Depuis quelques années, on assiste à un phénomène qui prend de l'ampleur à l'échelle mondiale, particulièrement dans les pays en développement : l'achat massif de terres agricoles par des investisseurs, étrangers ou nationaux. Ce phénomène, souvent appelé « accaparement des terres », s'inscrit dans un contexte de crise financière, alimentaire et énergétique. Au Canada, certains experts craignent qu'il ait des répercussions néfastes en l'absence d'un encadrement législatif adéquat.
Le présent document décrit le phénomène tel qu'il se produit de façon générale et plus particulièrement au Canada. Il aborde ensuite les principaux enjeux liés à l'accaparement des terres, pour enfin décrire les mesures législatives en place au Canada pour protéger les terres agricoles.
On entend par « accaparement des terres » l'acquisition ou la location d'importantes superficies foncières par des investisseurs du secteur privé (banques, sociétés, fonds d'investissement) ou du secteur public (entreprises d'État, institutions gouvernementales, fonds souverains), phénomène qui s'amplifie depuis 2008, année où ces investisseurs ont vu se présenter des possibilités dans la foulée de la crise financière, alimentaire et énergétique1. Pour certains, les terres agricoles représentent une forme d'investissement stable et lucratif. Pour d'autres, il s'agit d'un moyen d'assurer la sécurité alimentaire2.
Cela étant dit, l'accaparement des terres ne constitue pas une nouveauté en soi. Il suffit de remonter à la période coloniale, au temps de Christophe Colomb3 , pour trouver des exemples de ce phénomène vieux de plusieurs siècles. Le cas des multinationales fruitières montre lui aussi que l'accaparement des terres existe depuis longtemps. La société américaine Chiquita, par exemple, est présente en Amérique latine depuis le début du XXe siècle4.
Selon Land Matrix5 , organisme international d'enregistrement des transactions foncières à grande échelle6 , les transactions foncières répertoriées ont pour la plupart un lien avec la production agricole. Les investissements les plus importants visent le secteur des cultures destinées à la consommation humaine, suivi par celui des cultures liées à la production de biocarburant. Quant aux investissements sans lien avec la production agricole, ils se concentrent surtout dans le secteur du caoutchouc, du coton et de l'huile de palme destinée à l'industrie cosmétique. En plus de la production agricole, les terres achetées par des investisseurs étrangers sont également utilisées pour des activités liées à la foresterie et au tourisme7.
D'après les données compilées par Land Matrix en date de mai 2015, près de 60 millions d'hectares de terres ont fait l'objet de transactions à l'échelle mondiale entre 2000 et 2014, principalement dans les pays en développement. Durant cette période, l'organisme a recensé 1 322 transactions, dont 78 % menées à bien, 15 % prévues et 7 % n'ayant pas abouti. Les principaux pays qui achètent des terres en dehors de leurs frontières sont les États Unis, la Malaisie, Singapour, les Émirats arabes unis et le Royaume-Uni. Ensemble, ces cinq pays cumulent aujourd'hui une superficie totale de 20 millions d'hectares à l'extérieur de leur territoire. Quant au Canada, il a conclu 44 transactions visant au-delà de 2 millions d'hectares entre 2000 et 2014, principalement en Afrique et en Amérique latine (au Brésil et en Uruguay particulièrement)8.
Certains soutiennent que si l'accaparement des terres agricoles concerne avant tout les pays en développement, le Canada n'est pas épargné par le phénomène9. En 2010, des rumeurs selon lesquelles des intérêts étrangers, notamment chinois, avaient l'intention d'acquérir d'importantes superficies agricoles au Québec ont suscité beaucoup de réactions dans la communauté agricole10. Bien qu'elles ne se soient jamais matérialisées, ces rumeurs ont soulevé plusieurs questions quant à la possibilité future d'un tel achat massif de terres agricoles.
Selon les chiffres du recensement de 2011 pour le mode d'occupation des terres agricoles au Canada, les producteurs exploitants possèdent 64,6 % de la superficie totale, le reste étant des terres louées des autres. Comme le montre le tableau 1, c'est en Nouvelle-Écosse, au Québec et au Nouveau Brunswick que la proportion de la superficie appartenant aux producteurs exploitants est la plus forte, soit 91,0 %, 84,0 % et 83,5 % respectivement, et à Terre Neuve et Labrador qu'elle est la plus faible (31,2 %).
2006 | 2011 | |
---|---|---|
Canada | 66,1 | 64,6 |
Terre-Neuve-et-Labrador | 33,4 | 31,2 |
Île-du-Prince-Édouard | 78,2 | 77,5 |
Nouvelle-Écosse | 88,6 | 91,0 |
Nouveau-Brunswick | 84,1 | 83,5 |
Québec | 84,7 | 84,0 |
Ontario | 72,2 | 70,7 |
Manitoba | 67,3 | 66,0 |
Saskatchewan | 65,7 | 64,3 |
Alberta | 61,8 | 59,9 |
Colombie-Britannique | 56,4 | 56,1 |
Source : Tableau préparé par les auteurs à partir de données tirées de Statistique Canada, « Tableau 004 0001, Recensement de l'agriculture, nombre et superficie des fermes et mode d'occupation des terres agricoles, Canada et provinces », CANSIM (base de données), consultée le 6 août 2014.
Bien que la plus grande partie des terres agricoles canadiennes appartiennent à des producteurs exploitants, la proportion des terres qu'ils possèdent diminue d'année en année depuis le recensement de 1976. En revanche, la proportion de terres louées a augmenté durant la même période. En effet, la location est un mode d'occupation de plus en plus privilégié en raison, entre autres, du vieillissement de la population agricole et de l'augmentation du prix des terres agricoles11.
Depuis 1985, année où Financement agricole Canada a commencé à publier la valeur des terres agricoles au Canada, c'est en 2013 que s'est produite la plus forte augmentation annuelle, soit un bond de 22,1 % par rapport à l'année précédente, qui avait déjà battu un record avec une hausse de 19,5 %. Cependant, l'augmentation a été moins forte en 2014, se situant à 14,3 %.
Comme le montre la figure 1, la Saskatchewan, le Québec et l'Ontario sont les provinces où la valeur des terres agricoles a le plus augmenté au cours de 2014, soit de 18,7 %, 15,7 % et 12,4 % respectivement. La même année, elle a aussi augmenté dans les autres provinces, sauf à Terre Neuve Labrador, où elle n'a pas changé depuis quatre ans12.
Source : Figure préparée par les auteurs à partir de données tirées de Financement agricole Canada, Rapport Valeur des terres agricoles 2014, avril 2015.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer l'évolution du prix des terres au Canada, notamment le prix des céréales, des oléagineux et des bovins. La concurrence autour de l'achat des terres et la faiblesse des taux d'intérêt en vigueur ont également exercé une pression à la hausse sur la valeur des terres13.
Il est raisonnable de penser que cette hausse relativement rapide du prix des terres agricoles au Canada pourrait attiser la convoitise d'investisseurs étrangers de même que celle d'investisseurs canadiens en quête d'occasions de placements profitables. À cet égard, de grandes institutions financières et certains fonds d'investissement ont acquis récemment de grandes superficies, et ce, dans tout le Canada. Parmi eux figurent de grands acteurs canadiens, dont Agcapita LP, Assiniboboia Capital Corp., la Banque Nationale du Canada, Bonnefield Canadian Farmland LP, Pangea, ainsi que Walton International. Parmi les firmes étrangères, on retrouve la firme américaine Hancock Agricultural Investment Group, une filiale américaine de la Financière Manuvie, qui a fait l'acquisition en 2009 de Canneberges Bécancour, entreprise agricole québécoise possédant 450 hectares14.
À l'heure actuelle, il est difficile de dresser un tableau précis de la propriété des terres agricoles au Canada15. Le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO) a mené une étude sur l'acquisition des terres agricoles par des non-agriculteurs au Québec. Il conclut dans son rapport que l'accaparement des terres demeure marginal dans la province. En effet, il note qu'en 2012, seulement 0,2 % de la superficie des terres agricoles appartenait à des propriétaires domiciliés hors de la province 16. Avant la publication de ce rapport, des chercheurs de l'Université de Guelph avaient effectué une étude en 2010 et avaient conclu que des étrangers habitant à l'extérieur du Canada étaient propriétaires de seulement 3 % des terres données en location en Ontario17. Ainsi, l'accaparement des terres agricoles au Canada ne semble pas se produire dans la même mesure que dans les pays de l'Afrique ou de l'Asie.
Toutefois, il est intéressant de noter que les sociétés sont de plus en plus présentes sur le marché foncier agricole. Par exemple, un document publié par l'Union nationale des fermiers en 2015 signale que Walton International, une multinationale d'investissement dans l'immobilier dont le siège est Calgary et dont le financement peut provenir d'investisseurs étrangers, possède 13 000 acres (environ 5 260 hectares) en Ontario18. En Saskatchewan, Assiniboia Capital Corp, la plus importante société d'investissement dans les terres agricoles au Canada, possède 115 000 acres19. Elle contrôle ainsi l'équivalent de 150 entreprises agricoles.
Les gouvernements de plusieurs pays en développement prônent une politique d'ouverture envers les investisseurs étrangers, à condition d'obtenir de ces derniers la promesse qu'ils participeront au développement des infrastructures du pays. Cette situation soulève toutefois des questions lorsque l'objectif de l'acquisition de terres est de produire et d'exporter des denrées agricoles vers le pays d'origine des investisseurs dans le but d'assurer la sécurité alimentaire de ce dernier20. L'accaparement des terres agricoles est donc d'autant plus problématique qu'il touche plusieurs pays en développement où la sécurité alimentaire est un enjeu majeur. Dans certains pays, comme la Chine, la sécurité alimentaire est même synonyme de sécurité nationale21.
En plus d'assurer l'approvisionnement alimentaire de leur pays d'origine, les investisseurs étrangers sont également motivés par la perspective de profits qu'ouvre l'acquisition de ces terres. Toutefois, ces profits sont souvent dégagés au détriment des populations locales. En effet, les communautés locales participent rarement au processus de consultation qui précède les transactions relatives à l'acquisition de terres par des investisseurs étrangers22. De plus, les négociations entre ceux-ci et les propriétaires locaux manquent souvent de transparence et peuvent être déséquilibrées. Dans bien des cas, les populations locales touchées par l'arrivée d'investisseurs étrangers près de chez elles sont contraintes de se déplacer, ce qui entraîne d'autres problèmes sociaux. Enfin, l'indemnisation des populations déplacées est souvent insuffisante23.
Au Canada, les inquiétudes que soulève l'accaparement des terres agricoles ne concernent pas seulement les investisseurs étrangers, mais aussi les investisseurs canadiens. Par exemple, la Fédération de la relève agricole du Québec souligne que la menace de l'acquisition des terres agricoles ne vient pas seulement de l'extérieur, mais également du Canada, par l'intermédiaire d'instruments tels que les fonds d'investissement 24.
La principale préoccupation est l'impact sur le prix des terres agricoles au pays. Dans un contexte d'inflation du prix de ces terres, il est permis de croire que leur transfert à la relève agricole, dans un cadre familial ou non, pourrait être compromis. En effet, le financement de l'achat des terres agricoles est un enjeu majeur, autant pour les nouveaux agriculteurs que pour la relève agricole au Canada25.
La Constitution du Canada attribue aux provinces canadiennes de légiférer en matière de propriété des terres agricoles au pays26 , y compris tous les aspects du droit de propriété et de ses ramifications, notamment le droit relatif à la location et aux successions, ainsi que la réglementation de l'urbanisme et de l'utilisation des terres agricoles27. Les provinces peuvent aussi réglementer l'acquisition de parcelles de terre par des personnes qui ne résident pas sur leur territoire ou qui ne possèdent pas la citoyenneté canadienne.
Le pouvoir des provinces d'interdire ou de limiter l'acquisition de parcelles de terre par des personnes qui ne résident pas sur leur territoire a été confirmé par la Cour suprême du Canada en 1975. En effet, dans l'affaire Morgan c. Procureur général de l'Île du Prince Édouard28 , la Cour a validé une loi de l'Île du Prince Édouard qui interdisait aux non-résidents de la province de devenir propriétaires d'une parcelle de terre d'une superficie supérieure à 10 acres (environ 4 hectares) sans l'accord du lieutenant-gouverneur en conseil (le Conseil des ministres de la province).
Quant aux personnes qui résident légalement au Canada, mais qui n'ont pas obtenu le statut de citoyen, il n'est pas certain que ce soient les provinces qui aient la compétence constitutionnelle nécessaire pour limiter leur droit d'acquérir une parcelle de terre sur leur territoire. En effet, selon la Constitution canadienne, c'est le Parlement du Canada qui a compétence exclusive pour ce qui est de légiférer sur les questions relatives à la citoyenneté et aux étrangers. Dans un commentaire formulé dans le cadre de l'affaire Morgan, la Cour suprême a laissé entendre, sans toutefois trancher, que les provinces pourraient peut-être restreindre la propriété des terres par des non-citoyens29.
Quoi qu'il en soit, le gouvernement fédéral a réglé la question en 1977 en déléguant ce pouvoir aux provinces. À cet effet, l'article 35 de la Loi sur la citoyenneté30 permet aux provinces d'adopter un règlement visant à interdire ou à limiter « l'acquisition directe ou indirecte […] de droits sur des biens immeubles situés dans la province par des non-citoyens ou par des personnes morales ou associations qui sont en fait contrôlées par des non-citoyens31 ».
La Loi sur la citoyenneté ne leur permet cependant pas d'interdire ou de limiter l'acquisition de terres par des personnes ayant obtenu le statut de résident permanent aux termes de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, ni d'imposer de restriction qui 32 :
La Loi sur Investissement Canada est le principal mécanisme régissant l'examen de l'investissement étranger au Canada. Toutefois, les investissements étrangers dans une société agricole canadienne, peu importe la valeur de ces investissements, ne sont pas assujettis au processus de révision, à moins d'être susceptibles de porter atteinte à la sécurité nationale34. Ainsi, le gouvernement fédéral aurait la possibilité de refuser un investissement étranger concernant l'acquisition d'une terre agricole au Canada s'il est établi que cet investissement porte atteinte à la sécurité nationale.
Six provinces et un territoire ont adopté des mesures législatives visant à interdire ou à limiter l'acquisition de terres par des étrangers, des non-résidents ou des sociétés, soit l'Île du Prince Édouard, le Québec, le Manitoba, la Saskatchewan, l'Alberta, la Colombie-Britannique et le Yukon. Un tableau récapitulatif des restrictions en vigueur dans ces provinces et dans ce territoire est présenté en annexe.
À l'Île-du-Prince-Édouard, l'acquisition de terres agricoles est assujettie aux dispositions de la Lands Protection Act35.
Aucune personne ne peut posséder plus de 1 000 acres (environ 404 hectares) ou une société, plus de 3 000 acres (environ 1 214 hectares) de terres dans la province36.
En outre, la Lands Protection Act dispose que les personnes ne résidant pas dans la province pendant au moins183 jours au cours d'une année et les sociétés, y compris les coopératives et les associations sans but lucratif, ne peuvent acquérir plus de 5 acres (environ 2 hectares) de terres sans l'autorisation du gouvernement provincial 37. Sont exemptées de cette règle les acquisitions de terres résultant d'un don, d'un legs ou de la succession d'un conjoint, d'un frère ou d'une sœur ou d'un descendant ou ascendant en ligne directe38.
Au Québec, l'acquisition de terres agricoles est assujettie aux dispositions de la Loi sur l'acquisition de terres agricoles par des non-résidents (LATANR)39. Selon cette loi, seules les personnes qui résident au Québec – au sens de la LATANR40 – et les sociétés contrôlées par des personnes qui résident au Québec peuvent acquérir de terre agricole dont la superficie dépasse 4 hectares (environ 10 acres).
La LATANR prévoit que ni les non-résidents du Québec ni les sociétés non contrôlées par des personnes qui résident au Québec41 ne peuvent acquérir de terre agricole dont la superficie dépasse 4 hectares sans l'autorisation de la Commission de protection du territoire agricole du Québec42. Toutefois, cette autorisation est délivrée automatiquement lorsque la terre visée n'est pas propice à la culture du sol ou à l'élevage d'animaux ou lorsqu'un non-résident démontre qu'il a l'intention de s'établir au Québec et de devenir citoyen canadien ou résident permanent du Canada43.
La Commission peut également accorder à un non-résident ou à une société non contrôlée par des personnes qui résident au Québec la permission d'acquérir une terre agricole après avoir considéré les éléments suivants :
Cela dit, la LATANR ne permet pas à la Commission d'autoriser l'acquisition de plus de 1 000 hectares (environ 2 470 acres) de terres agricoles par année par des non-résidents ou des sociétés non contrôlées par des résidents du Québec, sauf si les non-résidents ont l'intention de s'établir au Québec44.
Au Manitoba, l'acquisition de terres agricoles est assujettie à la Loi sur la propriété agricole45 et au Règlement sur la propriété agricole46.
Aux termes de la Loi sur la propriété agricole, les citoyens canadiens et les résidents permanents du Canada, ainsi que les sociétés contrôlées par des citoyens canadiens et des résidents permanents du Canada, peuvent acquérir une terre agricole, quelle qu'en soit la superficie. Les personnes qui ne sont ni citoyens canadiens ni résidents permanents du Canada et les sociétés qui ne sont pas contrôlées par des citoyens canadiens ni par des résidents permanents du Canada ne peuvent généralement pas acquérir de terres agricoles dont la superficie totale est supérieure à 40 acres (environ 16 hectares) 47. Néanmoins, la Commission agricole du Manitoba peut permettre à une personne ou une entité qui ne peut normalement le faire d'acquérir une terre agricole d'une superficie totale de plus de 40 acres dans les cas suivants :
En Saskatchewan, l'acquisition de terres agricoles est assujettie aux dispositions de la Saskatchewan Farm Security Act49.
Aux termes de cette loi, seules les personnes ayant la citoyenneté canadienne ou résidant au Canada au moins 183 jours au cours d'une année, ainsi que les sociétés contrôlées par des citoyens canadiens, ou par des personnes résidant au Canada au moins 183 jours au cours d'une année, et non cotées en bourse, peuvent posséder des terres agricoles, quelle qu'en soit la superficie.
Les personnes qui n'ont pas la citoyenneté canadienne ou ne résidant pas au Canada au moins 183 jours au cours d'une année ne peuvent posséder plus de 10 acres (environ 4 hectares) de terres agricoles50. Il en est de même pour les sociétés cotées en bourse et pour celles qui ne sont pas contrôlées par des personnes qui ont la citoyenneté canadienne ou résidant au Canada au moins 183 jours au cours d'une année51.
La Saskatchewan Farm Security Act prévoit cependant des exemptions permettant aux non-résidents canadiens et aux sociétés d'acquérir des terres agricoles au-delà de ces limites dans certains cas. Par exemple, un non-résident peut acquérir une terre agricole appartenant à des membres de sa famille qui résident au Canada ou posséder, pendant une période maximale de cinq ans, des terres agricoles qui lui ont été attribuées par succession 52. Enfin, un non-résident ou une société qui n'en aurait pas le droit peut demander à la Farm Security Board l'autorisation d'acquérir plus de 10 acres de terres agricoles53.
En Alberta, l'acquisition de terres agricoles par des étrangers est assujettie au Règlement sur la propriété de terres appartenant à des étrangers54.
Le Règlement interdit aux personnes qui n'ont pas la citoyenneté canadienne ou qui n'ont pas le statut de résident permanent du Canada ainsi qu'aux sociétés qui ne sont pas sous le contrôle de citoyens canadiens ou de résidents permanents du Canada d'acquérir plus de deux parcelles d'une superficie totale de 20 acres (environ 8 hectares). Le Règlement ne limite pas la superficie des terres que les citoyens canadiens, les résidents permanents au Canada et les sociétés contrôlées par des citoyens canadiens ou des résidents permanents du Canada peuvent acquérir en Alberta.
La Colombie-Britannique n'interdit pas ni ne limite strictement le fait pour un étranger ou une société d'être propriétaire de terres agricoles. Toutefois, la Land Act55 dispose que le gouvernement provincial ne peut vendre des terres de la Couronne qu'aux citoyens canadiens, aux résidents permanents du Canada 56 ou aux sociétés et associations constituées ou enregistrées dans la province57.
Le Yukon n'interdit pas ni ne limite strictement le fait pour un étranger ou une société d'être propriétaire de terres agricoles. En revanche, le Règlement concernant l'administration et l'aliénation des terres du Yukon58 prévoit que la vente de nouvelles terres agricoles (nouveaux lotissements) par le gouvernement territorial est réservée :
L'achat de terres agricoles au Canada par des intérêts étrangers ou canadiens inquiète plusieurs intervenants agricoles. Ces derniers craignent que l'acquisition de ces terres par des spéculateurs fonciers nuise aux agriculteurs canadiens en empêchant, par exemple, la relève agricole d'accéder à la propriété foncière.
Certaines provinces limitent l'acquisition de terres agricoles par des étrangers. En raison du manque de données, il est cependant difficile d'établir l'efficacité de ces restrictions – et la mesure dans laquelle les terres agricoles appartiennent à des étrangers. Cela dit, et contrairement à la situation dans certaines autres régions du monde, l'accaparement des terres agricoles par des étrangers semble relativement marginal au Canada.
Par contre, l'acquisition de terres agricoles par des investisseurs canadiennes semble prendre de l'ampleur. De fait, parmi les récentes acquisitions de terres agricoles qui ont suscité la controverse, plusieurs ont été effectuées par des entités canadiennes et non par des étrangers.
† Les études générales de la Bibliothèque du Parlement sont des analyses approfondies de questions stratégiques. Elles présentent notamment le contexte historique, des informations à jour et des références, et abordent souvent les questions avant même qu'elles deviennent actuelles. Les études générales sont préparées par le Service d'information et de recherche parlementaires de la Bibliothèque, qui effectue des recherches et fournit des informations et des analyses aux parlementaires ainsi qu'aux comités du Sénat et de la Chambre des communes et aux associations parlementaires, et ce, de façon objective et impartiale. [ Retour au texte ]
Les transactions d'envergure :
Île-du-Prince-Édouard | Québec | Manitoba | Saskatchewan | Alberta | Colombie-Britannique (acquisition de terres de la Couronne seulement) | Yukon (nouveaux lotissements seulement) | |
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Personnes ou entités visées par les restrictions |
Toutes les personnes. |
Non-résidents de la province (36 mois au cours des 48 derniers). |
Non-citoyens canadiens et non‑résidents permanents du Canada. |
Non-citoyens canadiens et personnes n'ayant pas résidé au Canada 183 jours ou plus par année. |
Non-citoyens canadiens et non‑résidents permanents du Canada. |
Non-citoyens canadiens et non‑résidents permanents du Canada. |
Non-citoyens canadiens et non‑résidents du territoire (1 an). |
Limite de superficie |
Toutes les personnes : Non-résidents : Sociétés : 5 acres (environ 2 hectares). |
Dans tous les cas, 4 hectares (environ 10 acres). | Dans tous les cas, 40 acres (environ 16 hectares). | Dans tous les cas, 10 acres (environ 4 hectares). | Deux parcelles d'une superficie totale de 20 acres (environ 8 hectares). | Aucune acquisition de terres de la Couronne n'est permise. | Aucune acquisition de terres agricoles n'est permise (nouveaux lotissements). |
Autorisation de dépasser la limite |
Oui, avec l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil. Pour acquérir plus de 5 acres (non-résident) ou plus de 5 acres et jusqu'à 3 000 acres (société). |
Oui, avec l'autorisation de la Commission de protection du territoire agricole du Québec. Pour acquérir plus de 4 hectares. Maximum de 1 000 hectares par année en tout |
Oui, avec l'autorisation de la Commission agricole du Manitoba. Pour acquérir plus de 40 acres (certaines personnes ou entités seulement). |
Oui, avec l'autorisation de la Farm Land Security Board. Pour acquérir plus de 10 acres. |
Non. | Non. | Non. |
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