Dans ce résumé législatif de la Bibliothèque du Parlement, tout changement d'importance depuis la publication précédente est signalé en caractères gras.
Le projet de loi C‑3, Loi modifiant le Code criminel et le Code canadien du travail, a été présenté à la Chambre des communes et lu pour la première fois le 26 novembre 2021 1. Le 6 décembre 2021, un Énoncé concernant la Charte a été déposé pour le projet de loi à la Chambre des communes 2. Le projet de loi a été lu en deuxième lecture puis a été renvoyé au Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes (HUMA) le 9 décembre 2021. Le comité HUMA a fait rapport du projet de loi avec amendements à la Chambre des communes le 15 décembre 2021 3. Le projet de loi a été lu pour une troisième fois le 16 décembre 2021 et d'autres amendements ont été proposés.
Entre-temps, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie (SOCI) a entrepris une étude préalable du projet de loi. Le comité SOCI a lui aussi rendu son rapport le 15 décembre 2021 4. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a également tenu une réunion sur les modifications proposées au Code criminel dans le projet de loi C‑3. Il a déposé son rapport au Sénat le 16 décembre 2021 5 et le projet de loi a franchi l'étape de la première lecture au Sénat ce même jour. Les étapes de la deuxième et de la troisième lecture ont été franchies le 17 décembre 2021, et le projet de loi a reçu la sanction royale ce même jour.
Le projet de loi C‑3 vise à modifier deux lois et il contient huit articles : cinq qui s'appliquent au Code criminel, deux au Code canadien du travail, et un dernier qui porte sur le moment d'entrée en vigueur du projet de loi. Les principaux articles sont abordés dans les paragraphes qui suivent.
Le projet de loi vise à créer deux nouvelles infractions criminelles et à reconnaître deux nouvelles circonstances aggravantes dans la détermination de la peine 6. L'honorable David Lametti, ministre de la Justice et procureur général du Canada, a expliqué ces modifications comme suit :
Personne ne devrait être intimidé pour avoir fourni ou cherché à recevoir des soins de santé et chacun devrait pouvoir accéder aux soins dont il a besoin sans obstruction indue. Ce genre de comportement est totalement inacceptable, en particulier pendant une pandémie mondiale où l'accès aux services de santé est essentiel pour que la société canadienne puisse se rétablir et prospérer. Aujourd'hui, nous respectons un engagement important que nous avons pris envers les Canadiens 7.
Diverses infractions criminelles existantes peuvent s'appliquer aux situations d'intimidation à l'endroit d'un travailleur de la santé ou dans le cadre d'une manifestation près d'un établissement de santé lors de laquelle des personnes subissent de l'obstruction ou de l'intimidation, en fonction des faits 8. Il s'agit notamment des dispositions suivantes du Code criminel :
La plupart des infractions criminelles portent sur une action particulière, peu importe qui est la victime. Cependant, dans le Code criminel sont aussi définies quelques infractions liées à des catégories de victimes, comme c'est le cas des nouvelles infractions proposées. En voici des exemples :
En deuxième lieu, le projet de loi modifie le Code canadien du travail (CCT) pour abroger la disposition qui fait en sorte que « soigner sa [propre] maladie ou sa blessure » est une des raisons permises pour un employé de prendre un congé personnel, et instaurer plutôt un congé payé pour raisons médicales d'un maximum de 10 jours par année civile.
L'honorable Seamus O'Regan Jr., ministre du Travail, a expliqué en ces mots la raison d'être des changements proposés au CCT par le projet de loi :
Les Canadiens ne devraient pas avoir à choisir entre rester à la maison lorsqu'ils sont malades et nourrir leur famille. Le congé de maladie payé protégera les travailleurs et leurs proches, protégera leurs emplois et leurs milieux de travail. C'est une étape importante dans la lutte contre la COVID-19 et une addition nécessaire au filet de sécurité sociale, que réclament depuis longtemps les syndicats 9.
Un amendement apporté à la Chambre des communes permet également de prolonger le congé advenant le décès d'un enfant ou si l'employé ou son épouse ou conjointe de fait vit une mortinaissance.
En vertu de la partie III du CCT, les employés d'une entreprise fédérale, d'une personne morale constituée en vue de l'exercice de certaines attributions pour le compte de l'État canadien (à l'exception d'un ministère) et d'une entreprise canadienne au sens de la Loi sur les télécommunications 10 ont droit à divers congés payés et non payés pendant lesquels ils bénéficient d'une protection d'emploi 11.
Les périodes pendant lesquelles l'employé prend de tels congés sont prises en compte dans le calcul des prestations de retraite, de maladie et d'invalidité, à condition que l'employé paie les cotisations requises, ainsi que pour fins de détermination de l'ancienneté 12. Il convient de préciser que la partie III du CCT ne s'applique pas au secteur public sous réglementation fédérale; les droits et responsabilités des fonctionnaires fédéraux et des employés du Parlement concernant certaines normes du travail sont assujettis aux conventions collectives établies conformément à la législation fédérale 13. Jusqu'à présent, la partie III du CCT prévoyait cinq types de congés liés à une blessure ou à une maladie :
La partie III du CCT prévoit également des congés de décès. En vertu de la section VIII, en cas de décès d'un proche parent (y compris un enfant de l'employé ou un enfant de son époux ou conjoint de fait 17), l'employé a droit à un congé d'au plus dix jours avec protection d'emploi, qui peut être pris en une ou deux fois, pendant la période qui commence à la date du décès et se termine six semaines après la date des funérailles, de l'inhumation ou du service commémoratif, selon celle qui est la plus éloignée 18. Si l'employé travaille pour l'employeur sans interruption depuis au moins trois mois, les trois premiers jours du congé de décès sont payés 19. L'employé qui, au moment du décès d'un membre de la famille 20, est en congé de soignant (art. 206.3 du CCT) ou en congé en cas de maladie grave (art. 206.4 du CCT) pour ce même membre de la famille 21, a également droit au congé de décès. En plus du congé de décès, le CCT prévoit un congé d'au plus 104 semaines en cas de décès ou de disparition d'un enfant dont les circonstances permettent de tenir pour probable qu'il résulte de la perpétration d'un crime en vertu du Code criminel 22.
L'octroi d'un congé de décès d'au plus 10 jours découle d'un récent projet de loi d'initiative parlementaire – le projet de loi C‑220, Loi modifiant le Code canadien du travail (congé de décès) – qui a reçu la sanction royale le 29 juin 2021 et qui est entré en vigueur trois mois plus tard. Avant l'entrée en vigueur de ce projet de loi, le CCT prévoyait un congé de décès de cinq jours et ne comprenait pas l'employé en congé de soignant ou en congé en cas de maladie grave pour le membre de la famille au moment du décès de ce dernier 23.
L'article 2 du projet de loi C‑3 crée deux nouvelles infractions criminelles. La première concerne l'intimidation :
423.2(1) Commet une infraction quiconque agit de quelque manière que ce soit dans l'intention de provoquer la peur :
- soit chez une personne en vue de lui nuire dans l'obtention de services de santé fournis par un professionnel de la santé;
- soit chez un professionnel de la santé en vue de lui nuire dans l'exercice de ses attributions;
- soit chez une personne dont les fonctions consistent à appuyer un professionnel de la santé dans l'exercice de ces fonctions.
Le paragraphe proposé contient un libellé semblable à celui du paragraphe 423.1(1) du Code criminel, qui érige en infraction le fait d'intimider une personne associée au système judiciaire ou un journaliste 24.
La deuxième infraction concerne l'entrave intentionnelle à l'accès aux hôpitaux et aux autres établissements de soins de santé :
423.2(2) Commet une infraction quiconque, sans autorisation légitime, empêche ou gêne intentionnellement l'accès légitime par autrui à un endroit où des services de santé sont offerts par un professionnel de la santé.
Une partie du libellé de cette disposition est semblable à celui que l'on trouve dans certaines parties de l'infraction de méfaits qui est prévue actuellement à l'article 430 du Code criminel :
430(1) Commet un méfait quiconque volontairement, selon le cas,
[…]
- empêche, interrompt ou gêne l'emploi, la jouissance ou l'exploitation légitime d'un bien;
- empêche, interrompt ou gêne une personne dans l'emploi, la jouissance ou l'exploitation légitime d'un bien.
Conformément au nouveau paragraphe 423.2(3), il s'agit d'infractions mixtes; leurs auteurs peuvent donc être poursuivis par mise en accusation, et être passibles d'une peine d'emprisonnement maximale de 10 ans, ou par procédure sommaire, et être passibles d'une peine d'emprisonnement maximale de deux ans moins un jour. En comparaison, la peine d'emprisonnement maximale pour l'intimidation d'une personne associée au système judiciaire ou d'un journaliste est de 14 ans, et, pour l'infraction générale d'intimidation, elle est de cinq ans.
Le nouveau paragraphe 423.2(4) prévoit un moyen de défense à l'infraction consistant à empêcher ou à gêner l'accès (nouveau paragraphe 423.2(2)) lorsqu'une personne se trouve dans un endroit où des services de santé sont fournis, ou près de cet endroit, ou qu'elle s'en approche « aux seules fins d'obtenir ou de communiquer des renseignements ». On trouve un libellé analogue pour les infractions déjà prévues au Code criminel pour intimidation (art. 423) et méfaits (art. 430).
L'article 718.2 du Code criminel décrit un certain nombre de principes que les tribunaux doivent prendre en considération lorsqu'ils imposent une peine. L'alinéa 718.2a) fournit une liste de circonstances aggravantes pouvant entraîner une peine plus sévère pour toutes les infractions. L'article 5 du projet de loi C‑3 ajoute deux nouvelles circonstances aggravantes dont les tribunaux doivent tenir compte lors de la détermination de la peine :
Le paragraphe 8(1) du projet de loi précise que les articles 1 à 5 (modification du Code criminel) entreront en vigueur le 30e jour suivant le jour de l'obtention de la sanction royale par la loi.
L'alinéa 206.6(1)a) du CCT prévoit actuellement que « soigner sa [propre] maladie ou sa blessure » est l'une des raisons qui permet à un employé de prendre un congé personnel d'au plus cinq jours par année, dont trois jours payés après trois mois à emploi de l'employeur sans interruption. L'article 6 du projet de loi C‑3 abroge cet alinéa afin d'éviter la duplication avec les dispositions relatives au congé payé pour raisons médicales créé par l'article 7 du projet de loi qui s'applique, en vertu du paragraphe 239(1) du CCT, lorsque l'employé ne peut pas travailler en raison d'une maladie ou blessure, d'un don d'organe ou de tissu, ou d'un rendez-vous médical pendant les heures de travail. Il s'agit de motifs plus étendus que ce qui s'appliquait en vertu de l'alinéa 206.6(1)a).
Le paragraphe 7(1) du projet de loi ajoute des dispositions relatives au nouveau congé payé pour raisons médicales aux nouveaux paragraphes 239(1.2) à 239(1.6) du CCT.
Le nouveau paragraphe 239(1.2) du CCT prévoit qu'après chaque mois travaillé sans interruption pour un employeur, l'employé acquiert un jour de congé payé pour raisons médicales, jusqu'à concurrence de 10 jours par année civile. Le comité HUMA a modifié cette disposition du projet de loi afin que l'employé acquière un jour de congé payé pour raisons médicales « lorsqu'il a travaillé sans interruption pour l'employeur pendant une période d'au moins trente jours », plutôt que « au début de chaque mois », de sorte que la personne qui commence un emploi au milieu du mois commence plus rapidement à accumuler des jours de congé pour raisons médicales. Dans la version initiale, la personne ne pouvait compter les jours entre le début de l'emploi et le premier jour du mois suivant et aurait donc dû travailler plus d'un mois pour avoir droit à son premier jour de congé payé pour raisons médicales 25. La Chambre des communes a elle aussi modifié ce paragraphe du projet de loi afin de prévoir trois jours de congé payé pour raisons médicales après 30 jours de travail, puis un jour supplémentaire au début de chaque mois suivant par la suite, jusqu'à concurrence de 10 jours par année. L'amendement précise comment les choses se passeront pour les employés en place et les nouveaux employés à l'entrée en vigueur du paragraphe et dans les années à venir 26.
Comparativement au congé personnel qui peut être pris pour soigner sa propre maladie ou sa blessure, le nouveau congé payé pour raisons médicales prévoit un plus grand nombre de jours de congé payé par année (dix au lieu de trois), et il permet à l'employé de conserver ses trois jours de congé payé en vertu du congé personnel pour les autres motifs prévus au paragraphe 206.6(1). De plus, l'employé a accès aux journées de congé payé plus rapidement en vertu du nouveau congé payé pour raisons médicales, puisqu'il a accès à ce congé après un mois au lieu de trois.
Le nouveau paragraphe 239(1.3) prévoit que les jours de congé payé pour raisons médicales sont payés au taux régulier de salaire de l'employé pour une journée normale de travail et que cette indemnité de congé est considérée comme étant un salaire. Au paragraphe 7(2) du projet de loi, on précise, au nouvel alinéa 239(13)a) du CCT, que les termes « taux régulier de salaire » et « journée normale de travail » peuvent être définis par règlement.
Selon le nouveau paragraphe 239(1.4), le nombre de jours de congé payé pour raisons médicales qu'un employé a accumulés, mais n'a pas utilisés au cours d'une année civile, est reporté à l'année civile suivante le 1er janvier. Toutefois, ce nombre est déduit du nombre de jours qu'il pourra acquérir au cours de cette nouvelle année, de manière à ne pas dépasser 10 jours de congé payé pour raisons médicales pouvant être pris au cours d'une même année civile. Cette condition a pour effet d'éviter que l'employé n'ait pas de congé payé accumulé au 1er janvier de chaque année.
Le nouveau paragraphe 239(1.5) prévoit que le congé payé pour raisons médicales peut être pris en un bloc ou séparé, mais que l'employeur peut exiger que chaque période de congé soit d'une durée d'au moins une journée complète. Par conséquent, un employeur pourrait exiger qu'un employé utilise une journée complète de congé pour un rendez-vous médical, par exemple, plutôt que seulement le nombre d'heures requis.
En vertu du nouveau paragraphe 239(1.6), et au plus tard 15 jours après le retour au travail d'un employé qui a pris un congé payé pour raisons médicales, l'employeur peut exiger par écrit que l'employé lui fournisse un certificat délivré par un professionnel de la santé attestant qu'il était incapable de travailler pendant son congé.
Jusqu'à maintenant, le paragraphe 239(2) du CCT prévoyait la possibilité pour l'employeur d'exiger un certificat délivré par un professionnel de la santé lorsqu'un employé prenait un congé pour raisons médicales d'au moins trois jours. Le nouveau paragraphe 239(2) modifie ces dispositions pour préciser qu'elles s'appliquent désormais dans le cas d'un congé pour raisons médicales non payé, puisque le nouveau paragraphe 239(1.6) traite de l'exigence possible du certificat dans le cas du congé payé. Ainsi, dans la version initiale, un employé peut être appelé à fournir un certificat médical pour un congé payé, peu importe sa durée, alors que dans le cas d'un congé non payé, cette exigence peut seulement s'appliquer pour un congé d'au moins trois jours. Le comité HUMA a modifié le nouveau paragraphe 239(1.6) de manière à ce qu'un certificat médical puisse être exigé uniquement pour un congé payé pour raisons médicales d'au moins cinq jours consécutifs. L'exigence du certificat médical après au moins trois jours de congé non payé reste inchangée 27.
Le paragraphe 7(2) du projet de loi modifie le paragraphe 239(13) du CCT, qui énonce ce sur quoi le gouverneur en conseil peut prendre des règlements en ce qui concerne la section XIII du CCT sur le congé pour raisons médicales. Le nouvel alinéa 239(13)b) énonce que toute disposition de la section XIII du CCT portant sur le congé payé pour raisons médicales peut être adaptée par règlement afin de l'appliquer à certaines catégories d'employés. Ces adaptations par voie réglementaire peuvent seulement être introduites si, à la fois :
Le paragraphe 8(2) du projet de loi prévoit que les articles 6 et 7 du projet de loi, qui portent sur le congé payé pour raisons médicales prévu au CCT, entrent en vigueur à une date fixée par décret.
À la troisième lecture, la Chambre des communes a ajouté l'article 6.1, qui intègre essentiellement le projet de loi C‑307, Loi modifiant le Code canadien du travail (congés de décès), à quelques modifications près dans le projet de loi C‑3 28. En plus des dispositions actuelles sur les congés de décès, une période de congé de huit semaines est accordée en cas de décès d'un enfant ou de mortinaissance 29 :
Le paragraphe 8(3) prévoit que l'article 6.1, qui porte sur les congés de décès, entrera en vigueur à une date fixée par décret.
[ Retour au texte ]l'expulsion ou de l'extraction complète du fœtus du corps d'une personne, après vingt semaines de grossesse ou après que le fœtus a atteint un poids d'au moins 500 g, sans qu'il y ait, chez le fœtus, respiration, battement de cœur, pulsation du cordon ombilical ou contraction d'un muscle volontaire après cette expulsion ou extraction.
© Bibliothèque du Parlement