projet de loi permet l’ajout d’infractions à l’annexe.
L’annexe du projet de loi énumère différentes infractions pour lesquelles la radiation de la condamnation peut être ordonnée. Les principales infractions visées sont les infractions reliées à la grossière indécence, à la sodomie, aux relations sexuelles anales et aux infractions similaires prévues dans la Loi sur la défense nationale 12 (LDN) ou toute version antérieure de celle ci.
Lors de l’étude du projet de loi par le Comité de la Chambre des communes, il a été mentionné que la GRC compte actuellement plus de 9 000 dossiers de condamnations concernant ces infractions 13.
Dans son rapport, le Comité sénatorial demande, entre autres, que le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile lance « des consultations avec les intervenants et les experts en la matière afin d’examiner d’autres dispositions du Code criminel qui ont été appliquées de façon discriminatoire à l’endroit de la communauté LGBTQ2 14 » dès que le projet de loi aura reçu la sanction royale et donne plusieurs exemples de ces dispositions.
De plus, il demande que le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile élargisse l’annexe, « afin de corriger entièrement les torts mentionnés dans les excuses présentées par le premier ministre aux Canadiens de la communauté LGBTQ2 15 ».
L’article 1 de l’annexe du projet de loi vise l’infraction de grossière indécence ou de tentative de grossière indécence et inclut les diverses versions ayant figuré dans le Code criminel (le Code) 16 au fil des ans. Le libellé des dispositions ayant prévu ces infractions figure au tableau A.1 à l’annexe A du présent résumé législatif.
L’infraction de grossière indécence a été créée en 1885 par le droit criminel anglais et « avait expressément pour objectif d’interdire toute une série de comportements homosexuels masculins 17 ». Plus précisément, cette infraction « visait à “corriger” une lacune de la common law, qui ne criminalisait pas les actes homosexuels masculins comme la fellation et la masturbation mutuelle 18 ».
L’infraction de grossière indécence était incluse dans le premier Code criminel du Canada de 1892. La version de 1892 de cette infraction visait les actes de grossière indécence commis spécifiquement entre hommes. Cette infraction n’existe plus aujourd’hui, celle ci ayant été abrogée en 1988.
En 1955, le Code criminel a été modifié de manière à ce que l’infraction de grossière indécence ne vise plus uniquement les hommes. Ainsi, cette infraction pouvait alors viser des actes commis entre personnes hétérosexuelles et entre personnes lesbiennes 19.
En 1968, le Code criminel a été modifié afin d’ajouter des exceptions à l’infraction de grossière indécence. À partir de ce moment, une personne ne pouvait être reconnue coupable de grossière indécence pour un acte commis, dans l’intimité, entre un homme et une femme mariés qui consentent tous les deux à l’acte ou entre deux personnes âgées chacune de 21 ans ou plus qui consentent à l’acte.
Le Code ne définissait pas en quoi consistait la grossière indécence. Selon la jurisprudence, le critère applicable était le suivant : un acte de grossière indécence constitue un « écart marqué par rapport à la conduite décente que l’on peut attendre du Canadien moyen 20 ». Bien que des personnes aient été reconnues coupables de l’infraction de grossière indécence pour des actes commis entre hétérosexuels, la grossière indécence a été interprétée principalement de manière à s’appliquer à des actes homosexuels 21. La notion de grossière indécence a évolué avec le temps, en fonction des mœurs de la société. Ainsi, même si certains actes ont pu être considérés comme de la grossière indécence pendant une certaine période par les tribunaux, il est possible que ces mêmes actes ne l’aient plus été quelques années plus tard 22.
Finalement, veuillez noter que la peine d’emprisonnement maximale prévue pour l’infraction de grossière indécence a été maintenue à cinq ans, et ce, de son édiction jusqu’à son abrogation.
Les articles 2 à 4 de l’annexe du projet de loi visent les diverses dispositions du Code ayant établi les infractions de sodomie et de tentative de sodomie au fil des ans 23. Le tableau B.1 à l’annexe B du présent résumé législatif renferme le libellé des dispositions ayant porté sur ces infractions.
Le Code criminel de 1892 comprenait une infraction concernant la sodomie. Celle ci précède l’inclusion dans le Code de l’infraction actuelle concernant les relations sexuelles anales. À ce moment, le libellé de l’infraction de sodomie incluait également l’infraction de bestialité. La peine maximale prévue pour l’infraction de sodomie était la prison à vie.
En 1955, la peine maximale prévue dans le Code criminel pour l’infraction de sodomie est passée à 14 ans de prison.
En 1968, le gouvernement a modifié le Code criminel de manière à ajouter des exceptions à l’infraction de sodomie. À partir de ce moment, une personne ne pouvait être trouvée coupable de sodomie si l’acte était commis, dans l’intimité, entre un homme et une femme mariés qui consentent à l’acte ou entre deux personnes âgées chacune de 21 ans ou plus qui consentent à l’acte.
En 1988, l’infraction de sodomie a été renommée « relations sexuelles anales ». De plus, l’âge de consentement pour cette infraction est passé de 21 ans à 18 ans 24.
L’article 5 de l’annexe du projet de loi vise l’infraction de relations sexuelles anales, ou de tentative en vue de la commettre, visée par l’article 159 du Code criminel 25. Le libellé de cette infraction est reproduit au tableau C.1 à l’annexe C du présent résumé législatif.
La peine maximale d’emprisonnement prévue pour l’infraction de relations sexuelles anales est de 10 ans. L’infraction de relations sexuelles anales ne s’applique pas aux actes commis dans l’intimité par des époux ou par deux personnes âgées d’au moins 18 ans lorsque les deux personnes qui prennent part à l’acte y consentent.
L’article 159 du Code a été déclaré inconstitutionnel plusieurs fois par différentes cours d’appel au Canada, étant donné que le traitement accordé aux relations sexuelles anales consensuelles dans le Code diffère du traitement réservé aux autres formes d’activités sexuelles qui sont également consensuelles 26. Plus précisément :
Quatre cours d’appel et deux cours de première instance ont jugé que l’article 159 du Codecriminel brime les droits à l’égalité garantis par l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés selon l’état civil, l’âge et l’orientation sexuelle 27.
Or, trois projets de loi déposés au cours de la 1re session de la 42e législature visent l’abrogation de l’article 159 du Code :
abroge[r] l’article 159 afin que les relations sexuelles anales soient désormais traitées comme tout autre type d’activité sexuelle, y compris en ce qui concerne l’âge de consentement. Les relations sexuelles anales non librement consenties pourraient encore faire l’objet d’autres accusations, telles que celles d’agression sexuelle (art. 271 à 273 du Code) 29.
L’article 6 de l’annexe du projet de loi vise les infractions prévues dans la LDN ou toute version antérieure de celle ci, qui constituent une infraction visée par l’un des articles 1 à 5 de l’annexe, soit des infractions reliées à la grossière indécence, à la sodomie ou aux relations sexuelles anales.
Le système de justice militaire est distinct du système civil de justice pénale. Le Code de discipline militaire (CDM) prévu à la partie III de la LDN constitue le fondement législatif du système de justice militaire. Notamment, le CDM détermine les personnes qui y sont assujetties et incorpore au droit militaire toutes les infractions énoncées dans le Code criminel ou toute autre loi fédérale. En fait, l’article 2 de la LDN définit le terme « infraction d’ordre militaire » comme une infraction – à la Loi sur la défense nationale, au Code ou à une autre loi fédérale – passible de la discipline militaire.
Ainsi, les individus ayant été condamnés en vertu du système de justice militaire prévu par la LDN pour des infractions semblables à celles visées aux articles 1 à 5 de l’annexe du projet de loi pourront faire une demande de délivrance d’une ordonnance de radiation à la Commission.
L’article 23 du projet de loi prévoit que le gouverneur en conseil peut, par décret, ajouter à l’annexe un article ou partie d’article prévoyant une infraction dans le but de permettre la radiation de condamnations pour des infractions qui découlent d’une activité, si les deux conditions suivantes sont remplies :
Lors de l’étude du projet de loi par le Comité de la Chambre des communes, il a été mentionné que le projet de loi ne permet pas au gouverneur en conseil d’enlever une infraction déjà inscrite à l’annexe 34.
L’article 3 du projet de loi confère à la Commission des libérations conditionnelles du Canada le pouvoir d’ordonner ou de refuser la radiation d’une condamnation pour l’une des infractions mentionnées à l’annexe, conformément aux exigences prévues dans le projet de loi.
La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition 35 établit la Commission, qui constitue un tribunal administratif indépendant relevant du portefeuille de la Sécurité publique. La Commission prend des décisions sur la mise en liberté sous condition et la suspension du casier et formule des recommandations en matière de clémence.
Les attributions conférées par le projet de loi à la Commission peuvent être délégués à tout membre ou catégorie de membre de son personnel, sous réserve de l’approbation de son président, qui est le dirigeant la Commission (art. 4 du projet de loi).
L’article 7 du projet de loi désigne les personnes suivantes comme étant autorisées à demander une délivrance d’ordonnance de radiation à la Commission :
La Commission doit refuser toute demande lorsque le demandeur n’est pas autorisé à présenter la demande (par. 9(1) du projet de loi). Une autre exigence prévue à ce paragraphe énonce que toute demande de délivrance d’ordonnance de radiation qui ne concerne pas une infraction inscrite à l’annexe doit être rejetée par la Commission.
La Commission a également le pouvoir d’enquêter afin de déterminer si le demandeur est autorisé à présenter la demande (al. 11a) du projet de loi).
Les modalités de présentation d’une demande de délivrance d’ordonnance sont prévues à l’article 8 du projet de loi. De manière générale, la demande doit être présentée à la Commission selon les modalités prévues par elle et conformément aux paragraphes 8(2) et 8(3) du projet de loi.
Le paragraphe 8(2) du projet de loi spécifie que toute demande qui concerne une infraction pour laquelle il y a des critères à remplir, soit ceux prévus à l’article 25 du projet de loi ou par décret, « doit comprendre des documents qui fournissent des éléments de preuve à cette fin ».
D’abord, l’article 24 du projet de loi confère au gouverneur en conseil le pouvoir de prévoir, par décret, les critères qui doivent être remplis pour la délivrance d’une ordonnance de radiation d’une condamnation relative à une infraction inscrite à l’annexe 36.
Puis, l’article 25 du projet de loi précise ce qui doit être prouvé dans la demande de délivrance d’une ordonnance de radiation concernant une condamnation pour l’une des infractions énumérées à l’annexe. Plus précisément, les éléments de preuve doivent démontrer que les critères suivants sont remplis :
À cet égard, l’âge minimal du consentement pour une activité d’ordre sexuel est normalement de 16 ans (art. 151 du Code). Néanmoins, l’article 150.1 du Code prévoit des exceptions à ce principe, qui constituent des moyens de défense fondés sur la proximité de l’âge. Voici les moyens de défense dont la personne visée par la condamnation aurait pu se prévaloir, s’il lui avait été possible de le faire à l’égard d’une infraction visée à l’annexe :
Le paragraphe 8(3) prévoit que dans le cas où il est impossible de présenter les documents fournissant les éléments de preuve requis par l’article 25 ou par décret, le demandeur doit soumettre une déclaration solennelle ou sous serment, dans laquelle il doit :
Un demandeur qui ferait une fausse déclaration pourrait être reconnu coupable de parjure (art. 131 du Code). Le parjure constitue un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de 14 ans (art. 132 du Code). D’ailleurs, l’article 22 du projet de loi prévoit que la Commission est autorisée à communiquer les renseignements lui ayant été soumis ou les renseignements produits lors d’une demande de délivrance d’une ordonnance de radiation pour les besoins d’une enquête ou d’une poursuite pour l’infraction de parjure prévue à l’article 131 du Code.
Finalement, lors de l’étude du projet de loi par le Comité de la Chambre des communes, il a été mentionné qu’aucuns frais du gouvernement fédéral ne seraient facturés aux demandeurs de délivrance d’ordonnance de radiation 37. Néanmoins, ceci n’est pas prévu explicitement dans le projet de loi.
L’article 12 du projet de loi prévoit que la Commission doit procéder à un examen afin de déterminer si la demande ou la preuve recueillie dans le cadre d’une enquête sur la demande (autorisée par l’al. 11b) du projet de loi) révèlent des éléments de preuve selon lesquels :
La Commission devra se baser sur l’absence ou la présence de ces éléments de preuve pour accorder ou refuser une demande de délivrance d’ordonnance de radiation. D’une part, si l’examen de la demande effectué en vertu de l’article 12 ne révèle pas l’un de ces éléments de preuve, la Commission doit ordonner la radiation de la condamnation pour l’infraction visée par la demande (art. 13 du projet de loi). D’autre part, si l’examen de la demande effectué en vertu de l’article 12 révèle l’un de ces éléments de preuve, la Commission doit refuser la demande de radiation de la condamnation (art. 14 du projet de loi).
La Commission devra aviser le demandeur par écrit de sa décision prise en vertu des articles 13 ou 14 du projet de loi (art. 15 du projet de loi).
Une ordonnance de radiation de condamnation de la Commission fait en sorte que la personne visée par cette condamnation est réputée n’avoir jamais été condamnée pour cette infraction (par. 5(1) du projet de loi).
L’article 6 du projet de loi indique que le projet de loi n’a pas pour effet de limiter la prérogative royale de clémence à l’égard des infractions aux lois fédérales. La prérogative royale de clémence est « un pouvoir discrétionnaire absolu qui permet, dans des circonstances exceptionnelles, d’appliquer des mesures exceptionnelles à des personnes qui le méritent 38 » et est exercée par le gouverneur général ou le gouverneur en conseil au nom de la reine, sur la recommandation d’un ministre fédéral.
L’effet de la radiation prévue dans le projet de loi diffère de l’effet de la suspension d’un casier judiciaire qui peut aussi être accordée par la Commission en vertu de la Loi sur le casier judiciaire 39 (LCJ). Prévue à l’article 2.3 de la LCJ, la suspension du casier
permet que soient gardés à part les casiers judiciaires des personnes qui ont été déclarées coupables d’une infraction criminelle, mais ont fini de purger leur peine et démontré qu’elles sont maintenant des citoyens respectueux des lois 40.
En d’autres mots, la condamnation n’est pas effacée, mais est classée à part des autres condamnations. De plus, la suspension du casier peut être révoquée ou devenir nulle dans certaines situations, par exemple s’il existe des preuves convaincantes que le demandeur a cessé de bien se conduire (art. 7 et suivants de la LCJ).
Par contre, comme il a été mentionné plus tôt, la délivrance d’une ordonnance de radiation d’une condamnation par la Commission en vertu du projet de loi C‑66 a pour effet de faire en sorte que la personne est réputée n’avoir jamais été condamnée. De plus, tel qu’il est expliqué dans la section 2.7 qui suit, le projet de loi impose à la GRC et autres organismes et ministères fédéraux une obligation de destruction et de suppression des dossiers judiciaires relatifs aux condamnations visées par l’ordonnance de radiation de la Commission.
La Commission doit aviser la GRC de toute ordonnance de radiation qu’elle délivre. De même, elle doit aviser toute cour supérieure, provinciale ou municipale lorsqu’une telle cour conserve, à sa connaissance, un dossier judiciaire relatif à la condamnation visée par l’ordonnance de radiation délivrée.
Dès que possible après la réception de l’avis de la Commission, la GRC a l’obligation de détruire ou de supprimer de ses répertoires ou systèmes tout dossier judiciaire relatif à la condamnation visée par l’ordonnance (art. 17 du projet de loi).
La GRC a également l’obligation, dès que possible après la réception de l’avis d’une ordonnance de radiation de la Commission, d’aviser tous les ministères ou organismes fédéraux et toutes les forces de police (provinciales ou municipales) qui, à sa connaissance, conservent un dossier judiciaire concernant la condamnation visée par l’ordonnance de radiation (art. 18 du projet de loi).
Un ministère ou organisme fédéral qui reçoit un avis de radiation de la GRC aux termes de l’article 18 du projet de loi a l’obligation de détruire ou supprimer de ses répertoires ou systèmes tout dossier judiciaire relatif à la condamnation visée par l’ordonnance de radiation.
Ainsi, les dossiers judiciaires relatifs aux condamnations qui ont fait l’objet d’une radiation sont supprimés ou détruits des dossiers fédéraux. Néanmoins, les cours supérieures, provinciales ou municipales et les forces de police provinciales ou municipales n’ont pas l’obligation de supprimer ou de détruire ces dossiers judiciaires.
Les articles 17 et 19 du projet de loi prévoyant la destruction et suppression des dossiers judiciaires s’appliquent malgré les exigences relatives à la conservation des renseignements prévues aux articles 12 et 13 de la Loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada 41, aux paragraphes 6(1) et 6(3) de la Loi sur la protection des renseignements personnels 42 ainsi que par toute autre disposition d’une loi fédérale (art. 20 du projet de loi).
L’article 21 du projet de loi précise que les articles 17 à 20 ne s’appliquent pas aux documents soumis ou produits aux fins d’une demande de radiation présentée en vertu du projet de loi.
Le paragraphe 30(1) du projet de loi modifie la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels 43 (LERDS) de manière à ce que les renseignements qui ont été recueillis sous le régime de la LERDS soient détruits et radiés lorsqu’une ordonnance de radiation est rendue par la Commission en vertu du projet de loi. La LERDS prévoit un régime d’enregistrement des délinquants déclarés coupables de certains crimes sexuels désignés par la Loi et visés par une ordonnance du tribunal qui les oblige à s’enregistrer au Registre national des délinquants sexuels 44.
Article 178 du Code criminel Article 206 du Code criminel Article 206 du Code criminel |
Est coupable d’un acte criminel et passible de cinq ans d’emprisonnement et d’être fouetté, tout individu du sexe masculin qui, en public ou privément, commet avec un autre individu du même sexe quelque acte de grossière indécence, ou participe à un acte de cette nature, ou fait commettre ou tente de faire commettre par un autre un acte de cette nature . a. |
Article 149 du Code criminel |
Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement de cinq ans, quiconque commet un acte de grossière indécence avec une autre personne. |
Article 149 et 149A du Code criminel Article 157 du Code criminel Article 161 du Code criminel |
149. Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement de cinq ans, quiconque commet un acte de grossière indécence avec une autre personne b. 149A. Les articles 147 et 149 ne s’appliquent à aucun acte commis, dans l’intimité,
(2) Aux fins du paragraphe (1),
|
Notes:
Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement.
Articles 174 et 175 du Code criminel Articles 202 et 203 du Code criminel Articles 202 et 203 du Code criminel |
202. Est coupable d’un acte criminel et passible d’emprisonnement à perpétuité, celui qui commet la sodomie ou la bestialité a. 203. Est coupable d’un acte criminel et passible de dix ans d’emprisonnement, celui qui tente de commettre le crime mentionné à l’article qui précède a. |
Article 147 du Code criminel |
147. Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement de quatorze ans, quiconque commet la sodomie ou bestialité. |
Articles 147 et 149A du Code criminel Articles 155 du Code criminel Article 160 du Code criminel |
147. Est coupable d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement de quatorze ans, quiconque commet la sodomie ou bestialité b. 149A. Les articles 147 et 149 ne s’appliquent à aucun acte commis, dans l’intimité,
(2) Aux fins du paragraphe (1),
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Notes:
Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement.
Article 159 du Code criminel |
159(1) Quiconque a des relations sexuelles anales avec une autre personne est coupable soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de dix ans, soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. (2) Le paragraphe (1) ne s’applique pas aux actes commis, avec leur consentement respectif, dans l’intimité par les époux ou par deux personnes âgées d’au moins dix-huit ans. (3) Les règles suivantes s’appliquent au paragraphe (2) :
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Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement.
* Avertissement : Par souci de clarté, les propositions législatives du projet de loi décrit dans le présent résumé législatif sont énoncées comme si elles avaient déjà été adoptées ou étaient déjà en vigueur. Il ne faut pas oublier, cependant, qu’un projet de loi peut faire l’objet d’amendements au cours de son examen par la Chambre des communes et le Sénat, et qu’il est sans effet avant d’avoir été adopté par les deux chambres du Parlement, d’avoir reçu la sanction royale et d’être entré en vigueur. [ Retour au texte ]
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