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Le projet de loi S-243, Loi édictant la Loi sur la finance alignée sur le climat et apportant des modifications connexes à d’autres lois (titre abrégé : « Loi sur l’édiction d’engagements climatiques »), a été présenté au Sénat par la sénatrice Rosa Galvez le 24 mars 2022 1. Il a été adopté en deuxième lecture le 8 juin 2023 et a été renvoyé pour étude au Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie.
Le projet de loi comprend cinq parties :
L’objectif du projet de loi est d’aligner les activités du secteur financier sur les engagements climatiques, et ce, au moyen de diverses mesures. Ces mesures comprennent des exigences en matière de rapports, le contrôle de l’application des cibles relatives aux engagements climatiques, des exigences supplémentaires en matière de suffisance du capital à l’intention des banques, la nomination de personnes ayant une expertise en matière de climat au sein des conseils d’administration des entités déclarantes et l’imposition d’une obligation prioritaire aux administrateurs ou aux dirigeants d’entités déclarantes, soit celle d’aligner ces entités sur les engagements climatiques.
Depuis la fin des années 1980, le Canada a formulé plusieurs engagements, stratégies et plans visant à réduire les émissions nationales de gaz à effet de serre afin de contribuer à l’atténuation des changements climatiques à l’échelle mondiale 10. Dans le cadre de la LCRMC, le Canada s’est fixé pour objectif de réduire ses émissions de 40 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030 et d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050. La LCRMC définit la carboneutralité comme une « [s]ituation dans laquelle les émissions anthropiques de gaz à effet de serre dans l’atmosphère sont entièrement compensées par l’absorption anthropique de ces gaz au cours d’une période donnée 11 ».
L’objectif du Canada d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050 se fonde sur le « budget carbone mondial », soit le niveau d’émissions compatible avec une probabilité donnée de limiter, au cours de ce siècle, la hausse de la température mondiale à 1,5 °C ou 2 °C au-dessus des niveaux préindustriels. Ces objectifs de température ont été fixés dans l’Accord de Paris 12 de 2015, que le Canada a ratifié en 2016.
En ce qui concerne les budgets carbone, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat explique qu’entre 1850 et 2019, les émissions nettes cumulatives de dioxyde de carbone (CO2) ont totalisé quelque 2 400 gigatonnes (une gigatonne correspondant à un milliard de tonnes métriques) 13. Les émissions ont continué à augmenter au cours de la décennie 2010-2019, pendant laquelle les émissions anthropiques mondiales nettes ont atteint 59 gigatonnes de CO2 14. Par conséquent, « l’estimation centrale actuelle du budget carbone restant à partir de 2020 pour limiter le réchauffement à 1,5 °C avec une probabilité de 50 % a été évaluée à 500 gigatonnes de CO2; pour limiter le réchauffement à 2 °C avec une probabilité de 67 %, il est évalué à 1 150 gigatonnes de CO2 15 ».
Le projet de loi S-243 comprend cinq parties et 22 articles. Les principales dispositions sont décrites ci-dessous.
L’article 2 du projet de loi édicte la LFAC. Cette dernière comporte six parties et 18 articles :
L’article 2 de la LFAC présente les définitions des termes pertinents. Les principales définitions sont les suivantes :
Le paragraphe 3(1) du projet de loi indique que la LFAC a pour objet :
Le paragraphe 3(2) énonce que la LFAC réalisera cet objet en limitant les risques que posent les institutions financières pour le climat ainsi que les risques financiers que posent les changements climatiques pour le système financier canadien. Pour ce faire, elle prévoit les mesures suivantes :
Le paragraphe 4(1) indique qu’une entité est considérée comme étant alignée sur les engagements climatiques si :
Le paragraphe 4(2) prévoit en outre qu’une entité alignée sur les engagements climatiques respecte les droits des peuples autochtones, évite de causer un préjudice important aux obligations sociales et environnementales reconnues par le Canada et, dans le contexte de ses actions liées au climat :
La partie 2 décrit les exigences en matière de rapports qu’impose la LFAC aux entités.
L’article 5 présente les définitions pertinentes, tandis que l’article 6 énonce la façon dont l’entité déclarante doit établir ses plans et ses cibles en matière d’émissions afin que ses actions soient alignées sur les engagements climatiques. Le paragraphe 6(6) fournit, à l’intention des institutions financières fédérales, de l’information supplémentaire sur les émissions, les cibles et les plans.
L’article 7 prévoit qu’au plus tard 60 jours après la fin de chaque exercice, l’entité déclarante établit et rend public un rapport d’alignement sur les engagements climatiques, à moins qu’elle puisse démontrer qu’elle n’a produit aucune émission ou qu’elle a engendré des émissions négligeables au cours de l’exercice précédent.
L’article 8 indique que le ministre de l’Environnement et du Changement climatique peut concevoir et fournir des outils, des formulaires ou des lignes directrices sur lesquels l’entité déclarante peut s’appuyer pour établir son rapport d’alignement sur les engagements climatiques, ses plans ou ses cibles, et peut fournir une définition du terme « émissions négligeables » pour l’application de l’article 7.
L’article 9 oblige le surintendant :
L’article 10 exige :
L’article 12 exige qu’au moins un des administrateurs des entités fédérales et sociétés d’État mères ciblées soit une personne ayant une expertise en matière de climat. En ce qui concerne les conseils d’administration des entités déclarantes, l’article 13 indique qu’une personne ne peut être nommée au conseil d’administration d’une entité déclarante si :
Ces exigences s’appliquent aux nominations effectuées après le troisième anniversaire de la date d’entrée en vigueur du projet de loi, et toute nomination effectuée en contravention de l’article 13 est nulle.
Par ailleurs, l’article 15 énonce qu’il est interdit aux personnes nommées au titre de l’article 12 d’accepter un cadeau, un avantage ou une contribution de quelque valeur ou nature que ce soit de la part d’une organisation qui n’est pas alignée sur les engagements climatiques.
L’article 16 prévoit d’ailleurs que l’administrateur ou le dirigeant d’une entité déclarante a l’obligation d’agir de manière à ce que l’entité soit alignée sur les engagements climatiques. En outre, les administrateurs et les dirigeants sont tenus d’accorder à cette obligation la priorité par rapport aux autres obligations associées à leurs fonctions – exception faite des exigences prévues par la Loi de l’impôt sur le revenu – pour assurer l’alignement de l’entité sur les engagements climatiques 20.
L’article 17 prévoit que le surintendant peut prendre les ordonnances qu’il juge indiquées à l’égard de toute institution financière ou de tout régime de pension sous réglementation fédérale pour aider l’entité visée par l’ordonnance à s’aligner sur les engagements climatiques.
L’article 18 énonce que le ministre responsable, en consultation avec d’autres ministres, établit un plan d’action visant à favoriser les produits financiers compatibles avec les engagements climatiques au détriment de ceux qui sont incompatibles avec les engagements climatiques, en vue de déterminer les modifications législatives nécessaires pour modifier les lois régissant l’impôt, les investissements des régimes de pension et l’ordre de priorité des créanciers en cas de faillite, et pour adopter des mécanismes de contrôle d’application appropriés. De plus, le ministre responsable est tenu :
La partie 2 du projet de loi apporte des modifications connexes à un certain nombre de lois.
L’article 3 du projet de loi modifie le préambule de la Loi sur la Banque du Canada et l’article 4 du projet de loi y ajoute l’article 18.01, et ce, afin d’obliger la Banque du Canada à exercer ses pouvoirs de façon à s’aligner sur les engagements climatiques décrits dans la LFAC.
À l’heure actuelle, le paragraphe 10.1(1) de la Loi sur le développement des exportations exige qu’EDC, en conformité avec une directive du conseil, détermine avant de procéder à une opération si un projet d’intérêt pourrait avoir des effets environnementaux négatifs et s’il est justifié qu’EDC procède à l’opération. L’article 5 du projet de loi modifie l’article 10.1 afin d’inclure des exigences supplémentaires en matière d’engagements climatiques.
Le paragraphe 5(1) du projet de loi ajoute l’alinéa 10.1(1)a.1) pour intégrer des critères supplémentaires, qui consistent notamment à déterminer si un projet est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs ou un « effet sur les changements climatiques qui est négatif » aux termes de la LFAC.
Le paragraphe 5(2) du projet de loi ajoute le paragraphe 10.1(2.1) pour indiquer qu’une directive ne peut être établie par le conseil que si elle permet aux entités participant au projet d’être des entités alignées sur les engagements climatiques aux termes de la LFAC.
Le paragraphe 5(2) ajoute également le paragraphe 10.1(2.2) pour obliger EDC à réviser les directives existantes afin d’atténuer tout effet sur les changements climatiques qui est négatif, au sens de la LFAC.
De plus, l’article 6 ajoute l’article 10.2 afin d’obliger EDC à exercer ses pouvoirs d’une manière qui fasse d’elle une entité alignée sur les engagements climatiques.
L’article 7 du projet de loi ajoute le paragraphe 89(3) à la Loi sur la gestion des finances publiques, qui régit les instructions données par le gouverneur en conseil aux sociétés d’État mères, pour préciser que le gouverneur en conseil est réputé avoir donné à chaque société d’État mère énumérée à l’annexe III l’instruction d’être une entité alignée sur les engagements climatiques aux termes de la LFAC.
L’article 8 du projet de loi ajoute le paragraphe 4(3.1) à la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières afin d’exiger que le Bureau poursuive ses objectifs de manière à ce que lui-même et toutes les entités à l’égard desquelles il exerce un contrôle réglementaire ou une supervision soient des entités alignées sur les engagements climatiques, comme il est énoncé dans la LFAC. De plus, l’article 9 du projet de loi modifie l’article 6 de la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières pour inclure la LFAC parmi les lois qui énoncent les attributions exercées par le surintendant et pour exiger que celui-ci exerce ses attributions en s’alignant sur les engagements climatiques. Enfin, l’article 10 du projet de loi ajoute l’alinéa 38a.1) à la Loi sur le Bureau du surintendant des institutions financières afin que le gouverneur en conseil puisse, par règlement, prendre des mesures pour que les institutions financières s’alignent sur les engagements climatiques.
L’article 11 du projet de loi ajoute l’article 5.1 à la Loi sur l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public afin d’indiquer que l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public ne peut exercer ses pouvoirs que de manière à ce que lui-même et les régimes de pension pour lesquels il effectue des placements soient des entités alignées sur les engagements climatiques aux termes de la LFAC.
L’article 12 du projet de loi ajoute l’article 22.1 à la Loi sur la Banque de développement du Canada pour obliger la Banque de développement du Canada à exercer ses pouvoirs d’une manière qui fasse d’elle une entité alignée sur les engagements climatiques aux termes de la LFAC.
L’article 13 du projet de loi ajoute le paragraphe 7(3) à la Loi sur la Banque de l’infrastructure du Canada pour exiger que le conseil de la Banque de l’infrastructure du Canada exerce ses pouvoirs de manière à ce que lui-même et la Banque soient alignés sur les engagements climatiques aux termes de la LFAC.
L’article 14 du projet de loi modifie l’article 29 de la LCRMC, qui est une disposition relative à la date d’entrée en vigueur de l’article 23 de cette même loi. L’article 23 de la LCRMC prévoit que le ministre des Finances doit préparer un rapport annuel portant sur les principales mesures entreprises par l’administration publique fédérale afin de gérer ses risques et occasions d’ordre financier liés aux changements climatiques. L’article 14 du projet de loi prévoit que l’article 23 entre en vigueur à la date de sanction du projet de loi S-243 plutôt que le 31 mars 2023.
La partie 3 du projet de loi prévoit diverses exigences en matière d’examen et de rapports à l’intention du gouvernement fédéral.
Le paragraphe 16(1) du projet de loi énonce que, dans les deux ans suivant la date de sanction du projet de loi, le ministre des Finances doit déposer devant chaque Chambre du Parlement :
L’article 17 du projet de loi énonce que le gouverneur en conseil peut désigner tout ministre fédéral à titre de ministre chargé de l’application du projet de loi S-243 et que ce ministre doit effectuer, tous les trois ans à compter de la date d’entrée en vigueur du projet de loi, un examen indépendant des dispositions édictées par celui-ci. Le rapport d’examen indépendant doit être déposé devant chaque Chambre du Parlement dans les 15 jours de séance suivant la fin de l’examen et au plus tard neuf mois après le début de l’examen.
L’article 18 du projet de loi exige qu’un comité parlementaire réalise un examen approfondi du projet de loi tous les trois ans après son entrée en vigueur.
L’article 19 du projet de loi exige qu’un rapport annuel sur la mise en œuvre des dispositions qu’il édicte soit établi par le surintendant, en ce qui a trait aux entités soumises à sa surveillance, et par le ministre des Finances, en ce qui a trait aux sociétés d’État mères au sens de la Loi sur la gestion des finances publiques. Le ministre des Finances doit déposer les rapports devant chaque Chambre du Parlement au plus tard 10 jours de séance après leur achèvement.
La partie 4 du projet de loi apporte des modifications relatives à l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada.
L’article 20 du projet de loi ajoute l’alinéa b.1) à l’article 12 de la LFAC, lequel régit la nomination de personnes ayant une expertise en matière de climat au sein de divers conseils d’administration, afin d’inclure l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada.
L’article 21 modifie l’article 5 de la Loi sur l’Office d’investissement du régime de pensions du Canada 24, qui énonce la mission de l’Office, afin d’exiger que l’Office s’acquitte de sa mission de manière à ce que lui-même et le Régime de pensions du Canada soient des entités alignées sur les engagements climatiques aux termes de la LFAC.
Le paragraphe 22(1) énonce que les parties 1 à 3 du projet de loi entrent en vigueur au premier anniversaire de la sanction du projet de loi.
Le paragraphe 22(2) prévoit que la partie 4 entre en vigueur à la date ou aux dates fixées par décret du gouverneur en conseil, mais que ce décret n’a aucun effet tant que les lieutenants-gouverneurs en conseil d’au moins les deux tiers des provinces incluses, au sens du Régime de pensions du Canada, représentant au total les deux tiers au moins de la population de toutes les provinces incluses, n’ont pas signifié le consentement de leur province respective au décret. Cette exigence est énoncée à l’article 114 de la loi sur le Régime de pensions du Canada 25.
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