Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), plus de 1,44 million de réfugiés attendent leur réinstallation dans un tiers pays. Toujours selon le HCR, ces réfugiés ne peuvent ni retourner dans leur pays d'origine ni s'intégrer dans leur premier pays d'asile. Un total de 107 800 réfugiés ont été réinstallés dans le monde entier en 2019, avec ou sans l'aide du HCR. Selon le Pew Research Center, en 2018, le Canada a accueilli plus de réfugiés que tout autre pays.
En 2018, le Canada s'est joint à 181 autres pays pour appuyer le Pacte mondial sur les réfugiés (PMR) de l'Organisation des Nations Unies. Le PMR vise quatre objectifs centraux : 1) alléger la pression sur les pays d'accueil des réfugiés; 2) renforcer l'autonomie des réfugiés; 3) élargir l'accès aux solutions dans des pays tiers; 4) favoriser les conditions d'un retour dans les pays d'origine en sécurité et dans la dignité. La réinstallation des réfugiés donne suite au premier et au troisième de ces objectifs. Les programmes de réinstallation du Canada offrent trois volets principaux dans le cadre desquels les réfugiés entrent au Canada :
Le PMR considère que le PPPR est une « voie complémentaire » en créant une voie qui mène à la réinstallation de réfugiés dans un tiers pays. Ce programme a permis la réinstallation d'un grand nombre de réfugiés et, par conséquent, le gouvernement du Canada a noué un partenariat avec le HCR et d'autres organisations dans le cadre de l'Initiative mondiale de parrainage de réfugiés (IMPR). L'IMPR est un projet international qui vise le partage de pratiques exemplaires avec les gouvernements d'autres pays qui souhaitent mettre en œuvre un modèle de parrainage privé de réfugiés. Depuis le lancement de cette initiative à la fin de 2016, différentes variantes de parrainage communautaire ont vu le jour partout dans le monde.
Parmi les autres voies complémentaires, on compte le Programme d'étudiants réfugiés offert dans le cadre d'Entraide universitaire mondiale du Canada, qui combine la réinstallation avec des programmes d'étudiants étrangers dans des universités, des collèges et des cégeps canadiens. En outre, le Projet sur la voie d'accès à la mobilité économique, qui est relativement nouveau, permet d'accueillir des réfugiés qualifiés au Canada dans le cadre d'un volet d'immigration économique.
L'engagement du gouvernement du Canada à l'égard de la réinstallation des membres des groupes spéciaux comme les femmes en péril et les LGBTQ2 (personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers et bispirituelles) ne date pas d'hier. Parmi les autres groupes prioritaires ciblés dans le cadre d'initiatives spéciales du gouvernement en matière de réinstallation au cours des dernières années figurent les survivants de Daech en 2016 et les réfugiés syriens en 2015-2016.
Au moment de la rédaction de la présente étude générale, la pandémie mondiale de la maladie à coronavirus continue de toucher gravement la réinstallation des réfugiés à l'échelle nationale et mondiale. Le HCR a interrompu son programme de réinstallation à la mi-mars 2020, et le Canada a fait de même. En juin 2020, les programmes internationaux de réinstallation, y compris ceux du Canada, ont repris officiellement, bien que les chiffres de la réinstallation du Canada demeurent minimes en raison des restrictions de voyage et d'autres restrictions.
Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) estime que plus de 1,44 million de réfugiés sont actuellement en attente de leur réinstallation dans un tiers pays 1. Selon le HCR, ces réfugiés ne peuvent ni retourner dans leur pays d'origine ni s'intégrer dans leur premier pays d'asile. La communauté internationale a réinstallé 107 800 réfugiés en 2019, avec ou sans l'aide du HCR 2.
Le Canada a accepté plus de réfugiés que tout autre pays pour la toute première fois en 2018, alors que les États-Unis ont grandement réduit la capacité de leur programme de réinstallation de réfugiés 3. Chaque année, le Canada accueille environ 9 % de ses nouveaux résidents permanents à titre de réfugiés. Les niveaux prévus d'accueil de réfugiés demeureront semblables à ce chiffre au cours des deux prochaines années 4.
Le nombre de réfugiés réinstallés dans le cadre de parrainages privés a augmenté considérablement au cours des cinq dernières années et, en date de 2017, il a dépassé le nombre de réfugiés pris en charge par le gouvernement. La réussite du programme de parrainage privé a mené le gouvernement du Canada, en partenariat avec le HCR et d'autres organisations, à lancer l'Initiative mondiale de parrainage de réfugiés (IMPR), un projet international qui vise le partage de pratiques exemplaires avec les gouvernements d'autres pays qui souhaitent mettre en œuvre un modèle de parrainage privé de réfugiés.
La politique d'immigration du Canada s'articule autour de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés 5, selon laquelle le programme du Canada pour les réfugiés vise principalement à sauver des vies en offrant une protection aux personnes qui en ont besoin et en participant à l'effort international pour aider les personnes qui doivent être réinstallées. À la fin de l'année 2018, le Canada s'est joint à 181 autres pays pour appuyer le Pacte mondial sur les réfugiés (PMR) 6 des Nations Unies, favorisant ainsi l'atteinte de ses objectifs d'allégement du fardeau qui pèse sur les pays hôtes des réfugiés et de promotion des solutions pour les réfugiés dans des pays tiers. En plus de la réinstallation, le Canada doit s'acquitter de ses obligations internationales à l'égard des personnes venues au Canada de leur propre chef et qui ont besoin de protection (les demandeurs d'asile) 7.
Au moment de rédiger la présente étude générale, la pandémie mondiale maladie à coronavirus (COVID-19) continue de nuire gravement à la réinstallation des réfugiés à l'échelle tant nationale que mondiale. Le HCR a interrompu son programme de réinstallation à la mi-mars 2020, et le Canada lui a emboîté le pas. Bien que le HCR ait annoncé la reprise de son programme à la mi-juin 2020, en date de septembre 2020, les restrictions du Canada concernant tous les voyages entrants non essentiels continuent de limiter considérablement ses programmes nationaux de réinstallation des réfugiés.
La présente étude générale donne un aperçu des programmes du Canada en matière de réinstallation des réfugiés, décrivant les critères d'admissibilité à la réinstallation et les différents programmes de réinstallations en vigueur au pays. On y aborde également le rôle que la réinstallation joue dans les récents accords internationaux comme le PMR, et se penche sur le rôle du Canada dans l'IMPR. L'étude se conclut par une réflexion sur certains enjeux opérationnels liés à la réinstallation des réfugiés.
Pour être admissible à la réinstallation au Canada à titre de réfugié, une personne doit répondre aux critères énoncés dans la Convention relative au statut des réfugiés de 1951 de l'Organisation des Nations Unies (ONU) et son protocole de 1967, c'est-à-dire qu'elle doit craindre avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques. Cette personne doit également se trouver à l'extérieur du pays dont elle a la nationalité ou dans lequel elle avait sa résidence habituelle et ne pas être en mesure de se réclamer de la protection de ce pays.
En outre, selon le Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, est admissible à la réinstallation toute une personne qui se trouve hors de son pays et pour qui « une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne […] ont eu et continuent d'avoir des conséquences graves et personnelles » 8. Ce règlement stipule également que le demandeur doit établir qu'aucune possibilité raisonnable de solution durable n'est, à son égard, réalisable dans un délai raisonnable dans un pays autre que le Canada 9. Enfin, le demandeur doit normalement montrer qu'il peut réussir son établissement et il doit se soumettre à d'autres exigences, par exemple un examen médical et un contrôle de sécurité 10.
Les agents des visas d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) en poste dans les bureaux à l'étranger sont généralement chargés de déterminer si une personne donnée est admissible à la réinstallation et si elle peut être admise au Canada. Il arrive que des organismes de recommandation désignés (principalement le HCR) recommandent à IRCC le cas de certains réfugiés, tandis que d'autres réfugiés font l'objet d'une recommandation de la part de répondants du secteur privé. Les demandes sont traitées au cas par cas, sauf lorsqu'un afflux massif de réfugiés (p. ex. en raison d'un conflit ou d'un climat de violence généralisée) amène les responsables du HCR à déclarer qu'il s'agit d'un groupe de réfugiés prima facie 11. Les Syriens qui ont fui la guerre civile et qui ont été réinstallés au Canada en 2015 ont obtenu cette désignation, comme le HCR l'avait recommandé.
Au Canada, les réfugiés sont réinstallés dans le cadre de l'un des programmes suivants :
Conformément à l'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains 15, le gouvernement du Québec sélectionne des réfugiés à partir du bassin des personnes dont la réinstallation a été approuvée par IRCC, et il administre son propre programme de parrainage privé.
IRCC a commencé à publier un plan d'immigration pluriannuel en 2017, ce qui permet aux personnes qui travaillent avec les nouveaux arrivants de planifier au-delà d'un an. Dans le plan actuel, on maintient des niveaux d'accueil fixes pour le PPPR et le Programme mixte des RDBV jusqu'en 2021, mais comprend de légères augmentations du quota pour le Programme des RPG entre 2019 et 2021 16.
Le gouvernement fédéral a l'entière responsabilité des réfugiés qui arrivent au Canada dans le cadre du Programme des RPG. Le Programme d'aide à la réinstallation (PAR) d'IRCC fournit une aide à l'établissement aux réfugiés pris en charge par le gouvernement, et ce, au moyen d'un réseau d'organismes de fournisseurs de services. Cette aide comprend entre autres ce qui suit :
Le PAR peut aussi fournir aux réfugiés admissibles un soutien du revenu pour couvrir les frais initiaux et les frais courants, en général pour la première année passée au Canada 17.
Certains réfugiés choisis par le gouvernement aux fins de leur réinstallation ont besoin d'une aide spéciale, de sorte que le gouvernement collabore avec des répondants du secteur privé dans le cadre du PAC pour répondre aux besoins de ces réfugiés pendant une plus longue période d'établissement. Un réfugié peut être admissible au PAC pour différentes raisons, notamment les suivantes :
Le PPPR est un programme de réinstallation unique, puisque les répondants peuvent eux-mêmes recommander à IRCC des réfugiés aux fins de leur réinstallation. Les répondants assument la totalité des coûts financiers pendant la période de réinstallation initiale de 12 mois.
Dans le cadre du PPPR, les répondants du secteur privé fournissent un soutien initial pour l'établissement semblable à celui offert dans le cadre du PAR, ainsi qu'un soutien émotif et social. En 2018, le coût estimatif pour le parrainage d'une personne seule s'élevait à 16 500 $, tandis que le parrainage d'une famille de six personnes était évalué à 35 500 $ 18. Comme le PPPR a recours à des ressources du secteur privé, il permet aux réfugiés de se réinstaller au Canada sans entraîner une augmentation considérable des coûts pour le gouvernement.
Les répondants du secteur privé dans le cadre du PPPR comprennent les groupes suivants :
En 2017 et 2018, le nombre de réfugiés réinstallés pris en charge par le gouvernement représentait environ la moitié du nombre de réfugiés parrainés par des groupes du secteur privé, comme l'indique la figure 1. Compte tenu du fait que, selon les niveaux cibles d'immigration entre 2020 et 2022, le nombre prévu de réfugiés parrainés par le secteur privé représente environ le double du nombre de réfugiés pris en charge par le gouvernement chaque année, cette tendance devrait se maintenir 20.
Sources : Figure préparée par l'auteure à partir de données tirées de Gouvernement du Canada, « 02. Canada – Résidents permanents selon la catégorie, 2008-2017 », Faits et chiffres 2017 : Aperçu de l'immigration – Résidents permanents. Les données de 2018 sont tirées de Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Rapport annuel au Parlement sur l'immigration 2019 (1,93 Mo, 44 pages), 2020, p. 21.
Certains critiques du PPPR ont exprimé des préoccupations selon lesquelles le gouvernement pourrait transférer au secteur privé sa responsabilité à l'égard des réfugiés internationaux en négligeant le Programme des RPG en faveur de l'élargissement du PPPR 21. Ces préoccupations découlent en grande partie de la façon dont les réfugiés sont choisis pour chaque programme : ceux qui participent au Programme des RPG ont fait l'objet d'une recommandation de la part du HCR en raison de leur vulnérabilité, tandis que ceux qui participent au PPPR ont dans bien des cas été choisis en raison de leurs liens existants avec des citoyens canadiens ou des résidents permanents du Canada 22.
Le Programme mixte des RDBV s'appuie sur un partenariat qui a commencé en 2013 entre IRCC, les organismes de recommandations des réfugiés 23 et les répondants du secteur privé (SEP, groupes de cinq et répondants communautaires). Ce programme permet de jumeler des répondants du secteur privé avec des réfugiés qu'un organisme a déjà recommandés à IRCC et dont la réinstallation a été approuvée. Les réfugiés recommandés par des groupes de cinq ou des répondants communautaires doivent présenter des documents selon lesquels le HCR ou un gouvernement étranger a reconnu leur statut de réfugié 24. Le gouvernement et les répondants du secteur privé se partagent les frais de parrainage. Le PAR fournit une aide financière pendant les six premiers mois, tandis que les répondants du secteur privé assument les frais initiaux et offrent un soutien financier pendant six mois de plus. L'aide à l'établissement relève entièrement des répondants du secteur privé. Le Programme mixte des RDBV représente une minorité des réfugiés réinstallés au Canada, avec des cibles fixées à 1 000 réfugiés par année pour 2020-2022 25.
Le tableau 1 résume les principales différences entre les programmes de réinstallation.
Programme des réfugiés pris en charge par le gouvernement | Programme d'aide conjointe | Programme de parrainage privé de réfugiés | Programme mixte des réfugiés désignés par les bureaux des visas | |
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Recommandé à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) par : | Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) | HCR | Répondants du secteur privé | HCR |
Source du financement : | IRCC, au moyen du Programme d'aide à la réinstallation (PAR) | IRCC, au moyen du PAR | Répondants du secteur privé | IRCC et les répondants du secteur privé, qui sont responsables de part et d'autre du soutien financier pendant six mois. Les répondants assument les frais initiaux. |
Aide à l'établissement fournie par : | IRCC, au moyen du PAR | Répondants du secteur privé | Répondants du secteur privé | Répondants du secteur privé |
Couverture au titre du Programme fédéral de santé intérimaire |
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Source : Tableau préparé par l'auteure à partir de données tirées de Gouvernement du Canada, Programme des réfugiés pris en charge par le gouvernement; Gouvernement du Canada, Programme d'aide conjointe : Au sujet du processus; Gouvernement du Canada, Parrainer un réfugié; Gouvernement du Canada, Programme mixte des réfugiés désignés par un bureau des visas : Au sujet du processus; et Gouvernement du Canada, Programme fédéral de santé intérimaire : Couverture offerte.
Au cours des dernières décennies, la migration internationale a connu une hausse importante. En 2019, les migrants représentaient 3,5 % de la population mondiale totale par rapport à 2,8 % en 2000 27. De même, entre 2010 et 2019, la population mondiale de réfugiés a doublé, passant d'environ 10 millions à 20,4 millions 28. Cette réalité a incité la communauté internationale à concevoir des mécanismes de coopération pour gérer et protéger ces mouvements de personnes. Il en a résulté le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières (PMM) 29 et le PMR. Ces deux pactes s'appuient sur les Objectifs de développement durable de l'ONU 30 et la Déclaration de New York de 2016 pour les réfugiés et les migrants. Cette déclaration énonçait un ensemble initial d'engagements volontaires que les États membres de l'ONU ont adopté pour renforcer et améliorer les mécanismes de protection des réfugiés et des migrants, et pour s'engager à soutenir les pays hôtes. Bien qu'ils ne soient pas contraignants, les pactes offrent des incitatifs pour obtenir la participation des États.
En approuvant les pactes mondiaux, le Canada a exprimé son soutien à l'égard d'une coordination mondiale accrue des politiques en matière de migration et de réfugiés, en mettant en commun des pratiques exemplaires et en apprenant des autres États. Le gouvernement du Canada considère que les pactes fournissent un cadre pour orienter les États dans l'atteinte d'objectifs qui reflètent les valeurs canadiennes, comme le respect des droits de la personne et la dignité, et la protection des personnes les plus vulnérables. Leur mise en œuvre donne au Canada l'occasion de continuer de mettre les idées en commun et de participer à l'élaboration de processus qui reflètent ses priorités, comme la prise en compte des genres dans l'élaboration des politiques et des mesures 31.
Les négociations visant à conclure le PMM se sont déroulées sous la direction de l'honorable Louise Arbour, ancienne juge de la Cour suprême du Canada et actuelle Représentante spéciale pour les migrations du Secrétaire général de l'ONU, en consultation avec l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) 32 et les États membres de l'ONU. Les États membres de l'ONU ont été invités à appuyer le PMM à l'occasion de la Conférence intergouvernementale pour l'adoption du Pacte mondial sur les migrations, qui a eu lieu à Marrakech, au Maroc, en décembre 2018. Le PMM a été approuvé par 152 États, dont le Canada 33.
En appuyant le PMM, le gouvernement du Canada vise à apaiser les tensions sous-jacentes à la migration internationale, notamment les questions en matière de sécurité nationale et de droits de la personne entourant la migration internationale. Il souhaite également souligner le rôle positif que les migrants jouent dans les systèmes bien gérés, ainsi que les défis associés à la migration irrégulière 34. Le PMM appuie la création du Réseau sur les migrations de l'ONU, lequel est coordonné par l'OIM.
En 2018, le Canada et la plupart des autres États membres de l'ONU ont approuvé le PMR, une initiative dirigée par le HCR en consultation avec de nombreux gouvernements et organismes non gouvernementaux 35. L'entente défend quatre objectifs centraux :
Le gouvernement du Canada voit le PMR comme un moyen de respecter une humanité commune et de renforcer la sécurité collective en préservant un ordre fondé sur des règles qui respectent les droits de la personne. Sur le plan des priorités internationales du Canada, le PMR offre un moyen de continuer de défendre l'égalité entre les sexes ainsi que le renforcement du pouvoir des femmes et des filles 36.
La réinstallation de réfugiés au Canada correspond étroitement au troisième objectif du PMR (élargir l'accès aux solutions dans des pays tiers) et comprend à la fois des programmes de réinstallation officiels et ce que l'on appelle des « voies complémentaires » qui offrent d'autres routes d'immigration réglementées pour les réfugiés vers un pays tiers. Le PPPR du Canada est une voie complémentaire qui a servi de modèle que d'autres pays ont depuis adopté dans l'esprit du PMR. D'autres moyens accessibles aux réfugiés comprennent l'admission dans une université canadienne à l'aide du parrainage par Entraide universitaire mondiale du Canada (EUMC) et l'ouverture de voies d'immigration économique aux réfugiés.
L'Initiative mondiale de parrainage de réfugiés (IMPR) réunit le gouvernement du Canada, le HCR, l'Université d'Ottawa, l'Open Society Foundations et la Giustra Foundation pour contribuer à accroître l'accès des réfugiés à des voies complémentaires vers des pays tiers en travaillant avec les gouvernements de ces pays pour leur permettre de concevoir leurs propres programmes de parrainage communautaire des réfugiés. Comme il est mentionné précédemment, le PPPR du Canada s'est révélé efficace dans le parrainage et l'intégration de grand nombre de réfugiés tout en maintenant au minimum les frais de parrainage pour le gouvernement.
L'IMPR vise les objectifs suivants :
Depuis le lancement de l'IMPR à la fin de l'année 2016, différentes variantes de parrainages communautaires ont vu le jour partout dans le monde. Des programmes ont été lancés en Allemagne, en Argentine, en Australie, en Belgique, en Espagne, en France, en Irlande, en Italie, en Nouvelle-Zélande ainsi qu'au Royaume-Uni, et des programmes à court terme ont aussi vu le jour dans d'autres pays 37. Bien que le PPPR du Canada soit offert comme modèle dans le cadre de l'IMPR, l'approche de chaque pays est unique, et il existe des différences importantes entre tous les programmes.
Depuis 1978, le Programme d'étudiants réfugiés offert dans le cadre d'EUMC combine la réinstallation avec des programmes d'étudiants étrangers dans des universités, des collèges et des cégeps canadiens 38. EUMC est un SEP officiel dans le cadre du PPPR et permet d'accueillir chaque année plus de 130 réfugiés à titre de résidents permanents qui viennent étudier au Canada. L'une des forces de ce programme est le moyen naturel d'intégration que la vie étudiante et sur le campus offre aux nouveaux réfugiés, avec le perfectionnement de leurs compétences linguistiques, les réseaux sociaux et les possibilités de travail intégrés à l'expérience étudiante 39.
En partenariat avec le HCR et l'organisme sans but lucratif Talent Beyond Boundaries, le gouvernement du Canada a amorcé un programme pilote en 2018 pour l'accueil de réfugiés qualifiés au Canada dans le cadre d'un volet d'immigration économique. Le projet sur la voie d'accès à la mobilité économique (PVAME) qui en résulte a été lancé en réponse à l'accent mis par le PMR sur les voies complémentaires. Le programme visait à répondre à la fois aux besoins de réinstallation des réfugiés mondiaux et à ceux du marché du travail du Canada. À la suite du succès initial et de l'évaluation du projet, le lancement d'une deuxième phase a été annoncé lors du Forum mondial sur les réfugiés, en décembre 2019 40. Six mois plus tard, le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté a annoncé, lors des Consultations annuelles tripartites sur la réinstallation, la création d'un maximum de 500 places sur deux ans pour le PVAME 41.
Le HCR recommande des réfugiés aux fins de leur réinstallation. Il s'agit de réfugiés dont on juge qu'ils sont à risque dans leur pays d'accueil, ou ont des besoins particuliers et sont vulnérables. Dans d'autres cas, un manque de solutions prévisibles pour des groupes d'une population entière peut entraîner leur recommandation collective par le HCR aux fins de leur réinstallation 42. Le HCR et la communauté internationale reconnaissent que les places de réinstallation devraient être réservées à la fois aux personnes qui vivent un conflit apparent urgent et à celles qui se trouvent dans une situation récurrente et qui sont déplacées depuis de nombreuses années.
Le gouvernement du Canada définit ses propres priorités en matière de réinstallation des réfugiés, en déterminant les groupes particulièrement vulnérables et les populations de réfugiés spécifiques. Les femmes réfugiées sont une priorité de longue date de la réinstallation prise en charge par le gouvernement, et ce, depuis 1988, alors qu'IRCC a lancé le programme Femmes en péril. Ce programme vise à simplifier le processus de demande de statut de réfugié pour les femmes qui ne jouissent pas de la protection familiale habituelle et dont la sécurité n'est pas garantie par les autorités locales 43. Les personnes admissibles peuvent présenter une demande au titre de dans tous les programmes de réinstallation. En 2016, en réponse au génocide des yézidis dans le nord de l'Irak 44, le gouvernement a permis la réinstallation de 1 215 survivants de Daech, en grande majorité des femmes et des filles yézidies 45. Par le truchement du budget qu'il a accordé à IRCC en 2018, le gouvernement du Canada s'est engagé à permettre la réinstallation de 1 000 femmes et filles vulnérables de plus dans le cadre du Programme des RPG; cette réinstallation s'est terminée en 2019 46. IRCC a également annoncé le lancement en 2020 d'un projet pilote axé sur la réinstallation des femmes et des enfants vulnérables, entre autres 47.
Plus récemment, le gouvernement a accordé la priorité de la réinstallation aux réfugiés LGBTQ2 (personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers et bispirituelles). Depuis 2011, le Rainbow Refugee Assistance Partnership combine l'aide offerte par le gouvernement et par le secteur pour le parrainage des réfugiés qui fuient la persécution en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre 48.
Au cours des dernières années, le Programme des RPG a évolué considérablement sur le plan du nombre et des types de réfugiés qui se voient accorder la priorité aux fins de leur réinstallation; deux exemples notables en sont les réfugiés réinstallés dans le cadre de l'initiative de réinstallation des réfugiés syriens en 2015-2016 et les survivants de Daech en 2016. En 2015 et 2016, environ 25 000 réfugiés syriens sont arrivés au Canada, dont 53 % dans le cadre du Programme des RPG 49.
Comme il est fait mention précédemment, le PPPR comporte certaines difficultés sur le plan des priorités en matière de réinstallation. Les réfugiés parrainés sont sélectionnés par le secteur privé, souvent en fonction de facteurs comme la présence de membres de la famille ou de liens communautaires au Canada. Certains craignent que ce procédé privilégie des réfugiés d'une poignée de régions spécifiques de la planète au détriment de ceux d'autres régions qui ont également besoin d'être réinstallés 50.
Les programmes de réinstallation des réfugiés sont tous associés à de longs délais de traitement. IRCC ne rend pas publiques les données concernant les délais de traitement moyens, bien que le Ministère n'avait pas encore atteint son objectif de réduction des délais de traitement à 12 mois, en date de septembre 2019. La pandémie de COVID-19 a perturbé les efforts en sens, et de nombreuses voix s'élèvent pour décrier le problème de l'augmentation de l'arriéré une fois de plus en raison des restrictions liées à la pandémie 51. Certains agents des visas d'IRCC ont signalé des difficultés à atteindre les cibles établies dans les plans d'immigration pluriannuels, ce qui ajoute des demandes à celles qui dépassent déjà leur capacité de traitement 52. Une fois sa demande traitée et approuvée, un réfugié peut attendre jusqu'à quatre mois avant d'arriver au Canada 53. En général, les demandes des réfugiés pris en charge par le gouvernement sont traitées plus rapidement que celles des réfugiés parrainés par le secteur privé, bien que le Programme des RPG soit lui aussi touché par des retards. Dans le cadre du PPPR et du Programme des RPG, des agents des visas doivent mener des entrevues en personne et des évaluations avec les réfugiés recommandés, et ce processus peut parfois être retardé davantage en raison de mauvaises conditions de sécurité dans le pays d'asile où se trouvent les réfugiés 54.
Au cours des dernières années, les membres de la communauté LGBTQ2, entre autres, ont soulevé des préoccupations concernant certaines difficultés opérationnelles auxquelles se heurtent les réfugiés qui se trouvent dans un pays d'asile dans lequel ils ne sont pas en mesure d'être reconnus en tant que réfugiés ou d'obtenir une protection. Cela peut être attribuable à diverses raisons de nature politique ou culturelle. Dans le cas des personnes LGBTQ2, leur identité et leurs activités sont criminalisées dans de nombreux pays à l'échelle mondiale, ce qui a des répercussions négatives sur leur capacité à obtenir le statut de réfugié en qualité de personnes LGBTQ2 55. Le HCR peut, dans la mesure du possible, offrir la désignation du statut de réfugié et la protection aux personnes dans le besoin, mais cela a parfois des répercussions politiques pour l'organisme dans le pays d'asile en question 56. Par conséquent, cela peut avoir des répercussions négatives sur la capacité d'un réfugié à être reconnu comme tel et à faire l'objet d'une recommandation aux fins de sa réinstallation.
En raison de la pandémie de COVID-19 et des restrictions de voyage à l'échelle mondiale, le HCR et l'OIM ont mis en attente toutes les activités de réinstallation. Le gouvernement du Canada a emboîté le pas en interrompant ses programmes de réinstallation le 18 mars 2020. En date du 18 juin 2020, le HCR et l'OIM ont annoncé la reprise des voyages aux fins de réinstallation. Toutefois, les restrictions de voyage imposées par le Canada continuent de viser la plupart des voyages discrétionnaires à l'arrivée, ce qui met toujours un frein aux programmes nationaux de réinstallation 57. Le HCR estime que 10 000 départs de réfugiés vers des destinations internationales de réinstallation ont été touchés par l'interruption de deux mois causée par la pandémie 58.
Le Canada réinstalle un très grand nombre de réfugiés chaque année, en grande partie à l'aide de son recours à des voies complémentaires efficaces et novatrices comme le PPPR. Dans la nouvelle ère de la coopération mondiale facilitée par le PMR, le Canada continue d'introduire de nouveaux moyens de réinstaller les réfugiés. Le nombre de réfugiés continuant d'augmenter dans le monde, ces stratégies de soutien des réfugiés et des pays hôtes ainsi que les programmes de réinstallation se devront d'être toujours plus robustes.
* La présente étude générale s'inspire de Sandra Elgersma, La réinstallation des réfugiés : Les engagements d'ordre humanitaire du Canada, publication no 2015-11-F, Ottawa, Service d'information et de recherche parlementaires, Bibliothèque du Parlement, 1er avril 2015. [ Retour au texte ]
† Les études générales de la Bibliothèque du Parlement sont des analyses approfondies de questions stratégiques. Elles présentent notamment le contexte historique, des informations à jour et des références, et abordent souvent les questions avant même qu’elles deviennent actuelles. Les études générales sont préparées par le Service d’information et de recherche parlementaires de la Bibliothèque, qui effectue des recherches et fournit des informations et des analyses aux parlementaires ainsi qu’aux comités du Sénat et de la Chambre des communes et aux associations parlementaires, et ce, de façon objective et impartiale. [ Retour au texte ]
[l]es situations d'afflux massif concernent souvent des groupes de personnes à qui l'on reconnaît la qualité de réfugié en tant que groupe, du fait des raisons visiblement apparentes et objectives qui les ont incitées à fuir … L'impossibilité de procéder immédiatement à la détermination du statut de réfugié au cas par cas a mené au recours à la désignation ou à l'acceptation de groupes de réfugiés.HCR, Handbook on Procedures and Criteria for Determining Refugee Status under the 1951 Convention and the 1967 Protocol relating to the Status of Refugees, Genève, février 2019, p. 104 [traduction]. [ Retour au texte ]
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