La production aquacole a connu d’importantes augmentations au cours des 35 dernières années, tant au Canada qu’à l’échelle mondiale. La Colombie Britannique domine la production canadienne de poissons (principalement le saumon), tandis que l’Île-du-Prince-Édouard domine la production canadienne de mollusques et de crustacés. En 2019, 187 026 tonnes de fruits de mer ont été produites par le secteur canadien de l’aquaculture, dont la valeur est estimée à plus de 1,2 milliard de dollars, contribuant ainsi aux économies locales de nombreuses petites collectivités côtières.
Le cadre réglementaire de l’industrie canadienne de l’aquaculture est partagé entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Ce qui complique davantage les choses, c’est que ces responsabilités réglementaires diffèrent d’une province à l’autre. En plus des récentes réformes réglementaires, une loi fédérale sur l’aquaculture a été proposée en vue de clarifier le partage des pouvoirs et de simplifier le régime de réglementation pour l’industrie et le grand public. Les travaux en vue d’une telle loi fédérale ont commencé.
En plus de l’incertitude réglementaire, l’industrie canadienne de l’aquaculture continue également à être confrontée à des défis, notamment les préoccupations au sujet des répercussions environnementales, les perceptions négatives du public et la concurrence mondiale. Cependant, de nombreuses possibilités, comme les technologies émergentes, la participation accrue des Autochtones et la transparence de l’industrie, se profilent également à l’horizon.
L’aquaculture fait partie de l’économie canadienne depuis des décennies, et une aquaculture respectueuse de l’environnement pourrait être la pierre angulaire d’une économie bleue durable à long terme.
L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) explique que
l’aquaculture concerne la production d’animaux (y compris les crustacés, les poissons et les mollusques) et de végétaux (y compris les algues et les macrophytes d’eau douce) […] dans les zones intérieures (eau douce) et côtières (eau saumâtre, eau de mer) 1.
La présente étude générale porte sur la production aquacole au Canada, les perspectives d’emploi qu’elle favorise et le cadre réglementaire unique entourant l’industrie, y compris les récentes réformes réglementaires. Y sont également examinés certains des défis et des possibilités en perspective dans ce secteur au Canada.
Au Canada, 45 espèces de poissons, de mollusques et crustacés et d’algues marines sont cultivés à des fins commerciales 2. La production côtière de poissons dans des parcs en filet est le type d’aquaculture le plus courant au pays. Il existe également de nombreuses autres formes de production aquacole, notamment les parcs en filet en eau douce, les systèmes basés à terre et la culture à plat ou mise en valeur dans les zones intertidales (voir la figure 1) 3.
Source : Gouvernement du Canada, Profils des espèces d’élevage.
En 2019, la production aquacole du Canada s’est élevée à 187 026 tonnes, d’une valeur de plus de 1,2 milliard de dollars 4, le saumon de l’Atlantique venant en tête de la production et de la valeur pour les poissons, et les huîtres pour les mollusques et crustacés.
L’industrie a connu une croissance considérable au fil des ans. Les statistiques sur la production aquacole de Pêches et Océans Canada (MPO) sont disponibles depuis 1986. Cette année-là, 10 488 tonnes ont été produites au Canada, d’une valeur de 35,1 millions 5 de dollars (soit environ 73 millions en dollars de 2019). À l’époque, les espèces de poissons d’élevage étaient le saumon, la truite et la truite arc-en-ciel, tandis que les mollusques et crustacés étaient surtout des huîtres et des moules.
En comparaison, en 2018, le secteur canadien des pêches commerciales (c.-à-d. la pêche de capture) a débarqué 838 510 tonnes de fruits de mer, d’une valeur de plus de 3,74 milliards de dollars, ce qui comprend les pêches commerciales en eau douce et en mer 6.
En 2019, la production canadienne de poissons était dominée par la Colombie Britannique, tandis que la production de mollusques et de crustacés était la plus importante à l’Île-du-Prince-Édouard. Les deux provinces représentaient environ 60 % de la production globale dans leurs catégories respectives (voir les tableaux 1 et 2).
Province | Production (tonnes) |
Valeur (millions de dollars) |
---|---|---|
Colombie-Britannique | 90 595 | 681,7 |
Ontario | 5 887 | 38,1 |
Québec | 920 | 7,7 |
Nouveau-Brunswick | 22 395 | 188,4 |
Nouvelle-Écosse | 8 202 | 69,6 |
Île-du-Prince-Édouard | 492 | 4,1 |
Terre-Neuve-et-Labrador | 14 167 | 118,0 |
Canada | 143 820 | 1 114,3 |
Note: Pêches et Océans Canada ne produit pas de statistiques de production et de valeur pour le Manitoba, la Saskatchewan et l’Alberta afin de respecter les exigences de confidentialité de la Loi sur la statistique. Toutefois, les statistiques de production et de valeur de ces provinces sont incluses dans les totaux du Canada.
Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Pêches et Océans Canada, « Production aquacole du Canada en 2019 (tonnes) », Production d’aquaculture en quantité et en valeurs; et Pêches et Océans Canada, « Production aquacole du Canada en 2019 (000 $) », Production d’aquaculture en quantité et en valeurs.
Province | Production (tonnes) |
Valeur (millions de dollars) |
---|---|---|
Colombie-Britannique | 9 684 | 26,9 |
Ontario | 14 | 0,7 |
Québec | 375 | 2,8 |
Nouveau-Brunswick | 1 898 | 17,1 |
Nouvelle-Écosse | 1 996 | 12,5 |
Île-du-Prince-Édouard | 25 751 | 50,3 |
Terre-Neuve-et-Labrador | 3 488 | 5,4 |
Canada | 43 206 | 115,8 |
Note: Pêches et Océans Canada ne produit pas de statistiques de production et de valeur pour le Manitoba, la Saskatchewan et l’Alberta afin de respecter les exigences de confidentialité de la Loi sur la statistique. Toutefois, les statistiques de production et de valeur de ces provinces sont incluses dans les totaux du Canada.
Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Pêches et Océans Canada, « Production aquacole du Canada en 2019 (tonnes) », Production d’aquaculture en quantité et en valeurs; et Pêches et Océans Canada, « Production aquacole du Canada en 2019 (000 $) », Production d’aquaculture en quantité et en valeurs.
En 2019, le Canada a déclaré plus de 260 établissements aquacoles. La répartition par taille de ces établissements était établie comme suit :
La plupart des entreprises aquacoles canadiennes sont des petites ou des microentreprises, et seulement neuf d’entre elles sont des moyennes entreprises. En 2019, le MPO a déclaré que plus de 3 700 Canadiens travaillaient directement dans l’industrie de l’aquaculture 8.
Au Canada, les responsabilités à l’égard de la gestion de l’industrie sont partagées entre les gouvernements fédéral et provinciaux, et ces responsabilités varient d’une province à l’autre. Deux provinces, la Colombie-Britannique et l’Île-du-Prince-Édouard ont conclu des ententes spéciales avec le gouvernement fédéral pour certains aspects de la gestion de l’aquaculture sur leur territoire.
Une décision de 2009 de la Cour suprême de la Colombie-Britannique (l’arrêt Morton) 9 a classé l’aquaculture dans cette province comme « une pêche », et comme les pêches relèvent de la compétence fédérale, le gouvernement fédéral a été confirmé comme principal organisme de réglementation de l’aquaculture dans cette province. Le 10 décembre 2010, les gouvernements fédéral et de la Colombie-Britannique ont signé un protocole d’entente appelé Accord Canada–Colombie-Britannique sur la gestion de l’aquaculture, qui précise les rôles et les responsabilités de chaque ordre de gouvernement en ce qui concerne l’aquaculture 10.
À l’Île-du-Prince-Édouard, le gouvernement provincial a conclu une entente avec le MPO et l’industrie aquacole en 1928 pour mettre sur pied le Conseil de gestion des concessions aquacoles de l’Île-du-Prince-Édouard 11. En vertu de cette entente, le Conseil réglemente l’accès à la ressource, gère les dossiers de biens immobiliers et veille au respect du bail, entre autres choses. Composé de représentants des gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que de membres de l’industrie, il fournit des conseils et une orientation au MPO au sujet de divers aspects de l’industrie gérés par le gouvernement fédéral. Le MPO conserve sa compétence à l’égard de la délivrance des baux aquacoles par l’intermédiaire de sa Division des baux d’aquaculture de l’Île-du-Prince-Édouard 12.
À ce jour, il n’y a pas eu de décisions judiciaires ou d’ententes semblables touchant d’autres provinces, ce qui signifie que la gestion de l’industrie de l’aquaculture y demeure une responsabilité partagée entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Le tableau 3 présente les principales responsabilités liées à la gestion de l’aquaculture et l’ordre de gouvernement responsable de chacune.
Responsabilités liées à la gestion de l’aquaculture | Colombie-Britannique | Reste du Canada | Île-du-Prince-Édouard |
---|---|---|---|
Approbation du site : Déterminer l’emplacement possible de la ferme |
Partagé | Provincial | Partagé |
Gestion du site : Surveillance du milieu (fond marin) où la ferme sera exploitée |
Provincial | Provincial | Fédéral |
Exploitation et surveillance quotidiennes : Surveillance des activités aquacoles |
Fédéral | Provincial | Fédéral |
Introductions et transferts : Gestion des mouvements prévus des œufs vivants et des poissons |
Partagé | Partagé | Partagé |
Approbation des médicaments et des pesticides : Détermination des médicaments et pesticides pouvant être utilisés |
Partagé | Partagé | Partagé |
Salubrité : Surveillance de la salubrité et de la qualité du poisson récolté et vendu sur les marchés canadiens et internationaux |
Fédéral | Fédéral | Fédéral |
Source: Tableau préparé par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Gouvernement du Canada, Infographie : Réglementation de la pisciculture au Canada.
La Loi sur les pêches 13 confère au ministre des Pêches et des Océans (par le biais du MPO) le pouvoir de « réglementer l’industrie de l’aquaculture dans le but de protéger le poisson et son habitat. Cette [l]oi définit les pouvoirs en ce qui concerne l’attribution de permis de pêche, la gestion et la protection des pêches et la prévention de la pollution 14. »
Plusieurs règlements relevant de la Loi sur les pêches concernent la gestion des activités aquacoles au Canada. Les plus importants sont le Règlement du Pacifique sur l’aquaculture et le Règlement sur les activités d’aquaculture 15.
Mis en œuvre en 2010, le Règlement du Pacifique sur l’aquaculture fournit le cadre dans lequel les activités aquacoles (c.-à-d. les activités menées dans des installations en milieu marin, en eau douce et terrestres) ont lieu en Colombie-Britannique et décrit les exigences relatives à l’octroi des permis d’aquaculture 16.
Mis en œuvre en 2015, le Règlement sur les activités d’aquaculture « précise les conditions dans lesquelles les exploitants aquacoles pourront traiter leurs poissons contre les maladies et les parasites, déposer des matières organiques, ainsi que gérer leurs installations en vertu des articles 35 et 36 de la Loi sur les pêches 17 » dans toutes les provinces, sauf la Colombie-Britannique. Le Règlement sur les activités d’aquaculture impose également des exigences en matière de production de rapports, ainsi qu’en matière d’échantillonnage et de surveillance environnementale.
Les producteurs aquacoles sont tenus de déclarer certains types de renseignements concernant leurs installations chaque année, et le MPO communique maintenant ces renseignements au public par le biais du Portail du gouvernement ouvert 18. Des données sont disponibles pour les installations terrestres, en eau douce et en milieu marin. L’information publiée est propre à l’installation et comprend les cas où
Le MPO offre des renseignements supplémentaires propres aux installations aquacoles de la Colombie-Britannique sur les échappées (c.-à-d. les poissons qui s’échappent de leurs enclos), la surveillance benthique (c.-à-d. la surveillance du fond océanique sous les enclos à poissons) et d’autres sujets.
Les exigences en matière de production de rapports et de la fréquence de ceux-ci sont énoncées dans les règlements ou dans les conditions énumérées dans les permis d’aquaculture 20. Les rapports publics concernant les données sur l’aquaculture visent à « accroître la transparence et la responsabilisation [de l’industrie] 21 ».
En vertu des règlements d’application de la Loi sur les pêches, les installations aquacoles doivent être surveillées et inspectées. Entre 2011 et 2019, 2 494 inspections ont été menées, 476 infractions ont été signalées et 19 accusations ont été portées (voir la figure 2) 22.
Source: Figure préparée par la Bibliothèque du Parlement à partir de données tirées de Gouvernement du Canada, « Aperçu des résultats », Gestion de l’aquaculture canadienne.
Les accusations portaient sur des infractions de déclaration, le transport illégal, le dépassement de la quantité de biomasse permise, les activités se déroulant à l’extérieur de la période ou de la zone désignée et les tentatives d’entrave d’action des agents des pêches. Des accusations ne sont pas toujours portées dans les cas de non-conformité, et cette décision dépend de la gravité de l’infraction. En plus de porter des accusations, les agents d’application de la loi peuvent recommander de l’éducation, exiger des changements ou émettre des avertissements. « Une méthode de gestion des risques est utilisée pour déterminer la fréquence d’inspection et les exploitations devant être inspectées 23. »
L’idée d’une loi fédérale sur l’aquaculture fait l’objet de discussions depuis des années. Cependant, la compétence partagée dans ce domaine entre les gouvernements fédéral et provinciaux rend complexe la rédaction d’une future loi. Pour compliquer davantage les choses, les pouvoirs divisés sont partagés différemment entre les deux ordres de gouvernement dans certaines provinces, ce qui rend plus difficile l’application du cadre réglementaire.
À l’issue de la réunion du Conseil canadien des ministres des Pêches et de l’aquaculture en décembre 2018, les ministres « [ont convenu] d’élaborer une loi fédérale sur l’aquaculture, qui visera à améliorer la transparence du secteur, faciliter l’adhésion à de meilleures pratiques, et offrir à l’industrie une plus grande cohérence et une certitude plus importante 24. »
Comme l’indique la section 5 de la présente étude générale, l’industrie canadienne de l’aquaculture relève de la compétence fédérale en vertu de la Loi sur les pêches. Cependant, la Loi sur les pêches n’a pas été conçue à l’origine pour réglementer cette industrie, mais bien pour réglementer et gérer les pêches de capture 25. Une nouvelle loi fédérale sur l’aquaculture aurait les objectifs suivants :
Le MPO a pris certaines mesures concernant le projet de loi sur l’aquaculture. En 2019, le MPO a tenu plus de 20 séances de consultation partout au Canada; des activités de consultation en ligne ont également eu lieu 27. La lettre de mandat de 2019 de la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne comprenait la tâche d’amorcer « les travaux en vue d’introduire la toute première Loi sur l’aquaculture du Canada 28 ». En 2020, le MPO a publié un document de travail intitulé Une loi canadienne sur l’aquaculture, qui décrivait les principaux éléments et pouvoirs qui seraient inclus dans le projet de loi fédéral sur l’aquaculture 29.
Plus récemment, le gouvernement fédéral a publié sur son site Web les principaux articles qu’il propose d’ajouter à un projet de loi sur l’aquaculture 30. Cela comprend des dispositions qui seraient reprises de la Loi sur les pêches et de nouvelles dispositions à rédiger.
Les répercussions négatives potentielles de la production aquacole sur l’environnement représentent un défi constant pour l’industrie depuis des décennies. Contrairement à l’agriculture traditionnelle, l’aquaculture (à l’exception des installations terrestres) a lieu dans les eaux publiques, et sa mauvaise gestion peut entraîner des répercussions néfastes importantes sur l’environnement. Les préoccupations suivantes sont souvent citées :
En tant que ministère chargé de réglementer l’aquaculture au niveau fédéral, le MPO est également responsable de la communication de l’information sur l’industrie. Compte tenu des préoccupations relatives aux répercussions environnementales, il faut améliorer la communication des résultats scientifiques qui sous-tendent les décisions du gouvernement. Dans un rapport publié en décembre 2018, le Comité d’experts indépendant sur les sciences de l’aquaculture a indiqué qu’il « a parfois trouvé difficile d’accéder à l’information sur les rapports scientifiques, les programmes de recherche et les résultats des recherches » liés à l’aquaculture sur le site Web du MPO. Le Comité a recommandé que le MPO crée un portail d’information sur l’aquaculture et adapte l’information aux publics cibles, comme le grand public, les scientifiques et l’industrie. Cette approche permettrait de « communiquer au niveau approprié l’information sur les conclusions scientifiques, les incertitudes dans le domaine des sciences, ainsi que les décisions ayant un fondement scientifique 32 ».
La Commission d’enquête Cohen sur le déclin des populations de saumon rouge du fleuve Fraser a été créée par le gouvernement du Canada en 2009 33. Le rapport final de la Commission, publié en 2012, comprenait 75 recommandations, dont 13 portaient sur l’aquaculture. Une recommandation suggérait que les installations aquacoles situées dans les îles Discovery soient interdites, en attendant que des recherches plus poussées soient menées sur leurs répercussions sur les stocks de saumon rouge sauvage.
En 2010, le MPO a produit un rapport sur la faisabilité de déplacer l’aquaculture de la Colombie-Britannique vers des installations en parc clos (c.-à-d. des installations aquacoles qui limitent les interactions avec l’environnement aquatique, qui peuvent être terrestres ou flottantes) 34. La salmoniculture en parc clos a également été étudiée en 2013 par le Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes, et l’aquaculture en général a été étudiée par le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans en 2016 35.
Plus récemment, le MPO a évalué les risques posés par neuf agents pathogènes connus pour causer des maladies dans les exploitations aquacoles de la région des îles Discovery, et a estimé que le risque pour les populations de saumon rouge sauvage du fleuve Fraser était « minime » dans les neuf cas 36. Cette conclusion a toutefois été critiquée parce qu’elle ne semblait pas tenir compte du transfert du pou du poisson des saumons d’élevage aux stocks de saumon sauvage ni de l’état fragile actuel de ces stocks en Colombie-Britannique 37.
En décembre 2020, à la suite de consultations avec les Premières Nations locales, la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne a annoncé que les installations de salmoniculture dans la région des îles Discovery seraient éliminées progressivement dans les 18 mois, qu’aucun nouveau poisson ne pouvait être introduit dans les installations existantes de la zone, et que toutes les installations d’aquaculture de la zone seraient exemptes de poisson d’ici au 30 juin 2022, à l’exception des poissons existants qui n’avaient pas encore terminé leur cycle de croissance 38. La décision a touché 19 installations aquacoles dans la région, dont neuf étaient déjà mises en jachère (c.-à-d. qu’aucun poisson n’était cultivé) au moment de l’annonce.
En novembre 2020, le MPO a annoncé que le secrétaire parlementaire de la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne « s’engagera aux côtés des Premières Nations de la Colombie-Britannique, de l’industrie de l’aquaculture, et des intervenants environnementaux » pour assurer la transition de l’aquaculture en parcs en filet en Colombie-Britannique, bien qu’il n’ait pas été précisé ce vers quoi l’industrie ferait la transition. Les résultats du processus de mobilisation devraient être présentés à la ministre dans un rapport provisoire au printemps 2021, qui fournira une orientation sur la voie à suivre 39.
La répartition incohérente des pouvoirs concernant l’industrie de l’aquaculture au Canada ajoute également une couche de complexité réglementaire qui pourrait décourager l’expansion de l’industrie. L’objectif du gouvernement fédéral de procéder à une transition dans le secteur de l’aquaculture en parcs en filet en Colombie-Britannique pourrait engendrer une incertitude supplémentaire pour les producteurs aquacoles de cette province et d’autres régions du pays, car on ne sait pas encore à quoi ressemblerait cette transition, le délai qu’il faudrait respecter ni le coût de cette transition pour l’industrie.
L’aquaculture est une industrie mondiale; la FAO fait état d’une augmentation de la production aquacole à l’échelle mondiale de 527 % entre 1990 et 2018 40. La FAO a également fait remarquer que le développement durable de l’aquaculture serait essentiel pour maintenir cette tendance 41. En 2018, on estimait à 20,5 millions le nombre d’emplois attribuables à l’aquaculture dans le monde, mais seulement 388 000 emplois ont été attribués à l’industrie dans les Amériques.
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a signalé qu’en 2018, le Canada se classait au 20e rang mondial en matière de production aquacole, selon le poids 42. Le Canada doit donc être en concurrence avec des producteurs beaucoup plus importants pour obtenir et conserver des marchés d’exportation. La même année, l’OCDE a indiqué que les trois principaux producteurs aquacoles étaient la Chine, l’Indonésie et l’Inde.
Tous les deux ans, le MPO publie, en partenariat avec l’Association aquacole du Canada, un examen des projets de recherche et de développement en aquaculture menés par des chercheurs de tout le Canada au cours des deux années précédentes. Ces projets couvrent divers sujets, notamment la santé des poissons, la production, les techniques d’élevage, la nutrition et les interactions environnementales 43.
L’innovation dans l’industrie est en croissance. Par exemple, la Global Salmon Initiative dresse la liste des méthodes non médicales de gestion du pou du poisson qui sont étudiées et mises à l’essai par l’industrie aquacole dans le monde entier 44. Voici des exemples de méthodes novatrices de gestion du pou du poisson :
Le Canada cultive commercialement 45 espèces de poissons, de mollusques et crustacés et d’algues marines. Ainsi, une variété de produits de la pêche canadiens peut être et est commercialisée à l’échelle nationale et internationale 46. L’industrie aquacole offre aussi des produits spécialisés de grande valeur. Par exemple, certaines installations terrestres au Canada proposent des produits tels que le caviar.
De nombreuses exploitations aquacoles canadiennes ont été accréditées par des tiers pour diverses certifications, y compris pour les pratiques exemplaires en matière d’aquaculture et pour la production durable de fruits de mer, tandis que certaines installations ont été certifiées biologiques. Ces certifications peuvent accroître la valeur marchande et les recettes et fournir « une assurance supplémentaire de pratiques responsables de cultures des fruits de mer » pour les consommateurs et le grand public 47.
De 2013 à 2018, l’Initiative d’aquaculture autochtone au Canada a permis d’accroître la participation des communautés autochtones à l’industrie aquacole du Canada 48. L’Initiative a permis d’organiser des ateliers et a aidé les communautés en leur offrant une expertise technique et en les aidant à élaborer des études de faisabilité et des projets pilotes, entre autres mesures de soutien.
Au terme de l’Initiative, du financement et du soutien ont été offerts dans le cadre de l’Initiative des pêches commerciales intégrées du Nord, qui « appuie l’expansion d’entreprises communautaires de pêche commerciale et d’exploitations aquacoles appartenant à des Autochtones 49 ». L’augmentation de la participation des Autochtones à l’industrie de l’aquaculture pourrait contribuer à son expansion, à la création d’emplois pour les communautés autochtones et à la réconciliation.
L’adoption d’une loi fédérale sur l’aquaculture pourrait contribuer à réduire l’incertitude réglementaire qui existe actuellement dans l’industrie de l’aquaculture. Cette loi pourrait aussi aider les Canadiens à mieux comprendre le cadre réglementaire dans lequel l’industrie fonctionne et la façon dont les divers ordres de gouvernement gèrent l’industrie.
Le fait de fournir des renseignements scientifiques sous une forme conviviale et de cibler les différents destinataires (p. ex. le grand public, les scientifiques ou les producteurs aquacoles) pourrait également accroître la transparence et, en fin de compte, aider à mieux informer les Canadiens au sujet de l’industrie et de ses pratiques.
L’industrie de l’aquaculture a joué un rôle de plus en plus important dans l’économie des pêches du Canada; son incidence se fait surtout sentir dans les collectivités côtières où se trouvent la plupart des installations de production. Toutefois, l’incertitude réglementaire et le coût de l’atténuation des répercussions sur l’environnement peuvent retarder l’expansion de l’industrie.
De nouvelles exigences en matière de rapports et de surveillance et une transparence accrue, combinées à une loi fédérale sur l’aquaculture, pourraient contribuer à atténuer les préoccupations du public et de l’industrie. La mise en œuvre de technologies émergentes et de solutions novatrices à des problèmes communs (p. ex. la gestion du pou du poisson) par les producteurs aquacoles pourrait également contribuer à accroître l’appui du public tout en augmentant la production et en réduisant les répercussions environnementales des installations. En dépit des défis auxquels l’industrie de l’aquaculture est confrontée, elle peut être un élément clé de l’évolution vers une économie bleue durable au Canada 50.
† Les études générales de la Bibliothèque du Parlement sont des analyses approfondies de questions stratégiques. Elles présentent notamment le contexte historique, des informations à jour et des références, et abordent souvent les questions avant même qu’elles deviennent actuelles. Les études générales sont préparées par le Service d’information et de recherche parlementaires de la Bibliothèque, qui effectue des recherches et fournit des informations et des analyses aux parlementaires ainsi qu’aux comités du Sénat et de la Chambre des communes et aux associations parlementaires, et ce, de façon objective et impartiale. [ Retour au texte ]
* La présente étude générale s’inspire de Thai Nguyen et Tim Williams, L’aquaculture au Canada, publication no 2013‑12‑F, Bibliothèque du Parlement, 28 février 2013.
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