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Le projet de loi S-2, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada et apportant des modifications corrélative et connexes à d’autres lois, a été présenté au Sénat par le sénateur Marc Gold et lu pour la première fois le 24 novembre 2021 1.
Le projet de loi propose d’apporter des modifications à certaines dispositions de la Loi sur le Parlement du Canada 2 (la Loi) portant sur les indemnités annuelles supplémentaires versées aux sénateurs qui occupent certains postes. Il propose également d’apporter des modifications à la Loi en vue d’autoriser ces sénateurs à changer la composition du Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration (CIBA) et d’exiger qu’ils soient consultés au sujet des nominations de certains hauts fonctionnaires et agents du Parlement. Ces sénateurs comprennent : le leader du gouvernement au Sénat ou le représentant du gouvernement au Sénat, le leader de l’opposition au Sénat et le leader ou facilitateur de chacun des autres partis ou groupes parlementaires reconnus au Sénat. Le projet de loi propose également d’apporter une modification corrélative à la Loi sur les allocations de retraite des parlementaires, ainsi que des modifications connexes à plusieurs autres lois, dont la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur les mesures d’urgence et la Loi sur le lobbying.
Le projet de loi S-2 est identique au projet de loi S-4, qui a été présenté en avril 2021 par le sénateur Marc Gold lors de la 2e session de la 43e législature 3. Le projet de loi S-4 a été adopté par le Sénat en juin 2021, et il est mort au Feuilleton lorsque le Parlement a été dissous en août 2021.
La composition du Sénat du Canada a beaucoup changé au fil du temps. Jusqu’à récemment, la grande majorité des sénateurs étaient membres de deux partis politiques, soit le Parti libéral et le Parti conservateur (anciennement le Parti progressiste-conservateur), qui alternaient entre le gouvernement et l’Opposition officielle.
Les règles, les procédures et l’affectation des ressources du Sénat ont été modifiées afin de refléter les nouvelles réalités du Sénat et de prendre en compte le nombre croissant de sénateurs qui ne sont pas affiliés à un parti reconnu. En 2017, le Règlement du Sénat du Canada et le Règlement administratif du Sénat ont été modifiés de manière à inclure des groupes parlementaires reconnus d’au moins neuf sénateurs formés à des fins parlementaires 4. Plus précisément, le Règlement du Sénat du Canada reconnaît maintenant les groupes de sénateurs qui ne sont pas affiliés à un parti politique et leur accorde, à eux et à leur leader ou facilitateur, des droits procéduraux 5. De plus, le Règlement administratif du Sénat accorde maintenant aux caucus des groupes parlementaires reconnus les mêmes ressources que celles dont disposent les caucus des partis reconnus 6.
Aujourd’hui, le nombre de sénateurs qui ne sont pas affiliés à un parti reconnu a considérablement augmenté. En date de novembre 2021, il y a un parti reconnu (le Parti conservateur du Canada) et trois groupes parlementaires reconnus (le Groupe des sénateurs indépendants, le Groupe progressiste du Sénat et le Groupe des sénateurs canadiens). Certains sénateurs, y compris le Président et le représentant du gouvernement, siègent à titre de sénateurs non affiliés.
Bien qu’à l’heure actuelle la Loi ne prévoie pas de définition de « parti reconnu » ou de « groupe parlementaire reconnu », des tentatives ont été faites dans le passé pour modifier la Loi afin de définir ce qui constitue un « parti reconnu 7 ». La Loi reconnaît toutefois la présence du gouvernement, de l’Opposition et des partis reconnus au Sénat, et elle leur confère, à eux et à leur chef respectif, certains droits. Par exemple, l’article 20.1 de la Loi stipule qu’il faut consulter le chef de chaque parti reconnu au Sénat avant de nommer un conseiller sénatorial en éthique. De plus, au titre des alinéas 62.3(1)a) à 62.3(1)f.4) de la Loi, des indemnités annuelles supplémentaires doivent être versées aux sénateurs qui occupent certains postes de leadership.
En plus de ces modifications apportées à la composition du Sénat, le titre de « leader du gouvernement au Sénat » a été renouvelé en mars 2016, lorsque le premier ministre Justin Trudeau a nommé un sénateur indépendant représentant le gouvernement au Sénat. Quelques mois plus tard, une sénatrice indépendante et un sénateur indépendant, tous deux auparavant affiliés à des partis politiques, se sont joints au bureau du représentant du gouvernement au Sénat, la sénatrice à titre de coordonnatrice législative du gouvernement au Sénat et le sénateur en tant qu’agent de liaison du gouvernement 8. Aucune modification n’a été apportée à la Loi ou au Règlement du Sénat du Canada pour tenir compte de ces changements de désignation. Toutefois, dans une décision rendue en 2016, le Président du Sénat a cité une lettre du représentant du gouvernement au Sénat annonçant les sénateurs qui devaient occuper le poste de leader adjoint du gouvernement au Sénat et celui de whip du gouvernement, ainsi que la nouvelle désignation de ces postes : « coordonnateur législatif du représentant du gouvernement » et « agent de liaison du gouvernement », respectivement. Le Président a statué que le fait d’accorder de la liberté et de la souplesse à chaque groupe de leaders au Sénat en ce qui concerne l’utilisation de titres autres que ceux établis par le Règlement du Sénat du Canada, dans des limites raisonnables, est conforme à la pratique parlementaire antérieure et n’a pas d’incidence directe sur les délibérations parlementaires 9.
Des indemnités annuelles supplémentaires sont versées aux parlementaires en plus de leurs indemnités de session. L’indemnité de session est la rémunération régulière équivalant à un salaire que reçoit chaque parlementaire. La première indemnité annuelle supplémentaire prévue par la loi au Sénat remonte à 1947, lorsque la Loi sur le Sénat et la Chambre des communes (maintenant la Loi sur le Parlement du Canada) a été modifiée afin d’accorder une allocation annuelle supplémentaire au leader du gouvernement au Sénat (7 000 $) et au leader de l’opposition au Sénat (4 000 $) 10.
À la Chambre des communes, la Loi prévoit actuellement le versement d’indemnités annuelles supplémentaires aux députés qui occupent des postes de leadership au sein du gouvernement et de l’opposition, ainsi que dans « un parti dont l’effectif reconnu à la Chambre des communes comprend au moins douze personnes 11 ». Toutefois, au Sénat, seuls les sénateurs qui occupent des postes de leadership au sein du gouvernement et de l’Opposition officielle – le leader, le leader adjoint, le whip, le whip adjoint et le président du caucus – reçoivent des indemnités annuelles supplémentaires.
En 2001, le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement (RPRD) a présenté son septième rapport sur la reconnaissance d’un troisième parti au Sénat. Il recommandait notamment que le gouvernement soit invité à proposer d’apporter des modifications à la Loi pour tenir compte de la reconnaissance des autres partis conformément au Règlement du Sénat du Canada, et notait à cet égard que la Loi devrait être modifiée afin de prévoir le versement d’indemnités supplémentaires au leader, au leader adjoint et au whip des autres partis reconnus 12.
Plus tard, en 2018, le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat (MDRN) a souligné dans son rapport de 2018 que « [l]a Loi sur le Parlement du Canada ne reconnaît pas les postes de leadership au sein des autres partis ou groupes parlementaires aux fins de l’obtention des indemnités supplémentaires 13 ».
Le MDRN note également dans son rapport qu’au titre de la Loi, le leader du gouvernement au Sénat et le leader de l’opposition au Sénat peuvent apporter des changements à la composition du CIBA, mais qu’aucun autre leader ou facilitateur d’un parti ou d’un groupe parlementaire n’est investi de ce pouvoir. En ce qui concerne les exigences en matière de consultation avant la nomination d’un conseiller sénatorial en éthique, le MDRN a souligné que la Loi ne fait aucune mention des leaders ou des facilitateurs des autres partis ou groupes parlementaires, et que le libellé utilisé dans la Loi relativement aux exigences en matière de consultation avant la nomination d’un directeur parlementaire du budget n’est pas conforme au libellé utilisé dans le Règlement du Sénat du Canada et le Règlement administratif du Sénat 14.
Le MDRN a donc recommandé que le RPRD entreprenne un examen en vue de recommander d’apporter des modifications à la Loi sur le Parlement du Canada « pour que tous les partis reconnus et groupes parlementaires reconnus au Sénat soient traités sur un pied d’égalité 15 », et le MDRN a fourni la justification suivante pour ses conclusions :
[Ces modifications] visent à faire en sorte que les règles ou les procédures dont la mise en œuvre date d’une époque où le Sénat se composait largement de sénateurs affiliés au gouvernement ou à l’opposition ne restreignent plus le droit des groupes parlementaires, des partis ou des sénateurs de participer aux travaux du Sénat.
Dans bien des cas, le Sénat a déjà apporté des ajustements à ces règles et procédures afin de répondre aux besoins des nouveaux groupes parlementaires et de tenir compte des nouvelles configurations de leadership. Toutefois, il est temps de stabiliser ces correctifs 16.
Le projet de loi S-2 compte 17 articles. La section qui suit présente les dispositions principales.
Le projet de loi modifie la Loi sur le Parlement du Canada (la Loi) et apporte des modifications corrélative et connexes à d’autres lois afin de refléter, notamment, la nouvelle composition du Sénat.
À l’heure actuelle, le paragraphe 19.1(3) de la Loi prévoit que, conformément au Règlement du Sénat du Canada, le leader du gouvernement au Sénat et le leader de l’opposition au Sénat peuvent, même en cas de prorogation ou de dissolution du Parlement, apporter des changements dans la composition du CIBA. En vertu de cette disposition, aucun autre leader ou facilitateur d’un parti ou d’un groupe parlementaire n’est investi de ce pouvoir. L’article premier du projet de loi S-2 modifie le paragraphe 19.1(3) de la Loi afin d’autoriser le représentant du gouvernement au Sénat et le leader ou facilitateur de tout autre parti ou groupe parlementaire reconnu au Sénat à apporter des changements dans la composition du CIBA.
À l’heure actuelle, au titre de l’article 20.1 de la Loi, le chef de chaque parti reconnu au Sénat doit être consulté avant la nomination d’un conseiller sénatorial en éthique. L’article 2 du projet de loi S-2 modifie l’article 20.1 de la Loi afin que le gouverneur en conseil soit tenu de consulter, avant de nommer un conseiller sénatorial en éthique, le leader ou représentant du gouvernement au Sénat, le leader de l’opposition au Sénat et le leader ou facilitateur de chacun des autres partis ou groupes parlementaires reconnus au Sénat.
En outre, l’alinéa 79.1(1)a) de la Loi actuellement en vigueur stipule que le gouverneur en conseil doit consulter le leader du gouvernement au Sénat, le leader de l’opposition au Sénat et le chef de chaque parti et groupe parlementaire reconnus au Sénat avant de nommer un directeur parlementaire du budget. L’article 6 du projet de loi S-2 modifie le libellé de l’alinéa 79.1(1)a) de la Loi pour inclure le nouveau titre de « représentant du gouvernement au Sénat ». Le libellé de la disposition est également modifié pour tenir compte de la terminologie adoptée par les groupes au Sénat, à savoir « leader ou facilitateur » de chacun des autres partis ou groupes parlementaires reconnus au Sénat, afin d’assurer l’uniformisation avec la terminologie utilisée dans le Règlement du Sénat du Canada.
À l’heure actuelle, le paragraphe 62.3(1) de la Loi prévoit des indemnités annuelles supplémentaires pour les sénateurs occupant certains postes de leadership, y compris le leader du gouvernement au Sénat et le chef de l’Opposition au Sénat, ainsi que le leader adjoint, le whip et le whip suppléant du gouvernement et le chef adjoint, le whip et le whip suppléant de l’Opposition, et les présidents du groupe parlementaire du gouvernement et de l’Opposition. La Loi ne prévoit pas d’indemnités annuelles supplémentaires pour les sénateurs qui occupent d’autres postes, comme celui de leader ou de facilitateur de chacun des partis ou groupes parlementaires reconnus.
L’article 3 du projet de loi S-2 ajoute le nouveau paragraphe 62.4(1) à la Loi, qui prévoit le versement, à compter du 1er juillet 2022, d’indemnités annuelles supplémentaires aux sénateurs occupant les postes suivants au Sénat :
Le nouveau paragraphe 62.4(2) et les articles 67 et 67.1 modifiés de la Loi font en sorte que les sommes prévues au paragraphe 62.4(1) de la Loi seront rajustées annuellement en fonction de l’indice moyen, en pourcentage, des rajustements des taux des salaires de base publiés annuellement par Emploi et Développement social Canada (art. 3 et 4 du projet de loi).
L’article 5 du projet de loi S-2 modifie le paragraphe 71.1(1) de la Loi afin d’inclure les nouvelles indemnités annuelles dans le calcul des allocations d’invalidité annuelles pour les sénateurs qui démissionnent pour raison d’invalidité.
La Loi sur les allocations de retraite des parlementaires (LARP) 18 régit les allocations de retraite versées aux sénateurs et aux députés admissibles en vertu du Régime de retraite des parlementaires (le Régime). La participation au Régime, financée par les cotisations du gouvernement et des participants au Régime, est obligatoire pour les sénateurs et les députés 19.
L’article 7 du projet de loi modifie la définition d’« indemnité annuelle » dans la LARP pour inclure les indemnités annuelles supplémentaires prévues au nouvel article 62.4 de la Loi. Par conséquent, les nouvelles indemnités annuelles supplémentaires prévues dans le projet de loi sont incluses dans le calcul des gains ouvrant droit à pension des sénateurs, et le montant exigé des cotisations est ajusté en conséquence. Ainsi, à la suite de cette modification, les allocations de retraite des sénateurs reflètent le montant accru gagné par certains d’entre eux en raison des modifications apportées à la Loi.
À l’heure actuelle, certaines lois du Parlement prévoient que le gouverneur en conseil doit consulter le leader de chaque parti reconnu au Sénat avant de nommer des hauts fonctionnaires ou des agents du Parlement.
Le projet de loi apporte des modifications connexes à d’autres lois qui exigent que le gouverneur en conseil consulte le leader ou représentant du gouvernement au Sénat, le leader de l’opposition au Sénat et le leader ou facilitateur de chacun des autres partis ou groupes parlementaires reconnus au Sénat avant de nommer les hauts fonctionnaires ou agents du Parlement suivants :
Les articles 15 et 16 du projet de loi modifient respectivement le libellé du paragraphe 5(2) de la Loi sur le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, et des alinéas 4(2)a) et 4(2)b) de la Loi sur l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement afin d’inclure le nouveau titre de poste de « représentant du gouvernement au Sénat » et la désignation de « leader ou facilitateur » d’un parti reconnu ou d’un groupe parlementaire reconnu au Sénat.
Ainsi, le paragraphe 5(2) modifié de la Loi sur le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement exige que le premier ministre consulte le leader ou représentant du gouvernement au Sénat, le leader de l’opposition au Sénat et le leader ou facilitateur de chacun des autres partis ou groupes parlementaires reconnus au Sénat avant qu’un sénateur ne soit nommé membre au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement (art. 15 du projet de loi).
De même, les alinéas 4(2)a) et 4(2)b) modifiés de la Loi sur l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement prévoient que le leader ou représentant du gouvernement au Sénat, le leader de l’opposition au Sénat, et le leader ou facilitateur de chacun des autres partis ou groupes parlementaires reconnus au Sénat soit consulté avant qu’un membre soit nommé à l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement (art. 16 du projet de loi).
L’article 11 du projet de loi modifie le paragraphe 62(2) de la Loi sur les mesures d’urgence, qui apporte des changements dans la composition du Comité d’examen parlementaire en vue d’examiner l’exercice des attributions du gouvernement à la suite d’une déclaration de situation de crise; les modifications tiennent compte des nouvelles structures du leadership au Sénat.
Le paragraphe 17(1) du projet de loi S-2 précise que le projet de loi entre en vigueur à une date qui sera fixée par décret du gouverneur en conseil.
Comme l’adoption du projet de loi entraînerait l’affectation de crédits, le paragraphe 17(2) du projet de loi stipule qu’une recommandation royale et l’affectation de crédits par le Parlement sont nécessaires avant son entrée en vigueur.
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